Part. 8 - Prix de transfert / Ss-part. 6 - Accords de répartition des coûts / Chap. 2 - La conclusion d’un ARC / Sect. 6 - Cas pratique
Section 6 - Cas pratique
Exemple
Prenons pour exemple une situation dans laquelle 2 entités, une française (FRA SA) et une américaine (US Corp), toutes les 2 des fabricants, ont formé un ARC portant sur leurs activités de R&D à venir.
Dans la mesure où aucun des deux participants ne détient d’incorporel préexistant susceptible d’être utilisé dans le cadre des travaux à venir, il n’est pas nécessaire d’évaluer un paiement d’entrée.
Les principales hypothèses à retenir sont les suivantes :
- Le délai de gestation des activités de R&D est d'un an. Le délai de gestation est le temps encouru entre le début des activités de R&D et la première commercialisation ;
- Il est anticipé que la durée de vie économique des actifs qui seront développés est de 4 ans. Cela signifie qu’un investissement en R&D va pouvoir porter ses fruits sur une période de 4 ans (après le délai de gestation).
Les avantages attendus sont calculés en fonction des bénéfices d'exploitation futurs prévus.
Pour les besoins de cette analyse, nous nous plaçons au 1er janvier 2024. En outre, pour chaque année, nous faisons l’hypothèse que les flux financiers se matérialisent qu’en fin d’année, soit au 31 décembre de chaque année.
Le tableau ci-dessous présente le détail des coûts et des revenus sur les prochaines années :
Accord de répartition des couts | 2024 | 2025 | 2026 | 2027 | 2028 |
FRA SA (fabrication & R&D) | |||||
Revenus | 50.0 | 55.0 | 60.5 | 66.6 | 73.2 |
Coûts de fabrication | 33.0 | 34.0 | 35.0 | 36.0 | 37.0 |
Dépenses de R&D | 5.0 | 5.0 | 5.0 | 5.0 | 5.0 |
Autres dépenses d’exploitation | 10.0 | 11.0 | 12.0 | 13.0 | 14.0 |
Résultat d’exploitation (RE) | 2.0 | 5.0 | 8.5 | 12.6 | 17.2 |
Rémunération de routine des activités de fabrication (retour sur coûts (RC) : 3%) | 1.3 | 1.35 | 1.4 | 1.5 | 1.5 |
(A1) RE après rémunération de routine et avant dépenses de R&D | 5.7 | 8.65 | 12.1 | 16.1 | 20.7 |
(B1) Profit résiduel attribuable aux investissements de R&D de 2024 = (1/4) × (A1) | 2.2 | 3.0 | 4.0 | 5.2 | |
(C1) Avantage escomptés liés aux investissements de R&D de 2024 (CMPCi: 10%) | 10.0 | ||||
US Corp (fabrication & R&D) | |||||
Revenus | 70.0 | 75.6 | 81.6 | 88.2 | 95.2 |
Couts de fabrication | 44.0 | 46.0 | 48.0 | 50.0 | 52.0 |
Dépenses de R&D | 10.0 | 10.0 | 10.0 | 10.0 | 10.0 |
Autres dépenses d’exploitation | 15.0 | 18.0 | 21.0 | 24.0 | 27.0 |
Résultat d’exploitation (RE) | 1.0 | 1.6 | 2.6 | 4.2 | 6.2 |
Rémunération de routine des activités de fabrication (RC 3%) | 1.8 | 1.9 | 2.1 | 2.2 | 2.4 |
(A2) RE après rémunération de routine et avant dépenses de R&D | 9.2 | 9.7 | 10.6 | 12.0 | 13.9 |
(B2) Bénéfice résiduel attribuable aux investissements de R&D de 2024 = (1/4) × (A2) | 2.4 | 2.6 | 3.0 | 3.5 | |
(C2) Avantages (Bénéfices) escomptés liés aux investissements de R&D de 2024 (CMPC : 10%) | 8.2 |
Comme on peut le voir sur ce tableau, si l’on prend la première année où les bénéfices liés aux investissements de R&D se matérialisent, du côté de l’entité française, on constate que :
- Sur la base de revenus de 55, si l’on soustrait les coûts de fabrication et les autres dépenses d’exploitation, on obtient un profit (excluant les investissements de R&D de 2025) de 55 – 34 – 11 = 10 ;
- La rémunération de routine s’applique sur les coûts des activités méritant une rémunération de routine, c’est-à-dire les coûts de fabrication et les autres dépenses d’exploitation, soit 34 + 11 = 45. L’application d’un mark-up de 3% (retour sur coûts, RC) permet d’obtenir la rémunération de routine soit 3% × 45 = 1,35 ;
- (A1) est le résultat d’exploitation après rémunération des activités méritant une rémunération de routine et avant les dépenses de R&D. Il s’agit donc de soustraire du montant de 10 évoqué ci-dessus le montant de 1.35 que nous venons d’obtenir en au titre des profits de routine, ce qui nous donne 8.65.
En pratique, ce montant de 8.65 correspond ici à l’ensemble des profits résiduels de 2025 liés aux investissements en matière de R&D. Toutefois, comme la R&D a une durée de vie économique de 4 ans, ce profit résiduel reflète en partie seulement les investissements de R&D de l’année 2024 (n’oublions pas qu’il y a une durée de gestation aux termes de laquelle les investissements de R&D de 2025 ne contribuent pas aux profits résiduels de 2025, et ne porteront leurs fruits qu’à compter de l’année suivante).
Dans le cadre de ces calculs, comme la durée de vie des incorporels est de 4 ans, cela signifie que seul ¼ des profits résiduels de 2025 sont attribuables aux investissements en R&D de 2024. Les ¾ restants des profits résiduels viennent en fait rémunérés les investissements R&D des 3 années précédentes. Aussi, l’objectif étant de mesurer les bénéfices escomptés liés aux efforts de R&D de 2024 (dans le cadre de l’ARC), seuls ¼ des profits résiduels de 2025 doit être pris en compte. Ce même raisonnement doit être appliqué pour les années 2026, 2027 et 2028, dernière année où les investissements de R&D de 2024 produiront un avantage.
En répliquant ces calculs, et en gardant en tête que les calculs s’effectuent au début de 2024 alors que les flux de trésorerie évalués sont considérés comme se matérialisant en fin d’année, il apparaît que la valeur actuelle nette des bénéfices liés au investissements de R&D de l’entité française en 2024 sont : 1,8 + 2,3 + 2,7 + 3,2 = 10.
2024 | 2025 | 2026 | 2027 | 2028 | |
Avantages (bénéfices) escomptés liés aux investissements de R&D de 2024 (CMPC : 10%) | 2.2 | 3 | 4 | 5.2 | |
Valeur actualisée au 1/1/2024 | 1.8 | 2.3 | 2.7 | 3.2 |
L’application du même raisonnement pour l’entité américaine permet d’établir que les bénéfices de l’entité américaine associés à ses efforts de R&D de 2024 sont de 8,2.
En pratique, les coûts réels de R&D et les bénéfices avantages qui en découlent suggèrent que la contribution aux couts de R&D de 2024 de l’entité française auraient dû être plus élevée :
R&D – COST SHARING ARRANGEMENT – EXEMPLE | |
Coûts totaux de R&D 2024 | 15.0 |
Coûts supportés par FRA SA : | 33.3% |
Coûts supportés par US Corp : | 66.7% |
Avantages (bénéfices) totaux escomptés résultant des efforts de R&D en 2024 = (C1) + (C2) | 18.2 |
Avantages escomptés, part de FRA SA = (C1) / [(C1) + (C2)] | 55.0% |
Avantages escomptés, part de US Corp = (C2) / [(C1) + (C2)] | 45.0% |
Aussi, afin de s’assurer que les participations aux coûts de l’entité française et de l’entité américaine soient conformes au principe de pleine concurrence, il faudrait que l’entité française supporte 55 % des coûts et que l’entité américaine supporte 45 % des coûts. Or la répartition observée est que FRA SA supporte des couts de 5 (sur un total de 15) soit 33 % des coûts alors que l’entité américaine supporte des coûts de 10 soit 67% des coûts.
Nous pouvons alors simplement calculer l’ajustement nécessaire pour permettre de rééquilibrer le partage des bénéfices. La formule suivante permet ce calcul pour la part complémentaire des couts que FRA SA doit verser (et qui viendra dans ce cas simple compenser la part des coûts que la filiale américaine a financé en trop) : 15 x 55,0% - 5 = 3,26.
Cela signifie donc que FRA SA devrait effectuer un paiement d'équilibrage à US Corp de 3,26 pour 2024.
Bien entendu, les hypothèses retenues doivent être mises à jour sur la base du réel constaté au fil des ans, année après année, notamment en cas d’écart important constaté entre les avantages initialement escomptés et la réalité après quelques années de mise en œuvre de l’ARC.
Sur la base de l'exemple ci-dessus, nous développons ci-après une situation dans laquelle FRA SA a pu exploiter des brevets en les concédant à des tiers. En effet, au cours de l’ARC, une technologie brevetable a été développée et il est convenu que cette technologie brevetable sera concédée sous licence à des tiers par FRA SA. Cela signifie que son profil en termes de revenus évolue. Par conséquent, les avantages que FRA SA retire de sa participation à l’accord de répartition des coûts changent.
Nous retenons les hypothèses suivantes :
Tout d’abord, nous partons du principe que FRA SA et US Corp ont ajusté leurs contributions financières en conséquence, de sorte que leurs parts reflètent les parts des bénéfices attendus tels que déterminés précédemment (55 % et 45 %).
Nous supposons (pour simplifier) que la R&D brevetable a un délai de gestation de 2 ans et une durée de vie économique de 5 ans. Toutes les autres hypothèses restent les mêmes.
Le tableau ci-dessous présente les données financières :
Accord de répartition avec revenus de licence | 2024 | 2025 | 2026 | 2027 | 2028 |
FRA SA (fabrication & R&D) | |||||
Revenus | 50.0 | 55.0 | 60.5 | 66.6 | 73.2 |
Revenus obtenus de la licence de technologie | 25.0 | 28.0 | 31.4 | ||
Coûts de fabrication | 33.0 | 34.0 | 35.0 | 36.0 | 37.0 |
Dépenses de R&D | 8.3 | 8.3 | 8.3 | 8.3 | 8.3 |
Coûts administratifs liés aux activités de licence | 8.0 | 9.0 | 10.0 | ||
Autres dépenses d’exploitation | 10.0 | 11.0 | 12.0 | 13.0 | 14.0 |
Résultat d’exploitation (excluant l’activité de licence) | -1.3 | 1.7 | 5.2 | 9.3 | 13.9 |
Résultat d’exploitation de l’activité de licence | 17.0 | 19.0 | 21.4 | ||
Rémunération de routine de l’activité de fabrication (RC 3 %) | 1.3 | 1.4 | 1.4 | 1.5 | 1.5 |
Rémunération de routine de l’activité de licence (RC 2 %) | 0.2 | 0.2 | 0.2 | ||
(A1) Résultat d’exploitation après rémunération des activités de routine et avant couts de R&D (excluant les activités de licence) | 5.7 | 8.7 | 12.1 | 16.1 | 20.7 |
(D1) Résultat d’exploitation après rémunération de routine des activités de licence | 16.8 | 18.8 | 21.2 | ||
(B1) Bénéfices résiduels attribuables aux ventes de produits et aux efforts de R&D de 2024 | 2.2 | 3.0 | 4.0 | 5.2 | |
(E1) Bénéfices résiduels attribuables aux activités de licence et aux efforts de R&D de 2024 | 3.4 | 3.8 | 4.2 | ||
(C1) Avantages escomptés liés à la vente de produit (CMPC : 10 %) | 10.0 | ||||
(G1) Avantages escomptés liés à l’activité de licence (CMPC : 8 %)i | 14.5 | ||||
US Corp (fabrication et R&D) | |||||
Revenus | 70.0 | 75.6 | 81.6 | 88.2 | 95.2 |
Coûts de fabrication | 44.0 | 46.0 | 48.0 | 50.0 | 52.0 |
Dépenses de R&D | 6.7 | 6.7 | 6.7 | 6.7 | 6.7 |
Autres dépenses d’exploitation | 15.0 | 18.0 | 21.0 | 24.0 | 27.0 |
Résultat d’exploitation (RE) | 4.3 | 4.9 | 5.9 | 7.4 | 9.5 |
Rémunération de routine des activités de fabrication (RC 3 %) | 1.8 | 1.9 | 2.1 | 2.2 | 2.4 |
(A2) RE après rémunération de routine et avant dépenses de R&D | 9.2 | 9.7 | 10.6 | 12.0 | 13.9 |
(B2) Bénéfice résiduel attribuable aux investissements de R&D de 2024 = (1/4) × (A2) | 2.4 | 2.6 | 3.0 | 3.5 | |
(C2) Avantages (Bénéfices) escomptés liés aux investissements de R&D de 2024 (CMPC : 10%) | 8.2 |
Dans cet exemple, on constate que les coûts réels de R&D et les avantages qui en découlent suggèrent que la contribution financière de FRA SA aurait dû être plus élevée :
Coûts totaux de R&D de 2024 | 15.0 |
Part de FRA SA des coûts de R&D | 55 % |
Part de US Corp des coûts de R&D | 45 % |
Total des avantages escomptés résultants des efforts de R&D de 2024 | 10 + 14.5 + 8.2 = 32.7 |
Part des avantages escomptés de FRA SA | (10 + 14.5) / 32.7 = 75 % |
Part des avantages escomptés de US Corp | 8.2 / 32.7 = 25 % |