CAA de Paris, conclusions du rapporteur public sur l'affaire n° 10PA04417

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Sur la décision

Référence :
CAA
Juridiction : Cour administrative d'appel
Précédents jurisprudentiels : CAA Douai, 13 juin 2013, Mme B, n° 12DA00975
CAAP 1er décembre 1998, COB, n° 96PA04594
CE 23 novembre 1966
CE 23 septembre 1998, AP-HP, n° 184162
CE 4 octobre 1961
CE, 5 novembre 1993, COB, Rec p. 944
CE 8 septembre 1999, M. A, n° 127376
CE 9 décembre 1987, commune de Gouvieux, n° 86096
CE 9 novembre 1994, Mme Z, n° 120111

Sur les parties

Texte intégral

10PA04417 Mme C X c/ ACNUSA
Audience du 4 novembre 2013
Lecture du 19 novembre 2013
CONCLUSIONS de M. Stéphane Dewailly, Rapporteur public
Faits : Mme X a été recrutée, le 1er août 2005, par l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA), dans le cadre d’un contrat à durée déterminée d’une durée de 18 mois, pour exercer des fonctions de juriste. Ce contrat sera renouvelé, pour une période d’un an, jusqu’au 31 décembre 2007.
Par une décision du 25 octobre 2007, la présidente de l’ACNUSA a décidé de supprimer cet emploi de juriste et décidé, en conséquence, de ne pas renouveler le contrat de Mme X, à compter du 31 décembre 2007.
Cette décision était motivée par deux raisons « tout d’abord, les compétences de juriste du président et la collaboration de Y E, avocat, font qu’un poste à temps plein ne se justifie plus Par ailleurs, le profond changement généré par la très probable suppression de la commission nationale de prévention des nuisances et le transfert de ses attributions à l’ACNUSA va obliger l’Autorité à réorganiser sa structure et à remplacer le poste de juriste par un poste équivalent à celui de secrétaire général de la CNPN, dans lequel vos compétences professionnelles ne trouveraient pas à s’épanouir ».
C’est dans ce contexte que Mme X a saisi le TAP de deux requêtes tendant à l’annulation de la décision de suppression de l’emploi de juriste et de la décision de non renouvellement de contrat. Par un jugement du 17 juin 2010, le tribunal a rejeté celles-ci. Mme X interjette appel de ce jugement, demandant à la Cour de l’annuler et de faire droit à ses demandes.
Discussion :
1 – Mme X soutient que les mémoires de l’ACNUSA ne devraient pas être pris en compte, faute pour le président de cette autorité de justifier d’une habilitation donnée par son collège et pour l’avocat de justifier d’un mandat accordé par ce même collège.
• La première difficulté concerne le fait de savoir si l’autorité en cause dispose de la personnalité morale pour agir en justice directement sans passer par le truchement du ministère.
Vous constaterez que les dispositions législatives et réglementaires ne vous permettent pas de trancher cette question.
La jurisprudence a, en revanche, rappelé qu’une autorité administrative indépendante a qualité pour agir en justice (CE, 5 novembre 1993, COB, Rec p. 944 ; CAAP 1er décembre 1998, COB, n° 96PA04594). Cette partie de l’argumentation pourra être écartée.
• La seconde difficulté soulevée à trait à l’habilitation reçue du collège. Sur ce second point, l’argumentation ne tient pas, car cet organe délibérant n’est pas une assemblée au sens où on l’entend d’une assemblée locale élue ou d’un conseil d’administration… il n’a aucune compétence en matière d’organisation du service.
Ce rôle d’organisation est donc entièrement dévolu au président de l’ACNUSA et au secrétaire général de cette autorité. Vous pourrez donc écarter l’argument.
• Troisième difficulté soulevée, celle relative à l’habilitation de l’avocat. Toutefois, vous le savez, l’avocat étant, selon l’adage, cru sur sa robe, n’a pas à justifier du mandat qui lui est confié.
Ce troisième argument pourra être écarté, ainsi que, par voie de conséquence, le moyen pris en ses trois branches.
2 – Elle invoque ensuite l’irrégularité du jugement :
• Le tribunal aurait pris en compte et à tort les mémoires en défense signés par la présidente de l’autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, alors que celle-ci ne justifiait pas de sa qualité pour agir au nom de cette autorité administrative indépendante :
Cependant, vous le savez, le CE a rappelé que cette circonstance, si elle est établie, est sans incidence sur la solution d’un litige tendant à l’annulation pour un motif de droit de décisions administratives (CE 9 novembre 1994, Mme Z, n° 120111).
Ce moyen peut être écarté.
• En s’abstenant d’inviter l’ACNUSA à produire les éléments relatifs au coût financier de la réforme envisagée et de fournir des précisions sur l’ensemble des modalités de la collaboration avec Me E, le tribunal a méconnu le droit au procès équitable.
Toutefois, vous le savez, le mode d’administration de la justice par le juge administratif est différent de celui mis en œuvre par le juge judiciaire. Accusatoire pour ce dernier, il oblige les parties à se signifier leurs écritures et à fournir notamment les pièces du dossier sans l’intervention nécessaire du juge ; inquisitoire pour le premier, il place entre les mains du juge toute l’instruction et l’amène à apprécier ce qui lui semble utile à la solution d’un litige. En l’occurrence, les deux demandes formulées par Mme X ne lui ont pas semblé nécessiter la communication de ces documents.
Cela ne méconnaît pas le droit à un procès équitable. Ce moyen sera écarté.
• Le tribunal se serait mépris sur l’objet du litige et la portée de la décision attaquée en motivant son jugement par « la réforme à venir de la structure conduisait à privilégier la mise en place d’un poste de secrétaire général plutôt que le maintien d’un poste de juriste ».
Le recours exercé par Mme X portant sur la suppression de l’emploi et celle de ne pas renouveler en conséquence le contrat, vous ne pourrez dès lors qu’écarter ce moyen eu égard à la motivation sus-rappelée qui est bien en rapport avec ces demandes.
• Elle soutient enfin que le jugement serait insuffisamment motivé :
Parce qu’il n’aurait pas répondu aux arguments concernant des « informations factuelles précises relatives à l’organisation du pôle juridique dont elle avait la charge, à l’importance croissante des tâches assurées, aux modalités concrètes d’exercice de ses fonctions et à la sécurité juridique qui résultait de son expérience professionnelle, notamment en matière aéroportuaire » ou encore en tant que la présidente de l’Acnusa était trop occupée par ses tâches de présidente pour traiter des questions juridiques voire encore de l’argument tiré de l’application de la jurisprudence Corsair qui allait nécessairement alourdir les tâches dévolues au pôle juridique ou sur le détournement de pouvoir.
En revanche, contrairement à ce qui est soutenu, le tribunal a répondu au moyen tiré de ce que la présidente de l’Acnusa n’était pas compétente pour prendre une décision de non renouvellement de contrat.
Toutefois, ainsi qu’il l’a déjà été rappelé, une motivation est suffisante dès lors que le tribunal a répondu aux moyens soulevés, sans qu’il soit jamais obligé de répondre à l’ensemble des arguments invoqués à l’appui d’un moyen (CE 23 septembre 1998, AP-HP, n° 184162 ; CE 4 octobre 1961, Locussol, Rec p. 541 ; CE 23 novembre 1966, Sté d’exploitation du sanatorium Régina, Rec p. 619 ; CE 8 septembre 1999, M. A, n° 127376). Dans ces conditions, dès lors que, comme en l’espèce, le tribunal a répondu aux moyens soulevés, son jugement est suffisamment motivé.
Le jugement est donc régulier.
3 – En ce qui concerne la légalité de la décision de suppression de l’emploi de juriste
A – Elle soutient que la suppression d’un emploi de contractuel relevait de la compétence du collège de l’autorité :
Toutefois, à part un rôle d’avis et de sanction, il ne ressort d’aucune disposition légale ou réglementaire que le collège ait un rôle d’organisation du service (cf article L. 227-9 du code de l’aviation civile)
Ce moyen sera écarté.
B – La suppression de l’emploi de juriste serait contraire à l’intérêt du service et entachée de détournement de pouvoir
Le tribunal a apprécié les motifs retenus et constatés qu’ils n’étaient entachés d’aucune erreur de fait, pas étrangers à l’intérêt du service, ni d’erreur manifeste d’appréciation (CE 9 décembre 1987, commune de Gouvieux, n° 86096 ; CAA Douai, 13 juin 2013, Mme B, n° 12DA00975). Vous pourrez confirmer cette appréciation
Selon Mme X, ni la présidente de l’autorité, ni l’avocat collaborant avec celle-ci, n’étaient à même d’assumer la totalité des tâches qui lui étaient confiées, à l’aune de la réforme législative en cours qui étendait les pouvoirs de cette autorité. Elle en conclut que la suppression du poste de juriste avait pour seul objectif de l’évincer au profit de l’avocat.
Toutefois, ces affirmations ne sont pas démontrées en l’espèce et vous ne disposez d’aucun élément allant dans ce sens, alors en outre que ce type de fonctions, qui semblait devoir se résumer désormais au contentieux des sanctions, et ne justifiait plus, du fait de la volonté de la présidente de l’autorité de traiter directement les autres aspects juridiques, une activité juridique à temps complet, pouvait être externalisé. Notons qu’une modification du temps de travail de Mme X à mi-temps lui a été proposée préalablement et a été refusé par cette dernière.
De surcroît, même si un pôle « amendes administratives » a été créé après le départ de Mme X, rien ne démontre que les tâches remplies par les agents de ce pôle soient accomplies par agents disposant de compétences juridiques élevées.
Le détournement de pouvoir n’est donc pas établi.
La décision pourra être confirmée à travers le rejet des conclusions dirigées contre le jugement.
4 – En ce qui concerne la légalité de la décision de non renouvellement du contrat :
• Vous pourrez tout d’abord écarter le moyen tiré de l’illégalité, par voie d’exception, de la décision de suppression de l’emploi de juriste si vous nous suivez dans notre proposition de confirmation.
• Le moyen tiré ensuite de l’incompétence du président de l’Acnusa, pourra être écarté par adoption des motifs précédents, puisque le collège n’est pas compéten pour traiter de ce type de question.
• Mme X soutient que l’Acnusa aurait dû chercher à la reclasser dans un autre emploi :
Toutefois, si la jurisprudence récente admet qu’il existe un principe général du droit qui impose à une administration d’envisager le reclassement des contractuels, c’est uniquement lorsqu’ils sont titulaires d’un CDI. Ce qui n’est pas le cas de Mme X alors en outre que son contrat a été interrompu à son terme.
• L’apelante soutient que l’Acnusa aurait employé un autre agent sur le poste qui était supprimé
Toutefois, ainsi qu’il a déjà été dit, l’emploi du pôle « amendes administratives », créés après du départ de Mme X, est sans rapport avec l’emploi de juriste qu’elle occupait. Ce moyen pourra être écarté.
Les conclusions aux fins d’annulation seront donc rejetées.
4 – L’équité nous semble justifier que vous rejetiez les conclusions au titre des frais irrépétibles présentées par l’Acnusa.
Par ces motifs, nous concluons au rejet de la requête de Mme X et les conclusions présentées au titre des frais irrépétibles par l’ACNUSA.
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Textes cités dans la décision

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