CAA de Paris, conclusions du rapporteur public sur l'affaire n° 08P06322

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA
Juridiction : Cour administrative d'appel
Précédents jurisprudentiels : 29 mai 2009, société Les Laboratoires Servier, n° 307162
29 octobre 2008, société Laboratoire Glaxosmithkline, n° 307035

Texte intégral

N° 08PA06322
Société UCB Pharma SA
Audience du 13 septembre 2010
Lecture du 27 septembre 2010
CONCLUSIONS de Mme Anne SEULIN, Rapporteur public
L’article L. 5122-9 du code de la santé publique définit un mécanisme de contrôle a posteriori des documents publicitaires élaborés par les entreprises pharmaceutiques à l’attention des professions de santé.
Cet article dispose que les documents en question doivent être déposés auprès de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS). Lorsque l’Agence constate que, contrairement aux exigences des articles L. 5122-2 et L. 5122-3 du code de la santé publique, la publicité est trompeuse, qu’elle comporte un risque pour la santé publique, qu’elle ne respecte pas les dispositions de l’autorisation de mise sur le marché ou que le médicament n’a pas fait l’objet d’une telle autorisation, elle peut prendre, en vertu de l’article L. 5122-9 susvisé, trois types de mesures : ordonner la suspension de la publicité, exiger qu’elle soit modifiée, ou l’interdire purement et simplement en exigeant le cas échéant la diffusion d’un rectificatif.
Ces dispositions ont été mises en œuvre en 2004 par l’AFSSAPS à l’égard d’un médicament anti-histaminique, ou anti-allergique, dénommé Xyzall, dont le principe actif est la lévocétirizine et qui est commercialisé par le laboratoire UCB Pharma SA, qui a obtenu une autorisation de mise sur le marché le 14 février 2002, modifiée le 5 décembre suivant.
La lévocétirizine est indiquée dans le traitement symptomatique des rhinites allergiques saisonnières, des rhinites allergiques perannuelles et de l’urticaire chronique idiopathique.
Le 21 octobre 2003, la commission chargée au sein de l’AFSSAPS d’examiner les documents publicitaires rédigés par les entreprises pharmaceutiques, dénommée commission de la publicité et de la diffusion de recommandations sur le bon usage des médicaments, a estimé que trois documents relatifs au Xyzall, consistant en deux aides de visite et une brochure, destinées aux professionnels de santé, contenaient des mentions inexactes à propos de la propriété anti-inflammatoire du Xyzall et du bénéfice clinique pour les patients.
Après avoir diligentée une procédure contradictoire, au cours de laquelle la commission susvisée s’est réunie une seconde fois, le 18 novembre 2003, l’AFSSAPS a, par une décision du 10 février 2004, interdit les publicités, sous quelque forme que ce soit, pour la spécialité Xyzall reprenant les allégations de propriété anti-inflammatoire de ce médicament et de ses bénéfices cliniques pour les patients.
La société UCB Pharma a contesté sans succès cette décision devant le tribunal administratif de Paris et c’est la raison pour laquelle vous êtes aujourd’hui saisi d’une requête en appel de ce laboratoire pharmaceutique.
1. Le premier moyen soulevé en appel par la société UCB Pharma SA critique la régularité de la composition de la commission chargée du contrôle de la publicité lors des réunions des 21 octobre et 18 novembre 2003 en raison de la présence de nombreux agents de l’AFSSAPS et de suppléants alors que certains de leurs titulaires étaient bien là.
La commission chargée du contrôle de la publicité est obligatoirement consultée avant une interdiction de publicité en vertu de l’article R. 5047-5 alors en vigueur, devenu l’article R. 5122-14 du code de la santé publique.
Selon l’article R. 5054 du code de la santé publique dans sa rédaction alors en vigueur, cette commission est composée de 31 membres, dont une majorité de personnalités qualifiées et de représentants des personnels (médecins, pharmaciens, publicitaires, fabricants).
Selon l’article R. 5054-1 du même code, des suppléants sont désignés en nombre égal et dans les mêmes conditions et la commission peut faire appel à des experts, qui siègent avec voix consultative, ou bien le président de l’AFSSAPS peut demander à la commission d’entendre des experts. Enfin, le secrétariat de la commission est assuré par l’AFSSAPS en vertu de l’article R. 5054-2 du même code alors en vigueur.
Vous constaterez à la lecture du procès-verbal de séance du 21 octobre 2003 que 8 suppléants et 13 agents de l’AFSSAPS étaient présents, pour 23 membres titulaires qui assistaient à la séance et, à la lecture du procès-verbal de séance du 18 novembre 2003, que 7 suppléants et 15 agents de l’AFSSAPS étaient présents, pour 21 membres titulaires qui assistaient à la séance. Le quorum était donc atteint dans les deux cas.
Le Conseil d’Etat a déjà eu l’occasion de se prononcer sur la question de la régularité de l’avis rendu par la commission chargée du contrôle de la publicité et de la diffusion de recommandations sur le bon usage des médicaments, à partir d’un moyen rigoureusement identique à celui soulevé aujourd’hui devant vous, tirés de la présence d’un nombre impressionnant d’agents de l’AFSSAPS, bien supérieur à celui strictement nécessaire pour assurer le secrétariat de la commission et de la présence de suppléants en même temps que leur titulaires.
Dans un arrêt du 29 mai 2009, société Les Laboratoires Servier, n°307162 et suivants publié aux tables, la Haute Assemblée a considéré que l’assistance aux débats de cette commission consultative obligatoire de personnes qui n’en sont pas membres et n’exerçaient pas toutes les fonctions de secrétariat de la commission, mais qui sont toutes astreintes à une obligation de confidentialité, n’avait pas été de nature à entacher d’irrégularité les débats, dès lors qu’elles n’avaient participé ni aux débats, ni aux votes et n’avaient exercé aucune influence sur les débats.
Or, pas plus en première instance qu’en appel, la société UCB Pharma ne démontre que les agents de l’AFSSAPS auraient participé aux débats et aux votes lors des séances des 21 octobre et 18 novembre 2003, alors que leur positionnement hiérarchique ne pouvait d’avantage être considéré comme un élément de pression. A l’instar de ce qu’était leur situation dans l’arrêt des Laboratoires Servier, ils étaient, dans notre espèce, présents au titre d’une simple assistance silencieuse, comme simples spectateurs et en vue de leur propre information. Par ailleurs, tous ces fonctionnaires sont tenus au secret professionnel en vertu de l’article L. 5323-4 du code de la santé publique.
S’agissant ensuite de la présence des suppléants alors que, pour certains, leurs titulaires étaient présents, il s’agit d’une pratique fréquente visant à garantir que le quorum reste atteint en cas de départ des titulaires. Là aussi, rien n’indique que les suppléants auraient siégé à la place de leur titulaire.
Ce premier moyen tiré de la composition irrégulière de la commission chargée au sein de l’AFSSAPS du contrôle de la publicité sera donc écarté.
2. La société UCB Pharma SA soulève ensuite le moyen tiré du non respect de la procédure contradictoire, au motif que le délai de convocation de quinze jours à la séance de la commission, prévu par le règlement intérieur de l’AFSSAPS, n’aurait pas été respecté.
En l’espèce, la société UCB Pharma a été convoquée par fax le 4 novembre 2003 pour une audition du 18 novembre 2003, soit 14 jours à l’avance.
Vous constaterez en premier lieu que l’article R. 5047-5 du code de la santé publique dans sa version alors en vigueur ne prévoit aucun délai d’information ou de convocation de la société pharmaceutique devant la commission chargée du contrôle de la publicité.
Ensuite, si la société requérante produit un règlement intérieur de l’AFSSAPS daté du 19 mars 2007, dont le V-3 prévoit qu’un courrier recommandé avec accusé de réception est adressé à la société concernée quinze jours avant la commission suivante lui notifiant les mesures projetées et l’invitant à présenter des observations écrites et, si elle le souhaite, à être entendu par la commission, force est de constater que ce règlement intérieur n’était pas encore applicable à la date des séances des 21 octobre et 18 novembre 2003.
Enfin, dans un arrêt du 29 octobre 2008, société Laboratoire Glaxosmithkline, n°307035, publié aux tables, le Conseil d’Etat a considéré qu’un délai de dix jours était suffisant pour permettre au laboratoire pharmaceutique de préparer ses observations, alors qu’en l’espèce, la société UCB Pharma a disposé d’un délai de 14 jours.
Le moyen tiré de la violation de la procédure contradictoire sera donc écarté.
3. En ce qui concerne maintenant les moyens de légalité interne, nous rappellerons que l’article L. 5122-2 du code de la santé publique dispose que « la publicité définie à l’article L. 5122-1 ne doit pas être trompeuse ni porter atteinte à la protection de la santé publique. Elle doit présenter le médicament ou produit de façon objective et favoriser son bon usage. Elle doit respecter les dispositions de l’autorisation de mise sur le marché ».
La société requérante soulève les moyens tirés de l’erreur manifeste d’appréciation et du caractère disproportionné de la sanction.
Vous savez que le juge administratif exerce un contrôle restreint sur les appréciations techniques, notamment médicales, justifiant le prononcé d’une mesure d’interdiction de publicité et un contrôle normal sur le caractère proportionné de cette mesure : arrêts précités des Laboratoires Serviers et Laboratoire Glaxosmithkline et C.E. 28 juillet 2000 association Force Ouvrière consommateurs et autres, lebon p. 352.
En l’espèce, la société UCB Pharma soutient que le Xyzall a une efficacité dans les inflammations allergiques et produit à l’appui de ses allégations une étude réalisée par les laboratoires X ainsi que d’autres pièces en anglais tendant à démontrer l’effet anti-inflammatoire de la lévocétirizine.
Toutefois, ces pièces ne permettent pas de remettre en cause l’appréciation très précise portée par l’AFSSAPS dans la décision d’interdiction du 10 février 2004, selon laquelle le résumé des caractéristiques du produit annexé à l’autorisation de mise sur le marché n’avait pas validé la propriété « anti-inflammatoire » pour le Xyzall, tandis que l’étude de X et al, qui avait seulement constaté 3 effets inhibiteurs sur les 7 testés dans l’étude, n’avait pas permis de démontrer la propriété anti-inflammatoire de Xyzall ni de démontrer un bénéfice clinique pour les patients.
L’AFSSAPS a donc pu estimer, sans erreur manifeste d’appréciation, que le produit n’était pas présenté de manière objective et que la publicité était donc trompeuse.
S’agissant maintenant du moyen tiré du caractère disproportionné de la sanction, la société UCB Pharma se borne à soutenir que les mêmes mentions avaient été avancées pour la spécialité Zyrtec et que ce produit avait seulement fait l’objet d’une mise en demeure.
Il n’est toutefois pas établi que ces deux spécialités pharmaceutiques se trouvaient placées dans des situations comparables. Par ailleurs, au regard des griefs retenus par l’AFSSAPS tirés du non respect des indications de l’autorisation de mise sur le marché et de l’absence de présentation objective du produit, qui rendait la publicité du Xyzall trompeuse, la sanction de l’interdiction de la publicité n’apparaît pas disproportionnée.
Ce dernier moyen ne pourra donc d’avantage être accueilli.
PCMNC au rejet de la requête de la société UCB Pharma.
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