Tribunal judiciaire de Paris, 26 octobre 2020, n° 20/53713

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Lettre de l'Immobilier · 7 février 2022

TJ Paris, Juge de l'exécution, 20 janvier 2021, RG n°20/80923 L'impossibilité juridique d'exploiter les lieux loués, survenue au cours du bail, résultant d'une décision des pouvoirs publics contraignant le locataire à une fermeture totale, est assimilable à la solution envisagée par l'article 1722 du Code civil et l'exonère du paiement des loyers pendant la période concernée. En raison de l'état d'urgence sanitaire décrété à compter du 12 mars 2020, une société titulaire d'un bail commercial a fait l'objet d'une mesure de fermeture totale au public pour la période allant du 16 mars au 11 …

 

Millier-legrand Chantal · Lettre des Réseaux · 17 décembre 2021

TJ Paris, Juge de l'exécution, 20 janvier 2021, RG n°20/80923 L'impossibilité juridique d'exploiter les lieux loués, survenue au cours du bail, résultant d'une décision des pouvoirs publics contraignant le locataire à une fermeture totale, est assimilable à la solution envisagée par l'article 1722 du Code civil et l'exonère du paiement des loyers pendant la période concernée. En raison de l'état d'urgence sanitaire décrété à compter du 12 mars 2020, une société titulaire d'un bail commercial a fait l'objet d'une mesure de fermeture totale au public pour la période allant du 16 mars au 11 …

 
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Sur la décision

Référence :
TJ Paris, 26 oct. 2020, n° 20/53713
Numéro(s) : 20/53713

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PARIS 26 octobre 2020 S.A.S. […] c/ […]

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PARIS Arrêt du 26 octobre 2020 n° 20/53713

S.A.S. […]

/c […]

Portalis

352J-W-B7E-CSBVB

N°:7

Assignation du : 08 Juin 2020

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ par X Y, Juge, au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assisté de Rokhaya NIANG, Greffier.

DEMANDERESSE

S.A.S. […]

[…] représentée par Maître Jean-marie JOB de la SELARL JTBB A VOCATS, avocats au barreau de PARIS

- UP0254

DEFENDERESSE

[…]

[…]

[…] représentée par Maître Catherine CARIOU de la SELEURL

SELARL CATHERINE CARIOU, avocats au barreau de PARIS-

#B0107

DEBATS

A l’audience du 23 Septembre 2020, tenue publiquement, présidée par X Y, Juge, assisté de Anais ZIMMER, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil,

Par acte du 8 juin 2020, la société SAS […] a assigné la société SCI […] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris.

A l’audience du 23 septembre 2020, la société SAS […] comparait représentée par son conseil. Elle demande au juge des référés de :

-l’autoriser à suspendre le paiement des loyers dus en vertu du bail commercial du 20 juillet 2018 au titre


de la période d’état d’urgence sanitaire, soit à compter du 12 mars 2020 et jusqu’à la levée dudit état d’urgence, -désigner un médiateur judiciaire, -renvoyer l’affaire devant le juge du fond, -débouter la défenderesse de ses demandes, subsidiairement, reporter le paiement des loyers des 2ème et 3ème trimestres 2020, ou lui accorder les délais les plus larges pour s’en acquitter, -condamner la défenderesse à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens, dont distraction au profit de son conseil.

A cette même audience, la société SCI […] comparait représentée par son conseil. Elle demande au juge des référés de :

-débouter la demanderesse de ses demandes,

-condamner la demanderesse à lui payer la somme de 246 266, 39 euros représentant les loyers et charges et 2ème et 3ème trimestres

2020,

-subsidiairement, ordonner le renvoi de l’affaire au fond et condamner par provision la société demanderesse à lui payer la somme de 180 713, 84 euros au titre des loyers et charges du 1 1 mai 2020 au 30 juin 2020 puis du 1er juillet au 30 septembre 2020,

-condamner la demanderesse à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Il convient de se référer aux écritures respectives des parties pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions qui y sont contenus.

La décision a été mise en délibéré au 26 octobre 2020.

MOTIVATION

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile "le président du tribunal judiciaire (…) [peut] toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. / Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, [il peut] accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire".

L’article 4 de l’ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020, modifiée, relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période, dispose que "les astreintes, les clauses pénales, les clauses résolutoires ainsi que les clauses prévoyant une déchéance, lorsqu’elles ont pour objet de sanctionner l’inexécution d’une obligation dans un délai déterminé, sont réputées n’avoir pas pris cours ou produit effet, si ce délai a expiré pendant la période [allant du 12 mars au 23 juin 2020 inclus]. Si le débiteur n’a pas exécuté son obligation, la date à laquelle ces astreintes prennent cours et ces clauses produisent leurs effets est reportée d’une durée, calculée après [le 23 juin 2020], égale au temps écoulé entre, d’une part, le 12 mars 2020 ou, si elle est plus tardive, la date à laquelle l’obligation est née et, d’autre part, la date à laquelle elle aurait dû être exécutée« et que »le cours des astreintes et l’application des clauses pénales qui ont pris effet avant le 12 mars 2020 sont suspendus [entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020]".

Cet article a pour effet d’interdire l’exercice par le créancier un certain nombre de voies d’exécution forcée pour recouvrer les loyers échus entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020, mais n’a pas pour effet de suspendre l’exigibilité du loyer dû par un preneur à bail commercial dans les conditions prévues au contrat, qui peut donc être spontanément payé ou réglé par compensation.

Selon l’article 1134 devenu 1104 du Code civil, les contrats doivent être exécutés de bonne foi, ce dont il résulte que les parties sont tenues, en cas de circonstances exceptionnelles, de vérifier si ces circonstances ne rendent pas nécessaire une adaptation des modalités d’exécution de leurs obligations respectives.

S’agissant d’une obligation de somme d’argent, le moyen tiré de la force majeure, ou de la théorie des risques, soulevé par la société demanderesse pour solliciter la suspension de ses loyers pendant la


période juridiquement protégée est inopérant.

Le contexte sanitaire ne saurait en lui-même générer un manquement par le bailleur à son obligation de délivrance du bien loué. Ces circonstances ne lui étant pas imputables.

L’exception d’inexécution, soulevée par la preneuse, de ses obligations issues du bail, doit être étudiée à la lumière de l’obligation pour les parties de négocier de bonne foi les modalités d’exécution de leur contrat en présence des circonstances précitées.

Sur les demandes principales

A titre liminaire, il n’est pas démontré que la bailleresse a manqué à son obligation de délivrance des locaux en litige ni que la force majeure peut justifier de faire droit la demande principale. Ces moyens sont donc écartés.

Il en va de même du moyen fondé sur un trouble venant des pouvoirs publics assimilés à un tiers au sens de l’article 1725 du Code civil ; ce trouble qui soit de fait ou de droit n’étant pas imputable au bailleur.

En l’espèce, par acte sous seing privé, que les parties datent au 20 juillet 2018, la société SCI […] a donné à bail à la société SAS […] un local commercial situé contre commercial « LE PRADO » local n°SU10 à […].

Il ressort des éléments de la cause que la demande en paiement résulte d’un arriéré de loyer constitué pendant la période juridiquement protégée correspondant au 2ème trimestre 2020 prévu par le bail.

S’agissant de la demande de suspension des loyers, l’analyse de cette question suppose une appréciation concrète des situations respectives des contractants et de leurs échanges pendant la période considérée.

La société preneuse à bail fait état d’arguments portant sur l’accès des locaux pendant la période et l’attitude de son bailleur au cours de cette période. La défenderesse conteste ces arguments. Une telle analyse relève du juge du fond.

Tant la demande que les obligations qui la fondent sont donc, en l’état, sérieusement contestables. Aucun dommage imminent ni trouble manifestement illicite n’est non plus démontré.

Sur la demande reconventionnelle en paiement

La société SCI […] démontre que son secteur d’activité, la parapharmacie, a été fortement perturbé économiquement par le confinement décidé par les pouvoirs publics et les restriction des déplacements de sa clientèle.

Elle justifie par des échanges de courriers s’être rapprochée de son bailleur pour avoir essayé de trouver une solution amiable.

La demande en paiement est dés lors sérieusement contestable au titre de cette période qui correspond au 2ème trimestre 2020.

Il est dit n’y avoir lieu à référé sur la demande portant sur cette période.

Le quantum du 3ème trimestre, justifié selon décompte et non contesté en son calcul sera l’objet d’une condamnation en paiement.

Sur les délais de paiement

Aux termes de l’article 1343-5 du Code civil : « le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. / Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s’imputeront d’abord sur le capital. / Il peut subordonner ces mesures à l’accomplissement par le débiteur d’actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette. / La décision du juge suspend les procédures d’exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d’intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge. / Toute stipulation contraire est réputée non écrite. / Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d’aliment ».

En l’espèce, la société SAS […] justifie d’une situation économique


exceptionnelle en lien avec les difficultés de son secteur d’activité. Elle ne produit toutefois aucun élément comptable permettant de faire état de sa situation financière de manière exacte. En conséquence les délais seront limités à 10 mois.

Ce délai sera caduque en cas d’impayé de ses échéances courantes et l’intégralité de la somme due deviendra alors immédiatement exigible.

La médiation proposée n’a pas été acceptée à l’audience et ne peut donc être ordonnée.

Les conditions d’un renvoi devant le juge du fond sur le fondement de l’article 837 du code de procédure civile ne sont pas réunies.

-oOo-

La demanderesse, partie perdante, sera condamnée aux entiers dépens et à payer à la société SCI […] la somme totale de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, somme appréciée en équité à défaut d’autre justificatif.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire et en premier ressort ,

Renvoyons les parties à se pourvoir au fond ainsi qu’elles en aviseront, mais dès à présent par provision, tous les moyens des parties étant réservés :

Condamnons la société SAS […] à payer à la société SCI[…] la somme 124 594, 13 euros au titre des loyers du 3ème trimestre 2020,

Autorisons la société SAS […] à se libérer de cette dette en 9 mensualités de 12 500 euros, outre une 10ème mensualité qui sera du montant du solde de la dette, le 10 de chaque mois en sus du loyer courant et pour la première fois le 10 du mois suivant la signification de la présente ordonnance,

Rappelons que cette somme doit être payée en plus du loyer de chaque trimestre,

Disons que les procédures d’exécution pouvant être engagées par la société SCI […] sont suspendues d’une part et que les majorations d’intérêts ou les pénalités encourues à raison du retard cessent d’être dues d’autre part, pendant le délai précité,

A défaut de paiement d’une seule des mensualités prévues pour l’apurement de la dette ou d’un seul des appels trimestriels constitués des loyers et charges :

-disons que la totalité de la somme deviendra immédiatement exigible, et pourra entraîner toutes procédures d’exécution légalement admissibles,

Disons n’y avoir lieu à référé sur le surplus,

Disons n’y avoir lieu à renvoyer l’affaire devant le juge du fond,

Condamnons la société SAS […] à payer à la société SCI MASS ALIA SHOPING MALL la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamnons la société SAS […] au paiement des dépens,

Fait à Paris le 26 octobre 2020

Le Greffier, Rokhaya NIANG

Le Président, X Y



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Tribunal judiciaire de Paris, 26 octobre 2020, n° 20/53713