Tribunal de grande instance de Paris, 3e section, 30 septembre 2011

  • Œuvre de collaboration·
  • Œuvre collective·
  • Jeux en ligne·
  • Contrefaçon·
  • Jeu vidéo·
  • Musique·
  • Sociétés·
  • Droits d'auteur·
  • Composition musicale·
  • Compilation

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur F. indique être graphiste et compositeur musical de formation. Il a été embauché par contrat de travail à durée indéterminée le 16 juillet 2007, à l’issue de son stage de période d’application en entreprise, par la société Prizee.com en qualité de “sound designer”.

La société Prizee.com a pour activité toutes activités en rapport avec l’édition de sites internet, l’organisation de jeux concours, le développement et la vente de jeux vidéos, la conception et la vente de tous produits ayant trait à ses activités et l’accomplissement de prestations en informatique. Elle exploite une plate-forme de jeux en ligne destinée principalement au jeune public : le site qui propose des jeux en ligne dont l’accès est gratuit et qui permettent au joueur d’accumuler des points gagnants qui peuvent être convertis en cadeaux (console de jeux, CD…). Le nombre de parties quotidiennes gratuites est limité et les joueurs doivent, pour poursuivre leurs parties, faire l’achat de « Pack+ » qui sont alors facturés par micro-paiements. La société Prizee.com revendique 11,4 millions de joueurs actifs.

Monsieur F. a été licencié le 17 décembre 2009.

Il a fait constater les 4 et 5 mai 2010 par huissier de justice que les musiques dont il estime être l’auteur et rassemblées dans un CD de compilation “Prizee.music” étaient téléchargeables sur les sites , , , et et proposées sur comme cadeau aux internautes.

Estimant que les œuvres musicales qu’il a créées étaient encore exploitées avec les jeux en ligne par la société Prizee.com sur le site sans son autorisation et par le biais de cette compilation diffusée via la société Believe, ayant une activité de production, diffusion, promotion et distribution d’œuvres et d’artistes favorisant la création artistique et la diversité culturelle, sous toutes forme et tout support, Monsieur F. a, par actes d’huissier délivrés le 17 juin 2010, assigné devant le tribunal de grande instance de Paris les sociétés Prizee.com et Believe.

Dans ses dernières conclusions signifiées sur e-barreau le 6 juin 2011, Monsieur F. demande au tribunal, sous le bénéfice de l’exécution provisoire de :

– le recevoir en toutes ses demandes, fins et prétentions

Par conséquent :

Sur la contrefaçon de droits d’auteur :

– dire et juger que les 21 compositions musicales constituant le CD compilation ainsi que toutes les œuvres composées par Monsieur F. accompagnant les jeux en ligne sont des œuvres originales protégées par le droit d’auteur,

– constater qu’il est titulaire des droits sur les œuvres litigieuses,

– dire et juger que la société Prizee.com a commis des actes de contrefaçon en utilisant les compositions musicales pour les jeux en ligne sans son autorisation,

– dire et juger que la société Prizee.com et la société Believe ont commis des actes de contrefaçon en offrant au téléchargement les diverses musiques individuellement et sur support CD sans son autorisation,

– dire et juger qu’il a subi un préjudice matériel résultant de ces actes de contrefaçon,

– dire et juger que la société Prizee.com et la société Believe lui ont causé un préjudice moral du fait des actes de contrefaçon dont elles se sont rendues coupables,

– condamner solidairement la société Prizee.com et la société Believe à lui verser la somme de 218 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel résultant de la contrefaçon des œuvres précitées, avec intérêts légaux au jour du prononcé de la décision,

– interdire l’exploitation par la société Prizee.com et par la société Believe, à compter de la signification du jugement à intervenir, des œuvres revendiquées par Monsieur F., sous astreinte de 300 € par infraction constatée, une infraction étant constituée par la reproduction, la représentation ou la communication au public de tout ou partie de l’une de ces œuvres,

– ordonner à la société Believe de communiquer la liste des sites internet commercialisant les musiques de Prizee sous quelque forme que ce soit (vente, téléchargement, sous forme de compilation ou individuellement) ainsi que le nombre exact de téléchargements effectués des musiques de Monsieur F.,

– ordonner à la société Prizee.com la communication du nombre exact de CD fabriqués, vendus, offerts à titre de cadeaux, ainsi que le nombre exact de téléchargement par album et par titre,

– l’autoriser à reproduire, représenter et communiquer au public, notamment via son site internet, les vidéos ou extraits de vidéos présentant les jeux Prizee dont il a composé la musique, et/ou tout lien hypertexte renvoyant vers ces vidéos,

En outre :

– condamner solidairement la société Prizee.com et la société Believe à lui verser la somme de 3000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral résultant de la contrefaçon des œuvres précitées, avec intérêts légaux au jour du prononcé de la décision,

– ordonner à la société Prizee.com la communication du nombre exact d’exemplaires de CD distribués à titre de cadeaux aux joueurs ainsi que le nombre exact de téléchargements du CD et des musiques individuelles sur les différents sites internet,

– condamner solidairement la société Prizee.com et la société Believe au paiement de la somme de 20 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner solidairement la société Prizee.com et la société Believe aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Antoine Cheron, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

A l’appui de ses demandes, Monsieur F. indique avoir été embauché en qualité de compositeur et, unique salarié en charge de la production musicale des jeux en ligne, avoir composé l’ensemble des musiques Prizee.

Concernant la compilation, il relève qu’il bénéfice de la présomption de titularité puisqu’il est crédité sur la pochette du disque.

Il soutient avoir bénéficié d’une autonomie créative puisqu’il ne disposait que d’une commande accompagnée du thème et de l’ambiance des jeux et rédigeait lui-même le “sound design” et qu’il n’avait donc pas un rôle de simple technicien ou exécutant. Il ajoute que la seule validation de son travail par ses supérieurs hiérarchiques ne le prive pas de sa qualité d’auteur, la société Prizee.com ne justifiant pas des instructions qu’elle lui aurait données et s’agissant des attestations relève que dès lors que leurs auteurs sont toujours salariés, leur indépendance est relative.

Il s’oppose à la qualification d’œuvre collective soulevée en défense, ses créations étant parfaitement identifiables, ayant d’ailleurs fait l’objet d’une publication dans un CD et estime qu’il s’agit, compte tenu de son travail en concertation avec la société Prizee.com pour que la musique et les jeux s’accordent, d’œuvres de collaboration.

Il soutient que les musiques en cause sont protégeables au titre du droit d’auteur car elles sont le fruit d’un processus créatif et expriment sa personnalité dans la mélodie, l’harmonie et le rythme. Il estime que l’utilisation de l’informatique et des instruments virtuels commandés par un clavier Midi, n’exclut pas qu’il a effectué des choix dans une multitude de sons disponibles et ne remet pas en cause l’originalité de ses œuvres.

Il indique que la société Prizee.com n’avait pas l’autorisation d’exploiter ses œuvres, en l’absence de cession expresse de ses droits.

Concernant la société Believe, il lui reproche d’avoir diffusé la compilation et les œuvres musicales individuellement sur des sites internet et estime qu’en tant que professionnelle avertie, devant se préoccuper de la disponibilité des droits d’auteur sur les œuvres qu’elle distribue, elle a commis des actes de contrefaçon.

Au titre de son préjudice, il relève la très large exploitation de ses œuvres qui constituent l’un des éléments essentiels des jeux, la société Prizee.com en tirant un bénéfice évident et un profit, la distribution du CD comme gain participant de son succès commercial et constituant un outil marketing. Il estime donc son préjudice à 1% du chiffre d’affaires de la société Prizee.com. Il fait valoir un préjudice moral, s’agissant de la négation vexatoire de sa qualité d’auteur et une atteinte à sa psychologie et son honneur.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 23 juin 2011, la société Prizee.com demande au tribunal, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, de rejeter les prétentions au titre du droit d’auteur, conclut au débouté des demandes de Monsieur F. et, à titre subsidiaire, à l’absence de préjudice et au rejet des demandes de Monsieur F., de la demande de garantie de la société Believe. Elle sollicite de condamner le demandeur à lui payer la somme de 7000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens, dont distraction au profit de Maître Verbiest (cabinet Ulys).

La société Prizee.com estime tout d’abord que le son et la musique sont des éléments accessoires dans les jeux qu’elle met à la disposition des internautes et ne représente qu’une part minime du processus de création. Elle qualifie l’activité de Monsieur F. de prestataire sonore, son activité répondant à une commande portant sur la nature, la durée, le poids et le format du son attendu et s’agissant de musique d’atmosphère, de son contexte et de son style. Elle prétend qu’il devait respecter les directives de ses supérieurs.

Elle indique en outre que son ancien salarié cherchait les sons dans des banques de données composées de musiques de jeux déjà diffusées par Prizee ou libres de droits et critique les attestations versées au débat par le demandeur qui proviennent soit de salariés ayant quitté la société et ne travaillaient pas directement avec lui, soit de personnes incompétentes pour juger de son travail.

Elle dénie donc toute qualité d’auteur à Monsieur F. qui n’a pas été embauché en tant que créateur de musiques mais d’exécutant technique, n’avait pas d’intervention créative, ni d’autonomie dans l’exécution des tâches, son travail étant encadré et se caractérisant par une absence d’autonomie des choix, dans le respect de consignes strictes et impératives. Elle ajoute que son travail ne portait pas sur des créations d’œuvres originales mais sur l’habillage de jeux vidéo.

Elle fait valoir qu’il ne peut se prévaloir de la présomption de titularité, le CD Prizee music ayant été divulgué sous son nom en mentionnant la simple participation de Monsieur F.

Elle ajoute que les jeux en ligne constituent des œuvres collectives dans lesquelles les œuvres des membres de l’équipe se confondent, l’habillage sonore du jeu n’étant pas indépendant du jeu qu’il accompagne. Elle relève que le demandeur n’a pas adhéré à la Sacem et qu’aucune cession de droits n’est requise dans le cadre d’une œuvre collective.

A titre subsidiaire, elle estime qu’aucun préjudice n’a été subi par Monsieur F., que compte tenu du caractère imprécis du « périmètre de sa revendication » arbitraire et inexact, les listes de musique qu’il produit ne peuvent faire l’objet d’un quelconque droit à son bénéfice, celles-ci ne mentionnant à aucun moment dans quelle mesure les séquences qui y figurent proviennent de bases de données différentes. Elle relève que ses prétentions vont au-delà de ce qui est précisément identifié, à savoir 21 morceaux présents sur le CD. Elle estime que la sonorisation des jeux a un caractère accessoire, le joueur ayant la possibilité de désactiver le son et ceux-ci n’y accordant que peu d’importance. Elle prétend que la demande de rémunération proportionnelle est inapplicable en l’espèce et en tout état de cause que le pourcentage demandé est excessif quant à son assiette et son montant. Elle indique que Monsieur F. ne rapporte aucune preuve d’une atteinte à son droit moral et qu’il est de mauvaise foi puisqu’il a exploité ses jeux pour son compte en les mettant en ligne sans autorisation.

Elle estime que la demande en garantie de la société Believe ne peut être accueillie dans la mesure où tout professionnel se doit d’être diligent et qu’un distributeur doit s’assurer de la licéité des produits qu’il distribue.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 14 janvier 2011, la société Believe demande :

– sa mise hors de cause au titre de l’exploitation de la compilation Prizee Music car elle n’a pas réalisé sa commercialisation,

– de débouter le demandeur de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

– de prononcer sa mise hors de cause au titre de l’exploitation des jeux vidéos intégrant les compositions musicales revendiquées par le demandeur,

– de débouter le demandeur de ses demandes, fins et conclusions se rapportant à l’exploitation des jeux vidéo,

A titre subsidiaire,

– de constater que Monsieur F. ne justifie pas de l’étendue des préjudices qu’il revendique et ramener le montant des dommages et intérêts à un montant symbolique,

– de condamner la société Prizee à la garantir de toutes éventuelles condamnations qui seraient prononcées à son encontre au titre de la contrefaçon des droits d’auteur de Monsieur F.,

– de condamner le demandeur à lui payer la somme de 5000 € au regard du caractère manifestement abusif du montant des demandes formulées et la somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– le condamner aux entiers dépens dont distraction au bénéfice de Maître Masjter.

Sans en tirer aucune conséquence juridique, la société Believe indique que les revendications du demandeur portent sur un habillage musical et l’élaboration de simples bruitages et autres sonorités qui ponctuent les différentes étapes des jeux vidéo, soit le rôle d’un exécutant n’ayant bénéficié d’aucune marge de créativité.

La société Believe fait valoir qu’en sa qualité de distributeur numérique permettant à des artistes ou producteurs phonographiques indépendants de proposer leurs titres au téléchargement ou à l’écoute à partir des sites internet qui sont ses partenaires, elle a un rôle d’intermédiaire. Elle soutient ne pas être impliquée dans la commercialisation de la compilation “Prizee Music” qui a été confiée à l’une de ses filiales, la société de droit anglais Believe Direct Ltd qui exploite de manière indépendante un service de distribution numérique dénommé “zimbalam”.

Elle estime qu’en sa qualité de distributeur, elle s’est vu concéder des droits d’exploitation qui consistent en des droits voisins du droit d’auteur et portent exclusivement sur des enregistrements amenés à être diffusés en ligne et non sur l’exploitation d’œuvres musicales, les contrats de distribution n’emportant pas cession des droits d’auteur qui sont acquis par les éditeurs de site internet, les plateformes de téléchargement et d’écoute de musique en ligne, auprès des sociétés de gestion collective. Elle ajoute que l’absence d’adhésion à la Sacem-SDRM ne peut peser sur la société Believe Direct Ltd qui n’a pas à répondre de la négligence de l’auteur et estime que si le distributeur doit agir avec vigilance dans l’exécution des contrats de distribution, cette obligation ne lui impose pas de vérifier que chaque auteur est membre d’une société de gestion et en conclut que si Monsieur F. a été privé d’une rémunération, il en est responsable.

Concernant l’exploitation des jeux vidéos, elle fait valoir qu’elle ne peut en être tenue responsable alors que les jeux sont mis en ligne sur le site .

A titre subsidiaire, elle conteste la réalité du préjudice de Monsieur F., la compilation ayant eu une diffusion particulièrement restreinte, le nombre de vente étant dérisoire et le préjudice moral dont il sollicite la réparation ne se rattachant aux prérogatives dont il bénéfice au titre des dispositions du code de la propriété intellectuelle.

Elle sollicite la garantie de la société Prizee.com.

La clôture de l’instruction a été prononcée à l’audience de plaidoiries.

DISCUSSION

Sur les fins de non recevoir

Sur la qualification des jeux en ligne

La société Prizee.com dénie la qualité d’auteur à Monsieur F. au motif qu’il n’aurait eu aucune liberté de création, son travail consistant en celui d’un exécutant.

La fiche de poste de Monsieur F. indique qu’il définit l’identité sonore qui convient le mieux au site pour mettre en valeur les contenus visuels et les jeux, c’est à dire trouver le meilleur accompagnement sonore et adapter les sons à des images et qu’en tant que “créatif”, il est en charge de créer des sons et bruitages, des mélodies, musiques et atmosphère. Dans ses compétences figurent la maîtrise de différents logiciels ainsi que d’une table de mixage et la composition musicale. Par ailleurs, “il doit suivre les orientations artistiques et graphiques pour que la réalisation des effets sonores, des bruitages requis et des musiques soient en parfaite adéquation”.

Il ressort de l’attestation de l’ancienne responsable de Monsieur F., Madame K., que pour chaque jeu, un document de “production sound design” détaille chaque élément et décrit de manière précise les attentes concernant les musiques et des bruitages, faisant parfois appel à des sons disponibles dans des banques de données internes ou externes. Force est de constater qu’elle n’indique pas par qui était établi ce document, se contentant d’écrire “nous établissions un document de production”. Elle ajoute que les musiques et bruitages faisaient l’objet d’une validation par 5 personnes.

Monsieur Matthieu F., directeur de projet, mais qui ne justifie pas de compétences musicales, indique qu’il validait les propositions de Monsieur F. qui travaillait à partir d’instructions précises contenues dans le document de production et qu’il intervenait pour lui indiquer les sons les plus appropriés au jeu concerné, Monsieur F. retravaillant les sons non validés.

Cependant, le tribunal relève que la société Prizee s’abstient de verser au débat ces sound design et ne produit aucun document qui établirait que Monsieur F. réalisait ces compositions musicales sur instructions, aucune preuve matérielle de ces instructions ne figurant au dossier.

Il résulte de l’attestation de Madame Amandine L., qui partageait son bureau avec Monsieur F., et avait donc une connaissance quotidienne du travail de celui-ci qu’il était le seul compositeur de l’équipe et proposait, créait et composait des musiques. Monsieur Sébastien P. ayant travaillé directement avec le demandeur a constaté qu’il était autonome et soumis à une validation finale, uniquement. En outre, Madame Aude Z., qui était responsable du Gamestudio, indique que Monsieur F. créait lui-même le document de sound design en se basant sur le game design et prenant en compte les indications de l’environnement du jeu et qu’il disposait de toute latitude pour le processus de recherche et de création.

Le seul fait que ces trois personnes ne soient plus salariées de la société Prizee.com ne suffit pas en soi à remettre en cause leurs attestations.

Elles établissent que Monsieur F. a créé les musiques et bruitages à partir des “sound design” qu’il rédigeait lui-même. Il verse d’ailleurs au débat certains de ces “sound design”. Dès lors, même si son travail était validé par sa hiérarchie, il jouissait d’une liberté dans la création.

Le tribunal relève que certains éléments penchent en faveur de la qualification d’œuvre collective au sens de l’article L 113-2 du code de la propriété intellectuelle puisque les œuvres musicales ont été divulguées sous le nom de la société Prizee, réalisées par un salarié et impliquent une contribution personnelle de chaque auteur. Cependant, l’ensemble des conditions de l’œuvre collective n’est pas réunie, en l’absence de la preuve d’instructions et alors que, contrairement à ce que soutient la société Prizee.com, la musique ne se fond pas dans l’ensemble que constitue le jeu vidéo, puisqu’on peut l’écouter sans jouer, ainsi que l’établit d’ailleurs la commercialisation par la société Prizee.com d’un CD contenant les créations musicales.

En conséquence, les jeux en ligne constituent une œuvre de collaboration au sens de l’article L. 113-2 du code de la propriété intellectuelle, plusieurs personne ont concouru à leur réalisation et qu’il est tout à fait possible d’attribuer un droit distinct à Monsieur F. dont la contribution par le biais de la composition musicale peut être séparée. Les autres coauteurs, qui ne sont pas identifiés et n’ont pas été mis en cause, aucune des parties ne soulevant de fin de non recevoir de ce chef, ont réalisé la partie graphique de l’œuvre. La musique des jeux, créée par Monsieur F., fait donc partie d’une œuvre de collaboration audiovisuelle.

Sur la protection des œuvres revendiquées par Monsieur F.

L’article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous, comportant des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial.

Le droit de l’article susmentionné est conféré, selon l’article L.112-1 du même code, à l’auteur de toute œuvre de l’esprit, quels qu’en soit le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination et en particulier (5°) les compositions musicales avec ou sans parole.

Il se déduit de ces dispositions le principe de la protection d’une œuvre sans formalité et du seul fait de la création d’une forme originale.

Néanmoins, lorsque cette protection est contestée en défense, l’originalité d’une œuvre doit être explicitée par celui qui revendique des droits d’auteur, seule cette partie étant à même d’identifier les éléments traduisant sa personnalité.

Monsieur F. définit ainsi les musiques sur lesquelles il revendique des droits d’auteur :

– “Defi de diabolo“ : Menu : les voix angéliques rendent compte de la volonté de Diabolo de vouloir s’échapper des enfers.

Jeu : les vieux orgues sont inspirés des films de vampires des années 50 60 ; la rythmique saccadée et lente rappelle les tambours des armées d’orcs du Seigneur des Anneaux, les voix graves renforcent la présence des enfers.

– « Toudou aviateur » : menu et jeu : l’inspiration vient des musiques martiales, les trompettes donnent un son héroïque, les violons renforcent la dramatique de l’action, et les tambours accentuent encore le côté guerrier de la musique, comme dans les marches militaires.

– « Tout feu tout flamme » Menu : l’orchestration classique renforce le côté héroïque et pourtant sombre de l’action.

Jeu : Monsieur F. a voulu garder l’orchestration classique en renforçant le côté sombre de l’action mais aussi en rajoutant des sons électroniques inspirés de jeux plus anciens, comme Megaman ou Mario.

– « Fast and furax » : Menu : la rythmique « rap » « électro » met en avant le côté méchant (gangsta) et « savant fou » de Furax, le personnage du jeu.

Jeu : la rythmique et les synthés électroniques traduisent la sensation de vitesse et le côté futuriste de la fuite, qui est l’action principale du jeu.

– « Ratatrouille » Menu et jeu : l’inspiration vient des musiques des films de Tim Burton (Les noces funèbres, Beetlejuice, L’étrange Noël de Mr Jack…) composées par Danny Elfman. La rythmique rapide, quant à elle, souligne la course poursuite du jeu.

– « Arbre à poème » : Menu et jeu : cette musique est basée sur une orchestration classique, la flûte évoquant le printemps et la faune, les violons la sérénité de la nature, la construction de la musique allant crescendo et decrescendo rappelle l’action du personnage qui doit sauter pour rattraper ses poèmes.

– « Farambulle »: Menu : l’inspiration vient du Grand Bleu et du travail d’Eric Serra : les nappes de synthétiseurs rappellent l’univers marin ; les clochettes ajoutent un caractère enfantin au jeu, dont la cible est clairement les jeunes enfants.

Jeu : ici l’inspiration vient des musiques tropicales, on retrouve les percussions typiques, bells, shaker, tambour, steel drums qui évoquent immédiatement la musique des Caraïbes.

– « Cap sur le trésor » : Menu et jeu : pour faire une ambiance sous marine et intrigante, Monsieur F. a utilisé des sons graves et des delays. Les clochettes rappelant les joyaux qu’il va falloir récolter durant le jeu.

Dans la version longue, Monsieur F. détourne les basses très graves, très utilisées en « dub » (musique moderne tirée du reggae), pour en faire une version plus « adulte ».

– « Toudou cuistot » Menu : l’accordéon, en instrument principal, rappelle les guinguettes d’autrefois, et les vieux restaurants de Montmartre.

Jeu : Monsieur F. a utilisé, pour la rythmique, des sons d’ustensiles de cuisine puisque le jeu se déroule dans cette pièce. Il a aussi utilisé des claviers jazz dans le style de Gonzales (compositeur, pianiste moderne) pour donner de l’énergie à la musique.

– « La mine endiablée » : Menu : les sons saccadés présagent de la course rapide et périlleuse que le joueur va vivre, les voix fantomatiques, ainsi que les synthés éthérés, créent un sentiment de peur faisant écho à la caverne hantée.

Jeu : l’ajout d’une rythmique rapide renforce l’impression de vitesse.

– « Memochrono » Menu et jeu : Monsieur F. s’est inspiré des musiques de gentlemen cambrioleurs, dans un style électro (Furax est le personnage « technologique » de Prizee, Monsieur F. a d’ailleurs défini pour chaque personnage, un style de musique particulier), la gamme utilisée est chromatique (ton et demi tons) pour symboliser le compte à rebours de l’explosion à venir.

– « Picbulle » Menu et jeu : l’inspiration est la même pour le côté féminin que « Jardin secret », mais un peu plus adulte avec une guitare jouée en arpège, s’inspirant de « Jeux interdits ». Les percussions quant à elles donnent un côté bayou et « marécage », puisque Koulapic, le personnage du jeu, est une grenouille.

– “Chauffe qui peut » Menu : la musique met en avant, notamment grâce à l’accordéon et au rythme, l’ambiance « musique de marin », la sensation de roulis et le côté comique de la situation.

Jeu : Monsieur F. a repris les accordéons pour rester dans l’ambiance « marin » (le bateau coule), les clochettes rappellent quant à elles le monde de glace en train de fondre.

– « Frigomino » Menu et jeu : L’utilisation de sons brillants tels que les clochettes ou le triangle, ainsi que le synthé au son très « froid », soulignent l’action se passant dans le réfrigérateur du personnage Toudou.

– « Aqua ombra » Menu et jeu : encore une fois l’inspiration vient du Grand bleu, mais cette fois-ci avec une couleur plus sombre, symbolisée à la fois par la batterie et par la mélodie en mineur (schématiquement, une mélodie en majeur est plutôt gaie, en mineur elle est plutôt triste). La trompette renforce cet aspect.

– « Tuyo loco » Menu et jeu : les sons en arpèges ainsi que les solos de pianos symbolisent l’eau qui s’écoule rapidement, les violons viennent quant à eux symboliser le flux plus calme de l’eau.

– « Tektonik furax » : Musique initialement composée pour un « évènementiel » hebdomadaire, Monsieur F. en a composé une version longue à la demande des joueurs (et de Madame R., qui désirait adapter cette musique en sonnerie de portable). Cette musique, inspirée des productions « house » actuelles, met en avant le côté « fou fou » de Furax.

– « Prizee univers » : Le but était de composer une musique qui puisse être appréciée à la fois par les grands et les petits. Tout en ayant une dominante enfantine, Monsieur F. a choisi un instrument (le rhodes) dans les aigus, qui sonne comme une boîte à musique, tout en utilisant une gamme mineure, qui donne plus de profondeur à la mélodie et donc la rend plus adulte.

Par ailleurs, il décrit aussi des musiques qui figureraient sur le site  :

– « Marathon laveur » : Menu et jeu : l’inspiration vient de la bossa brésilienne, l’objectif étant de créer une ambiance estivale. C’est en écoutant des musiques Gilberto Gil que Monsieur F. trouvé la ligne directrice et les harmonies si particulières de la bossa nova.

– « Jardin secret » : Menu et jeu : le piano et le wurlitzer donnent une impression de calme et de sérénité, en essayant de symboliser le jardin secret et donc le côté féminin et jeune de la cible, dans l’esprit du dessin animé « Mon petit poney »

– « Taka » Menu : Monsieur F. s’est inspiré de la musique de chambre, donnant une sensation d’univers rassurant.

Jeu : l’inspiration est la même. Les pizzicatos, donnent cependant une impression supplémentaire d’urgence et d’action, propre à motiver le joueur.

– « filopat » : Menu et jeu : le basson donne un côté comique, renforçant l’identité du personnage (une araignée gaffeuse). Les pizzicatos symbolisent toutes ses pattes et le comique de ses déplacements.

Après avoir écouté les musiques figurant sur le CD “Prizee Music” (21 versions longues) et dont le demandeur caractérise pour chacune leur originalité dans ses écritures, le tribunal constate que chacune d’elle fait preuve d’un travail de création. Même si comme le revendique Monsieur F., chaque morceau contient des inspirations, ils contiennent tous une mélodie, une harmonie et un rythme et traduisent un univers musical propre, expression de la personnalité de l’auteur.

Le fait que ces musiques aient été réalisées à partir de techniques informatiques ne peut empêcher leur protection par le droit d’auteur dès lors qu’il ne s’agit pas d’un simple travail technique mais d’un travail de création. Par ailleurs, la société Prizee.com n’apporte pas la preuve que les compositions musicales dont la protection est sollicitée ont été recopiées au sein de banques de sons, qu’elle s’abstient de verser au débat.

En revanche, les autres œuvres décrites dans les écritures (“marathon laveur, “jardin secret”, “taka” et “filopat”) qui seraient diffusées sur le site ne sont pas versées au débat, si bien que le tribunal ne peut se livrer à une appréciation de leur originalité. De même, pour les autres compositions indiquées dans le tableau récapitulatif (pièce 9) que le demandeur n’identifie pas, ne décrit pas, et n’indique pas en quoi elles sont protégeables au titre du droit d’auteur, le tribunal n’est pas en mesure d’apprécier leur protection.

En conséquence, il convient de déclarer Monsieur F. recevable à agir pour les œuvres musicales suivantes : « Defi de diabolo », « Toudou aviateur », « Tout feu tout flamme », « Fast and furax », « Ratatrouille », « Arbre à poème », « Farambulle », « Cap sur le trésor», « Toudou cuistot », « La mine endiablée », « Memochrono », « Picbulle », « Chauffe qui peut », « Frigomino », « Aqua ombra », « Tuyo loco », « Tektonik furax » et « Prizee univers » et le déclarer irrecevable pour le surplus des œuvres dont il demande la protection.

Sur la contrefaçon

Concernant la société Prizee.com

Aux termes de l’article L.122-4 du code de la propriété intellectuelle, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite, et il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque.

La société Prizee.com ne conteste pas avoir représenté et reproduit, sans le consentement de Monsieur F., les œuvres musicales, que ce soit sur le site internet dont elle est titulaire, à l’occasion de conférences de presse, dans le restaurant qu’elle exploite et par l’exploitation des titres figurant sur la compilation Prizee Music.

Le tribunal relève en effet qu’aucune pièce ne justifie d’une cession des droits de Monsieur F. sur l’exploitation de ses œuvres alors que dans le cadre d’un œuvre de collaboration, cette cession est impérative.

Dès lors, la société Prizee.com a commis des actes de contrefaçon au préjudice de Monsieur F.

Concernant la société Believe

Au soutien de ses demandes de condamnation, Monsieur F. n’incrimine que la diffusion par la société Believe des œuvres de la compilation Prizee Music sur le réseau internet, incluant les services de téléchargement.

Il ressort ainsi du constat d’huissier que le disque “prizee.music” est distribué sous le label Prizee/Digital Believe Digital qui constitue un des noms commerciaux de la société Believe, au vu de son extrait Kbis, qui se présente d’ailleurs sur son site français comme le premier distributeur numérique d’artistes et de labels indépendants en Europe, sur les principaux sites de téléchargement en raison d’accords directs avec les distributeurs et sa distribution s’appuyant sur ses “bureaux internationaux”, notamment au Royaume-Uni pour la promotion.

Contrairement à ce que soutient la société Believe, aucun lien n’est établi entre cette société et la société Believe Direct Ltd dont seule la responsabilité devrait être engagée d’après le distributeur français.

Au soutien de sa mise hors de cause, la société Believe verse au débat le certificat de la marque zimbalam appartenant à la société de droit anglais Believe Ltd et qui figure sur la pièce portant sur les “royalties”, une pièce qu’elle intitule “formulaire d’inscription de la société Prizee.com aux services de la société Believe Ltd Direct”. Cependant, aucun élément extrinsèque ne permet d’établir la force probante de cette pièce qui n’est ni datée, ni signée et ne contient aucune indication manuscrite.

En conséquence, la demande de mise hors de cause de la société Believe sera rejetée.

En vertu de l’article L 335-3 du code de la propriété intellectuelle, la contrefaçon est constituée par la diffusion de l’œuvre sur des plateformes musicales, sans l’autorisation de l’auteur. Dès lors que la société Believe, professionnelle de la distribution, a distribué les œuvres musicales, ce qui constitue un acte de commercialisation, elle s’est rendue coupable de contrefaçon. En sa qualité de professionnelle, il lui appartenait de vérifier que la société Prizee.com était bien titulaire des droits d’auteur sur les œuvres en cause. L’argument de la société Believe tendant à contester sa responsabilité du fait qu’elle n’est pas titulaire de droits d’auteur sur les œuvres musicales mais de droits voisins est inopérant, dès lors que sa participation à la commercialisation illicite est établie.

Sur les mesures réparatrices

En vertu de l’article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle, pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération les conséquences économiques négatives, dont le manque à gagner, subies par la partie lésée, les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits et le préjudice moral causé au titulaire de ces droits du fait de l’atteinte.

Monsieur F. sollicite la réparation au titre de ses droits patrimoniaux d’auteur d’un préjudice matériel et moral.

Le préjudice patrimonial de l’auteur est constitué par le fait qu’en l’absence de cession de droit, il n’a pu bénéficier d’une rémunération au titre de l’exploitation de ses œuvres musicales pour une durée et une aire géographique déterminées. Monsieur F. a donc subi un manque à gagner et son préjudice moral est lié au fait qu’il n’a pas cédé ses œuvres à son ancien employeur et que celles-ci ont été diffusées sur le site internet Prizee.com dans les jeux, dans le CD, dans le restaurant exploité par cette société et à l’occasion d’une conférence de presse et commercialisées en ligne sans son autorisation.

S’agissant du bénéfice réalisé par la société Prizee.com, celle-ci verse au débat une “enquête” en s’abstenant de justifier sur quel panel elle a été réalisée, au terme de laquelle 60,1% des personnes interrogées indiquent ne pas écouter les musiques et bruitages en jouant. Cette enquête établit par ailleurs que seules 2,4 % des personnes interrogées sont insatisfaits des sons et de la musique.

La société Prizee.com produit une attestation du nouveau responsable du “game studio” qui indique qu’il a dû “reprendre toutes les musiques de tous les jeux du fait de la taille anormale et inefficace des fichiers” et encore une évolution de son chiffre d’affaires qui établirait que le travail de Monsieur F. n’a pas favorisé son développement, celui-ci ayant chuté de 28 % pendant son activité au sein de la société. Cependant, force est de constater que la taille des fichiers n’a pas empêché la société Prizee.com de les exploiter sur son site et qu’elle ne caractérise aucun lien entre le travail de Monsieur F. et l’arrêt de son développement. Au contraire, il ressort de l’enquête que la musique accompagnant les jeux était appréciée des internautes.

Il résulte des pièces versées au débat qu’en, 2008, cette société était le 1er site européen de jeux à cadeaux et comptait 21 millions d’utilisateurs.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, et alors que les compositions musicales de Monsieur F. ont indiscutablement contribué à l’image de la société Prizee.com et en tout état de cause ont créé son identité sonore, le préjudice de Monsieur F. au titre de ses droits patrimoniaux d’auteur sera évalué à 50 000 €, sans qu’il soit besoin de faire droit au droit d’information sollicité à l’encontre de cette société, le tribunal ayant suffisamment d’éléments pour fixer le préjudice.

La société Believe justifie avoir versé à la société Prizee.com la somme de 10,56 € au titre de “royalties”, portant sur 90 % du montant des ventes des musiques sur les sites et pour les mois d’avril 2010 à juin 2010. Elle sera donc condamnée à payer à Monsieur F. cette somme. Il sera fait droit à la demande au titre du droit d’information, la société Believe s’étant abstenue de verser des pièces portant sur la période postérieure.

Il sera fait droit afin de faire cesser l’atteinte liée à la contrefaçon aux mesures d’interdiction dans les termes du dispositif, les faits de l’espèce ne justifiant le prononcé d’une astreinte. Au vu de la nature du présent litige, portant un contentieux entre un employeur et son ancien salarié, la demande de publication judiciaire sera rejetée.

Sur la demande de garantie formée par la société Believe à l’encontre de la société Prizee.com

La société Prizee.com conteste la demande en garantie au motif que la société Believe devait s’assurer de l’existence de ses propres droits d’auteurs. Cependant, il est constant que la société Prizee.com qui a demandé à la société Believe de distribuer des œuvres sur lesquelles elle n’était pas titulaire de droits doit la garantir, sur le fondement de la garantie d‘éviction, à hauteur de toutes les condamnations prononcées à son encontre dans le présent jugement, à l’exception le cas échéant de l’astreinte.

Sur la demande de Monsieur F. tendant à l’autoriser à reproduire, représenter et communiquer au public, notamment via son site internet, les vidéos ou extraits de vidéos présentant les jeux Prizee dont il a composé la musique, et/ou tout lien hypertexte renvoyant vers ces vidéos

S’il est constant que Monsieur F. peut reproduire, représenter et communiquer au public la musique sur laquelle il est titulaire de droits d’auteur, l’autorisation qu’il sollicite ne peut lui être accordée dès lors qu’il ne bénéficie pas de droits d’auteur sur les autres composants des jeux vidéos et notamment les éléments graphiques. Cette demande sera donc rejetée.

Sur la demande pour procédure abusive

La société Believe estime que le montant des demandes pécuniaires à son encontre est exorbitant, le demandeur n’ayant pas distingué les actes qui ne lui sont pas imputables résultant de l’exploitation des jeux vidéo en ligne, ce qui lui cause un préjudice particulièrement grave puisqu’elle a dû provisionner cette somme au moment de la clôture de ses comptes.

Cependant, elle ne rapporte pas la preuve d’une quelconque intention de nuire ou légèreté blâmable de la part de Monsieur F., qui a pu légitimement se méprendre sur l’étendue de ses droits et en particulier de son indemnisation.

Faute de démontrer une faute du demandeur, la société Believe sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les autres demandes

Parties perdantes, les sociétés Prizee.com et Believe seront condamnées in solidum aux dépens et à payer à Monsieur F. pour indemniser les frais que celui-ci a dû engager pour faire valoir ses droits dans les mêmes conditions la somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Les circonstances de l’espèce ne justifient pas d’ordonner l’exécution provisoire à l’exception de la mesure portant sur le droit d’information et de la condamnation au titre des frais irrépétibles.

DECISION

Le tribunal, par jugement rendu publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

. Déclare Monsieur F. recevable à agir en contrefaçon pour les œuvres musicales « Defi de diabolo », « Toudou aviateur », « Tout feu tout flamme », « Fast and furax », « Ratatrouille », « Arbre à poème », « Farambulle », « Cap sur le trésor», « Toudou cuistot », « La mine endiablée », « Memochrono », « Picbulle », « Chauffe qui peut », « Frigomino », « Aqua ombra », « Tuyo loco », « Tektonik furax » et « Prizee univers »,

. Le déclare irrecevable à agir pour les autres compositions musicales dont il demande la protection,

. Rejette la demande de mise hors de cause de la société Believe,

. Dit que la société Prizee.com a commis des actes de contrefaçon de droit d’auteur au préjudice de Monsieur F.,

. Dit que la société Believe a commis des actes de contrefaçon de droit d’auteur au préjudice de Monsieur F.,

En conséquence,

. Condamne la société Prizee.com à payer à Monsieur F. la somme de 50 000 € en réparation de son préjudice fondé sur ses droits patrimoniaux d’auteur,

. Condamne la société Believe à payer à Monsieur F. la somme de 10,56 € portant sur le préjudice de Monsieur F. du mois d’avril 2010 au mois de juin 2010 inclus,

. Ordonne à la société Believe de communiquer à Monsieur F. la liste des sites internet commercialisant les musiques sur lesquelles Monsieur F. est titulaire de droit d’auteur, sous quelque forme que ce soit (vente, téléchargement, sous forme de compilation ou individuellement) ainsi que le nombre exact de téléchargements effectués de ces musiques et ce, à compter du mois de juillet 2010 jusqu’au jour du prononcé du présent jugement,

. Dit que cette communication devra intervenir dans le mois suivant le prononcé de ce jugement et à défaut sous astreinte de 150 € par jour de retard, ladite astreinte courant pendant un délai de 3 mois,

. Se réserve la liquidation de ladite astreinte,

. Dit qu’il appartiendra à Monsieur F. de saisir à nouveau le tribunal si un accord n’est pas trouvé avec la société Believe pour l’indemnisation de son préjudice portant sur la période postérieure au mois de juin 2010,

. Interdit l’exploitation par la société Prizee.com et par la société Believe des compositions musicales « Defi de diabolo », « Toudou aviateur », « Tout feu tout flamme », « Fast and furax », « Ratatrouille », « Arbre à poème », « Farambulle », « Cap sur le trésor», « Toudou cuistot », « La mine endiablée », « Memochrono », « Picbulle », « Chauffe qui peut », « Frigomino », « Aqua ombra », « Tuyo loco », « Tektonik furax » et « Prizee univers » passé un délai de trois mois à compter de la signification du présent jugement,

. Déboute Monsieur F. de ses autres demandes,

. Dit que la société Prizee.com devra garantir la société Believe de l’ensemble des condamnations prononcées à son encontre dans le présent jugement, à l’exception de l’astreinte au titre du droit d’information,

. Déboute la société Believe de sa demande reconventionnelle,

. Condamne in solidum les sociétés Prizee.com et Believe aux dépens qui seront recouvrés par Maître Antoine Cheron, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

. Condamne in solidum la société les sociétés Prizee.com et Believe à payer à Monsieur F. la somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

. Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision en ce qui concerne uniquement le droit d’information et les frais irrépétibles.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal de grande instance de Paris, 3e section, 30 septembre 2011