CAA de Paris, conclusions du rapporteur public sur l'affaire n° 10PA04337

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Sur la décision

Référence :
CAA
Juridiction : Cour administrative d'appel
Précédents jurisprudentiels : 3 mai 2004, n° 258399
CAAP 2 novembre 2009 M. Y Z n° 08PA03262
C.E. 12 décembre 2007 M. X n° 288978

Texte intégral

N° 10PA04337
Institut professionnel des métiers du sport C/ ministre de la santé, de la jeunesse et des sports
Séance du 12 mars 2012
Lecture du 26 mars 2012
CONCLUSIONS de Mme Anne SEULIN, Rapporteur public
L’Institut professionnel des métiers du sport dit IPMS est un organisme de formation qui préparait à l’ancien brevet d’Etat d’éducateur sportif option « métiers de la forme ». Ce brevet d’Etat a été remplacé par le brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport, spécialité « activités gymniques, de la forme et de la force » mention « forme en cours collectif » et mention « haltères, musculation et forme sur plateau », par l’arrêté du 10 août 1985 portant création de la spécialité « activités gymniques, de la forme et de la force » de ce brevet.
Le principe de ce nouveau brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport délivré par le ministère de la jeunesse et des sports, qui se substitue aux anciens brevets d’Etat, a été mis en place par le décret n°2001-792 du 31 août 2001 codifié aux articles D. 212-20 et suivants du code du sport et organisé par un arrêté du 18 avril 2002.
Le 27 janvier 2007, la direction régionale de la jeunesse et des sports d’Ile de France a organisé une réunion d’information sur le brevet professionnel activités gymniques de la forme et de la force au cours de laquelle a été présentée la procédure d’habilitation et à laquelle était présent l’IPMS.
Le 5 juin 2007, l’IPMS a déposé un dossier de demande d’habilitation à la direction régionale. Une décision de refus d’habilitation lui a été notifiée le 7 août 2007, que l’institut a contesté par un recours gracieux du 29 août 2007. Une décision expresse de rejet lui a été opposée le 1er octobre suivant.
Puis, par lettre du 2 mai 2008, l’IPMS a demandé à l’administration de l’indemniser des préjudices qu’il avait subis du fait de l’illégalité des décisions de refus d’habilitation. Cette demande a été rejetée le 15 juillet 2008.
L’IPMS a alors saisi le tribunal administratif de Paris de deux requêtes, l’une enregistrée le 30 octobre 2007 tendant à l’annulation des décisions des 7 août et 1er octobre 2007 lui refusant l’habilitation et l’autre, enregistrée le 11 septembre 2008, tendant à la condamnation de l’Etat à lui verser la somme de 255.842 euros en réparation du préjudice subi.
Par jugement du 18 juin 2010 statuant sur ces deux requêtes, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 7 août 2007 au motif de l’incompétence de son auteur et rejeté le surplus des conclusions de l’IPMS.
C’est le jugement dont l’institut fait aujourd’hui appel en tant qu’il n’a pas fait droit à ses conclusions tendant à l’annulation de la décision du 1er octobre 2007 et à ses conclusions indemnitaires.
1° L’IPMS fait d’abord valoir que l’administration ne pouvait pas rejeter son dossier de demande d’habilitation au motif de son caractère incomplet dès lors qu’elle ne l’avait pas invité à le compléter.
Force est toutefois de constater que la décision de refus d’habilitation du 1er octobre 2007 n’est pas fondée sur le caractère incomplet du dossier déposé par l’IPMS, qui comportait les 10 pièces requises par l’article 7 de l’arrêté du 18 avril 2007. Le moyen sera donc écarté.
2° L’IPMS poursuit en faisant valoir que le directeur régional a entaché sa décision d’erreur de droit et d’erreur manifeste d’appréciation pour les quatre motifs sur lesquels il s’et fondé.
Nous estimons, à l’instar des premiers juges, que vous n’exercez qu’un contrôle restreint sur la décision du directeur régional d’habiliter ou non un organisme de formation, compte tenu du caractère technique de la matière, pour laquelle l’administration dispose d’un pouvoir discrétionnaire d’appréciation : voir par analogie avec le reconnaissance d’une qualification professionnelle : C.E. 12 décembre 2007 M. X n°288978 mentionné aux tables ; CAAP 2 novembre 2009 M. Y Z n°08PA03262.
a/ En ce qui concerne d’abord les deux motif se rattachant à l’analyse de l’emploi,
L’arrêté du 18 avril 2002 indique que les organismes de formation doivent produire un référentiel professionnel pour la spécialité visée, complété et adapté.
Il ressort de l’instruction du 11 octobre 2002, qui ne vous est certes pas opposable mais dont vous pouvez vous servir pour comprendre les modalités de mise en œuvre du nouveau brevet professionnel, qu’il est demandé aux organismes de formation candidat à l’habilitation de compléter et d’adapter le référentiel du brevet professionnel afin d’adapter le diplôme et la formation y conduisant à la réalité locale des emplois et d’apprécier l’opportunité de la mise en œuvre de la formation dans la région considérée compte tenu du contexte socio-économique et de la cohérence de cette offre avec le schéma régional des formations.
Cela suppose pour l’organisme de formation d’analyser l’emploi sur le territoire dans le secteur d’activité concerné, en repérant la liste des employeurs et des entreprises d’accueil potentiels et en précisant les conditions dans lesquelles ces derniers sont associés à la conception et à la mise en œuvre de la formation et d’analyser les profils d’emploi à court et moyen terme dans les mêmes limites géographiques et professionnelles.
Le premier motif de la décision attaquée du 1er octobre 2007 est le suivant : « La justification de la formation s’appuie essentiellement sur des données empruntées à des études nationales et à une enquête de l’OMNAS de 2004 relative au secteur marchand de la forme en Ile de France. L’enquête locale présentée p. 18 du dossier porte sur des besoins généralistes de formation et non pas sur une étude circonstanciée des besoins d’emploi dans un réseau d’entreprises partenaires clairement identifiées. »
L’IPMS fait valoir que l’étude au niveau local figurant pages 11 à 17 de son dossier met en évidence les spécificités locales. Toutefois, vous constaterez que l’étude de marché ne recense pas les besoins précis d’entreprises identifiées dans les métiers de la forme, et, ainsi que l’a très justement relevé le tribunal, ces quelques pages reprennent pour partie l’analyse figurant à l’annexe I du décret du 10 août 2005.
En ce qui concerne ensuite les contrats de partenariat, la décision attaquée énonce : « La liste d’employeurs potentiels présentée p. 96 et 97 inclut certaines structures déjà partenaires réels d’établissements de formations habilités dont la taille ne permet pas la prise en charge de stagiaires supplémentaires… ».
L’IPMS fait valoir qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’impose que les entreprises partenaires soient dans un lien d’exclusivité avec l’organisme qui sollicite l’habilitation.
Force est cependant de constater que ce qui a motivé le directeur régional n’est pas la circonstance que les entreprises partenaires de l’IPMS soient déjà en relation avec d’autres organismes habilités, mais le fait que l’institut n’a pas démontré qu’il détenait de véritables contrats de partenariat avec ces sociétés et que les entreprises seraient à même d’accueillir ses stagiaires, alors que le respect du principe de l’alternance est fondamental dans le cursus de formation, comme cela ressort de l’article 14 du décret du 31 août 20101, codifié à l’article D. 212-33 du code du sport.
Si l’IPMS fait valoir aujourd’hui qu’elle dispose d’un réseau développé en Ile de France et verse aux débats, pour la première fois en appel, des fiches d’engagement sur l’insertion professionnelle des stagiaires préparant à ce brevet professionnel émanant de différents clubs de remise en forme situés en région Ile de France, vous constaterez que sur les 61 sociétés figurant sur la liste dressée aux pages 96 et 97 de son dossier d’habilitation, seules 11 ont signé des fiches d’engagement d’insertion professionnelles pour des stagiaires tandis que les 10 autres sociétés qui ont signé des fiches n’apparaissent pas sur la liste.
Il est ainsi établi que la liste d’entreprises dressée sans plus de précision dans le dossier d’habilitation, ne correspond pas nécessairement à toutes les sociétés avec lesquels l’IPMS disposerait d’un partenariat effectif.
Aucune erreur de droit ni erreur manifeste d’appréciation ne sera donc constatée.
b/ En ce qui concerne ensuite le troisième motif tiré de l’unité capitalisable UC 10, l’article 15 de l’arrêté susvisé du 18 avril 2002 portant organisation du brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport délivré par le ministère de la jeunesse et des sports définit les dix unités capitalisables constitutives du référentiel de certification du diplôme. L’unité capitalisable 10 vise à l’adaptation à l’emploi et à un contexte particulier.
La décision attaquée indique « L’UC 10 est une UC d’adaptation destinée à l’acquisition de compétences non développées dans les autres UC. D’autre part, elle est non construite et s’appuie essentiellement sur une énumération de thème ».
L’UC 10 développée par l’IPMS dans son dossier de demande d’habilitation (P. 37) a pour but de « agir sur la prévention des problèmes de santé par le sport » autour de trois axes :
- identifier les éléments de santé qui modifient la pratique sportive
- conseiller sur une pratique sportive adaptée
- accompagner dans la démarche de remise en forme.
Ces objectifs ne se différencient pas pleinement du contenu des UC 2 « être capable de prendre en compte les caractéristiques des publics pour préparer une action éducative ou UC 6 : « être capable d’encadrer un groupe dans le cadre d’une action d’animation ». Surtout, l’institut ne démontre pas que cette spécialité répondrait à des besoins locaux définis en partenariat avec les employeurs potentiels.
Vous constaterez aussi que dans le nouveau dossier d’habilitation déposé en 2008 qui a permis à l’IPMS d’obtenir son habilitation, l’institut a fait preuve d’innovation en proposant un UC 10 « gérer et commercialiser des services sportifs ».
L’IPMS produit toutefois une liste d’organismes de formation, pour lesquels l’unité capitalisable d’adaptation n°10 portant exactement sur le même thème, a été admise.
Dans ces conditions, alors même que vous admettriez une erreur manifeste d’appréciation du ministre sur ce motif, nous vous proposerons de le neutraliser dès lors que l’administration aurait pris la même décision en se fondant seulement sur les deux premiers motifs relatifs à la situation de l’emploi qui ne sont entachés ni d’erreur de droit, ni d’erreur manifeste d’appréciation.
c/ En ce qui concerne le dernier motif tiré des problèmes dans la conception et l’organisation de la formation, dans l’organisation et la conduite de l’alternance et dans la certification,
Là encore, à la lecture des pages 74 et suivants du dossier d’habilitation, vous constaterez que la présentation de la formation est vraiment sommaire en ce qui concerne notamment le rôle des tuteurs dans le cadre de l’alternance, rien n’est dit sur les blocs de formation et leurs contenus et sur la façon dont les unités capitalisables sont regroupées et la durée consacrée à chaque unité capitalisable tandis que le planning de la formation est vague sur les contenus et sur le partage entre les périodes en entreprise et les périodes hors entreprise.
En outre, les procédures de certifications n’étaient pas achevées lorsque le dossier a été présenté tandis que la mise en situation pédagogique, prévue le 11 octobre 2007 pour une formation débutant le 1er octobre, ne laissait pas suffisamment de temps aux stagiaires pour acquérir les fondamentaux en matière de pédagogie et de sécurité des pratiquants.
Le deuxième dossier présenté pendant l’année 2008 par l’IPMS et qui a abouti à son habilitation n’est absolument pas comparable, car il est beaucoup plus détaillé et précis notamment sur l’évaluation du positionnement et, en page 44 et suivantes, pour tout ce qui relève de l’organisation et du contenu de la formation, autant d’insuffisances qui étaient pointées par le ministre dans le premier dossier.
Aucune erreur manifeste d’appréciation ne sera donc, là encore, décelée.
d/ Si l’IPMS fait enfin valoir que son dossier aurait été traité de manière discriminatoire par rapport aux autres candidats à l’habilitation, elle ne l’établit pas.
Si vous nous suivez et admettez la légalité de la décision du 1er octobre 2007, vous ne pourrez que rejeter les conclusions indemnitaires de la société IPMS, en l’absence de faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat.
S’agissant de la décision du 7 août 2007 qui a été annulé par les premiers juges pour incompétence, comme l’indique clairement le commissaire du Gouvernement dans ses conclusions sur l’arrêt Devillers du 3 mai 2004, n°258399 mentionné aux tables, il convient de distinguer, non pas entre illégalité externe et illégalité interne, mais entre les illégalités source directe et certaine de préjudice et les illégalités qui ne revêtent pas de caractère préjudiciable direct.
Or, comme l’a aussi constaté le tribunal, il n’existe aucun lien de causalité entre l’illégalité fautive de la décision du 7 août 2007 pour incompétence de son signataire et les préjudices invoqués par l’IPMS qui résultent seulement de l’application de dispositions législatives et réglementaires et du fait que l’IPMS ne remplissait pas les conditions de fond pour se voir délivrer l’habilitation.
PCMNC : au rejet de la requête de l’institut professionnel des métiers du sport.
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