Tribunal de commerce de Paris, 27 octobre 2003, n° 2001029950

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
T. com. Paris, 27 oct. 2003, n° 2001029950
Juridiction : Tribunal de commerce de Paris
Numéro(s) : 2001029950

Texte intégral

— Maître Gilles HUVELIN Avocat D1188

- Maître Nicole DELAY-PEUCH Avocat

*2001029950* JA* -PAGE 1 A377

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

JUGEMENT PRONONCE LE LUNDI 27/10/2003

1ère CHAMBRE AFFAIRES CONTENTIEUSES

RG: 2001029950

17/05/2001

ENTRE SA LE COMPTOIR BLEU dont le siège social est […]

PARTIE DEMANDERESSE assistée de Maître Jérôme LETANG Avocat au Barreau de LYON (Toque n°659) et comparant par Maître Gilles HUVELIN Avocat D1188

ET SA X dont le siège social est […], ci-devant et actuellement […]

PARTIE DEFENDERESSE: assistée de Maître Olivier LAUDE Avocat A53 G et comparant par Maître Nicole DELAY-PEUCH Avocat A377

APRES EN AVOIR DELIBERE

L’activité juridictionnelle a été suspendue du 1er février au 21 février 2002. Par une réunion extraordinaire du 21 février 2002 le Tribunal a décidé la reprise de cette activité à partir du 22 février 2002. En conséquence, les parties ayant été avisées, l’affaire est rappelée.

Objet du Litige

LE COMPTOIR BLEU (ci-après LCB) a contacté X pour lui céder une de ses branches d’activités.

Les négociations n’ont pas abouti. C'est ainsi que LCB demande que X soit condamnée à lui payer 13,2 MFRF

(2,012 M€) pour l'achat, et qu’il soit ordonné LCB de à régulariser des ordres de mouvement portant sur 66% des actions du capital de « BLEU.FR » au profit de X, le jour du règlement des 13,2 MFRF.

X s’oppose aux demandes de LCB et, à titre reconventionnel, demande des dommages et intérêts de 30.[…] € pour comportement fautif de LCB au cours des négociations.

Résumé des Faits

LE COMPTOIR BLEU a été créé en 1990 et exerce une activité de vente de voyages suivant 2 modalités :

vente pour le compte d’enseignes de la grande distribution comme Auchan, Tati, Pronuptia, Interval Travel, etc. vente à distance : par le site Internet « BLEU.FR » I par Minitel « 3615 bleu » et par un numéro indigo.

La vente pour le compte d’enseignes comprend 2 types de partenariat : le mandat global et le mandat réduit.

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Tribunal de commerce de Paris N° RG 2001029950

Jugement du 27/10/2003

1ère CHAMBRE AFFAIRES CONTENTIEUSES JA – PAGE 2

LCB dit avoir souhaité céder « BLEU. FR » pour se consacrer uniquement à son activité de base, les ventes sous la marque d’autrui.

Entre juillet et octobre 2[…], LCB est entré en de

contact avec plusieurs sociétés, dont WANADOO, filiale

FRANCE TELECOM, spécialisée dans l’Internet.

Du 31 octobre au 18 décembre 2[…], une phase initiale de pourparlers a eu lieu entre LCB et X. Le seul interlocuteur de X était M. Y

Z, Président du Directoire de LCB.

Aussi, X n’ayant aucune expertise dans

l’activité d’agence de voyage, les données relatives la

viabilité et à la rentabilité d’un éventuel projet ont été déterminées par M. Z.

Le 22 décembre 2[…], X confirmait son intention de poursuivre les négociations en vue d’acquérir la majorité des actions (66% des actions et droits éventuels) et signait

avec M. Z (qui agissait "tant en son nom propre qu'au nom et pour le compte des futurs actionnaires de la société" à créer) un document conjoint de 5 pages qui exposait le projet

d’acquisition. Ce document (« projet d’acquisition ») expliquait que, Sous réserve du résultat d'un audit (« due diligence »)

l’acquisition pourrait être réalisée selon des modalités provisoires qui étaient définies pour : le prix d’acquisition, une promesse de vente de LCB, le périmètre du fonds de commerce, les modalités de paiement, 8 conditions suspensives

(dont un audit) dont la validation n’était pas acquise à la date du 22 décembre, les obligations du vendeur (un exclusivité jusqu’au 31 mars 2001), et stricte une

confidentialité.

Ainsi, sous réserve de l'audit juridique et financier, et sur la base d’une valeur provisoirement estimée

à 20 MFRF, il était envisagé que, X commencerait par acquérir, pour 13,2 MFRF, 66% du capital social de la société

« BLEU. FR » (en cours de constitution par LCB qui la dénommait finalement « NEWTRAVEL. FR »).

Ce document posait les bases de la négociation. Il était la suite logique des discussions engagées. Le 4 janvier 2001, une première réunion de travail

d’audit se déroulait entre LCB et le Cabinet REC, agissant pour cours de cette réunion, M. le compte de X. Au

Z disait ne pas souhaiter communiquer les éléments de la comptabilité analytique du LCB (ainsi que d’autres documents)

à REC, en invoquant des accords de confidentialité passés avec

d’autres partenaires.

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Tribunal de commerce de Paris N° RG 2001029950

Jugement du 27/10/2003

JA – PAGE 3 1ère CHAMBRE AFFAIRES CONTENTIEUSES

Le 19 janvier 2001, X apprenait, par REC, que,

à la suite de dissensions internes au sein du groupe LCB, M.

Z, président de LCB et de la nouvelle société

« NEWTRAVEL.FR », avait été révoqué de ses mandats le 16 janvier

2001. Cependant, WANADOO souhaitant poursuivre l’opération projetée, et malgré l’absence de documents essentiels réclamés

à plusieurs reprises, les 14 et 15 février 2001, REC procédait

à l'examen des documents mis à sa disposition. Le 26 février,

REC remettait son rapport d’audit à X. Au vu des résultats de l’audit, X faisait

savoir au nouveau dirigeant de LCB qu’elle n’entendait pas poursuivre les négociations et expliquait ses raisons à LCB.

LCB tentait de

convaincre WANADOO d’accepter de décembre 2[…]. finaliser « l’accord » du 22

Par courrier du 13 mars, X confirmait que les

à reconsidérer sa conclusions de l’audit la conduisait position au regard de la poursuite du projet car au moins une des conditions suspensives ne pouvait être satisfaite.

C’est dans ces circonstances que LCB décidait

d’engageait la présente procédure.

La Procédure

Par acte du 18 avril 2001, LCB a assigné X et demande de : condamner X à payer la somme 13,2 MFRF (soit

2.012.327 €) avec intérêts au taux légal à compter de

l’assignation,

ordonner à LCB de régulariser des ordres de

mouvement portant sur 66 %/ du capital de NEWTRAVEL. FR au profit de X, le jour du règlement de la somme précitée, dommages et intérêts : 200 KFRF (soit 30.489,80 €) pour résistance abusive, article 700 du NCPC : 100 KFRF (soit 15.244,90 €) exécution provisoire, dépens.

WANADOO a déposé des conclusions 'en réponse"

l’audience du 27 novembre 2001.

LCB a répondu et réitéré par des conclusions déposées à l’audience du 19 mars 2002.

WANADOO a déposé des conclusions "en réponse" l’audience du 14 mai 2002.

a déposé des conclusions "responsives et LCB récapitulatives à l’audience du 17 septembre 2002.

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Tribunal de commerce de Paris N° RG 2001029950

Jugement du 27/10/2003

1ère CHAMBRE AFFAIRES CONTENTIEUSES JA – PAGE 4

Par conclusions « en réplique n°2 et récapitulatives » déposées à l’audience du 17 septembre 2002, X confirme et demande de : dire que la lettre d’intention du 22 décembre 2[…] ne constitue pas une promesse synallagmatique de vente ni un engagement ferme d’acquérir les actions de NEWTRAVEL. FR, constater l’existence de motifs sérieux justifiant

l’arrêt des négociations, constater la défaillance de conditions posées par la lettre d’intention du 22 décembre 2[…], du seul fait de la

société LCB, dire que X a parfaitement exécuté ses obligations au titre de la lettre d’intention du 22 décembre

2[…], dire que la responsabilité de X n'est pas engagée, dire que la lettre d’intention du 22 décembre 2[…] est caduque, dire que LCB a agi de mauvaise foi dans le cadre des négociations, débouter LCB de toutes ses demandes, fins et

conclusions, dommages et intérêts : 30.[…] €, article 700 du NCPC : 30.[…] €, exécution provisoire, dépens.

Dans ses dernières conclusions "responsives et récapitulatives n°2" du 15 octobre 2002, LCB réitère à titre principal, et ajoute, à titre subsidiaire : condamner X à payer à LCB la somme de

5.712.[…] € au titre de son préjudice,

En toute hypothèse : débouter X, article 700 du NCPC : 15.244,90 €

- exécution provisoire, dépens.

Lors de l’audience du Juge Rapporteur, les parties étaient représentées et sont restées sur leurs positions. Le Tribunal a clos les débats et dit qu’il sera statué par un jugement contradictoire en premier ressort.

Moyens de Parties

LCB soutient

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Tribunal de commerce de Paris N° RG 2001029950

Jugement du 27/10/2003

JA – PAGE 5 1ère CHAMBRE AFFAIRES CONTENTIEUSES

LCB, se fondant sur le document du 22 décembre 2[…] signé des 2 parties, dit que cette convention entre X et

LCB, est inexactement appelée "lettre d'intention" par

X, mais qu’elle constitue une vente en raison de :

★ l’existence d’un accord définitif signé entre LCB et X

* la juste valorisation de la branche d’activité cédée

LCB développe longuement ces 2 points. La lettre du 22 décembre 2[…] matérialise l’existence

d’un accord sur la chose et sur le prix, ce qui vaut vente.

En effet, la promesse de vente vaut vente lorsqu’il y

a consentement réciproque des 2 parties sur la chose et le prix.

Pour qu’une promesse synallagmatique puisse valoir

vente, les parties doivent avoir donné leur engagement sur les éléments essentiels à la vente, ce qui est le cas en l’espèce.

En effet, aux termes de la convention du 22 décembre :

la « chose », objet de l’accord des parties, est définie en page 1 (« la majorité des actions, soit 66% ») et en page 2 « la cession de 66% du capital social »). Ainsi, la chose est identifiable.

B le « prix » de 66% des actions a été fixé et est cité

en termes clairs : "le prix d’acquisition, soit 13.200.000

FRF".

- les modalités de paiement sont également prévues en pages 3 et 4.

Tant que les conditions suspensives ne sont pas réalisées, l’exécution du contrat de l’obligation ne peut être exigée. Le contrat n'en existe pas moins. Une fois les

conditions suspensives réalisées, l’obligation est réputée avoir pris naissance au jour du contrat. En l’espèce, il est

inexact, comme l’a imaginé X, que 2 des conditions suspensives n’auraient pas été réalisées :

✔- l’audit avait pour but de confirmer l’exactitude et le bien-fondé des bases de la négociation. L’audit a eu lieu.

Si l’audit constituait une condition suspensive, en revanche, les conclusions de l’audit n’en constituaient pas une. L’audit

n’a pas révélé une situation significativement différente de celle annoncée. la signature de contrats définitifs. Par exemple, si le contrat d’acquisition d’actions (comportant une garantie

d'actif et de passif) n’a pas été réalisé, c’est le fait du mutisme et de l’attitude d’obstruction de X qui ne peut

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Tribunal de commerce de Paris N° RG 2001029950

Jugement du 27/10/2003

1ère CHAMBRE AFFAIRES CONTENTIEUSES JA – PAGE 6

se prévaloir તે posteriori de la non-réalisation de cette condition suspensive.

La valorisation de "NEWTRAVEL. FR" (correspondant à

l’activité de vente à distance de LCB) est juste.

LCB soutient aussi que la possibilité d’exercice de façon autonome et complète de l’activité de vente à distance de voyages est avérée, et que les éléments constitutifs du fonds de commerce (tels que visés dans l’accord du 22 décembre) ont été vérifiés par le Cabinet REC.

Puis LCB commente quelques prétextes (fallacieux, selon elle) avancés par WANADO0 : sur le prétendu refus de communiquer des documents.

-

Le rapport d’audit n’en fait pas état, à l’exception de la comptabilité analytique de LCB qui n’existait pas (ce n'est pas une obligation), et qui n’aurait pas pu être prête. sur la prétendue absence chronique de rentabilité de l’activité. LCB s'étonne que WANADOO se préoccupe de

l’insuffisance de rentabilité car, selon LCB, l’intérêt de

X ne résidait pas dans la rentabilité mais dans

l’acquisition d'un savoir-faire que détenait LCB. La rentabilité n’a jamais été mentionnée comme condition de réalisation de l’achat des actions. sur les du système d'information. faiblesses

L’auditeur a certes relevé des faiblesses, mais c’est une remarque mineure. Ce n’était pas une condition de réalisation de l’achat. La valorisation de « NEWTRAVEL. FR » ne s’en trouve

nullement affectée.

- sur le départ de M. RAYNAL. Il est inexact de prétendre, comme le fait X, que toute la compétence

« métier » disparaissait avec le départ de M. Z. En effet, cette compétence restait grâce au personnel (2 cadres techniques, l’une responsable marketing et l’autre responsable adjoint de plateau) dont le transfert était projeté. De plus,

c’est de façon provisoire que M. RAYNAL avait pris la présidence de « NEWTRAVEL. FR ». Enfin, LCB affirme que la vente est parfaite, mais que le cessionnaire (X) ne veut lesplus acquérir actions, le cédant (LCB) peut alors lui imposer la cession.

Ainsi, LCB demande l’exécution forcée de l’accord du 22 décembre qui vaut promesse synallagmatique de vente.

A titre subsidiaire, et dans le cas où le Tribunal estimerait qu’il n’y a pas lieu d’ordonner l’exécution forcée,

LCB chiffre à 5,712 M€ (selon une note établie par un expert comptable choisi par LCB) la réparation de son préjudice.

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N° RG 2001029950 Tribunal de commerce de Paris

Jugement du 27/10/2003

1ère CHAMBRE AFFAIRES CONTENTIEUSES JA – PAGE 7

X oppose

l’activitéWANADOO n’avait aucune expertise dans

d’agence de voyages et que les discussions ont été conduites sur la base des seules déclarations faites par M. RAYNAL et des seuls éléments financiers que ce dernier avait bien voulu communiquer (et qui tenaient sur une seule feuille de calcul préparée par ses soins). attendre que les négociations soient Sans formalisées, M. Z décidait de procéder à la constitution la société de « NEWTRAVEL. FR » (et non « BLEU. FR » comme

envisagé). Le 20 décembre 2[…], M. Z signait un contrat de location de locaux de 940 m². Le 21 décembre, l’intégralité du capital (40.[…] €) était libérée.

Après examen de la proposition de M. RAYNAL, WANADOO informait LCB, par un courrier du 22 décembre, de son intention de poursuivre les négociations en vue d’acquérir la majorité des actions, soit 66%.

Dans cette lettre, X formulait les bases sur lesquelles un partenariat éventuel était envisageable : la détermination claire, précise et chiffrée des éléments du fonds de commerce, les modalités envisageables pour l’acquisition des actions de la nouvelle société.

La proposition devait être finalisée avant le lier

avril 2001, avec 2 principales conditions suspensives préalables : la réalisation d’un audit permettant de vérifier la réalité des éléments composant le fonds de commerce à apporter, et sa valorisation, la conclusion de divers contrats définitifs.

X voulait plus particulièrement s’assurer de la possibilité de la nouvelle société d’exercer son activité de façon autonome et complète à partir d’éléments essentiels du fonds de commerce définis à l’article 3 de la lettre.

La première réunion d’audit a été difficile.

L’absence de coopération rendait impossible l’analyse des résultats réels du fonds de commerce, objet de la cession envisagée.

X était surprise d’apprendre, par le Cabinet REC, la révocation brutale de M. Z, les nouveaux dirigeants de LCB ne l’informant pas de cet événement capital.

WANADOO perdait plus qu’un interlocuteur, car M.

RAYNAL assumait la gestion de l’entreprise en terme de développement et de management. Il était l’homme clé.

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1ère CHAMBRE AFFAIRES CONTENTIEUSES JA – PAGE 8

Ce départ faisait planer une ombre sur l’avenir du projet bâti par M. Z, et le processus d’audit était affecté.

Au vu des résultats de l’audit, X fit savoir au nouveau dirigeant de LCB, dès le 6 janvier 2001, qu’elle

n’entendait pas poursuivre les négociations. Sans chercher à comprendre les motifs sérieux justifiant sa décision, LCB, aux abois, tentait de convaincre X d’accepter de finaliser

« l’accord du 22 décembre ».

X rappelle que la lettre du 22 décembre est une lettre d’intention.

Cette lettre ne constitue pas un engagement ferme et ne constitue pas une promesse de vente. Elle ne formalise aucun accord définitif, ni sur la chose, ni sur le prix. Sa portée et ses limites sont clairement posées.

La conclusion d’un accord définitif était soumise à

la réalisation d’un audit qui devait confirmer à la fois

l’existence d’une activité pouvant être exploitée d'une manière complète et autonome, ainsi que sa valorisation.

La portée de la condition relative à l’audit a été précisée, et c’est évidemment le résultat de l'audit qui importe.

X rejette l’affirmation de LCB selon laquelle la condition, relative à l’audit, serait nulle car potestative

(aux motifs que sa réalisation aurait dépendu du seul bon vouloir de WANADO0). Il n'en est rien puisque l’audit a été réalisé par une société tiers. Ainsi, la condition posée par termes de la lettre d’intention es

les parties aux parfaitement valable. de 3 L’accord définitif supposait la signature contrats définitifs (contrat de cession et d’acquisition des actions, promesse de vente par LCB et garantie de passif et

d’actif). Or, aucun contrat n’a été ni établi, ni signé. LCB

n’a pas effectué les démarches lui incombant et ne saurait reprocher à X de ne pas les avoir effectuées.

WANADOO, après avoir rappelé les contours et

l’objectif de l’audit, donne ensuite les motifs sérieux justifiant qu’il soit mis un terme aux négociations : les difficultés rencontrées dans le cadre de

l’audit (le refus de communiquer de nombreux documents contractuels et comptables essentiels, et les conséquences de ces refus). Cette carence de LCB a fait que X n’a pas été en mesure de porter une appréciation sur l’activité qui devait être cédée,

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l'absence de rentabilité d’exploitation de l’activité information déterminante) et (une l’absence chronique de rentabilité de LCB, ainsi que l’impossibilité de déterminer la rentabilité, le chiffre d’affaires et le taux de marge de l’activité « BLEU. FR » à céder, les faiblesses du système d’information

(impossibilité de déterminer avec sérieux tant le périmètre de l’activité cédée que les éléments le constituant, et de valoriser cette activité), le départ de M. Z, véritable homme-clé,

Au début du mois de mars 2001, X parvint au

constat final qu’il n'était pas possible de confirmer

l’existence d’un fonds de commerce autonome et encore moins de procéder à la valorisation du fonds de commerce à apporter à la nouvelle société « NEWTRAVEL. FR » et décidait de

ne pas donner suite à la proposition.

Concernant la demande de LCB de faire ordonner

l’exécution forcée de la cession, X fait remarquer que la valeur des actions est nulle et que les éléments qui devaient constituer le cœur du fonds de commerce n’existent plus, ou sont en voie de disparition, du seul fait de LCB.

Motifs de la décision

Sur la demande principale de LCB

Attendu que des pourparlers ont été entamés entre LCB et X pour l’acquisition par X de la majorité du capital social de la société "BLEU. FR", activité dénommée ensuite « NEWTRAVEL. FR » par LCB,

Attendu que, en règle générale, il est habituel et normal que des sociétés entament des discussions commerciales

ou financières ; qu’il est tout aussi parfaitement normal,

habituel et légitime que ces discussions n’aboutissent pas nécessairement, avec la condition que les parties ne manquent pas aux règles de bonne foi dans leurs relations commerciales,

Attendu que LCB soutient qu’il y a eu accord sur la chose et sur le prix, et que X soutient l’inverse,

Ainsi, il y a lieu d’examiner les conditions dans lesquelles les pourparlers se sont déroulés entre LCB et

X, ainsi que les documents présentés au Tribunal.

Attendu que LCB base son argumentation sur la lettre du 22 décembre 2[…], qui est le premier, et d'ailleurs le seul, document signé entre les parties,

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1ère CHAMBRE AFFAIRES CONTENTIEUSES JA PAGE 10

Attendu que ce document n’a pas d’intitulé, mais, par contre, a un objet, ainsi libellé :

Objet : Projet d’acquisition de la majorité du capital social de la société « BLEU. FR », société en cours de constitution par LE COMPTOIR BLEU

Attendu ainsi que, dès l’objet, il est clairement exposé, par les parties, que ce document est un « projet »,

Attendu que le mot « projet » prend alors ici toute son importance ; que le mot projet a 2 sens,

Que le premier sens est : "l’image d’une situation,

d’un état que l’on pense atteindre", avec pour synonymes

« dessein », « intention », « plan », « vue »; que le second sens est

« travail », « rédaction préparatoire », « premier état », avec pour synonymes 'canevas« , »ébauche« , »esquisse", Que les 2 sens indiquent bien un aspect provisoire, préliminaire et non conclu, et donc pas un acte définitif, final ; que, par exemple, un projet de loi peut-être voté, accepté ou au contraire refusé,

Attendu que, dans le cas du « projet » entre

LCB/X, c’est LCB qui a pris contact avec WANADOO ; que

X avait une politique générale de croissance externe et qu’ainsi, il est normal que X examine les « projets » qui lui sont proposés ; mais qu’il est tout aussi normal que

X puisse refuser un « projet » qui lui est proposé 7 que X a accepté d’entamer des pourparlers ; que WANADOO ne connaissait pas ce domaine d’activité ; que X a fait confiance à M. Z ; que X a accepté que le premières données lui soient fournies par M. RAYNAL (en qui

X avait confiance) ; que les discussions entre WANADOO et LCB se trouvaient dans une étape « préliminaire » qui était

l’évaluation du fonds de commerce proposé par LCB ; que le mot ici« projet » trouve tout son sens ; laqu’il y avait donc nécessité d’un audit ; que, par prudence, X a inscrit, dans lettre, des conditions suspensives qui ont été la acceptées par le signataire de LCB ; que parmi ces conditions suspensives, il y avait un audit, Attendu que, dès l’article 1 de la lettre, 11 est desrésultat sous réserve du « due clairement précisé : diligence », Attendu que l’article 5 confirme cette demande de

X : "audit complet confirmant l’exactitude et le bien

***

fondé de la valorisation des actions" ; que la phrase suivante précise "X réserverait ses droits en cas de découverte

d’un ou plusieurs éléments non révélés … et modifiant de façon

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Jugement du 27/10/2003

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significative la situation de la société (c’est-à-dire

« NEWTRAVEL. FR ») Attendu ainsi qu’il n’est donc inexact, et pas sérieux, comme le soutient LCB, que la seule réalisation de

l’audit aurait été la condition suspensive ; que cet argument de LCB sera écarté,

Attendu que l’audit a été effectué par un cabinet

tiers ; que de façon à lever les doutes soulevés par LCB, la

lecture des conclusions de l'audit (paragraphe 4, pages 27 à

30 du Rapport d’Audit) est décisive, conclusions sont sansAttendu en effet que ces ambiguïté ; que leur lecture est très édifiante ; qu’il faut en retenir principalement que LCB n’a jamais pu parvenir à la rentabilité de ses activités ; que l’activité était (ou était devenue) une « coquille vide », Attendu que, outre le départ brusque de M. Z et

l’absence de conclusion de contrats définitifs, il existe

d’autres faits qui augmentaient aussi la méfiance que X pouvait rencontrer dans une signature finale d'un accord, alors que X examinait le « projet »,

Attendu, par exemple, que la lecture (effectuée par le cabinet d’audit) des rapports de gestion du Directoire et des délibérations des Conseils de Surveillance et des

Assemblées Générales des actionnaires permettent de voir des

difficultés récurrentes chroniques de trésorerie, des changements fréquents d’organisation et, તે la fin de

l’exercice clos le 31 décembre 1999, les capitaux propres de

LCB inférieurs à la moitié du capital social,

Attendu ainsi qu’il est aisé de comprendre la réticence de X de reprendre l’activité proposée par LCB; que les motifs invoqués par X sont ainsi parfaitement

motivés ; que WANADOO a expliqué à LCB que les éléments découverts au cours de l’audit ont été tels qu’ils ont conduit X à se décharger de ses engagements,

Attendu donc que les discussions entre X et LCB

se trouvaient ainsi dans une étape préliminaire, qui était

l'évaluation du fonds de commerce proposé par LCB ; que le

« projet » était une « intention » des parties ; que si la « chose »

était « prédéterminée », elle n'était pas confirmée dans le

« projet » du 22 décembre et qu’elle ne l'a pas été par la suite,

Attendu que la lettre « projet » du 22 décembre dit clairement que si l’acquisition des actions de « BLEU. FR »

n’était pas intervenue au plus tard le 1 ier avril, X serait alors dégagée de toutes obligations,

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Jugement du 27/10/2003

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Attendu que, dès le 6 mars, soit plus de 3 semaines

avant la date limite, X a informé LCB en donnant une réponse provisoire ; que le 13 mars, WANADOO a donné une réponse définitive, mais négative pour LCB,

Attendu que les termes de l’article 7 de la lettre du

22 décembre en définissent la portée et les limites Comme suit: ladite offre ne saurait constituer un accord ou une reconnaissance quelconque de notre part sur un caractère contractuel et/ou suffisant dans le cadre du projet envisagé,

Attendu que, par la faute de LCB (son refus ou son incapacité), de communiquer des documents comptables essentiels, ni l’auditeur (le Cabinet REC), ni X, n'on

été en mesure de procéder à une analyse comptable et

financière en vue de l’établissement d’un budget pour l’année

2001 et d'un plan de financement, et donc d’estimer une valorisation précise du fonds de commerce,

Qu’ainsi, LCB ne saurait reprocher à X ses propres manquements.

Le Tribunal constatera que les conditions relatives à la détermination par X (et une proposition éventuelle à

LCB) d’un prix final n’étaient pas remplies, qu’il n’y a pas eu, après les résultats de l’audit, une proposition ferme de

X sur le prix ; qu’il ne peut pas y avoir eu accord des parties sur l’achat par WANADOO de l’activité "BLEU.FR"

(renommée ensuite « NEWTRAVEL.FR ») appartenant à LCB et que si le « projet » du 22 décembre 2[…] a bien posé les bases de la négociation, ce n'est en aucun cas un accord entre les parties, donc pas un contrat qui lierait X à LCB,

Attendu que, plus généralement, il n’y a pas eu

d’offre de la part de X ; que LCB ne fournit d'ailleurs aucun document, et n’apporte aucune preuve d’une offre ferme

de WANADOO ; que le seul document fourni par LCB, à l’appui de sa demande, est la lettre du 22 décembre 2[…] qui sera rejetée car elle n’était qu’une base de discussions et non un accord ferme entre les parties,

Ainsi, le Tribunal dira que la lettre du 22 décembre

n’est, ni un accord final, ni une promesse synallagmatique.

Attendu que X n’était pas liée à LCB par un autre document pour l’achat de 66% des actions de « BLEU. FR »,

Attendu alors qu’aucune condition n’était déterminée; que X, en ne poursuivant pas les pourparlers, était dans son bon droit et n’a pas manqué aux règles de bonne foi dans ses relations commerciales avec LCB,

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N° RG: 2001029950 Tribunal de commerce de Paris

Jugement du 27/10/2003

1ère CHAMBRE AFFAIRES CONTENTIEUSES JA PAGE 13

Attendu qu’en l’absence d’une convention formée entre les parties, il ne saurait être fait droit à aucune des demandes de LCB,

En conséquence, le Tribunal dira LCB mal fondé en ses demandes, et déboutera LCB de l’ensemble de ses demandes à titre principal.

Sur les demandes de dommages et intérêts par LCB Attendu que LCB demande que X soit condamnée à lui verser de 30.489,80 € (200 KFRF) titre de à sommeune dommages et intérêts pour résistance abusive,

Attendu aussi, à titre subsidiaire, que LCB demande que X soit condamnée à lui verser une somme 5,712 Mà titre de réparation de son préjudice, en présentant une évaluation,

Mais attendu que LCB succombe sur sa demande principale, et n’a pas subi de préjudice du fait de X,

Le Tribunal rejettera les demandes de LCB ces

titres.

Sur la demande de dommages et intérêts par X Attendu sollicite, àque X titre reconventionnel, l’allocation d’une somme de 30 K€ à titre de

dommages et intérêts,

Attendu que X soutient que LCB a entravé la bonne tenue des négociations et demande que l’attitude de LCB soit sanctionnée,

Attendu, certes, qu’il est surprenant que LCB ait engagé aussi rapidement la présente procédure (seulement un mois après l’arrêt des négociations), Attendu aussi qu’il est apparent que LCB a tenté, sans succès du reste, d’accélérer (en fait de forcer) la

vente,

Mais attendu que les dépenses présentées par X, et qu’elle qualifie d’engagées en vain, concernent 3 postes

(mobilisation de deux cadres, intervention d’un cabinet pour

l’audit et embauche d’un Directeur du futur pole tourisme) qui entrent dans le cadre normal d'une préparation en vue de

l’acquisition éventuelle d’une nouvelle activité ; que X avait décidé d’anticiper sur les charges à venir dans

l’éventualité de la conclusion de l’accord ; mais que X ne peut pas en faire le reproche à LCB, car un accord sur une acquisition est toujours incertain, et que le refus n’est pas

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Tribunal de commerce de Paris N° RG 2001029950

Jugement du 27/10/2003

1ère CHAMBRE AFFAIRES CONTENTIEUSES JA PAGE 14

le fait de LCB, mais d’une décision (justifiée d’ailleurs) de

X,

Ainsi, le Tribunal rejettera la demande de X à ce titre.

Sur les autres demandes

Le Tribunal rejettera toutes autres prétentions, plus amples ou contraires, des parties, les en déboutera.

Sur l’article 700 du NCPC reconnaître ses droitsAttendu que pour faire

WANADOO a dû engager des frais non compris dans les dépens qu’il ne serait pas équitable de laisser à

sa charge, le Tribunal trouvera dans le dossier des éléments suffisants pour fixer l’indemnité à la somme de 30.[…] € pour X en application de l’article 700 du NCPC, condamnera LCB à payer cette somme.

Attendu que le Tribunal déboutera LCB de sa demande à ce titre.

Sur l’exécution provisoire

Attendu que l’exécution provisoire est demandée par X,

Attendu que le présent jugement ne contient aucune mesure irréversible,

Attendu en effet, que, hormis l’indemnité au titre de

l’article 700 du NCPC, le présent jugement ne concerne aucune somme d’argent.

Le Tribunal ordonnera l’exécution provisoire, sans constitution de garantie.

Sur les dépens : Ils seront mis à la charge de LCB qui succombe.

Par Ces Motifs

Le Tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire, en premier ressort,

Dit la SA LE COMPTOIR BLEU mal fondée en ses demandes à l’encontre de la SA WANADO0, et déboute la SA LE

COMPTOIR BLEU de toutes ses demandes.

Déboute la SA X de sa demande de dommages et intérêts.

Rejette toutes autres prétentions, plus amples ou contraires, des parties, les en déboute.

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N° RG 2001029950 Tribunal de commerce de Paris

Jugement du 27/10/2003

1ère CHAMBRE AFFAIRES CONTENTIEUSES JA PAGE 15

Condamne la SA LE COMPTOIR BLEU à payer à la SA somme de 30.[…] € au titre de l’article 700 du X la

NCPC.

Ordonne l’exécution provisoire sans constitution de garantie. Condamne la SA LE COMPTOIR BLEU aux entiers dépens, dont ceux à recouvrer par le Greffe liquidés à la somme de 39,44 EUROS TTC (dont TVA : 6,15

EUROS).

Confié, lors de l’audience du 10 décembre 2002 à Monsieur IRLES en qualité de Juge rapporteur. Mis en délibéré le 27 janvier 2003. Délibéré par Madame A, Messieurs IRLES et JURIS et prononcé à

l’Audience Publique où siégeaient :

Monsieur ECK, Président de Chambre, Madame A et Monsieur JURIS, Juges. assistés de Mademoiselle DANCHOT, Greffier. Les parties en ayant été préalablement avisées. La minute du jugement est signée par le Président du délibéré et le Greffier.

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Tribunal de commerce de Paris, 27 octobre 2003, n° 2001029950