Tribunal de grande instance de Paris, Référés, 21 novembre 2017, n° 17/59485

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, réf., 21 nov. 2017, n° 17/59485
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 17/59485

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

N° RG :

17/59485

BF/N° : 1

Assignation du :

28 Septembre 2017

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

rendue le 21 novembre 2017

par E-F G, Vice Présidente au Tribunal de Grande Instance de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de C D, Greffier.

DEMANDERESSE

S.A.S LAFUMA MOBILIER

[…]

[…]

représentée par Maître Emmanuel BOUTTIER de la SCP DEPREZ, GUIGNOT & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS – #P0221

DÉFENDERESSES

Société ALIBABA (France)

[…]

[…]

représentée par Maître Alexandra NERI du PARTNERSHIPS HERBERT SMITH FREEHILLS PARIS LLP, avocats au barreau de PARIS – #J0025

Société ALIBABA GROUP HOLDING LTD

[…]

[…]

représentée par Maître Alexandra NERI du PARTNERSHIPS HERBERT SMITH FREEHILLS PARIS LLP, avocats au barreau de PARIS – #J0025

Société ALIBABA .COM HONG KONG LIMITED

[…]

HONG KONG

représentée par Maître Alexandra NERI du PARTNERSHIPS HERBERT SMITH FREEHILLS PARIS LLP, avocats au barreau de PARIS – #J0025

Société ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED

C/[…]

Bay – HONG KONG

représentée par Maître Alexandra NERI du PARTNERSHIPS HERBERT SMITH FREEHILLS PARIS LLP, avocats au barreau de PARIS – #J0025

INTERVENANTE VOLONTAIRE

Société ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED

[…]

[…]

représentée par Maître Alexandra NERI du PARTNERSHIPS HERBERT SMITH FREEHILLS PARIS LLP, avocats au barreau de PARIS – #J0025

DÉBATS

A l’audience du 06 Novembre 2017, tenue publiquement, présidée par Marie-Christine COURBOULAY, Vice Présidente, assistée de Olivier ALIDAL, Greffier,

FAITS ET PROCÉDURE

Les parties :

La demanderesse :

Le GROUPE LAFUMA commercialise quatre types de produits : textile, équipements (sac à dos, sac de couchage, etc.), chaussure et mobilier.

La société LAFUMA MOBILIER S.A.S est la filiale de la société LAFUMA SA qui a pour activité la création, la fabrication et la commercialisation de meubles, qui sont le fruit d’un savoir faire français.

Parmi sa large gamme de produits, la société LAFUMA MOBILIER fabrique et commercialise notamment le fauteuil « RELAX » sous la marque « LAFUMA ».

Dans le cadre de son activité, la société LAFUMA MOBILIER est ainsi autorisée en vertu d’un contrat de licence inscrit au Registre National des Marques à l’INPI à agir en protection des marques suivantes dont la société LAFUMA SA est titulaire :

— la marque française semi-figurative LAFUMA numéro 3581711 déposée le 12 juin 2008 et enregistrée pour désigner des produits et services des classes 18, 20, 22, 25 et 28;

— la marque européenne semi-figurative LAFUMA numéro 7187339 déposée le 26 août 2008 et enregistrée pour désigner des produits et services des classes 18, 20, 22, 25 et 28 ;

— la marque verbale française « LAFUMA » numéro 1642621 déposée le 31 janvier 1991 enregistrée pour désigner des produits et services des classes 9, 18, 20, 22, 25 et 28 ;

— la marque européenne « LAFUMA » numéro 6800734, déposée le 25 mars 2008 et enregistrée pour désigner des produits et services des classes 18, 20, 22, 25 et 28

Les défenderesses :

L’entreprise ALIBABA a été fondée en 1999 et exerce des activités variées tels que la fourniture de services cloud, les technologies numériques dans les nouveaux médias, ou encore l’exploitation de plate-formes de commerce électronique.

Elle exploite plus particulièrement la plate-forme B2B ALIBABA.com, dont la version en langue française est accessible à l’adresse french.ALIBABA.com.

Elle dit tirer ses revenus des abonnements « Premium » (Gold Supplier Membership) facturés à certaines grandes entreprises internationales, donnant accès à des fonctionnalités « à valeur ajoutée » telle que la mise en avant des offres ou l’accès à une boutique personnalisée. La deuxième source de revenus provient de l’hébergement d’annonces promotionnelles. À cet égard, il convient de souligner qu’elle ne tire aucun revenu de type « commission » sur les transactions commerciales réalisées par les utilisateurs au moyen de la plate-forme.

Il est prétendu que :

*la société responsable contractuellement vis-à-vis des utilisateurs enregistrés ou résidant hors de Chine, HONG KONG ou Macao, en ce compris le public européen est la société ALIBABA.com Singapore e-commerce Private Limited, et ce selon les conditions d’utilisation du site. Cette entité serait responsable du déroulement et de la gestion des ventes sur le site et c’est avec cette société que les utilisateurs français contractent.

*la société ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED est chargée de l’administration (notamment technique et opérationnelle) des sites ALIBABA, y compris à travers les versions destinées au public européen, telles que celle accessible à l’adresse french.ALIBABA.com.

*la société ALIBABA FRANCE a pour activité le "conseil pour les affaires et autres conseils de gestion" et exerce essentiellement des activités de recherche de partenariats, notamment avec des sociétés de luxe françaises, pour les autres sociétés du groupe ALIBABA. Ses seuls clients sont les autres sociétés du groupe ALIBABA. Elle n’a aucune activité opérationnelle ni implication dans l’exploitation du site french.ALIBABA.com.

*la société ALIBABA GROUP HOLDING LIMITED exerce une simple activité de holding et n’est dès lors aucunement impliquée dans l’exploitation du site.

*la société ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED est en charge de la gestion des relations avec l’administration américaine et notamment la SEC (US Securities and Exchange Commission). Elle n’a aucune activité commerciale et opérationnelle et est ainsi complètement étrangère à l’exploitation du site.

La plate-forme ALIBABA.com offre un service d’intermédiation permettant aux acheteurs professionnels d’entrer en contact avec des vendeurs professionnels afin de négocier et, le cas échéant, d’acheter certains lots de produits proposés à la vente. Elle dit avoir mis en place une politique de défense des droits de propriété intellectuelle.

Le litige :

La société LAFUMA MOBILIER a fait constater, par acte d’huissier de justice du 20 juin 2017, la présence sur le site french.ALIBABA.com/g/lafuma.html, de marques « LAFUMA » reproduites pour vendre des copies des fauteuils commercialisés par la société LAFUMA MOBILIER, mais également le fait que le site en cause ne comportait aucune mention légale obligatoire relative aux coordonnées de l’éditeur.

Le 5 juillet 2017, la société LAFUMA MOBILIER a alors procédé à une série de notifications via le site internet ALIBABA à l’encontre des annonces litigieuses, notifications qui ont donné lieu à des réponses sans lien avec cette dernière.

Le 7 juillet 2017, elle a fait constater par acte d’huissier de justice que les actes de contrefaçon perduraient sur le site internet french.ALIBABA.com/g/lafuma.html.

Le 17 juillet 2017, la société LAFUMA MOBILIER a mis en demeure la société ALIBABA FRANCE de suspendre l’accès à 117 annonces reproduisant des marques françaises et européennes “LAFUMA” accessibles sur le site french.ALIBABA.fr.

Une liste imprimée des offres litigieuses était jointe à la lettre.

La société ALIBABA FRANCE, qui dit ne pas intervenir dans l’exploitation du site french.ALIBABA.fr, a transmis la lettre de mise en demeure aux services concernés.

Faisant suite à la lettre de mise en demeure, un email a été adressé aux conseils de la société LAFUMA MOBILIER le 30 août 2017 afin de demander la liste des offres litigieuses en version électronique afin de permettre aux équipes techniques de les retirer plus rapidement, et d’inviter la société LAFUMA MOBILIER et ses conseils à soumettre des notifications par le biais de sa plate-forme IPP pour l’avenir.

La société LAFUMA MOBILIER n’a pas répondu à cet email.

Le 26 septembre 2017, la société ALIBABA laquelle confirmait par email aux conseils de la société LAFUMA MOBILIER que les offres litigieuses n’étaient plus disponibles en ligne.

C’est dans ces conditions que, le 28 septembre 2017, la société LAFUMA MOBILIER a fait assigner en référé les sociétés ALIBABA FRANCE, ALIBABA HOLDING, ALIBABA GROUP et ALIBABA HONG KONG devant le tribunal de grande instance de Paris afin qu’il soit enjoint à la société ALIBABA (France) de cesser tout usage du signe “LAFUMA” à titre de marque, de nom de domaine, d’enseigne, de mots clefs, sur quelque support que ce soit sous sous astreinte de 50.000 euros par jour de retard , de communiquer les coordonnées des annonces litigieuses et la suppression des ces annonces litigieuses, de faire figurer les mentions légales sur son site internet sous astreinte de 50.000 euros par jour de retard et de la condamner à lui payer la somme de 200.000 euros en réparation du préjudice matériel subi des actes de contrefaçon des marques Lafuma, la somme de 100.000 euros en réparation du préjudice matériel subi des actes de concurrence déloyale et parasitaire, la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Dans ses conclusions reprises oralement à l’audience, la société LAFUMA MOBILIER a demandé au juge des référés de :

Vu les articles L.713-2, L.713-3 et L.716-6 du code de la propriété intellectuelle,

Vu les articles 808 et 809 du code de procédure civile,

Vu la Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004,

Vu les articles L. 121-1 et suivants du code de la consommation,

1)

— DÉCLARER l’ensemble des demandes de la société LAFUMA MOBILIER recevables ;

— DIRE ET JUGER y avoir lieu à référé sur le fondement de l’article L. 716-6 du code de propriété intellectuelle ;

2)

— ENJOINDRE aux sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LTD, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED de cesser tout usage du signe « LAFUMA » à titre de marque, de nom de domaine, d’enseigne, de mot clefs, sur quelque support que ce soit, notamment promotionnel, moteur de recherche, ou à toutes autres fins, sur quelque support que ce soit, sous astreinte de 50.000 € par jour de retard à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir, sauf accord préalable et exprès de la société LAFUMA MOBILIER ;

— ENJOINDRE aux sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LTD, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED, de mettre en œuvre toutes mesures appropriées de blocage de parution d’annonces, sur le site ALIBABA.com, portant atteinte aux droit de propriété intellectuelle de la société LAFUMA MOBILIER, et en particulier portant la mention « LAFUMA » protégée par les marques n°3581711, 7187339, 1642621 et 6800734, sous astreinte de 50.000 € par jour de retard à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir, sauf accord préalable et exprès de la société LAFUMA MOBILIER ;

— CONDAMNER in solidum aux sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LTD, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED à payer à la société LAFUMA MOBILIER la somme provisionnelle de 200.000 €, à valoir sur ses dommages-intérêts dus en réparation du préjudice matériel subi des actes de contrefaçon des marques n°3581711, 7187339, 1642621 et 6800734;

3)

— DIRE ET JUGER y avoir lieu à référé sur le fondement des articles 809 et 808 du code de procédure civile ;

— ORDONNER aux sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LTD, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED de faire figurer ses mentions légales sur leur site internet, sous astreinte de 50.000 € par jour de retard à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir, sauf accord préalable et exprès de la société LAFUMA MOBILIER ;

— CONDAMNER in solidum aux sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LTD, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED) à payer à la société LAFUMA MOBILIER la somme provisionnelle de 100.000 €, à valoir sur ses dommages-intérêts dus en réparation du préjudice matériel subi des actes de concurrence déloyale et parasitaire ;

4)

— LE CAS ÉCHÉANT, A TITRE SUBSIDIAIRE CONDAMNER in solidum aux sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LTD, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED à payer à la société LAFUMA MOBILIER la somme provisionnelle de 100.000 €, à valoir sur ses dommages-intérêts dus en réparation du préjudice matériel subi des actes de concurrence déloyale et parasitaire.

Et ENJOINDRE in solidum aux sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LTD, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED de cesser tout usage du signe « LAFUMA » à titre de marque, de nom de domaine, d’enseigne, de mot clefs, sur quelque support que ce soit, notamment promotionnel, moteur de recherche, ou à toutes autres fins, sur quelque support que ce soit, sous astreinte de 50.000 € par jour de retard à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir, sauf accord préalable et exprès de la société LAFUMA MOBILIER; ET ENJOINDRE aux sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LTD, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED, de mettre en œuvre toutes mesures appropriées de blocage de parution d’annonces, sur le site ALIBABA.com, portant atteinte aux droit de propriété intellectuelle de la société LAFUMA MOBILIER, et en particulier portant la mention « LAFUMA » protégée par les marques n°3581711, 7187339, 1642621 et 6800734, sous astreinte de 50.000 € par jour de retard à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir, sauf accord préalable et exprès de la société LAFUMA MOBILIER

5)

— CONDAMNER in solidum aux sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LTD, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED à payer à la société LAFUMA MOBILIER la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— CONDAMNER in solidum aux sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LTD, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED aux entiers dépens conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

— ORDONNER l’exécution de la décision dès son prononcé, sur minute, en application de l’article 489 du code de procédure civile.

Dans leurs conclusions en réponse également exposées oralement à l’audience, les sociétés défenderesses demandent de :

- DIRE ET JUGER n’y avoir lieu à référé, que ce soit sur le fondement de l’article L. 716-6 du code de propriété intellectuelle ou sur le fondement de l’article 809 du code de procédure civile ;

- PRONONCER la mise hors de cause des sociétés ALIBABA (France), ALIBABA Z-B, ALIBABA GROUP HOLDING LIMITED et ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, dès lors que celles-ci ne sont pas responsables de l’exploitation du site french.ALIBABA.com ;

- RECEVOIR la société ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED en son intervention volontaire ;

- DÉBOUTER la société LAFUMA MOBILIER S.A.S. de toutes ses demandes fins et conclusions ;

- CONDAMNER la société LAFUMA MOBILIER S.A.S aux dépens, ainsi qu’au paiement d’une indemnité 10.000 euros à la société ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED et 2.000 euros à chacune des sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LIMITED, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED ET ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la mise hors de cause de la société ALIBABA FRANCE :

La société ALIBABA FRANCE demande au juge des référés de la mettre hors de cause car elle n’a aucun rôle dans l’édition du site puisqu’elle n’a qu’un rôle de développement marketing de la marque. Elle précise que les mentions légales ont été ajoutées au site french.ALIBABA.com fin octobre 2017 et que c’est la société ALIBABA SINGAPOUR qui est contractuellement l’éditeur du site.

La société ALIBABA GROUP, la société ALIBABA.COM HONG KONG, la société ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED également immatriculée à HONG KONG sollicitent également leur mise hors de cause au motif qu’elles ne sont pas éditrices du site.

La société LAFUMA MOBILIER répond qu’au jour de l’assignation, faute de mentions légales du site, et devant l’opacité du Groupe ALIBABA, elle a été contrainte d’assigner les sociétés susceptibles d’être responsables des produits offerts en vente sur ce site de sorte qu’elle avait intérêt à agir à l’encontre de toutes les sociétés attraites dans la cause.

Sur ce

La « mise hors de cause » ne correspond en soi juridiquement ni à une prétention ni à un moyen de défense. Tendant à contester la qualité du défendeur à l’action, le moyen opposé par la société ALIBABA FRANCE s’analyse en application de l’article 12 du code de procédure civile en une fin de non-recevoir.

A ce titre, en vertu des articles 31 et 32 du code de procédure civile, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé, toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir étant irrecevable.

Et, conformément à l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Force est de constater que le site french.ALIBABA.com ne comportait pas au jour de l’assignation de mentions légales et que les réponses apportées aux notifications faites par la société LAFUMA MOBILIER par mail ou à sa mise en demeure ne lui permettaient aucunement de connaître l’éditeur du site internet french.ALIBABA.com de sorte que la société LAFUMA MOBILIER avait intérêt à agir à l’encontre des entités connues du groupe ALIBABA afin de déterminer qui était l’éditeur du site litigieux et pouvait être tenu pour responsable des agissements reprochés.

Il ressort de l’extrait kbis versé au débat en pièce 6-1 par la société LAFUMA MOBILIER que la société ALIBABA FRANCE n’a pas un simple rôle de développement marketing de la marque ALIBABA mais a également comme mission de développer des plate-formes d’e-commerce et des services associés par ALIBABA ainsi que la fourniture de services clients en lien avec les activit2s susvisées ainsi que tous autres services et activités s’y rapportant.

Au vu de ce libellé et de l’absence de mentions légales au sein du site french.ALIBABA.com, la société LAFUMA MOBILIER a valablement assigné la société ALIBABA FRANCE.

Enfin, la modification du site intervenue fin octobre 2017 peu de temps avant l’audience et après l’assignation ne peut avoir pour effet de priver la société LAFUMA MOBILIER de son intérêt à agir contre la société ALIBABA FRANCE, intérêt qu’elle avait au jour de l’assignation.

En conséquence, la fin de non recevoir soulevée par la société ALIBABA FRANCE sera rejetée.

S’agissant des autres sociétés, il convient de constater que le whois inclus au procès-verbal de constat de l’huissier du 7 juillet 2017 indique qu’une société Hangzou ALIBABA Advertising .co serait titulaire du nom de domaine ALIBABA.com.

Que cette société n’est pas dans la cause et n’intervient pas volontairement.

Les sociétés ALIBABA ne versent aucun élément au débat pour établir ce que serait leur rôle exact au sein du groupe et quelle activité elles exercent, et pas même un extrait du registre des sociétés.

Or, la société ALIBABA HOLDING pourrait tout à fait être titulaire du nom de domaine, les titres de propriété intellectuelle étant en général logés au sein des holdings ; la société ALIBABA.COM HONG KONG admet être chargée de l’administration (notamment technique et opérationnelle) des sites ALIBABA, y compris à travers les versions destinées au public européen, telles que celle accessible à l’adresse french.ALIBABA.com.

La société ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED prétend être en charge de la gestion des relations avec l’administration américaine et notamment la SEC (US Securities and Exchange Commission) sans rapporter la preuve de sa création dans le seul but des échanges avec la SEC.

En conséquence, faute de démontrer réellement qu’elles sont sans lien avec la gestion du site et en l’absence de mentions légales au sein du site au jour de l’assignation, les sociétés ALIBABA HOLDING, ALIBABA.COM HONG KONG, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED seront déboutées de leur fin de non recevoir à l’encontre des demandes de la société LAFUMA MOBILIER .

Sur l’intervention volontaire de la société ALIBABA SINGAPOUR :

La société ALIBABA SINGAPOUR fait valoir qu’elle est l’éditeur du site et que les mentons légales ont été ajoutées au site french.ALIBABA.com fin octobre 2017 de sorte que son intervention est recevable.

La société LAFUMA MOBILIER répond que rien ne vient au soutien du fait que la société ALIBABA SINGAPOUR est bien l’éditeur du site au vu de la structure du site et de son chiffre d’affaires.

Sur ce

La société ALIBABA SINGAPOUR prétend être responsable contractuellement vis-à-vis des utilisateurs enregistrés ou résidant hors de Chine, HONG KONG ou Macao, en ce compris le public européen ce qui n’est pas définition d’un éditeur car la société ALIBABA SINGAPOUR n’entretient aucune relation contractuelle avec les tiers ; l’éditeur est la personne qui est responsable à l’égard des tiers du fait du contenu publié sur un site et il s’agit d’une responsabilité délictuelle.

Cependant, le site a été modifié fin octobre 2017 pour faire apparaître les mentions légales de façon certes peu claire car elles sont situées à la fin de la très longue liste des conditions d’utilisation et non sous un onglet dédié à ces mentions. Il y est indiqué que la société ALIBABA SINGAPOUR est l’éditeur du site de sorte que son intervention volontaire sera déclarée recevable.

Sur la nature d’hébergeur de la société ALIBABA SINGAPORE ou des autres sociétés ALIBABA :

Les sociétés ALIBABA font valoir que le site litigieux est un site B to B, destiné aux seuls professionnels et qui met en relation des acheteurs de lots auprès de commerçants chinois proposant les produits recherchés ; qu’elle ne sont pas responsables du contenu, qu’elles ne perçoivent aucune commission sur les transactions qui ont lieu à travers le site mais qu’elles sont rémunérées par les publicités qui apparaissent sur le site.

Elles ajoutent que des revenus proviennent également des abonnements « Premium » (Gold Supplier Membership) facturés à certaines grandes entreprises internationales, donnant accès à des fonctionnalités « à valeur ajoutée » telle que la mise en avant des offres ou l’accès à une boutique personnalisée.

La société LAFUMA MOBILIER conteste le caractère d’hébergeur des sociétés ALIBABA car elles interviennent sur les annonces proposées sur le site et ont donc un rôle actif dans ce site comme l’a jugé la cour d’appel de paris dans le dossier Ebay ; elles indiquent qu’en tout état de cause, il n’y a eu aucun prompt retrait.

Sur ce

L’article 6-1-2° définit les hébergeurs comme étant des personnes qui “mettent à la disposition du public par les services de communication au public en ligne, le stockage de signaux d’écrits, d’images, de son ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services”.

Les éditeurs sont définis comme étant “la personne qui détermine les contenus qui doivent être mises à la disposition du public sur le service qu’il a créé ou dont il a la charge.”

L’article 6-3-1° de la LCEN vise le cas de personnes éditeurs à titre professionnels et non professionnels.

Il ressort des pièces versées au débat et des explications données par les parties que le site ALIBABA est bien un site B to B qui permet à des professionnels vendeurs et acheteurs croiser leur demande de lots de produits avec l’offre des mêmes produits par les fournisseurs.

Mais il apparaît des dires mêmes des sociétés ALIBABA qu’elles offrent des abonnements « Premium » (Gold Supplier Membership) facturés à certaines grandes entreprises internationales, donnant accès à des fonctionnalités « à valeur ajoutée » telle que la mise en avant des offres ou l’accès à une boutique personnalisée. Ces revenus dits premium constituent 27% du chiffre d’affaires global du groupe ALIBABA de sorte que les sociétés ALIBABA sont rémunérées dans cette proportion par les ventes qui interviennent sur la plate-forme.

Ce faisant, les sociétés ALIBABA ont un rôle actif dans le contenu du site de nature à lui conférer une connaissance et un contrôle des données publiées sur son site ; en effet elles mettent en avant certaines entreprises qui lui rapportent des revenus plus substantiels que d’autres en leur offrant des services particuliers qu’elles appellent “à valeur ajoutée”. Elles ne se contentent donc pas de fournir un accès à une plate-forme de vente mais elles hiérarchisent les offres proposées en fonction de leurs propre intérêt et non de celui des professionnels négociant à travers le site ALIBABA. Elles ne se limitent donc pas à une fourniture neutre du service offert par la plate-forme.

Elles permettent également à certaines entreprises d’être plus visibles et d’ouvrir une boutique sur le site ce qui là encore démontre un rôle actif qui a une influence sur le contenu mis en ligne.

Choisissant les professionnels auxquels elles permettent d’ouvrir une boutique, et s’agissant d’une activité de e-commerce, les sociétés ALIBABA influencent ainsi le contenu de ces boutiques virtuelles et de ce fait accèdent au statut d’éditeur.

Elles offrent encore des facilités de paiement afin de promouvoir en France les produits offerts par les commerçants chinois abonnés à leur site et mettent à leur disposition des entrepôts en France.

Elles indiquent également qu’elles ont mis en place une politique de protection des droits de propriété intellectuelle ce qui est certes compatible avec le statut d’un hébergeur mais qu’elles se réservent le droit de retirer d’office des produits contrevenant ce qui implique qu’elles exercent de fait un contrôle a priori sur le contenu des offres transitant sur leur site.

Il apparaît ainsi que les professionnels qui doivent s’abonner pour travailler à travers le site ALIBABA constituent le réseau commercial des sociétés ALIBABA qui a donné à son site une apparence de site d’hébergement et que les sociétés ALIBABA sont bien les maîtres d’oeuvre du site french.ALIBABA.com et du contenu qui y est offert.

Elles ont donc la qualité d’éditeur et l’obligation de surveiller a priori la licéïté de toutes les informations diffusées sur l’intégralité du site.

Sur les actes de contrefaçon :

La société LAFUMA MOBILIER prétend que les sociétés ALIBABA reproduisent ses marques françaises et européennes verbales et semi-figuratives au sein du site french.ALIBABA.com pour vendre des fauteuils et chaises de jardin ou camping, produits visés au dépôt des marques. Elle sollicite une mesure d’interdiction et des indemnités réparatrices des préjudices subis.

Les sociétés ALIBABA répondent qu’aucun acte de contrefaçon n’est démontré car aucun achat n’a été effectué par l’huissier pour la bonne raison que ce site n’est ouvert qu’aux professionnels, qu’elles n’ont pas à contrôler a priori le caractère contrefaisant ou pas des objets offerts en vente et qu’elles permettent aux titulaires de droit de remplir une fiche en ligne ouvrant la possibilité de faire retirer promptement les objets protégés par des droits de propriété intellectuelle.

Elles versent au débat un procès-verbal de constat du 3 novembre montrant que le retrait des offres litigieuses listées par la société LAFUMA et jointes à sa mise en demeure du 17 juillet 2017, a été effectué.

Sur ce

L’article L 716-6 du code de la propriété intellectuelle dispose : “Toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l’encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d’actes argués de contrefaçon…

Saisie en référé ou sur requête, la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu’il est porté atteinte à ses droits ou qu’une telle atteinte est imminente”.

Conformément aux articles 9 « droit conféré par la marque de l’union européenne » et 11 « date de l’opposabilité du droit aux tiers » du Règlement UE 2017/1001 du 14 juin 2017 sur la marque de l’Union européenne, la marque de l’Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif opposable aux tiers à compter de la publication de l’enregistrement de la marque. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires, d’un signe identique à la marque communautaire pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée ou d’un signe identique ou similaire à la marque de l’Union européenne pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services.

En vertu des dispositions combinées des articles 17 « application complémentaire du droit national en matière de contrefaçon », 129 « droit applicable » et 130 « sanctions » de ce règlement, si les effets de la marque de l’Union européenne sont exclusivement déterminés par les dispositions du règlement, les atteintes à une marque de l’Union européenne et leurs sanctions sont régies par le droit national concernant les atteintes à une marque nationale.

A cet égard, conformément à l’article L 717-1 du code de propriété intellectuelle, constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur la violation des interdictions prévues aux articles 9, 10, 11 et 13 du règlement (CE) 40/94 du Conseil du 20 décembre 1993 sur la marque communautaire désormais dite de l’Union européenne.

Et, conformément à l’article L 716-1 du code de la propriété intellectuelle, l’atteinte portée au droit du propriétaire de la marque constitue une contrefaçon, qui peut être prouvée par tout moyen en vertu de l’article L 716-7 du même code, engageant la responsabilité civile de son auteur. Constitue une atteinte aux droits de la marque la violation des interdictions prévues aux articles L 713-2, L 713-3 et L 713-4 du même code.

En vertu de l’article 713-2 du code de la propriété intellectuelle, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire :

a) La reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, même avec l’adjonction de mots tels que : « formule, façon, système, imitation, genre, méthode », ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l’enregistrement ;

b) La suppression ou la modification d’une marque régulièrement apposée.

La société LAFUMA SA est titulaire des marques LAFUMA opposées dans ce litige et la société LAFUMA MOBILIER en est la licenciée ainsi que cela ressort des certificats d’identité des marques mis au débat, ce qui n’est pas contesté par les sociétés ALIBABA.

Contrairement à ce que prétendent les sociétés ALIBABA, la matérialité de la contrefaçon n’est pas établie du seul fait d’une vente à destination des consommateurs français mais peut l’être tout aussi bien du seul fait d’une offre en vente accessible aux consommateurs français ou aux grossistes français.

En l’espèce, le procès-verbal de constat du 7 juillet établit de façon parfaitement claire que le site french.ALIBABA.com offre en vente des fauteuils et chaises de jardin ou de camping en reproduisant servilement les marques verbales et semi-figuratives françaises et européennes LAFUMA à des professionnels français.

En conséquence, il existe bien un acte de contrefaçon par reproduction car les signes sont identiques et les produits sont les mêmes que ceux visés à l’enregistrement des marques opposées.

Ainsi la vraisemblance de l’existence d’une contrefaçon par reproduction est établie du fait de l’offre en vente des fauteuils reproduisant les marques LAFUMA et il sera fait droit aux mesures de blocage de reproduction des marques LAFUMA formées par la société LAFUMA MOBILIER dans les termes du dispositif, pendant un temps limité c’est-à-dire jusqu’à ce qu’une décision soit rendue au fond.

En revanche faute de prouver au moins l’existence d’un manque à gagner éventuellement par la perte de part de marché ou de chiffre d’affaires, la société LAFUMA MOBILIER est mal fondée en ses demandes d’indemnité provisionnelle.

Elle ne peut solliciter la réparation de la dévalorisation des marques car elle n’en est pas la titulaire.

La société LAFUMA MOBILIER sera donc déboutée de ses demandes indemnitaires.

Sur les demandes en concurrence déloyale :

La société LAFUMA MOBILIER forme une demande subsidiaire sur le fondement de l’article 809 du code de procédure civile au titre de la concurrence déloyale pour le cas où la contrefaçon ne serait pas retenue.

Elle forme également une demande à titre principal au motif que l’usage du signe LAFUMA sur les annonces du site ALIBABA constitue une atteinte à son nom commercial et à son enseigne ; que sont vendus via les annonces mises en ligne sur le site french.ALIBABA.com des produit identiques au siens vendus à un prix nettement moins important en faisant croire qu’il s’agit de produits authentiques.

Elle ajoute que l’absence de mentions légales constitue un acte déloyal dans la vie des affaires.

Les sociétés ALIBABA répondent qu’aucun acte de concurrence déloyale ne peut être reproché à la société ALIBABA SINGAPOUR, qu’il n’y a pas d’atteinte au nom commercial et à la dénomination sociale de la société LAFUMA MOBILIER du fait de la présence du signe LAFUMA sur les pages du site ALIBABA.

Sur ce

La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu’un signe ou un produit qui ne fait pas l’objet de droits de propriété intellectuelle, puisse être librement reproduit, sous certaines conditions tenant à l’absence de faute par la création d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit, circonstance attentatoire à l’exercice paisible et loyal du commerce.

L’appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d’une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l’imitation, l’ancienneté d’usage, l’originalité, la notoriété de la prestation copiée.

Le parasitisme est constitué lorsqu’une personne physique ou morale, à titre lucratif et de façon injustifiée, copie une valeur économique d’autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d’un savoir-faire, d’un travail intellectuel et d’investissements.

La demande formée à titre subsidiaire par la société LAFUMA MOBILIER est sans objet, la demande au titre de la contrefaçon ayant été accueillie.

Il apparaît du procès-verbal de constat du 7 juillet 2017 que le signe LAFUMA est présent sur les pages du site ALIBABA pour vendre les mêmes produits que ceux vendus par la société LAFUMA MOBILIER aux professionnels français qui voudraient en acquérir.

La présence de ce signe constitue une atteinte à la dénomination sociale et au nom commercial de la société LAFUMA MOBILIER puisqu’il existe une confusion sur le caractère authentique des produits et que les acquéreurs sont amenés à penser qu’il s’agit de produits manufacturés et vendus avec le consentement de la société LAFUMA MOBILIER, d’autant que ces produits sont très ressemblants des produits LAFUMA que ceux-ci soient ou non protégés par un modèle de sorte que la confusion en est accrue.

En conséquence, la présence du signe LAFUMA sur les annonces du site ALIBABA constitue une atteinte à la dénomination sociale et au nom commercial de la société LAFUMA MOBILIER.

De plus le fait de pouvoir rechercher sur le site ALIBABA des produits en utilisant le mot clé LAFUMA, s’il ne constitue pas un usage à titre de marque, constitue au sein du site marchand ALIBABA un acte de concurrence déloyale puisqu’il sert à tromper l’acquéreur en offrant des produits qui ne sont pas des produits authentiques.

Il sera donc fait droit aux mesures d’interdiction sur le fondement de l’article 809 du code de procédure civile ainsi qu’il sera précisé au dispositif.

Pour les mêmes raisons que celles explicitées plus haut, aucune indemnité provisionnelle ne sera allouée à la société LAFUMA MOBILIER.

Enfin et contrairement à ce que prétendent les sociétés ALIBABA, le site french.ALIBABA.com ne présentait pas de mentions légales lors du procès-verbal de constat dressé le 7 juillet 2017.

Si au sein d’une rubrique “termes d’utilisation”, des mentions légales pouvaient être trouvées, elles n’apparaissaient aucunement sous un onglet spécifique intitulé “mentions légales” et ce en contravention avec les dispositions nationales reprenant la Directive Européenne sur le commerce en ligne.

La société LAFUMA MOBILIER est recevable à demander qu’il soit enjoint aux sociétés ALIBABA de réparer cette omission qui constitue à leur encontre une acte de concurrence déloyale puisque les sociétés défenderesses en s’exonérant de respecter les obligations légales propres au marché européen et plus particulièrement français, adoptent un comportement déloyal au regard des règles de la concurrence qui s’appliquent à toutes les autres sociétés.

Le défaut de mentions légales d’un site pourrait même constituer un des critères permettant de qualifier un site internet marchand de site pirate.

Il convient de constater que les sociétés ALIBABA ont amélioré fin octobre 2017 la situation du site french.ALIBABA.com en renommant la rubrique “termes d’utilisation” en “conditions d’utilisation et mentions légales”.

Cependant, cette rubrique contient un très grand nombre d’articles relatifs aux seules conditions d’utilisation et les mentions légales n’arrivent qu’à la toute fin de ces pages.

Pour respecter complètement les obligations légales, ces mentions doivent apparaître sous un onglet ou une rubrique indépendante et permettre aux utilisateurs ou aux tiers de pouvoir connaître le nom et l’adresse de l’entité responsable en cas de litiges sur le site et de pouvoir la contacter aisément.

Il sera donc enjoint aux sociétés ALIBABA de séparer les mentions légales des conditions d’utilisation, mais sans qu’il soit nécessaire de prononcer une astreinte.

Sur les autres demandes :

Les conditions sont réunies pour allouer à la société LAFUMA MOBILIER la somme de 10.000 euros à la charge in solidum des sociétés ALIBABA sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le ministère d’avocat n’étant pas obligatoire dans le cadre de la présente procédure, il n’y a pas lieu de faire application de l’article 699 du code de procédure civile ;

Les circonstances de l’espèce ne justifient pas sur le fondement de l’article 489 du code de procédure civile, de prononcer une exécution au seul vu de la minute de la présente décision qui est exécutoire par provision de plein droit.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par mise à disposition au greffe le jour du délibéré, par ordonnance contradictoire et en premier ressort,

Rejetons la fin de non recevoir formée par les sociétés ALIBABA FRANCE, ALIBABA HOLDING, ALIBABA.COM HONG KONG, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED ;

Reçevons la société ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED en son intervention ;

Enjoignons aux sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LTD, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED de cesser tout usage du signe « LAFUMA » à titre de marque au sein du site ALIBABA.com, ou portant atteinte à la dénomination sociale et au nom commercial LAFUMA MOBILIER , ou utilisé à titre de mot clefs permettant une recherche interne au sein du site ALIBABA.com ;

Enjoignons aux sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LTD, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED, de mettre en œuvre toutes mesures appropriées de blocage de parution d’annonces, sur le site ALIBABA.com, portant atteinte aux droit de propriété intellectuelle de la société LAFUMA MOBILIER, et en particulier portant la mention « LAFUMA » protégée par les marques n°3581711, 7187339, 1642621 et 6800734, sous astreinte provisoire de 4.000 € par jour de retard, l’astreinte prenant effet 10 jours après la signification de la présente ordonnance et courant pendant 3 mois, sauf accord préalable et exprès de la société LAFUMA MOBILIER ;

Nous réservons la liquidation de l’astreinte conformément aux dispositions de l’article L131-3 du code des procédures civiles d’exécution ;

Disons que le blocage durera jusqu’à ce qu’une décision intervienne au fond ou que les parties trouvent un accord ;

Déboutons la société LAFUMA de ses demandes indemnitaires provisionnelles en réparation du préjudice matériel subi des actes de contrefaçon des marques n°3581711, 7187339, 1642621 et 6800734 et du fait des actes de concurrence déloyale à titre principal ;

Constatons que les sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LTD, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED ont ajouté des mentions légales sur leur site internet mais leur enjoint de les faire figurer indépendamment des conditions d’utilisation ;

Condamnons in solidum aux sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LTD, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED à payer à la société LAFUMA MOBILIER la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons in solidum aux sociétés ALIBABA (France), ALIBABA GROUP HOLDING LTD, ALIBABA.COM HONG KONG LIMITED, ALIBABA GROUP SERVICES LIMITED, ALIBABA.COM SINGAPORE E-COMMERCE PRIVATE LIMITED aux entiers dépens

Disons n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

Rappelons que la présente décision est exécutoire par provision ;

Déboutons la société LAFUMA MOBILIER de sa demande de rendre la décision exécutoire sur minute.

Fait à Paris le 21 novembre 2017

Le Greffier, Le Président,

Olivier ALIDAL Marie-Christine COURBOULAY

1:

Copies exécutoires

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Tribunal de grande instance de Paris, Référés, 21 novembre 2017, n° 17/59485