Proposition de loi portant réforme de la loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique

En discussion
1re lecture, Sénat, Commission, 7 mars 2023

Sur le projet de loi

Dépôt du projet de loi : 4 décembre 2022
Nombre d'étapes : 3 étapes
Articles au dépôt : 2 articles
Nombre d'amendements déposés : 14 amendements
Amendements adoptés : 11 amendements

Documents parlementaires18


Mesdames, Messieurs, Depuis l'adoption de la loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique dite « loi Bardoux », il est acquis que l'art est la chose de tous. Aussi, l'atteinte causée à sa vérité ou sa provenance doit être sanctionnée au nom de l'intérêt général. Plus d'un siècle s'est écoulé depuis ce texte fondateur. Dans un monde ouvert, ainsi que sous l'effet des mutations technologiques, ont émergé de nouveaux enjeux liés à la création, à l'accès du public à l'art et à sa circulation. Si la fraude artistique a toujours existé, il fût une époque où le faussaire véhiculait … 
Cet amendement vise à autoriser le juge à pouvoir prononcer, à titre de peine complémentaire, l'interdiction pour les personnes physiques coupables d'exercer, à titre temporaire ou définitif, l'activité professionnelle dans l'exercice de laquelle ou à l'occasion de laquelle ils auraient commis l'infraction. Il s'agit d'une peine complémentaire régulièrement prévue en cas de fraudes, comme par exemple dans le cadre du délit de tromperie. 
Cet amendement vise à élargir le champ d'application des circonstances aggravantes aux cas dans lesquels les faits sont commis par des personnes utilisant les facilités que procure l'exercice d'une activité professionnelle. Déjà applicable en matière de recel ou de blanchiment, cette circonstance aggravante vise les professionnels du marché de l'art et répond au souci d'accroître la confiance des futurs acquéreurs dans le fonctionnement du marché et la déontologie de ses acteurs. 

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Texte du document


Après le chapitre II du titre Ier du livre Ier du code du patrimoine, il est inséré un chapitre II bis ainsi rédigé :

« Chapitre II bis

« Lutte contre les fraudes artistiques

« Art. L. 112-28. – Est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende le fait :

« 1° De réaliser ou de modifier, par quelque moyen que ce soit, une œuvre d'art ou un objet de collection, dans l'intention de tromper autrui sur l'identité de son créateur, son origine, sa datation, sa nature ou sa composition ;

« 2° De présenter, de diffuser ou de transmettre, à titre gratuit ou onéreux, une œuvre ou un objet mentionné au 1° en connaissance de son caractère trompeur ;

« 3° De présenter, de diffuser ou de transmettre, à titre gratuit ou onéreux, une œuvre d'art ou un objet de collection en trompant, par quelque moyen que ce soit, sur l'identité de son créateur, son origine, sa datation, sa nature ou sa composition ;

« 4° De présenter, de diffuser ou de transmettre, à titre gratuit ou onéreux, une œuvre d'art ou un objet de collection en trompant, par quelque moyen que ce soit, sur sa provenance.

« Art. L. 112-29. – Les faits mentionnés à l'article L. 112-28 sont punis de sept ans d'emprisonnement et de 750 000 euros d'amende lorsqu'ils sont commis :

« 1° Soit par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice, sans qu'elles constituent une bande organisée ;

« 2° Soit de manière habituelle ou en utilisant les facilités que procure l'exercice d'une activité professionnelle ;

« 3° (nouveau) Soit au préjudice de l'État ou d'une collectivité territoriale, ou de l'un de leurs établissements publics.

« Art. L. 112-30. – Les faits mentionnés à l'article L. 112-28 sont punis de dix ans d'emprisonnement et de 1 000 000 d'euros d'amende lorsqu'ils sont commis en bande organisée.

« Art. L. 112-30-1 (nouveau). – Les personnes morales déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues à l'article 121-2 du code pénal, des délits punis aux articles L. 112-28 à L. 112-30 du présent code encourent, outre l'amende suivant les modalités prévues à l'article 131-38 du code pénal, les peines prévues aux 2° à 9° de l'article 131-39 du même code. L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 dudit code porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise.

« Art. L. 112-31. – Le juge peut également prononcer :

« 1° La confiscation de l'œuvre ou de l'objet mentionné à l'article L. 112-28 du présent code ;

« 1° bis (nouveau) Sa destruction ;

« 2° Sa remise, s'ils existent, au créateur victime ou à ses ayants droit.

« L'article L. 3211-19 du code général de la propriété des personnes publiques est applicable en cas de confiscation de l'œuvre en application du 1° du présent article.

« La peine complémentaire de confiscation est encourue dans les conditions prévues à l'article 131-21 du code pénal.

« Art. L. 112-32. – En cas de relaxe ou de non-lieu, la juridiction peut prononcer la confiscation, la destruction ou la remise, s'ils existent, au créateur victime ou à ses ayants droit de l'œuvre ou de l'objet saisi lorsqu'il est établi qu'il constitue, en tant que tel, un faux au sens du 1° de l'article L. 112-28.

« Art. L. 112-33 (nouveau). – Les personnes physiques coupables des délits punis aux articles L. 112-28 à L. 112-30 du présent code encourent également à titre de peine complémentaire l'interdiction, suivant les modalités prévues à l'article 131-27 du code pénal, soit d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, soit d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour leur propre compte ou pour le compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale. Ces interdictions d'exercice peuvent être prononcées cumulativement.

« Art. L. 112-34 (nouveau). – Lorsqu'il est établi qu'ils constituent, en tant que tels, des faux au sens du 1° de l'article L. 112-28, les œuvres et les objets mentionnés au même article L. 112-28 font l'objet d'une inscription sur un registre dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. »


I. – La loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique est abrogée.

II. – Le code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :

1° L'article L. 3211-19 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « contrefaisantes mentionnées par la loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique » sont remplacés par les mots : « ou objets falsifiés au sens du 1° de l'article L. 112-28 du code du patrimoine » ;

b) Au second alinéa, les mots : « contrefaisantes mentionnées par la loi du 9 février 1895 précitée et confisquées dans les conditions fixées par ses articles 3 et 3-1 » sont remplacés par les mots : « ou objets falsifiés au sens du 1° de l'article L. 112-28 du code du patrimoine ayant donné lieu à confiscation en application des articles L. 112-31 ou L. 112-32 du même code » ;

2° Au 1° de l'article L. 5441-3, les mots : « contrefaisantes mentionnées par la loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique » sont remplacés par les mots : « ou objets falsifiés au sens du 1° de l'article L. 112-28 du code du patrimoine ».