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Sur la décision
| Référence : | T. com. Paris, 29 déc. 2021, n° 2019032961 |
|---|---|
| Juridiction : | Tribunal de commerce de Paris |
| Numéro(s) : | 2019032961 |
Texte intégral
Copie exécutoire : REPUBLIQUE FRANCAISE ASSOCIATION V. X
Y & S.
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Z
Copie aux demandeurs : 2 Copie aux défendeurs : 3
TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS
8 EME CHAMBRE
JUGEMENT PRONONCE LE 29/12/2021 par sa mise à disposition au Greffe 2 ہے RG 2019032961
ENTRE :
SAS N.P.A. CONSEIL, dont le siège social est […] – RCS Nanterre B 448527754
Partie demanderesse: assistée de Me Sébastien COURTIER membre du CABINET Z, avocat (E833) et comparant par Me X et Me Z membre de
I’ASSOCIATION V. X Y & S. Z, avocats (J119)
ET:
1) SAS SBA COMPTA, dont le siège social est […] – RCS Paris B 532034485
Partie défenderesse : assistée de Me Camille PIGNET membre du Cabinet AORIS
AVOCATS, avocat (D1910) et comparant par Me Nicole Delay-Peuch, avocat (A377) 2) SAS SMALLBUSINESSACT.COM, dont le siège social est […] – RCS Paris B 510605090
Partie défenderesse : assistée de Me Camille PIGNET membre du Cabinet AORIS
AVOCATS, avocat (D1910) et comparant par Me Nicole Delay-Peuch, avocat (A377)
APRES EN AVOIR DELIBERE
LES FAITS
La société AA CONSEIL (ci-après AA) exerce une activité de conseil dans le secteur des médias et de la communication. En 2014, elle confie à la société SBA COMPTA (ci-après
SBA), anciennement dénommée CHLOROPHIL, une mission d’expertise comptable, mission qui consiste en la présentation et l’examen limité des comptes annuels, le suivi mensuel des opérations comptabilisées et le traitement des déclarations de TVA. La saisie des opérations comptables est confiée à SMALLBUSINESSACT.COM, société du
groupe SBA.
Au cours de l’année 2018, AA est informée d’une vérification de sa comptabilité pour les exercices 2015 et 2016 et, le 29 mai 2018, elle reçoit de l’administration fiscale une proposition de rectification pour irrégularités dans sa comptabilité ; il lui est réclamé la somme de 426 065 euros, dont 10 932 euros d’intérêts de retard et 126 339 euros
d’amendes et pénalités, au titre des exercices 2015 et 2016. Le 4 juin 2018, AA informe SBA de cette proposition et elle lui demande de lui faire part de ses observations et de l’assister dans le cadre de ce redressement.
En l’absence de réponse de SBA, AA lui adresse un nouveau courrier le 18 juillet 2018, en réponse duquel SBA rejette la faute sur M. AB AC, seul dirigeant et associé de SBA en 2015 et 2016, qui a quitté l’entreprise en 2017.
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C’est ainsi qu’est née la présente instance.
PROCEDURE
Par un acte en date du 4 juin 2019 remis à une personne dite habilitée pour la société SBA COMPTA et par un acte en date du 4 juin 2019 signifié le même jour par procès-verbal de remise à l’étude de l’huissier, conformément aux articles 656 et 658 du code de procédure
civile pour la société SMALLBUSINESSACT.COM, NPA assigne SBA et
SMALLBUSINESSACT.COM,
Puis par un acte daté du 6 juillet 2020 SBA COMPTA assigne en intervention forcée de M. AB AC
Par décision en date du 22 septembre 2020, le tribunal joint les 2 instances RG 2019032961 et RG 2020031780.
Puis par un jugement du 26 mai 2021, le tribunal disjoint les instances antérieurement regroupées sous le numéro RG J2020000297 et statuant séparément : En ce qui concerne le RG 2020031780
Se déclare incompétent pour connaitre de la demande de la SAS SBA COMPTA contre M. AB AC au profit du tribunal judiciaire de Lyon ;
En ce qui concerne le RG 2019032961
Renvoie l’affaire à l’audience de mise en état du 15 juin 2021. C’est ainsi que cette affaire revient devant le juge désigné à l’audience de mise en état.
Le tribunal retiendra les dernières conclusions formulées par les parties qui en sont convenues.
Par l’acte du 4 juin 2019 et dans ses dernières conclusions du 30 juin 2020, dans le dernier état de ses prétentions, AA demande au tribunal de :
VU les dispositions des articles 1217 et 1231-1 du Code civil,
Recevoir la société AA CONSEIL en ses demandes et l’y déclarée bien fondée ;
Constater que les sociétés SBA COMPTA, anciennement dénommée CHLOROPHIL, et
SMALLBUSINESSACT.COM ont commis des fautes dans la réalisation de leurs prestations ;
Constater que ces fautes ont fait subir à AA CONSEIL des préjudices importants; Constater qu’il existe un lien de causalité entre les fautes commises par les Sociétés SBA
COMPTA, anciennement dénommée CHLOROPHIL, et SMALLBUSINESSACT.COM et les préjudices subis par la société AA CONSEIL ;
En conséquence,
Condamner in solidum les sociétés SBA COMPTA, anciennement dénommée
CHLOROPHIL, et SMALLBUSINESSACT.COM à verser à la société AA CONSEIL la somme de 82.609,15 euros au titre du préjudice subi avec intérêts; Débouter les sociétés SBA COMPTA, anciennement dénommée CHLOROPHIL, et
SMALLBUSINESSACT.COM de toutes leurs demandes, fins et prétentions ; Ordonner l’exécution provisoire ;
Condamner in solidum les sociétés SBA COMPTA, anciennement dénommée CHLOROPHIL, et SMALLBUSINESSACT.COM à verser à la société AA CONSEIL la somme de 9.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code civil ;
Les condamner aux dépens.
SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM concluent à l’audience du 14 octobre 2021
Dans le dernier état de leurs prétentions, elles demandent au tribunal de : Vu les articles 1134, 1147, 1315 anciens du Code civil dans leur version applicable au litige, Vu les articles 1103, 1104, 1217 et 1231-1 du Code civil
Débouter la société AA CONSEIL de l’ensemble de ses demandes ;
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Condamner la société AA CONSEIL à payer à la société SBA COMPTA la somme de 3 642 € au titre des factures d’honoraires impayées avec pénalités de retard égales au taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage conformément à l’article L 441-10 du Code de commerce, à compter de la date d’exigibilité du paiement de ces factures ; Condamner la société AA CONSEIL à payer à la société SMALLBUSINESSACT.COM la somme de 22 507,20 € au titre des factures d’honoraires impayées ; Condamner la société AA CONSEIL à payer aux sociétés SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM la somme de 2 500 euros à chacune au titre de l’article 700 du
Code de procédure civile ; Condamner la société AA CONSEIL aux entiers dépens.
L’ensemble de ces demandes a fait l’objet du dépôt de conclusions ; celles-ci ont été échangées en présence d’un greffier qui en a pris acte sur la cote de procédure. A l’audience de mise en état du 7 septembre 2021, le tribunal a désigné un juge chargé d’instruire l’affaire.
Régulièrement convoqués à l’audience dudit juge du 14 octobre 2021 à laquelle les parties se présentent et après avoir entendu leurs observations, le juge clôt les débats et annonce que le jugement, mis en délibéré, sera prononcé par sa mise à disposition des parties le 15 décembre 2021 reporté au 29 décembre 2021 conformément aux dispositions de l’article 450 du code de procédure civile.
Conformément à l’article 871 du code de procédure civile le juge chargé d’instruire l’affaire a rendu compte au tribunal dans son délibéré.
MOYENS DES PARTIES
Après avoir pris connaissance de tous les moyens et arguments développés par les parties tant dans leurs plaidoiries que dans leurs écritures, appliquant les dispositions de l’article 455 du code de procédure civile le tribunal les résumera succinctement de la façon suivante.
A l’appui de ses demandes, AA CONSEIL soutient que :
• Le redressement fiscal lui est préjudiciable ; elle n’avait pas anticipé de telles erreurs et ne dispose pas de la trésorerie suffisante pour pouvoir régler immédiatement la somme réclamée par l’administration,
Ce redressement résulte des seules erreurs commises par SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM dans l’exercice de leurs missions,
AA a délégué la gestion complète de sǝ comptabilité en toute confiance, a réglé des
•
honoraires à ce titre et ne doit pas subir les conséquences d’un redressement fiscal dont elle n’est pas responsable,
• Son nouveau cabinet d’expertise-comptable (EUREDIT) a constaté de nombreuses irrégularités dans la tenue de la comptabilité sur d’autres exercices et a été contrainte de corriger l’ensemble de sa comptabilité ce qui lui a entrainé des frais supplémentaires,
• NPA entend engager la responsabilité solidaire de SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM en raison des nombreuses fautes commises dans l’exercice de leurs missions et obtenir la réparation de son préjudice,
• Les tentatives pour trouver une issue amiable au litige, notamment une mise en demeure du 18 mars 2019, sont demeurées vaines,
• Les irrégularités constatées par l’administration fiscale entrent toutes dans le champ de la mission confiée à SBA qui a manqué à son obligation de conseil dans l’exercice de sa mission,
Pour leur défense, SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM répliquent que :
L’expert-comptable est débiteur d’une obligation de moyens et non de résultat,
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. Les contours de sa mission sont définis par une lettre de mission qui fait loi entre les parties et un éventuel manquement de l’expert-comptable s’apprécie au regard de la mission qui lui est confiée,
. Un redressement fiscal n’engage pas la responsabilité de l’expert-comptable et seul un manquement à ses obligations aurait pour effet d’engager sa responsabilité,
. CHLOROPHIL (devenue SBA) et SMALLBUSINESSACT.COM ont exécuté leurs prestations conformément à la lettre de mission et leur responsabilité ne saurait être engagée du fait du redressement fiscal supporté par AA,
. La mission de CHLOROPHIL consistait en une mission de présentation et d’examen limité des comptes annuels pour des honoraires annuels de 3 060 € HT et il était expressément précisé en première page de la lettre de mission que le client est responsable à l’égard des tiers de l’exhaustivité, de la fiabilité et de l’exactitude des informations comptables et financières concourant à la présentation des comptes ainsi que des procédures de contrôle interne concourant à l’élaboration de ses comptes, Cette responsabilité de AA est classique dans la mesure où l’expert-comptable n’émet pas les factures du client ou qu’il ne fait pas les commandes et les paiements, L’expert-comptable sollicite de son client la transmission de tous les documents
.
comptables émis et reçus, à charge du client de transmettre l’ensemble des informations financières.
Il est renvoyé à l’assignation, aux conclusions précitées et au corps du présent jugement pour un plus ample exposé des moyens des parties.
SUR CE :
Sur le choix du demandeur dans la recherche de responsabilité :
Il résulte de la jurisprudence que le client de l’expert-comptable a le choix de rechercher la responsabilité soit de l’associé d’une société d’expertise-comptable, soit de la société elle- même.
Qu’en l’espèce SBA COMPTA ayant assigné à la fois, l’associé et la société d’expertise comptable, le tribunal de céans dans sa décision du 26 mai 2021 s’est déclaré incompétent pour connaitre de sa demande à l’encontre de M. AB AC au profit du tribunal judiciaire de Lyon et compétent pour juger du litige avec les sociétés SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM.
Le tribunal confirmera donc sa compétence pour juger du seul litige opposant la société AA aux sociétés SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM.
Sur les manquements de SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM allégués par AA
Attendu qu’au visa des articles 1103 et 1104 du code civil « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits » et « doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi »>
Attendu que l’article 1217 du Code civil: « La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :
- refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation;
- poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l’inexécution. Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter ».
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Attendu qu’en application de l’article 1353 du code civil, il appartient NPA CONSEIL de rapporter la preuve de l’obligation dont elle demande l’exécution;
Attendu que l’administration fiscale a relevé plusieurs irrégularités concernant les exercices fiscaux des années 2015 et 2016 de la société AA CONSEIL :
TVA collectée non comptabilisée,
TVA déduite à tort sur les dépenses afférentes à des véhicules de tourisme, Absence de réintégration de la fraction non déductible des loyers afférents à des voitures particulières,
Non-acquittement de la Taxe sur les véhicules de société,
Application d’un taux inadéquat pour le règlement de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue due pour l’année 2016.
Attendu que l’expert-comptable est débiteur à l’égard de son client d’une obligation de moyen et non de résultat.
Un éventuel manquement de l’expert-comptable s’apprécie donc au regard de la mission confiée.
Que les contours de sa mission sont définis librement entre l’expert-comptable et son client par le biais d’une lettre.
De la lettre de mission datée du 10 février 2014 qui lie les parties, il ressort clairement que :
· la mission de CHLOROPHIL (devenue SBA COMPTA) consiste en une mission « de présentation et d’examen limité des comptes annuels » pour des honoraires annuels de 3 060 € HT, sur la base de diligences ne mettant pas en ceuvre toutes les procédures requises pour un audit,
AA CONSEIL est responsable à l’égard des tiers de l’exhaustivitė, de la fiabilité et de
-
l’exactitude des informations comptables et financières la concernant ;
· la mission de CHLOROPHIL est d’exprimer une assurance de niveau modéré sur la
-
conformité des comptes de AA CONSEIL et n’est pas de détecter des erreurs ou irrégularités pouvant ou ayant lieu au sein de AA CONSEIL ;
- AA CONSEIL est responsable de la communication complète et entière des informations
->
et documents nécessaires pour l’établissement de l’opinion de l’expert-comptable sur la conformité de ses comptes.
Quant au contrat de prestation de services de SMALLBUSINESSACT.COM.COM du 4 février 2014 il détaille ses missions de saisie des opérations comptables et précise :
« Nous travaillons en fonction des instructions communiquées, des informations et documents transmis, afin de délivrer dans le délai convenu les prestations souscrites. Nous sommes tenus par une obligation de résultat relative dans la mesure où elle est limitée et directement liée aux éléments portés par vous à notre connaissance »
Il est par ailleurs constant que le seul redressement fiscal n’engage pas la responsabilité de l’expert-comptable. Seul un manquement à ses obligations a pour effet d’engager sa responsabilité.
En revanche, aucun devoir d’exiger qu’un client agisse conformément aux conseils donnés ni un «< devoir de refuser toute complaisance » ne peuvent être retenus comme étant à la charge de l’expert-comptable. Le client du professionnel doit communiquer à son interlocuteur tous les renseignements nécessaires à l’établissement des comptes ou à la préparation des déclarations fiscales ou sociales.
En l’espèce, s’agissant des déclarations de TVA, SBA COMPTA les préparait en fonction des factures et pièces transmises par AA CONSEIL et SMALLBUSINESSACT. Si SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT n’avaient aucun intérêt à ne pas prendre en compte toutes les factures transmises pour réaliser leur mission respective, les écarts entre la TVA collectée et celle déclarée, constatés par l’administration fiscale ne peuvent donc
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résulter que d’une absence de transmission de certaines factures ; les contrôles comptables même limités comme le précise la lettre de mission devaient permettre à SBA COMPTA de détecter ces écarts entre TVA collectée et déclarée.
Toutefois en fin d’exercice, il appartenait au cabinet d’expertise-comptable de relever les éventuels écarts sur les reversements de TVA et de le signaler à sa cliente dans le cadre de son obligation de conseil et de diligence.
Il s’ensuit que la responsabilité de SBA COMPTA est engagée sur ce point.
De même que sur la TVA déduite à tort sur les dépenses afférentes à des véhicules de tourisme, l’absence de réintégration de la fraction non déductible des loyers afférents à des voitures particulières, comme l’application d’un taux inadéquat pour le règlement de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue due pour l’année 2016, la responsabilité des défenderesses est engagée : c’est à l’expert de connaître les taux applicables et les conditions de déductibilité de certaines dépenses en matière fiscale et non à l’entreprise, sa cliente. S’agissant du non-acquittement de la Taxe sur les véhicules de société, il ressort de la proposition de rectification fiscale (pièce 6 du demandeur) « qu’au cours des opérations de contrôle, la société (AA CONSEIL) a remis au service vérificateur les déclarations de TVTS pour les périodes du 1/10/2014 au 30/09/2015 et du 1/10/2015 au 30/09/2016 qui auraient dû être déposées au service des impôts compétent, accompagnées du paiement de la
TVTS ».
Que sur ce point il apparaît que la mission confiée à l’expert-comptable était de préparer la déclaration de la Taxe sur les Véhicules de Tourisme et de Société et d’inciter clairement sa cliente à la déposer au service des impôts et à payer les taxes. Des éléments d’information fournis au tribunal il ressort que l’expert-comptable n’a pas manifesté sur ce point la diligence nécessaire auprès de sa cliente et que sa responsabilité est engagée.
Il résulte de tout ce qui précède que la responsabilité des irrégularités relevées par l’administration fiscale est imputable dans une large mesure à SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM.
Sur les préjudices allégués par le demandeur :
Sur le paiement des intérêts de retard et des majorations:
Il est constant que le paiement de l’impôt lui-même ne peut constituer un préjudice dès lors que l’impôt est normalement dû.
S’agissant des intérêts de retard réclamés par l’administration fiscale qui viennent réparer le préjudice subi par l’Etat du fait du retard du paiement de l’impôt par le contribuable, il appert que AA CONSEIL, a conservé dans son patrimoine les fonds dus et ne démontre pas ne pas avoir retiré un avantage financier qui compense le préjudice résultant du paiement des intérêts de retard.
Par conséquent, les intérêts de retard ayant été compensés en partie par cet avantage financier, il n’y a pas lieu de les imputer en totalité à l’expert-comptable.
De même, en ce qui concerne les majorations et pénalités, elles doivent être supportées par la ou les parties fautives et réparties en l’espèce, en fonction d’un partage de responsabilité entre l’expert-comptable et son client.
Après un examen attentif des pièces versées au débat, le tribunal retient une responsabilité partagée entre les parties et condamnera in solidum SBA et SMALLBUSINESSACT.COM à payer à AA CONSEIL 80% des sommes réclamées par l’administration fiscale, soit la somme de 26 916,80 € (80% de 33 646 € correspondant aux intérêts de retard à hauteur de 20 899 € et aux majorations à hauteur de 12 750 €)
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Sur les préjudices allégués par le demandeur, résultant d’une part des erreurs constatées dans la comptabilité au titre d’exercices non vérifiés par l’Administration fiscale et d’autre part d’erreurs régularisées par le nouvel expert-comptable :
Alors que SBA et SMALLBUSINESSACT.COM sont restées en charge pour les exercices
2015 et 2016 de la tenue de la comptabilité de AA, le 20 juin 2017, M. AB AC, expert-comptable et dirigeant, quitte CHLOROPHIL.
Ce dernier travaillant sur la comptabilité de AA depuis plusieurs années et AA souhaitant maintenir la relation avec lui, elle résilie les contrats avec CHLOROPHIL et
SMALLBUSINESSACT.COM et signe le 30 novembre 2017 une lettre de mission avec la société COMITEM qu’a rejoint M. AB AC. En conséquence les erreurs constatées dans la comptabilité au titre d’exercices non vérifiés par l’Administration fiscale ne peuvent être retenues que pour les exercices antérieurs à l’année 2017: il s’agirait en l’occurrence d’un préjudice consistant en la perte de chance d’encaisser des sommes qui lui revenaient et qui s’élèverait à la somme de 24.473,15 euros, selon le nouvel expert-comptable (EUREDIT) qui a succédé à la société COMITEM. Attendu que le montant avancé n’est assorti d’aucune pièce probante, le tribunal déboutera AA CONSEIL de sa demande à ce titre.
Sur les erreurs relevées et régularisées par la société EUREDIT, comme cette dernière l’atteste (pièce 17 du demandeur) elles concernent l’arrêté des comptes 2017 et l’exercice
2018 qui ne ressortit plus de la responsabilité de SBA et SMALLBUSINESSACT.COM puisque AA a rompu ses contrats avec celles-ci en novembre 2017; aussi le tribunal écartera la demande de paiement à AA CONSEIL d’une somme de 7.740 euros TTC par SBA et SMALLBUSINESSACT.COM.
Sur le préjudice allégué résultant du temps qui a dû être engagé par la société AA CONSEIL dans le cadre du contrôle fiscal :
AA CONSEIL sollicite un dédommagement au titre du temps passé par ses dirigeants et salariés dans le cadre du contrôle fiscal qu’elle évalue à la somme de 16 750 €.
Outre l’absence de justificatif de temps passé ou du taux horaire des personnels concernés qui doit être relevée il est patent qu’un contrôle fiscal mobilise les dirigeants de toute entreprise assujettie à un contrôle fiscal et ne saurait donner lieu au paiement par l’ancien expert-comptable de tout ou partie des salaires versés à ces personnels, même si la responsabilité d’une partie du redressement fiscal peut lui être attribuée. Aussi le tribunal déboutera AA CONSEIL de cette demande de dédommagement du temps passé par ses salariés.
Il ressort de tout ce qui précède que le tribunal déboutera la société AA CONSEIL de ses demandes de dommages et intérêts, hormis la somme de 26 916,80 € correspondant à une partie des intérêts de retard et des majorations réclamés par l’administration fiscale.
Sur les demandes reconventionnelles des parties défenderesses:
Attendu que, selon l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ;
A titre reconventionnel, SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM sollicitent la condamnation de AA CONSEIL à leur régler des honoraires dus au titre des exercices 2014 à 2017 (3 642€ pour SBA COMPTA et 22 507,20 € pour SMALLBUSINESSACT.COM).
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Elles allèguent que le montant des honoraires était défini dans les lettres de mission respectives de SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM, signées toutes deux par AA CONSEIL.
Attendu qu’elles ne démontrent pas avoir adressé ces factures à la société AA CONSEIL au moment des prestations, ni que cette dernière ne les aurait pas réglées, ni qu’elles auraient tenté leur recouvrement en vain.
De plus, le règlement des honoraires des sociétés SBA et SBA COMPTA devait se faire par prélèvements sur le compte de la société AA CONSEIL par les deux sociétés. Or, ces dernières ne produisent aucune pièce attestant de demande de prélèvement formulée au titre des sommes réclamées et les copies des factures versées au débat correspondent à des rééditions établies en 2019.
En conséquence les défenderesses n’apportant pas les preuves de la réalité de factures remontant pour les plus anciennes à 2014, le tribunal les déboutera de ces demandes reconventionnelles.
Sur les demandes relatives à l’application de l’article 700 du CPC
Attendu que la société AA CONSEIL a dû, pour faire valoir ses droits, engager des frais qu’il serait inéquitable de lui faire supporter; qu’il convient donc de condamner in solidum les sociétés SBA COMPTA, anciennement dénommée CHLOROPHIL, et
SMALLBUSINESSACT.COM à lui payer la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, déboutant pour le surplus.
Sur l’exécution provisoire
Attendu que l’exécution provisoire est sollicitée, qu’elle est compatible avec la nature de l’affaire, que le tribunal l’estime nécessaire ; qu’il convient, en conséquence, d’ordonner cette mesure, sans constitution de garantie ;
Sur les dépens
Attendu que vu les faits de l’espèce et les décisions du tribunal, les sociétés SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM seront condamnées in solidum au paiement des dépens.
Sans qu’il soit besoin d’examiner plus avant les autres moyens des parties que le tribunal considère comme inopérants ou mal fondés, il sera statué dans les termes ci-après.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement en premier ressort par jugement contradictoire
Confirmant sa décision du 25 mai 2021, se déclare compétent pour juger du litige opposant la société AA CONSEIL aux sociétés SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM;
Condamne in solidum les sociétés SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM à payer à la société AA CONSEIL 80% des sommes réclamées par l’administration fiscale, au titre
d’amendes et de majorations, soit la somme de 26 916,80 €
Déboute la société AA CONSEIL de ses autres demandes de dommages et intérêts,
Dit les sociétés SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM mal fondées en leurs demandes reconventionnelles et les en déboute,
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Condamne in solidum les sociétés SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM, à payer à la société AA CONSEIL la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement, en toutes ses dispositions, sans constitution de garantie,
Condamne in solidum les sociétés SBA COMPTA et SMALLBUSINESSACT.COM aux dépens de l’instance, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 130,34 € dont 21,51 € de TVA.
En application des dispositions de l’article 871 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 octobre 2021, en audience publique, devant M. AD AE, juge chargé d’instruire l’affaire, les représentants des parties ne s’y étant pas opposés,
Ce juge a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré du tribunal, composé de M. AD AE, M. AF AG et M. AH AI. Délibéré le 14 décembre 2021 par les mêmes juges.
Dit que le présent jugement est prononcé par sa mise à disposition au greffe de ce tribunal, les parties en ayant été préalablement avisées lors des débats dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
La minute du jugement est signée par M. AD AE, président du délibéré et par Mme Sylvie Vandenberghe, greffier.
Le greffier, Le président,
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