Tribunal Judiciaire de Caen, Chambre procedure ecrite, 11 avril 2025, n° 24/03438
TJ Caen 11 avril 2025

Arguments

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  • Accepté
    Droit à remboursement en cas d'opération non autorisée

    La cour a jugé que les opérations litigieuses avaient été initiées par une personne distincte des utilisateurs et que les époux [R] n'avaient pas commis de négligence grave, ce qui leur donne droit au remboursement.

  • Accepté
    Droit aux intérêts de retard

    La cour a ordonné le versement des intérêts de retard à compter de la date de la mise en demeure, conformément à la législation en vigueur.

  • Accepté
    Droit à la capitalisation des intérêts

    La cour a ordonné la capitalisation des intérêts échus, conformément à l'article 1343-2 du code civil.

  • Accepté
    Droit à une indemnité pour frais de justice

    La cour a jugé équitable de fixer l'indemnité à 1 500 euros, conformément à l'article 700 du code de procédure civile.

Résumé par Doctrine IA

Dans cette décision du Tribunal Judiciaire de Caen, les époux [R] demandent le remboursement de deux sommes frauduleusement débitées de leur compte joint par la Société Générale, ainsi que des intérêts et des frais de justice. Les questions juridiques posées concernent la qualification des opérations comme "non autorisées" au sens des articles L. 133-18 et suivants du code monétaire et financier, et la responsabilité de la banque face à une escroquerie par "spoofing téléphonique". Le tribunal conclut que la Société Générale doit rembourser les sommes de 4 952,23 euros et 8 701,39 euros, avec intérêts de retard, ordonne la capitalisation des intérêts, et condamne la banque à verser 1 500 euros aux époux au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

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Sur la décision

Référence :
TJ Caen, ch. procedure ecrite, 11 avr. 2025, n° 24/03438
Numéro(s) : 24/03438
Importance : Inédit
Dispositif : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur
Date de dernière mise à jour : 5 mai 2025
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Sur les parties

Texte intégral

N° du répertoire général : N° RG 24/03438 – N° Portalis DBW5-W-B7I-I42P

38E Autres actions en responsabilité exercées contre un établissement de crédit

JUGEMENT N°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE CAEN

CHAMBRE PROCEDURE ECRITE

JUGEMENT DU 11 AVRIL 2025

DEMANDEURS :

Madame [E] [C] épouse [R]

née le [Date naissance 6] 1961 à [Localité 12]

demeurant [Adresse 2]

Monsieur [S] [R]

né le [Date naissance 5] 1958 à [Localité 8]

demeurant [Adresse 2]

Tous deux représentés par Me Sylvie PANETIER, avocat au barreau de CAEN, vestiaire : 61

DEFENDEUR :

La SOCIETE GENERALE

RCS de [Localité 11] n° 552 120 222

dont le siège social est [Adresse 4], en son établissement de l’Agence [Adresse 10] , prise en la personne de son représentant légal.

Non représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Présidente : Mélanie Hudde, juge, statuant en juge unique, les avocats de la cause en ayant été avisés ;

Greffière : Béatrice Faucher, greffière, présente lors des débats et de la mise à disposition ;

DÉBATS à l’audience publique du 19 décembre 2024,

DÉCISION réputée contradictoire, en premier ressort.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 avril 2025, après prorogation du délibéré fixé initialement au 6 mars 2025.

COPIE EXÉCUTOIRE à

Me Sylvie PANETIER – 61

FAITS ET PROCÉDURE

M. [S] [R] et son épouse Mme [E] [C] sont titulaires, dans les livres de la SOCIETE GENERALE, d’un compte joint n° 30003 00449 00056051239 55. Ils disposent, chacun, d’une carte bancaire associée à ce compte.

Le 6 décembre 2022, Mme [R] a déposé plainte contre X pour escroquerie au commissariat de police central de [Localité 7]. A cette occasion, Mme [R] a expliqué :

— que la veille, vers 20 H 45, elle avait reçu un appel sur son téléphone portable, le numéro affiché étant celui du service des fraudes de la SOCIETE GENERALE, à savoir le [XXXXXXXX01] ;

— qu’un homme, parlant français correctement et sans accent, lui avait demandé s’il était normal que sa carte bancaire soit utilisée à [Localité 9] ;

— qu’après une réponse négative de sa part, son interlocuteur lui avait demandé d’aller sur son application bancaire pour modifier le code secret à l’effet de faire cesser les opérations de débit en cours ; qu’à cet effet, il lui avait communiqué un nouveau code secret (08 05 72) ; qu’elle avait fait le changement demandé ; que par la suite, elle avait reçu des SMS sur son téléphone portable du 39984 et du 39985 qui sont les numéros qu’elle a habituellement lorsqu’elle reçoit des messages de la part de sa banque ;

— que s’étant rendue compte qu’il s’agissait d’une escroquerie, elle et son mari avaient contacté le service des fraudes de la SOCIETE GENERALE ; qu’un technicien leur avait alors dit “de faire des faux codes de façon à bloquer” les opérations en cours ;

— que, le matin même, leur conseillère bancaire leur avait confirmé qu’ils avaient été victimes d’escroquerie et leur avait annoncé que l’argent figurant sur un livret A et deux autres comptes avait été viré sur leur compte joint, puis viré sur un compte qui avait été ajouté à leur liste des bénéficiaires.

Le 7 décembre 2022, le compte joint des époux [R] a été débité de 4 952, 23 euros avec comme référence le numéro de carte bancaire de Mme [R] et de 8 701, 39 euros avec comme référence le numéro de carte bancaire de M. [R], leur relevé de compte faisant état d’achats faits depuis la LITUANIE.

Dès le 7 décembre 2022, les époux [R] ont demandé à leur banque le remboursement des sommes frauduleusement débitées de leur compte joint.

Le 16 décembre 2022, la somme de 8 701, 39 euros a été re-créditée sur le compte joint par la SOCIETE GENERALE, ladite banque adressant aux époux [R] une lettre datée du même jour ainsi libellée : “J’ai le plaisir de vous informer que nous accédons à votre demande de remboursement. Cependant, je vous rappelle que la Société Générale se réserve le droit de contrepasser le montant de ces remboursements s’il était établi qu’ils ont été effectués à tort”.

En revanche, la demande de remboursement des 4 952, 23 euros a été refusée, les époux [R] se voyant adresser le 19 décembre 2022 la lettre suivante :

“Après examen attentif des données informatiques associées à la (aux) transaction(s), il apparaît que c’est bien votre carte qui a été utilisée.

Dans ces circonstances, et sans que votre bonne foi ne soit nullement mise en cause, j’ai le regret de vous informer qu’une suite favorable à votre demande ne peut être envisagée.

En application des articles L. 133-18 et L. 133-19 du code monétaire et financier, seules les opérations non autorisées sont susceptibles de faire l’objet d’un remboursement. J’espère que ces précisions vous permettront de comprendre le bien-fondé de notre position”.

Finalement, le 2 janvier 2023, la SOCIETE GENERALE est revenue sur l’opération du 16 décembre 2022 et une somme de 8 701, 39 euros a été débitée du compte joint des époux [R], la banque opposant, dans une lettre datée du 14 février 2023, que la transaction contestée“a été validée à distance au moyen d’une authentification renforcée, nécessitant la connaissance de votre code secret et identifiant de Banque à Distance ainsi que des codes de sécurité transmis par SMS sur votre téléphone portable personnel. Aussi, la responsabilité de SG Société Générale ne saurait être engagée (…) ”. Par ailleurs, la banque a avisé les époux [R] de l’application de deux commissions d’intervention de 8 euros, les débits de 4 952, 23 euros et 8 701, 39 euros ayant conduit à ce que leur compte joint présente un solde débiteur.

La plainte déposée par Mme [R] a fait l’objet d’un classement sans suite au motif que l’enquête n’avait pas permis d’identifier la (les) personne(s) ayant commis l’infraction.

Le 17 mars 2023, les époux [R] ont saisi le médiateur auprès de la Fédération Bancaire Française d’une demande de médiation, laquelle été estimée recevable le 21 avril 2023. Un avis (non produit) aurait été rendu le 12 janvier 2024.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date du 22 mars 2024 (distribuée le 27 mars suivant), les époux [R] ont, par l’intermédiaire de leur conseil, vainement mis en demeure la SOCIETE GENERALE de leur rembourser dans le délai de trente jours les sommes de 8 701, 39 euros et 4 952, 23 euros frauduleusement débitées sur leur compte joint le 7 décembre 2022.

Par acte de commissaire de justice en date du 5 août 2024, les époux [R] ont assigné la SOCIETE GENERALE devant ce tribunal, au visa des articles L. 133-18 et suivants du code monétaire et financier, aux fins de voir :

— condamner la SOCIETE GENERALE à leur rembourser les sommes de 4 952, 23 euros et de 8 701, 39 euros ;

— condamner la SOCIETE GENERALE à leur verser les intérêts au taux légal à compter du 7 décembre 2022, avec capitalisation des intérêts échus dus pour une année au moins

— condamner la SOCIETE GENERALE à payer la somme de 1 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

Pour l’exposé des moyens des demandeurs, il est renvoyé à la lecture de l’assignation conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

Bien que régulièrement assignée par dépôt d’une copie de l’acte à l’Etude, la SOCIETE GENERALE n’a pas constitué avocat.

La clôture de l’instruction a été ordonnée le 6 novembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A l’appui de leur demande de remboursement fondée sur les articles L. 133-18 et suivants du code monétaire et financier, les époux [R] – qui ont alerté leur agence bancaire des opérations frauduleuses sur leur compte joint très rapidement – font valoir que, affolée par l’annonce de prélèvements frauduleux, mais mise en confiance par le ton très professionnel de son interlocuteur qui la nommait “Madame [R]” et connaissait son numéro de téléphone portable, alors que le numéro d’appel affiché était celui du service des oppositions de la SOCIETE GENERALE, Mme [R] s’est trouvée mise en confiance et a suivi les instructions reçues. Ils soulignent qu’à aucun moment, ils “n’ont communiqué leurs codes secrets ni leurs codes CCV de carte bancaire”. Ils indiquent que la jurisprudence de la cour d’appel de [Localité 13] (arrêt de la 13ème chambre du 28 mars [Immatriculation 3]/07299) à vocation à s’appliquer à l’espèce. Ils ajoutent : “On peut de plus se demander comment le ou les escrocs avaient pu avoir connaissance du nom des titulaires d’un compte courant SG, connaître leur situation matrimoniale, le numéro de téléphone de “l’appareil de confiance” et il est très probable qu’un défaut de sécurité des données bancaires pourrait être reproché à la Société générale”.

Il résulte des articles L. 133-18, L. 133-19 et L. 133-23 du code monétaire et financier que, en cas d’opération de paiement reconnue comme “non autorisée”, le payeur dispose en principe d’un droit à remboursement immédiat. Ce remboursement peut toutefois être refusé en cas d’agissement frauduleux de l’utilisateur lui-même ou, pour les seules opérations authentifiées de manière forte dans les conditions prévues par la loi, en cas de “négligence grave commise par l’utilisateur de services de paiement” démontrée par le prestataire de services de paiement.

Au vu des déclarations faites par Mme [R] auprès des services de la police nationale lors de son dépôt de plainte, l’espèce ne permet pas de caractériser une négligence grave de la part des époux [R].

En effet :

— les opérations de débit litigieuses ont manifestement été initiées par une personne distincte des utilisateurs ;

— Mme [R] a fait l’objet d’une opération de “spoofing téléphonique” (affichage, lors d’un appel téléphonique entrant malveillant, du numéro de téléphone d’un interlocuteur légitime) puisque le numéro de téléphone du service des fraudes de la SOCIETE GENERALE est apparu sur son téléphone portable ;

— ce procédé manipulatoire l’a mise en confiance et a diminué sa vigilance puisqu’elle pensait être en relation avec un salarié de la SOCIETE GENERALE, étant observé que face à un appel téléphonique évoquant de surcroît un risque d’utilisation frauduleuse d’une carte bancaire, la vigilance de la personne qui reçoit cet appel est moindre que celle d’une personne qui réceptionne un mail, laquelle dispose de davantage de temps pour en prendre connaissance et s’apercevoir d’éventuelles anomalies révélatrices de son origine frauduleuse.

Par suite, il y a lieu de condamner la SOCIETE GENERALE à payer aux époux [R] les sommes de 4 952, 23 euros et de 8 701, 39 euros au titre du remboursement des fonds débités frauduleusement le 7 décembre 2022 sur leur compte joint, avec intérêts de retard au taux légal à compter du 27 mars 2024, date de la réception de la mise en demeure de rembourser adressée par leur conseil.

La juridiction étant saisie d’une demande en ce sens, il y a lieu, en application de l’article 1343-2 du code civil, d’ordonner la capitalisation des intérêts échus, dus au moins pour une année entière.

Le point de départ des intérêts capitalisés, qui ne peut pas être antérieur à la demande de capitalisation formulée par les créanciers, sera fixé à la date de l’acte introductif d’instance, soit le 5 août 2024.

Succombant, la SOCIETE GENERALE sera condamnée aux dépens.

Elle sera en outre tenue de payer aux époux [R] une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à 1 500 euros.

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort :

CONDAMNE la SOCIETE GENERALE à payer à M. [S] [R] et à Mme [E] [C] épouse [R] les sommes de 4 952, 23 euros et de 8 701, 39 euros, avec intérêts de retard au taux légal à compter du 27 mars 2024 ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts échus, dus au moins pour une année entière

FIXE le point de départ des intérêts capitalisés au 5 août 2024 ;

CONDAMNE la SOCIETE GENERALE aux dépens ;

CONDAMNE la SOCIETE GENERALE à payer à M. [S] [R] et à Mme [E] [C] épouse [R] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire.

Ainsi jugé le onze avril deux mil vingt cinq, la minute est signée de la présidente et de la greffière.

La greffière La présidente

Béatrice Faucher Mélanie Hudde

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