Proposition de loi ordinaire indemnisation des victimes du chlordécone en guadeloupe et en martinique

En discussion
Dépôt, 10 juillet 2018

Sur le projet de loi

Dépôt du projet de loi : 10 juillet 2018
Nombre d'étape : 1 étape
Articles au dépôt : 12 articles

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Doctrine propose ici les documents parlementaires sur les articles modifiés par les lois à partir de la XVe législature (2017).

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Texte du document

I. – La République française reconnaît le préjudice subi par les populations des collectivités de la Guadeloupe et de la Martinique tiré des dommages sanitaires, environnementaux et économiques de la pollution des terres provoquée par l'usage comme insecticide agricole de la molécule organochlorée persistante qu'est le chlordécone.
II. – Il est créé, sous le nom de « Fonds d'indemnisation des victimes du chlordécone en Guadeloupe et en Martinique », un établissement public national à caractère administratif, doté de la personnalité juridique et de l'autonomie financière, placé sous la tutelle des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et du ministre en charge des outre-mer.
Cet établissement a pour mission de réparer les préjudices définis à l'article 2 de la présente loi. Le régime de garantie que constitue ce fonds intervient en solidarité avec toute responsabilité qui pourrait être judiciairement établie à l'égard d'une personne, d'une entreprise ou de toute organisation ayant manqué au devoir de vigilance qui lui incombait dans l'usage des pesticides mentionnées au I du présent article, dans sa sphère d'influence et qui pourrait également être reconnue responsable dans les conditions fixées aux article L. 225-102-4 et L. 225-102-5 du code de commerce.
Les seuils mentionnés aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 225-102-4 ne sont pas applicables au régime de responsabilité prévu à l'alinéa précédent du présent article.
Il est administré par un conseil d'administration composé de représentants de l'État, du conseil régional et du conseil départemental de Guadeloupe, la collectivité territoriale de Martinique, des organisations siégeant à la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, des associations locales d'aide aux victimes du chlordécone et de personnalités qualifiées. Il est présidé par un Président de chambre ou un conseiller à la Cour de cassation, en activité ou honoraire, et administré par une commission d'indemnisation.
Il emploie des agents régis par les titres II, III ou IV du statut général des fonctionnaires en position d'activité, de détachement ou de mise à disposition. Il emploie également des agents contractuels de droit public avec lesquels il peut conclure des contrats à durée déterminée ou indéterminée. Il peut également faire appel à des agents contractuels de droit privé pour occuper des fonctions exigeant une qualification particulière dans le domaine de l'indemnisation des préjudices ou des maladies professionnelles. Les agents contractuels employés par le Fonds d'indemnisation des victimes du chlordécone en Guadeloupe et en Martinique sont tenus au secret et à la discrétion professionnels dans les mêmes conditions que celles qui sont définies à l'article 26 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.
Il est créé, au sein du fonds défini au premier alinéa, une Commission médicale autonome. Elle rend, le cas échéant, un avis sur l'existence d'un lien direct entre l'exposition au chlordécone et la survenue de la pathologie. Sa composition est arrêtée par les ministres chargés de l'agriculture, de la santé et des outre-mer.
Il est créé, au sein du fonds défini au premier alinéa, une Commission scientifique autonome. Elle rend, le cas échéant, un avis sur l'existence d'un lien direct entre l'utilisation du chlordécone et son incidence sur la pollution des sols et des rivières de Guadeloupe et de Martinique. Sa composition est arrêtée par les ministres chargés de l'agriculture, de l'environnement et des outre-mer.

Peuvent obtenir la réparation intégrale de leurs préjudices au titre du fonds mentionné à l'article 1er de la présente loi :
1° Les personnes qui ont obtenu la reconnaissance d'une maladie professionnelle occasionnée par l'exposition au chlordécone, au titre de la législation française de sécurité sociale ou d'un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d'invalidité ;
2° Les personnes qui ont subi un préjudice résultant directement d'une exposition au chlordécone en Guadeloupe et en Martinique ;
3° Les enfants, atteints d'une pathologie occasionnée par l'exposition au chlordécone de l'un de leurs parents ;
4° Les professionnels de la mer qui ont subi un préjudice résultant directement de l'utilisation du chlordécone en Guadeloupe et en Martinique ;
5° Les personnes qui souffrent d'une pathologie résultant directement d'une utilisation du chlordécone en Guadeloupe et en Martinique ;
6° Les ayants droit des personnes mentionnées aux 1°, 2°, 4° et 5°.

Le demandeur justifie de l'exposition au chlordécone et de l'atteinte à l'état de santé de la victime.
Le demandeur informe le fonds des autres procédures relatives à l'indemnisation des préjudices définis à l'article 1er de la présente loi éventuellement en cours. Si une action en justice est intentée, il informe le juge de la saisine du fonds.
Si la maladie est susceptible d'avoir une origine professionnelle et en l'absence de déclaration préalable par la victime, le fonds transmet sans délai le dossier à l'organisme concerné au titre de la législation française de sécurité sociale ou d'un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d'invalidité. Cette transmission vaut déclaration de maladie professionnelle. Elle suspend le délai prévu à l'article 5 de la présente loi jusqu'à ce que l'organisme concerné communique au fonds les décisions prises. En tout état de cause, l'organisme saisi dispose pour prendre sa décision d'un délai de trois mois, renouvelable une fois si une enquête complémentaire est nécessaire. Faute de décision prise par l'organisme concerné dans ce délai, le fonds statue dans un délai de trois mois.
Le fonds examine si les conditions de l'indemnisation sont réunies : il recherche les circonstances de l'exposition au chlordécone et ses conséquences sur l'état de santé de la victime ; il procède ou fait procéder à toute investigation et expertise utiles sans que puisse lui être opposé le secret professionnel ou industriel. Vaut justification de l'exposition au chlordécone la reconnaissance d'une maladie professionnelle occasionnée par le chlordécone au titre de la législation française de sécurité sociale ou d'un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d'invalidité, ainsi que le fait d'être atteint d'une maladie provoquée par le chlordécone et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail et de la sécurité sociale.
Vaut également justification du lien entre l'exposition au chlordécone et le décès la décision de prise en charge de ce décès au titre d'une maladie professionnelle occasionnée par le chlordécone en application de la législation française de sécurité sociale ou d'un régime assimilé ou de la législation applicable aux pensions civiles et militaires d'invalidité.
Dans les cas valant justification de l'exposition au chlordécone visés aux quatrième et cinquième alinéas du présent article, le fonds peut verser une provision si la demande lui en a été faite, il est statué dans le délai d'un mois à compter de la demande de provision.
Le fonds peut requérir de tout service de l'État, collectivité publique, organisme assurant la gestion des prestations sociales, organisme assureur susceptibles de réparer tout ou partie du préjudice, la communication des renseignements relatifs à l'exécution de leurs obligations éventuelles.
Les renseignements ainsi recueillis ne peuvent être utilisés à d'autres fins que l'instruction de la demande faite au fonds d'indemnisation et leur divulgation est interdite. Les personnes qui ont à connaître des documents et informations fournis au fonds sont tenues au secret professionnel.
Le demandeur peut obtenir la communication de son dossier, sous réserve du respect du secret médical.