Tribunal de commerce de Paris, 5 janvier 1940, n° 999

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
T. com. Paris, 5 janv. 1940, n° 999
Juridiction : Tribunal de commerce de Paris
Numéro(s) : 999

Texte intégral

Le Tribunal,

Attendu que la Société Waterman expose et fait plaider que le nom de Waterman constitue, au titre de nom commercial et de la marque générale de ses produits, sa propriété pour

l’exploitation d’un établissement de fabrication et de vente de porte-plume réservoirs;

Que ce nom jouit d’une notoriété considérable; Que la Société Bassatis vend et met en vente des lames de rasoir de sa fabrication sous le nom de Waterman et fait sur ce nom une importante publicité ;

Que cette dénomination, pour lames de rasoirs n’ayant pas les qualités auxquelles les acquéreurs de stylographes sont habitués, est de nature à jeter sur son nom, le sérieux de sa maison et la qualité de ses produits un grave discrédit; Ce pourquoi la Société Waterman demande à ce Tribunal de voir dire et juger:

Qu’elle, la demanderesse, a la propriété, à titre commercial, du nom de Waterman ;

Que la Société Bassatis a porté atteinte à cette propriété en faisant apposer sur des objets fabriqués le nom d’un fabricant autre que le véritable et commis des actes de concurrence déloyale ou illicite et dommageable;

(1) On admet généralement que l’usurpation de nom com mercial n’est illicite que lorsque l’emploi du nom a lieu dans une industrie similaire et peut entraîner une confusion entre les produits.

Le jugement ci-dessus est intéressant en ce qu’il apprécie d’une façon plus extensive la possibilité de confusion. En effet, le Tribunal a admis, bien que les produits fussent différents, que le consommateur risquait de croire que les produits présentés provenaient du titulaire du nom, et qu’il pouvait en résulter un préjudice pour ce denier. Il a fait une application au moins morale du principe posé dans l’article 6 bis de la Conven tion d’Union de Paris concernant les marques notoires.



Qu’il soit fait défense de renouveler ces actes sous astreinte de 100 francs par contravention constatée;

Et, pour le préjudice causé, s’entendre condamner la Société

Bassatis à payer à la Société Waterman la somme de 50.000 fr. à titre de dommages-intérêts;

Voir ordonner la publication à ses frais du jugement à inter venir dans 10 journaux au choix de la demanderesse; Attendu que la Société Bassatis en ses conclusions soutient la demande mal fondée et fait plaider que s’agissant d’industries et d’articles différents, aucune confusion, aucune concurrence, aucun préjudice n’est possible, demande acte de ce qu’elle dénie tous actes de concurrence déloyale ou illicite émanant d’elle ou des agents ayant un lien de subordination quelconque avec elle;

Sur le nom commercial:

Attendu que le caractère lucratif attaché à un nom ou à une dénomination donne à ce nom ou à cette dénomination une valeur commerciale et un droit privatif, qui s’acquièrent par l’usage, au profit de celui qui l’a créé ou introduit dans la vie commerciale;

Attendu qu’il est constant que le nom de Waterman jouit

d’une grande notoriété dans le commerce;

Que l’usage déjà ancien qui en est fait en France par la Société demanderesse confère à celle-ci un droit privatif;

Que le fait pour un fabricant de lames de rasoirs de présenter ses produits sous ce nom est de nature bien que les produits

-

soient différents , tout en étant destinés à être vendus à la même clientèle, à créer une confusion qui bénéficie à coup sûr

à la Société Bassatis et peut causer à la Société Waterman un préjudice important, si les lames sont de qualité médiocre et les procédés de mise en vente contraires aux usages loyaux du commerce, ou tout au moins un trouble commercial appréciable dans le cas contraire;

Qu’au surplus, aucun motif ne paraissait expliquer le choix par la Société Bassatis d’un nom déjà utilisé et aussi différent du sien; qu’il convient donc, en tout état de cause, d’interdire

à la Société Bassatis de se servir dans l’avenir du nom de Water man pour la vente ou la présentation de ses produits;

Sur les procédés de concurrence déloyale:

Attendu que la Société Waterman prétend et fait plaider que les agents de la Société Bassatis n’hésitent pas à présenter la lame Waterman comme provenant de la fabrication de la

Société Waterman ;

Mais attendu que si un certain nombre de dépositaires ou


de clients de la Société Waterman ont pu faire cette confusion, il n’a pas été établi aux débats que les vendeurs des lames qui ont visité la clientèle de la Société Waterman aient eu un lien de subordination quelconque avec la Société Bassatis et que cette dernière ait directement, par correspondance ou démarches, entretenu cette confusion regrettable;

Qu’il échet, en conséquence, de constater qu’aucun fait précis de concurrence déloyale ou illicite ne peut être retenu à l’encontre de la Société Bassatis en dehors de l’emploi abusif du nom de Waterman ;

Sur le préjudice:

Attendu que la Société Bassatis ayant commis une faute en usurpant sans droit le nom commercial de Waterman, il échet de dégager si Waterman a, de ce fait, éprouvé un préjudice;

Attendu qu’il n’est pas établi que les lames de rasoirs vendues par la Société Bassatis ou tout autre grossiste sous le nom de

Waterman soient de mauvaise qualité ;

Qu’il semble résulter des appréciations fournies par la clien tèle de la Société Waterman qu’il n’a pu en résulter pour cette dernière aucune déconsidération ou perte de clientèle;

Que toutefois la Société Waterman a subi un trouble commer cial moyen, notamment d’une confusion créée dans sa clientèle, qu’elle a droit de ce chef à réparation;

Et attendu que le Tribunal trouve dans les faits de la cause les éléments d’appréciation suffisants pour fixer à la somme de 5.000 francs l’indemnité à allouer à la Société Waterman ;

Qu’il n’y a pas lieu, par contre, en raison des circonstances de la cause, de faire droit aux conclusions de la Société Waterman aux fins d’insertion de la décision rendue, comme dese prononcer davantage sur les divers voir dire et juger requis auxquels le présent jugement répond suffisamment, comme enfin de donner à la Société Bassatis l’acte qu’elle requiert;

Attendu qu’il échet d’accueillir la demande à due concur rence;

Par ces motifs,

Dit qu’il n’y a pas lieu de donner à la Société Bassatis l’acte qu’elle requiert ;

Dit que la Société Bassatis a pris sans droit le nom com mercial de Waterman pour la vente de ses lames de rasoirs ; Lui fait défense de se servir à l’avenir du nom de Waterman pour la présentation et la vente de ses produits, sous astreinte de 50 francs par infraction constatée un mois après la signifi cation du présent jugement;

Condamne la Société Bassatis à payer à la Société L.-E.



Waterman la somme de 5.000 francs à intérêts ;

Déclare mal fondées : la Société Wate sa demande ; et la Société Bassatis toutes fins qu’elles comportent ;

Les en déboute respectivement ;

Et condamne la Société Bassatis aux

titre de dommages et

rman en le surplus de en ses conclusions à

dépens.

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