Proposition de loi ordinaire instaurer un mécanisme de régulation carcérale et de prévention de la surpopulation pénitentiaire

En discussion
Dépôt, 3 juillet 2023

Sur le projet de loi

Dépôt du projet de loi : 3 juillet 2023
Nombre d'étape : 1 étape
Articles au dépôt : 4 articles

Document parlementaire1


Mesdames, Messieurs, Bien que la France connaisse depuis des décennies de nombreuses réformes procédurales pour endiguer la surpopulation carcérale, force est de constater qu'elle n'arrive pas à se débarrasser de ce fléau. Pire, la France est condamnée régulièrement pour l'état de ses prisons et cela largement pour les conséquences de cette surpopulation carcérale enkystée. Depuis cette année 2022, la France franchit chaque mois son record d'incarcération. Au 1er avril 2023, elle comptait 73 080 personnes détenues, dont 19 773 prévenus. Le taux d'occupation était de 142,2 % dans les … 

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Texte du document

I. – Après le chapitre III du titre Ier du livre II du code pénitentiaire, il est inséré un chapitre III bis ainsi rédigé :
« Chapitre III bis
« Mécanisme de régulation carcérale
et de prévention de la surpopulation pénitentiaire
« Art. L. 213-10.  – L'administration pénitentiaire définit un seuil de criticité pour chaque établissement, correspondant à un taux d'occupation à partir duquel les services des établissements ne sont plus en mesure de fonctionner sans affecter durablement la qualité de la prise en charge et les droits fondamentaux des personnes écrouées.
« Le dépassement de ce seuil entraîne la saisine de la commission de l'application des peines, qui doit envisager des mesures de régulation et de prévention.
«  Un décret précise les modalités de définition de ce seuil de criticité pour chaque établissement.
« Art. L. 213-11.  – Aucune détention ne peut être effectuée, ni mise à exécution, dans un établissement pénitentiaire ou dans un quartier le composant, au-delà de la capacité d'accueil.
« Pour permettre l'incarcération immédiate des personnes écrouées lorsqu'elle est ordonnée par l'autorité judiciaire, des places sont réservées dans chaque établissement, afin de mettre en œuvre le mécanisme de régulation carcérale de la surpopulation pénitentiaire prévu au premier alinéa.
« L'incarcération d'une personne condamnée ne peut conduire à la libération d'une personne prévenue et, inversement, l'incarcération d'une personne prévenue ne peut conduire à la libération d'une personne condamnée.
«  Un décret précise les modalités de calcul du nombre de places réservées au sein de chaque établissement pénitentiaire, ce nombre étant fixé en proportion de la capacité d'accueil de celui-ci.
« Lorsque l'arrivée en détention d'une personne écrouée conduit un établissement pénitentiaire à utiliser l'une des places réservées prévues au présent article, une personne détenue condamnée ou prévenue au sein du même établissement doit être libérée selon les procédures prévues aux articles L. 213-12 et L. 213-13, dès que le seuil de criticité est atteint.
« Art. L. 213-12. – Lorsque le mécanisme de libération prévu à l'article L. 213-11 doit être mis en œuvre au sein d'un établissement pénitentiaire, la libération d'une personne condamnée est décidée, dans le cadre d'une mesure de libération conditionnelle, de semi-liberté, de placement à l'extérieur, de détention à domicile sous surveillance électronique, de suspension ou de fractionnement de peine ou d'une libération sous contrainte.
« Lorsqu'il s'agit d'une mesure de libération conditionnelle, de semi-liberté, de placement à l'extérieur, de détention à domicile sous surveillance électronique, de suspension ou de fractionnement de peine, le juge de l'application des peines octroie la mesure dans les conditions prévues aux articles 712-6 à 712-10 du code de procédure pénale.
« Lorsqu'il s'agit d'une libération sous contrainte, le juge de l'application des peines octroie la mesure dans les conditions prévues à l'article 720 du code de procédure pénale.
« La décision prise en application des deuxième et troisième alinéas du présent article doit intervenir dans un délai de quinze jours à compter de la date d'écrou de la personne détenue entrée en surnombre, après avoir recueilli le consentement des intéressés. Elle est mise en œuvre sans délai.
« À défaut de décision du juge de l'application des peines dans le délai de quinze jours, une réduction de peine exceptionnelle d'un quantum égal au reliquat de la peine restant à subir, liée aux circonstances exceptionnelles de surpopulation carcérale, est accordée par le juge de l'application des peines après avis de la commission de l'application des peines, recueilli par tous moyens, à une personne détenue condamnée en exécution d'une ou plusieurs peines privatives de liberté dont le reliquat de peine est inférieur ou égal à six mois. Cette réduction de peine peut être ordonnée sans que soit consultée la commission de l'application des peines en cas d'avis favorable du procureur de la République. À défaut d'un tel avis, le juge peut statuer au vu de l'avis écrit des membres de la commission, recueilli par tout moyen.
«  Art. L. 213-13. – Lorsque le mécanisme de libération prévu à l'article L. 213-11 doit être mis en œuvre au sein d'un établissement pénitentiaire, la libération d'une personne mise en examen placée en détention provisoire est accordée dans les conditions prévues au second alinéa de l'article 147 du code de procédure pénale.
« La mise en liberté peut être assortie de mesures de contrôle judiciaire. Elle peut également prendre la forme d'une assignation à résidence avec surveillance électronique en application de l'article 142-6 du même code.
« La décision de mise en liberté doit intervenir dans un délai de vingt jours à compter de la date d'écrou du détenu entré en surnombre. Elle est mise en œuvre sans délai.
« À défaut de décision du juge d'instruction ou du juge des libertés et de la détention dans le délai de vingt jours, une mise en liberté immédiate, liée aux circonstances exceptionnelles de surpopulation carcérale, est ordonnée par le juge des libertés et de la détention à une personne mise en examen placée en détention provisoire pour des faits relevant des juridictions correctionnelles.
« Art. L. 213-14. – L'administration pénitentiaire fournit une information hebdomadaire présentant la situation et le taux d'occupation des établissements pénitentiaires à tous les magistrats du ressort et, le cas échéant, des ressorts limitrophes.
« Art. L. 213-15. – Les modalités d'application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d'État. »
II. – Le I entre en vigueur six mois après la promulgation de la présente loi.

I. – Afin d'assurer une effectivité au principe de l'encellulement individuel, le code pénitentiaire est ainsi modifié :
1° L'article L. 6 est ainsi modifié :
a) À la dernière phrase, après le mot : « restrictions », sont insérés les mots : « doivent demeurer limitées et » ;
b) Est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le recours à des matelas au sol pour le couchage des personnes détenues est interdit. » ;
2° L'article L. 213-4 est abrogé.
II. – Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport fixant les conditions que doit réunir une place de détention afin de respecter la dignité humaine et de contribuer aux objectifs de prévention de la récidive et de réinsertion.

Dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport étayant la nécessité de mettre en œuvre une politique pénale et carcérale réduisant le recours à la détention et analysant les causes de l'inflation pénale, ainsi que les réorientations budgétaires afférentes.