Tribunal Judiciaire de Nanterre, 16 décembre 2022, n° 22/00671

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Sur la décision

Référence :
TJ Nanterre, 16 déc. 2022, n° 22/00671
Numéro(s) : 22/00671

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTERRE

RÉFÉRÉS

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ RENDUE LE 16 DECEMBRE 2022

N° RG 22/00671 – N° Portalis DB3R-W-B7G-XJHM

N° :

DEMANDEURS Madame E-C Z,

Madame E-C Z Monsieur B A 80 boulevard Edmond Rostand 92500 Rueil-Malmaison c/ Monsieur B A Madame C Y, 80 boulevard Edmond Rostand 92500 Rueil-Malmaison Monsieur D X représentés par Maître Stéphanie SINGER de la SCP B.L.S.T., avocats au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 709

DEFENDEURS

Madame C Y 3 rue Joyeuse 92500 RUEIL-MALMAISON

Monsieur D X 3 rue Joyeuse 92500 RUEIL-MALMAISON

représentés par Maître Antoine CHRISTIN de la SELARL ANTOINE CHRISTIN AVOCAT, avocats au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 720

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Présidente : Marie-Odile DEVILLERS, 1ère Vice-présidente, tenant l’audience des référés par délégation du Président du Tribunal,

Greffière : Divine KAYOULOUD ROSE, Greffière

Statuant publiquement en premier ressort par ordonnance contradictoire mise à disposition au greffe du tribunal, conformément à l’avis donné à l’issue des débats.

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Nous, Président , après avoir entendu les parties présentes ou leurs conseils, à l’audience du 15 septembre 2022, avons mis l’affaire en délibéré au 27 octobre 2022 et prorogé à ce jour.

EXPOSÉ DU LITIGE
Monsieur B A et Madame E-C Z ont acquis le 18 janvier 2018 une maison d’habitation au 80 boulevard Edmond Rostand à Rueil-Malmaison, cadastrée section […]. Monsieur X et Madame Y ont acquis la maison construite sur le terrain attenant au […] le […].

Soutenant que les travaux que ces derniers ont réalisés sur leur terrain : rehaussement du terrain pour constituer une terrasse surélevée, mise en place d’une terrasse végétalisée, édification d’un “mur” en bois recouvert partiellement d’une bâche plastique verte contreviendraient aux règles de la mitoyenneté et constitueraient un trouble manifestement illicite par la gêne qu’ils occasionneraient, Madame Z et Monsieur A ont par acte du 28 février 2022 fait assigner Madame Y et Monsieur. X en référé devant le président du tribunal judiciaire de Nanterre en demandant à celui-ci de :

- condamner solidairement Monsieur X et Madame Y sous astreinte de 150€ par jour de retard à compter du prononcé de l’ordonnance à intervenir à procéder à la suppression:

- de la terrasse artificiellement édifiée par surélévation topographique ;

- des panneaux de bois implantés sur le mur séparatif ou à sa proximité ;

- de toute végétation ne respectant pas les règles de distances.

- condamner solidairement Monsieur X et Madame Y au paiement d’une indemnité provisionnelle de 5.000,00 € à valoir sur leur préjudice , la somme de 2.000€ en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de la procédure comprenant le coût du procès-verbal de constat du 17 août 2021 pour 309.20 €.

Après un premier renvoi, l’affaire a finalement été plaidée à l’audience du 15 septembre 2022:
Madame Z et Monsieur A ont fait soutenir oralement à l’audience des conclusions dans lesquelles ils maintiennent leurs demandes mais concluent en outre au débouté de toutes les demandes de Madame Y et Monsieur X et rajoutent une demande de suppression de toute caméra et tout dispositif d’enregistrement placés dans leur propriété.

Ils soutiennent que les constructions réalisées par Monsieur X et Madame Y contreviennent radicalement aux règles de la mitoyenneté parce que le mur ne serait pas mitoyen et que la palissade s’appuierait dessus.

Ils prétendent que la clôture a été rehaussée par des panneaux de bois pour atteindre une hauteur de 2.97 mètres soit une hauteur supérieure à ce qu’exige le règlement du plan d’urbanisme de la commune “prévoyant en son article 5.1.2 une hauteur maximum de 2 mètres” et que celle-ci interdirait en outre un “aspect bois”.
Mme Y et M. X ont fait soutenir oralement à l’audience des conclusions dans lesquelles ils demandent au juge des référés de :

- à titre principal de dire et juger n’y avoir lieu à référé sur les demandes des consorts Z-A en l’absence d’urgence, de trouble manifestement illicite et/ou d’obligation

- reconventionnellement de condamner les consorts Z-A à procéder :

. à la dépose de la caméra installée à proximité de leur gouttière ;

.à la pose, sur la partie de leur terrasse qui jouxte le terrain des consorts Y-X, d’un pare-vue d’une hauteur minimale de 1,90m avec un prolongement en retour de 0,60m ; sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé un délai de 30 jours suivant la signification de l’ordonnance à intervenir, pendant un délai de quatre mois, à l’issue duquel il sera à nouveau statué,

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 – condamner les consorts Z-A à payer aux consorts Y- X une somme de 3.600 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Ils soutiennent qu’ils auraient fait enlever la terrasse et la végétation, et auraient reculé la terrasse vers leur maison, que la première palissade n’est en aucun cas solidarisée au mur des consorts Z-A.

Ils exposent qu’ils utilisent depuis leur achat le jardin, ce que ne faisait pas l’occupante précédente, qu’ils ont cherché à s’arranger avec leurs voisins qui ont refusé la conciliation, qui les espionnent en permanence et ont installé une caméra.

MOTIFS DE LA DÉCISION
Madame Z et Monsieur A fondent notamment leurs demandes sur l’art 544 du code civil qui précise que la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements. Ils estiment que la terrasse et la palissade faites par leurs voisins porterait atteinte à leur droit de propriété en ce qu’elles violeraient les dispositions du code civil et les règlements et ils estiment qu’ils subissent un trouble intolérable de voisinage.

Sur la suppression de la terrasse artificiellement édifiée par surélévation topographique
Madame Z et Monsieur A ne précisent pas sur quel texte le fait pour Madame Y et Monsieur X d’avoir légèrement surélevé de quelques décimètres le sol de leur terrain (la modification est peu visible à l’oeil nu), ni d’installer une terrasse en bois, par définition amovible, serait “manifestement illicite”. Il apparaît en outre que cette terrasse a été déplacée pour être installée à plus de 2 mètres de la clôture et l’on voit encore moins en quoi elle serait un trouble ou contraire à la loi.

Sur la suppression de la palissade
Madame Z et Monsieur A prétendent que “la clôture a été rehaussée par des panneaux de bois” pour atteindre une hauteur de 2.97 mètres, et prétendent que cette hauteur serait supérieure à ce qu’exige le règlement du plan d’urbanisme de la commune “prévoyant en son article 5.1.2 une hauteur maximum de 2 mètres” et que celle-ci interdirait en outre un “aspect bois”.

L’article 5.1.2 du règlement du plan d’urbanisme de la commune de Rueil qu’ils invoquent est relatif aux “clôtures sur limite séparative de propriété”, or en l’espèce cette palissade n’était pas comme ils l’indiquent un rehaussement de la clôture existante mais une palissade à 20 centimètres du mur de clôture et il n’apparaît pas, avec l’évidence nécessaire en référé, que le règlement s’applique en l’espèce.

Ils soutiennent qu’une distance de 1,90 cm aurait du exister entre leur mur et la palissade, ils invoquent l’article 678 du code civil. Cet article, dans la section consacrée aux “vues sur la propriété du voisin” interdit celles-ci “s’il n’y a dix-neuf décimètres de distance entre le mur où on les pratique”. Cependant la terrasse rehaussée de Mme Y et M. X ne peut en aucun cas être constitutive de vue, puisqu’elle reste en dessous de la fenêtre de Mme Z et Monsieur A et ne change pas la vue sur leur maison, et la palissade encore moins puisqu’elle bouche au contraire la vue, et aucune distance minimale n’est donc imposée par le code civil entre la palissade et le mur voisin. L’impossibilité d’un tour d’échelle n’est pas non plus établie, il serait difficile mais non impossible et ce sont les défendeurs qui subiraient ces difficultés et ceci ne suffit pas, en l’absence d’une éventuelle demande de tour d’échelle, à interdire l’installation d’une palissade sur son propre jardin.

En outre Madame Z et Monsieur A semblent avoir encore reculé la palissade depuis au moins le mois de mai et la demande de la retirer est donc devenue sans objet.

Sur les “plantations”

Ils invoquent également une violation de l’article 671 du code civil qui oblige d’avoir des arbres, arbrisseaux et arbustes près de la limite de la propriété voisine à la distance prescrite par les règlements particuliers actuellement existants, ou par des usages constants et reconnus et, à défaut de règlements et usages, qu’à la distance de deux mètres de la ligne séparative des deux héritages pour les plantations dont

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la hauteur dépasse deux mètres, et à la distance d’un demi-mètre pour les autres plantations.

Cette soi disant violation fait l’objet d’une contestation sérieuse , puisque cet article fait référence soit

“à des règlements particuliers” , soit à des “usages constants et reconnus” et qu’il existe un réel débat sur la distance qui doit s’appliquer de ce fait à Rueil-Malmaison, la règle des 2 mètres ne s’appliquant pas partout en région parisienne. Il y a également contestation possible sur la hauteur et la distance des bambous qui ont en en outre été reculés et enfin un débat sur l’application du texte à des bambous qui n’étaient pas plantés mais en pots.

Sur la suppression des panneaux de bois implantés sur le mur séparatif ou à sa proximité

Il soutiennent que la palissade s’appuyant sur leur mur, elle porterait atteinte à leur droit de propriété alors qu’il résulte clairement des photos prises par Madame Y et Monsieur X que la palissade ne touche pas le mur, même les “retours” en bout de palissade sont à quelques centimètres. En effet si le constat d’huissier établi le 17 août 2021 à la demande de Madame Z et Monsieur A précise page 7 que “les panneaux sont fixés sur le mur de clôture des requérants”, cette affirmation est illustrée avec une photo prise de très loin qui ne contredit pas les photos prises par Madame Y et Monsieur X sur lesquelles apparaît un espace très réduit entre la palissade et le mur.

Il existe donc une contestation très sérieuse sur le fait que ce mur porterait atteinte au droit de propriété de Madame Z et Monsieur A.

Sur la demande de suppression de “toute caméra
Madame Z et Monsieur A n’apportent aucun élément permettant d’établir que Madame Y et Monsieur X auraient installé une caméra dans leur jardin pour les espionner, les photos fournies étant des photos prises lors d’un déjeuner notamment et le fond de la photo seulement est la propriété des voisins et l’image de la tête de Monsieur A n’étant capturée que parce qu’il observe par dessus la clôture.

Ils n’ont jamais contrairement aux conclusions de Madame Z et Monsieur A reconnu avoir installé une caméra.

Cette demande sera rejetée comme étant sans objet.

Sur la demande de dommages et intérêts

Dans la mesure où n’a pas été établi un trouble manifestement illicite résultant d’une faute de Madame Y et Monsieur X, les demande de Madame Z et Monsieur A seront rejetés, toute demande indemnitaire supposant une faute. Les plaintes réciproques pour harcèlement, injures démontrent qu’il existait un climat détestable entre voisins mais il n’appartient pas au juge des référés d’en déterminer l’origine qui est certainement partagée.
Madame Z et Monsieur A seront donc déboutés de toutes leurs demandes.

Sur les demandes reconventionnelles
Madame Y et Monsieur X soutiennent que le PLU de Rueil-Malmaison exige que Madame Z et Monsieur A installent un pare-vue sur leur terrasse qui est incontestablement à moins de 3mètres de la ligne séparative de leur propriété.

Il apparaît cependant que le texte cité par Madame Y et Monsieur X concerne “la réalisation” d’une terrasse, or en l’espèce la terrasse de Madame Z et Monsieur A existe depuis une date indéterminée et il existe une contestation sérieuse sur le point de savoir si l’obligation d’un pare-vue s’applique aux terrasses déjà existantes, ou simplement à leur construction.

La pose d’une caméra dans l’axe de la propriété d’un voisin est en elle-même une atteinte à la vie privée de Madame Y et Monsieur X et il convient de la faire cesser en urgence.
Madame Z et Monsieur A contestent avoir fait installer une caméra qui apparaît cependant incontestablement sur les photos produites par Madame Y et Monsieur X.

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Dans la mesure où ils déménagent en vendant leur maison, la demande est sans objet et Madame Y et Monsieur X en seront déboutés .

Sur la demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

L’action de Madame Z et Monsieur A qui ont refusé la tentative de conciliation et les propositions amiables de Madame Y et Monsieur X, a obligé Madame Y et Monsieur X à exposer des frais, et il est équitable de la condamner à payer à Madame Z et Monsieur A la somme de 1000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

PAR CES MOTIFS,

RENVOYONS les parties à se pourvoir sur le fond du litige ;

Par provision, tous moyens des parties étant réservés ;

DÉBOUTONS Madame Z et Monsieur A de toutes leurs demandes ;

DÉBOUTONS Madame Y et Monsieur X de leurs demandes ;

CONDAMNONS Madame Z et Monsieur A à payer à Madame Y et M. X la somme de 1000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNONS Madame Z et Monsieur A aux dépens.

FAIT À NANTERRE, le 16 décembre 2022.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

Divine KAYOULOUD ROSE, Greffière Marie-Odile DEVILLERS, 1ère Vice-présidente

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