Tribunal de grande instance de Paris, 8e chambre 1re section, 28 juin 2011, n° 10/02697

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

8e chambre 1re section

N° RG :

10/02697

N° MINUTE :

Assignation du :

17 Février 2010

(footnote: 1)

JUGEMENT

rendu le 28 Juin 2011

DEMANDERESSE

Madame Z X Y

[…]

[…]

représentée par Maître Joëlle HOFFLER, de la SCP MOUCHART Associés, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #P0509

DÉFENDEUR

Syndicat des copropriétaires […], représenté par son syndic le […],

[…]

[…]

représenté par Maître Nicolas GUERRIER de la SCP NICOLAS GUERRIER et ALAIN de LANGLE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #P208

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Alain PALAU, Vice Président

X BRUSTON, Vice-Président

[…], Juge

assistés de Clémentine PIAT, Greffier,

DEBATS

A l’audience du 05 Avril 2011

tenue en audience publique au cours de laquelle les avocats ont été avisés de la date du délibéré

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe

Contradictoire

en premier ressort

* * *

EXPOSE DU LITIGE

Faits et procédure :

Madame Z X Y est propriétaire du lot n°4, soit un appartement au 1er étage du bâtiment A de l’immeuble situé […] à Paris 8e.

Le règlement de copropriété du 29 mai 1953 prévoit pour les dépenses d’ascenseur que :

“ Exception à la règle indiquée ci-dessus dans l’article ci-dessus est faite pour les dépenses relatives à l’escalier de maître et à l’ascenseur de chaque corps de bâtiment, c’est à dire :

— (…) l’entretien et les dépenses de réparations de chacun des ascenseurs situés respectivement dans chacun des escaliers de maître,

— les primes d’assurances spéciales auxquelles donneraient lieu les ascenseurs,

Ces dépenses ne seront supportées que par les sociétaires nantis d’un droit d’usage sur les appartements situés respectivement dans chaque corps de bâtiment et ultérieurement chaque propriétaire de lot situé dans chaque corps de bâtiment.

Etant donné que l’ascenseur est utilisé aussi bien par les occupants du premier, deuxième et troisième étages, que par les occupants des quatrième et cinquième étages,

Etant donné que ce qui est le plus onéreux dans le fonctionnement de l’ascenseur c’est le fait d’appuyer sur le bouton beaucoup plus que le parcours proprement dit (dépense de courant ou de d’air comprimé),

Etant donné que si l’occupant du deuxième étage reçoit plus de visiteurs que l’occupant du cinquième étage, il peut arriver qu’il utilise l’ascenseur autant que ce dernier sinon plus,

Etant donné que de toute manière, la présence d’un ascenseur dans un immeuble classe cet immeuble et valorise les appartements même ceux des étages inférieurs,

Etant donné qu’on ne pourrait envisager un remplacement d’ascenseur supporté essentiellement par les sociétaires, porteurs de parts affectés aux derniers étages ou par les propriétaires de ces lots, il est ici formellement décidé que les dépenses énumérées ci-dessus concernant chacun des (…) ascenseurs seront réparties par parts égales entre tous les sociétaires nantis d’un droit d’usage concernant les lots situés dans chaque corps de bâtiment aux premier étage, deuxième étage, troisième étage, quatrième étage, cinquième étage ou par les propriétaires de ceux-ci.

En conséquence, ne participent pas à ces charges, les porteurs de parts nantis d’un droit d’usage ou les propriétaires de lots situés au rez-de-chaussée dans chaque corps de bâtiment.”

L’assemblée générale du 16 novembre 2009 a adopté la résolution n°20 suivante :

20°) “L’assemblée décide d’adopter à la majorité de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965 le projet de création d’une nouvelle grille de répartition des charges ascenseur pour le bâtiment A, selon la grille se trouvant en pages 25 et 26 du projet de règlement de copropriété joint à la convocation et annexé au présent procès-verbal.”

La grille est la suivante :

[…]

nature

Nbre de pièces

Niveau

Coeff. d’habilitabilité

Coeff. d’usage

Coeff. d’étage

tantièmes

4

Profession libérale

1

1

2

2

1

1.943

6

Appartement

1

2

2

1

1,17

1.136

22

bureaux

1

3

2

3

1,34

3.905

26

Appartement

1

4

2

1

1,51

1.467

18

Appartement

1

4,5

2

1

1,595

1.549

Total Valeur absolue

10.000

Elle a également approuvé la résolution suivante (page 10) :

“Correction de l’article 1 chapitre 1 page 11 ainsi rédigé “compte tenu de la destination de la copropriété et de l’état descriptif de division, la copropriété est principalement à usage d’habitation, de professions libérales et de bureaux”, selon le projet de règlement de copropriété joint à la convocation et annexé au présent procès-verbal”.

Par acte d’huissier de justice du 17 février 2010, Madame Z X Y a assigné, devant ce tribunal, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé […] à Paris 8e en annulation d’une résolution de l’assemblée générale du 16 novembre 2009, en annulation d’une clause du règlement de copropriété, aux fins d’une nouvelle répartition des charges et en restitution de fonds.

L’assemblée générale du 27 janvier 2010 a adopté la résolution n°4 laquelle donne tous pouvoirs au syndic pour procéder à l’enregistrement du règlement de copropriété et représenter le syndicat des copropriétaires lors des différents actes administratifs à entreprendre.

Moyens et prétentions des parties :

Madame X Y, aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives notifiées le 7 février 2011, demande au tribunal, au visa des articles 10 et 43 de la loi du 10 juillet 1965, de :

— annuler la résolution suivante page 12 de l’assemblée générale du 16 novembre 2009 : “L’assemblée décide d’adopter à la majorité de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965 le projet de création d’une nouvelle grille de répartition des charges ascenseur pour le bâtiment A, selon la grille se trouvant en pages 25 et 26 du projet de règlement de copropriété joint à la convocation et annexé au présent procès-verbal”,

— Annuler la grille annexée faisant corps avec la résolution :

[…]

nature

Nbre de pièces

Niveau

Coeff. d’habitabilité

Coeff. d’usage

Coeff. d’étage

tantièmes

4

Profession libérale

1

1

2

2

1

1.943

6

Appartement

1

2

2

1

1,17

1.136

22

Bureaux

1

3

2

3

1,34

3.905

26

Appartement

1

4

2

1

1,51

1.467

18

Appartement

1

4,5

2

1

1,595

1.549

— Annuler la clause du règlement de copropriété du 29 mai 1953 disant que les charges d’ascenseur “seront réparties par parts égales entre tous les sociétaires nantis d’un droit d’usage concernant les lots situés dans chaque corps de bâtiment aux premier étage, deuxième étage, troisième étage, quatrième étage, cinquième étage ou par les propriétaires de ceux-ci”,

— en conséquence, dire que la répartition des charges de l’ascenseur sera la suivante :

Niveau

n° lot

Nbre de pièces

Coeff. d’habitabilité

Coeff. d’usage

Coeff. d’étage

Valeur absolue

% lot

part tantièmes

1

4

1

2

1

0,2

0,4

3,44

344

2

6

1

2

1

1,17

2,34

20,12

2.012

3

22

1

2

1

1,34

2,68

23,04

2.304

4

26

1

2

1

1,51

3,02

25,97

2.597

5

18

1

2

1

1,595

3,19

27,43

2.743

Totaux

11,63

100

10.000

— ordonner au syndicat des copropriétaires de procéder à la répartition des charges d’ascenseur pour le lot n°4 en appliquant le coefficient d’étage de 0,2 au lot 4,

— le condamner à lui payer le trop-perçu au titre du lot n°4,

— annuler la résolution de l’assemblée du 27 janvier 2010 donnant pouvoir au syndic pour l’enregistrement de la répartition des charges d’ascenseur,

— la dispenser de toute participation à la dépense commune des frais de procédure,

— condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux dépens qui pourront être recouvrés dans les conditions de l’article 699 du Code de procédure civile.

Madame X Y, qui exerce la profession d’avoué, expose, pour demander l’annulation de la résolution approuvant une nouvelle répartition des charges d’ascenseur ainsi que la nullité de la clause d’origine du règlement de copropriété, que les répartitions sont contraires aux dispositions de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965.

Elle conteste en premier lieu le coefficient d’usage retenu par la nouvelle grille, soit 1 pour les appartements, 2 pour les professions libérales et de 3 pour les bureaux et demande qu’il soit fixé à 1 pour tous les locaux.

Elle expose que dans le règlement de copropriété, les lots, tous des “appartements”, ont la même destination, ne supportent aucune destination obligatoire et bénéficient dans le règlement, de la possibilité d’y exercer une profession libérale, d’y installer des bureaux ou d’y fixer l’habitation. Elle ajoute que les lots sont tous égaux au titre de l’utilité objective d’un ascenseur pour des usages variés potentiels.

Elle précise que l’usage effectif constaté au jour de l’assemblée est que quatre sur dix appartements hébergent une activité professionnelle pour l’ensemble des locaux, et précise que cet usage peut cesser, le lot pouvant être affecté à l’habitation, ce dernier usage pouvant également évoluer. Elle fait valoir que le règlement n’est, quant à lui, pas variable et que se fonder sur l’usage effectif du lot ne consiste pas à appliquer le critère objectif de l’équipement pour ce lot. Elle considère donc que le coefficient de 1 doit s’appliquer à tous les lots et pour tous les étages.

Elle conclut que chaque lot peut choisir son usage parmi les trois autorisés par le règlement de copropriété sans que ce choix n’entraîne des charges différentes selon l’usage effectif dès lors qu’il n’y a pas de modification de la destination ou de l'“usage” au sens de la loi en cas de modification de l’usage effectif, lequel n’a pas d’intérêt pour la fixation des charges.

De ce chef, elle fait valoir que l’utilité de l’équipement est appréciée, par la jurisprudence, de manière objective laquelle retient comme critère non pas l’usage effectif fait par le copropriétaire mais l’usage possible. Elle ajoute que lorsque le règlement de copropriété prévoit différents usages, sans affecter aux lots des usages particuliers, l’utilité ne dépend pas de l’usage des lieux, lequel peut varier. Elle précise que l’usage effectif d’un lot, qui peut avoir plusieurs destinations autorisées par le règlement de copropriété, n’est pas un critère de répartition.

Elle expose que dans le cas où la destination des lots est fixée par le règlement de copropriété, l’usage des lots est alors identique à cette destination, de sorte que l’usage est alors un critère de répartition.

Elle soutient que le syndicat des copropriétaires tente de créer un doute sur la notion de destination des lots en y opposant celle d’usage. Elle indique que si l’article 8 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que le règlement de copropriété fixe “la destination” des parties privatives, les règlements de copropriété emploient également le terme “usage”. Elle soutient que sans tenir compte du vocabulaire, la distinction doit être faite entre l’effet obligatoire ou non du règlement de copropriété quant à l’usage c’est à dire soit une destination ou usage obligatoire soit une destination ou usage libre.

Elle prétend que seul l’usage obligatoire ou prédéterminé entraîne un changement d’usage. Elle réfute les jurisprudences invoquées par le syndicat des copropriétaires dans la mesure où elles ont trait à des espèces où l’usage était prédéterminé. Elle considère que les jurisprudences invoquées par le défendeur quant au vote à la majorité de l’article 25f confirment tout au contraire que la liberté d’usage pour tous les lots est le contraire du changement d’usage qui ne concerne que l’usage obligatoire ou prédéterminé.

Elle conclut qu’il ne faut pas confondre destination de l’immeuble et destination ou usage du lot. Elle déclare que :

— dans un immeuble dont la destination est unique ou restrictive, le changement d’usage d’un lot pour un usage non prévu ou interdit par le règlement de copropriété exige l’unanimité,

— dans un immeuble dont la destination est multiple et les usages des lots prévus au règlement de copropriété, le changement d’usage d’un lot est possible pour un autre usage prévu au règlement, avec exigence d’un vote à la majorité de l’article 25f,

— et dans un immeuble où la destination de celui-ci est multiple et où aucun lot n’a d’usage ou de destination prédéterminé, les usages des lots sont libres pour tous les usages prévus au règlement de copropriété sans qu’il y ait “changement” d’usage du lot.

S’agissant du coefficient d’étage, elle fait état des coefficients habituellement appliqués et notamment comme en l’espèce lorsque l’ascenseur est installé en demi-étage, le 1er étage bénéficiant d’un abattement. Elle ajoute que le dernier étage bénéficie également d’une réduction ce que l’assemblée lui a reconnu, et observe que le syndicat n’explique pas ce traitement inégal. Elle précise que pour le 1er étage le coefficient devient 0,2 et seul ce coefficient doit être corrigé.

Elle présente la méthode de calcul des charges, admet que la méthode employée dans la nouvelle grille est la bonne mais qu’il y a lieu seulement de corriger les coefficients d’usage et d’étage appliqués. Elle propose une nouvelle grille sur ces bases.

Au titre de la répartition des charges, elle fait valoir que la nouvelle répartition aura effet pour l’avenir en ce qui concerne le coefficient d’usage apparu pour la première fois dans la résolution attaquée. Elle ajoute qu’elle aura un effet rétroactif en ce qui concerne l’annulation du coefficient d’étage prévu au règlement de copropriété d’origine qui procède à une répartition uniforme entre tous les étages, sans distinction de coefficients. Elle demande le remboursement des charges trop payées en exécution du règlement de copropriété annulé.

Elle conteste l’argumentation du syndicat des copropriétaires qui s’oppose à toute rétroactivité.

Elle sollicite, par voie de conclusions, l’annulation de la résolution de l’assemblée générale postérieure du 27 janvier 2010 qui donne tous pouvoirs au syndic pour procéder à l’enregistrement du règlement de copropriété et donc nécessairement sur la grille de répartition des charges.

***

Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé […] à Paris 8e, aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives notifiées le 7 mars 2011, demande au tribunal de :

— débouter Madame Z X Y de ses demandes,

— la condamner à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux dépens qui pourront être recouvrés dans les conditions de l’article 699 du Code de procédure civile.

Le syndicat des copropriétaires, pour demander le rejet des prétentions, se réfère aux dispositions de l’article 25f de la loi du 10 juillet 1965. Il précise que l’enjeu du litige est de savoir si l’usage ou la destination d’un lot, lorsqu’il n’est pas expressément fixé par le règlement de copropriété, peut être un critère de la répartition des charges d’ascenseur.

Il considère que le changement d’usage au sens de l’article 25f doit être conforme au règlement de copropriété. Il ajoute que la jurisprudence n’a pas limité le champ d’application de ladite disposition au seul cas où le règlement de copropriété fixe la destination de chaque lot.

Il précise que lorsque le règlement fixe la destination de l’immeuble et celle de chaque lot, un changement conforme de la destination du lot suppose l’unanimité, et après obtention de cette unanimité, il pourra être procédé à la répartition des charges en application de l’article 25f.

Il conteste l’interprétation des jurisprudences faite par Madame X Y et se réfère à d’autres arrêts. Il conclut que :

— lorsque le règlement de copropriété fixe la destination de l’immeuble et expressément celle de chaque lot, tout changement d’usage exige l’unanimité car il s’agit d’une modification du règlement qui a valeur contractuelle et ce n’est qu’ensuite que pourra intervenir une modification de la répartition des charges,

— lorsque le règlement de copropriété fixe une seule destination, tout changement exige l’unanimité,

— lorsque le règlement de copropriété fixe plusieurs destinations à l’immeuble ou une destination tolérée, tout changement est libre et l’article 25f doit s’appliquer. Il précise que la situation litigieuse se situe dans ce dernier cas.

Il expose que l’assemblée générale du 16 novembre 2009 a modifié le règlement de copropriété comme suit “la copropriété est principalement à usage d’habitation, de profession libérale et de bureaux”. Il ajoute qu’il est logique que la grille proposée comporte un coefficient d’usage. Il précise que si Madame X Y souhaite utiliser son lot à usage d’habitation, elle pourra alors recourir aux dispositions de l’article 25f.

Il fait valoir que la jurisprudence établit que l’usage est un critère conforme à l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965 et que dès lors que le règlement de copropriété autorise plusieurs destinations, le changement d’usage du lot permet de recourir à l’article 25f.

Du chef du coefficient d’étage, il fait valoir que tous les étages sont desservis par deux demi-étages, la première fois avant l’étage, (avant étage, une volée d’escalier à monter ou après étage, une volée à descendre) sauf pour le 5e étage qui n’est desservi que par une volée à monter ce qui explique l’abattement pour celui-ci.

Il soutient que la grille proposée par Madame X Y repose sur une appréciation erronée de la réalité puisque chaque étage est desservi de la même manière, sauf le dernier. Il ajoute que la demanderesse ne démontre pas en quoi l’application d’un coefficient d’étage est contraire au principe de l’utilité. Il précise que la requérante ne conteste pas l’application du coefficient de pondération mais son calcul, ce qui ne relève pas de l’action en nullité.

Il demande le rejet de la demande en nullité de la résolution de l’assemblée générale du 27 janvier 2010 dans la mesure où la délégation donnée au syndic ne vise que les délibérations valables de sorte que si le tribunal devait annuler la résolution n°20, la délégation serait toujours valide mais ne porterait plus sur celle-ci.

S’agissant de la demande en annulation de la clause originelle du règlement de copropriété de 1953, il fait valoir que celui-ci exposait de façon détaillée les motifs de la répartition égalitaire. Il ajoute que la mesure de l’utilité n’est pas précisée dans la loi et que toute méthode d’appréciation est acceptable a priori dès lors qu’elle conduise au respect du principe d’utilité. Il souligne qu’un jugement du 4 septembre 2007 a débouté d’autres copropriétaires de leur demande de nullité de ladite clause. Il conclut que le critère d’utilité était respecté.

Il expose qu’en réalité, Madame X Y s’estime lésée financièrement de sorte qu’il s’agit d’une action en révision (prescrite) plus qu’une action en nullité.

Il ajoute que le règlement de copropriété d’origine fait bien une différence entre les charges pour chaque corps de bâtiment.

Il soutient qu’il a fait voter la modification de la répartition des charges et décidé de mettre en oeuvre des critères plus modernes sans pour autant que l’ancienne soit entachée de nullité.

Il demande le rejet des prétentions en faisant observer que la nouvelle grille est légèrement plus avantageuse pour Madame X Y que l’ancienne qu’elle n’avait pourtant pas contestée jusqu’à ce jour.

Il sollicite le rejet de la demande de remboursement et soutient qu’elle ne peut, en vertu de l’article 12 de la loi du 10 juillet 1965, avoir d’effet que pour l’avenir.

***

Il sera expressément renvoyé aux conclusions des parties des 7 février et 7 mars 2011, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, conformément à l’article 455 du Code de procédure civile.

***

L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 mars 2011.

MOTIFS

Sur les demandes de Madame X Y :

Sur la résolution n°20 :

En vertu de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965, les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d’équipement commun en fonction de l’utilité que ces services et éléments présentent à l’égard de chaque lot.

Conformément aux dispositions de l’article 10 et 25f de la loi du 10 juillet 1965, la répartition des charges ne peut être modifiée qu’à l’unanimité des copropriétaires à moins qu’elle ne soit rendue nécessaire par un changement d’usage d’une ou plusieurs parties privatives

En l’espèce, il ressort des pièces produites que la destination de l’immeuble est à usage d’habitation, de professions libérales et de bureaux. Les lots décrits à l’état descriptif de division ne sont pas affectés à un usage particulier et prédéterminé. Chaque copropriétaire peut donc en user librement à usage d’habitation, de professions libérales ou de bureaux.

Dans la mesure où un copropriétaire use de ses parties privatives dans le respect des trois types d’usages autorisés indifféremment pour chaque lot, la variation dans l’utilisation réelle, qui relève de la liberté du copropriétaire, n’est pas constitutive d’un changement d’usage au sens de la loi du 10 juillet 1965.

L’affectation effective d’un lot, à un moment déterminé, à l’un ou l’autre des usages autorisés ne peut donc être un critère objectif d’appréciation de l’usage du lot et partant conduire à une appréciation différenciée de l’utilité que présente pour lui l’équipement collectif.

Par ailleurs, le règlement de copropriété a vocation à s’appliquer entre les copropriétaires de manière pérenne. Le choix personnel du copropriétaire de l’usage de son lot, dans les limites ci-dessus, peut être modifié librement et à sa discrétion. Le recours aux dispositions de l’article 25f dans cette situation, comme le demande le syndicat, conduirait à une instabilité des relations entre les copropriétaires, à une remise permanente de la répartition des charges en fonction des usages alors qu’aucune restriction à cet égard n’est prévue au règlement de copropriété.

En tout état de cause, dès lors que l’usage n’est pas contraire à la destination de l’immeuble et est conforme aux usages multiples autorisés indifféremment pour chaque lot, le copropriétaire n’est pas tenu de soumettre, à chaque modification personnelle d’affectation des parties privatives, une demande en ce sens dans les conditions de l’article 25f en vue d’obtenir une nouvelle répartition des charges.

Dans ces conditions, l’assemblée générale ne pouvait valablement approuver une résolution entérinant, dans la grille de répartition des charges d’ascenseur, un coefficient d’usage distinct pour chaque lot en fonction de l’usage des lots à un moment donné.

En conséquence, la résolution n°20 (page 12) de l’assemblée générale du 16 novembre 2009 sera annulée et partant la grille annexée faisant corps avec ladite résolution.

Sur la clause du règlement de copropriété et les demandes de nouvelle répartition et de remboursement de trop perçu :

Le fait pour le syndicat des copropriétaires d’envisager une nouvelle répartition de charges et la mise en oeuvre de critères plus modernes n’impliquent pas que la clause originelle de répartition prévue au règlement de copropriété est nécessairement non-conforme.

La clause du règlement de copropriété du 29 mai 1953 explicite, aux termes d’un exposé détaillé, les motifs pour lesquels il a été décidé que les charges d’ascenseur seraient réparties en parts égales entre les copropriétaires d’un même escalier. Elle fait référence expressément au critère prévu par l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965.

Il n’y est pas fait référence au coefficient d’usage qui, comme le précise Madame X Y, est apparu pour la première fois, dans la résolution ci-dessus annulée.

Madame X Y ne démontre pas que le critère d’utilité tel qu’il est précisé par le règlement de copropriété est contraire à la réalité et aux dispositions de l’article susvisé. Elle sera déboutée de sa demande en annulation de la clause du règlement de copropriété du 29 mai 1953 disant que les charges d’ascenseur “seront réparties par parts égales entre tous les sociétaires nantis d’un droit d’usage concernant les lots situés dans chaque corps de bâtiment aux premier étage, deuxième étage, troisième étage, quatrième étage, cinquième étage ou par les propriétaires de ceux-ci”.

Ladite clause n’étant pas réputée non-écrite, il n’y a pas lieu de procéder à une nouvelle répartition des charges et Madame X Y sera déboutée de sa demande de ce chef.

De même, Madame X Y ne peut prétendre à un remboursement des charges qu’elle a régulièrement payées sur la base de la clause du règlement de copropriété. Sa demande à ce titre sera rejetée.

Il appartiendra, le cas échéant, à l’assemblée générale, laquelle peut envisager de moderniser la grille de répartition des charges d’ascenseur, de prendre en considération l’annulation prononcée ci-avant.

Sur la résolution n° 4 de l’assemblée générale du 27 janvier 2010 :

La recevabilité de la demande en annulation n’est pas discutée.

Ladite résolution se limite à donner tous pouvoirs au syndic pour procéder à l’enregistrement du règlement de copropriété et représenter le syndicat des copropriétaires lors des différents actes administratifs à entreprendre.

Madame X Y ne présente aucune critique tenant aux conditions dans lesquelles ladite résolution a été adoptée.

Il est constant que le syndic ne peut mettre en oeuvre que les délibérations valablement approuvées. L’annulation de la résolution n°20 ci-dessus n’a pas pour effet d’invalider les pouvoirs plus généralement délégués au syndic aux termes d’une résolution régulièrement votée.

Madame X Y sera déboutée de sa demande en annulation de la résolution n°4 de l’assemblée générale du 27 janvier 2010.

Sur les demandes accessoires :

Le syndicat des copropriétaires, qui succombe principalement, sera condamné aux dépens.

Il devra payer à Madame X Y la somme de 1.800 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Madame X Y bénéficiera des dispositions de l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par jugement contradictoire, en premier ressort et publiquement par mise à disposition au greffe :

Annule la résolution n°20 (page 12) de l’assemblée générale des copropriétaires de l’immeuble situé […] à Paris 8e tenue le 16 novembre 2009 et partant la grille de répartition des charges d’ascenseur annexée faisant corps avec la résolution,

Déboute Madame Z X Y du surplus de ses demandes,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé […] à Paris 8e à payer à Madame Z X Y la somme de 1.800 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

Rappelle que Madame Z X Y est dispensée de toute participation à la dépense commune des frais de procédure comprenant les dépens et l’indemnité au titre de l’article 700 du Code de procédure civile dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires,

Rejette les plus amples demandes des parties,

Condamne le syndicat des copropriétaires précité aux dépens qui pourront être recouvrés par la Scp Mouchart Associés, représentée par Maître Joëlle Hoffler, Avocat, dans les conditions de l’article 699 du Code de procédure civile, pour ceux dont elle a fait l’avance sans recevoir provision.

Fait et jugé à Paris le 28 Juin 2011

Le Greffier Le Président

12

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