ADLC, Décision du 16 décembre 1997 relative à des pratiques mises en oeuvre par la règie municipale des pompes funèbres de Marseille, 97-D-92

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cons. conc., déc. n° 97-D-92 du 16 déc. 1997
Numéro(s) : 97-D-92
Identifiant ADLC : 97-D-92
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Texte intégral

CONSEIL DE LA CONCURRENCE Décision n° 97-D-92 du 16 décembre 1997 relative à des pratiques mises en oeuvre par la régie municipale des pompes funèbres de Marseille Le Conseil de la concurrence (commission permanente), Vu la lettre en date du 13 août 1993, enregistrée sous le numéro F 617, par laquelle la société Agences Funéraires du Midi, devenue Compagnie Générale des Pompes Funèbres a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en oeuvre par la régie municipale des pompes funèbres de Marseille ; Vu l’ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 modifiée, relative à la liberté des prix et de la concurrence et le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié, pris pour son application ; Vu le code général des collectivités territoriales et le code des communes ; Vu les observations présentées par la Compagnie Générale des Pompes Funèbres, la ville de Marseille, ainsi que par le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et les représentants de la Compagnie Générale des Pompes Funèbres et de la ville de Marseille entendus ; Adopte la décision fondée sur les constatations (I) et sur les motifs (II) ci-après exposés : I. – Constatations A. -L’ORGANISATION DU SERVICE DES POMPES FUNÈBRES 1. La réglementation Le service des pompes funèbres comprend le service intérieur, le service extérieur et le service des prestations libres.

Le service extérieur est un service public qui, en application de la loi du 28 décembre 1904, appartenait aux communes. Il comprenait différentes prestations énumérées limitativement par le même article : le transport de corps après mise en bière, la fourniture des corbillards, des cercueils, des tentures extérieures des maisons mortuaires, les voitures de deuil ainsi que les fournitures et le personnel nécessaires aux inhumations, exhumations et crémations. Le contenu actuel de ce service est défini par l’article L. 2223-19 du code général des collectivités territoriales (ancien art. L. 362-1 du code des communes) dans sa rédaction issue de la loi n° 93-23 du 8 janvier 1993, relative à la législation dans le domaine funéraire. Les prestations relevant du service extérieur comprennent désormais, outre celles prévues antérieurement : ● le transport de corps avant mise en bière ; ● l’organisation des obsèques ; ● les soins de conservation ; ● la fourniture des housses, des cercueils et de leurs accessoires intérieurs et extérieurs ainsi que des urnes cinéraires ; ● la gestion et l’utilisation des chambres funéraires. Les communes, avant 1993, pouvaient assurer le service extérieur, soit directement, soit par entreprise, en se conformant aux lois et règlements sur les marchés de gré à gré et adjudications. Depuis la loi du 8 janvier 1993 précitée, les communes n’ont plus de monopole sur ces activités qui peuvent être assurées, non seulement par les communes ou leurs délégataires, mais aussi par toute entreprise ou association bénéficiaire d’une habilitation délivrée par le représentant de l’État dans le département. Toutefois, l’article 28-1 de la loi de 1993 a prévu une période transitoire pendant laquelle : " Les régies communales et intercommunales de pompes funèbres existant à la date de publication de la présente loi peuvent, durant une période qui ne saurait excéder cinq années à compter de cette date, assurer seules le service extérieur des pompes funèbres tel que défini par les dispositions légales précédemment en vigueur « . Jusqu’à l’entrée en vigueur, le 1er janvier 1987, de la loi n° 86-29 du 9 janvier 1986, les familles ne pouvaient recourir, pour les prestations du service extérieur qu’à l’entreprise implantée dans la commune de mise en bière lorsque celle-ci avait organisé ce service. Pour accroître la liberté des familles, la loi susmentionnée (ancien art. L. 362-4-1 du code des communes) a assoupli les conditions d’exercice du service extérieur des pompes funèbres en prévoyant que » lorsque la commune du lieu de mise en bière n’est pas celle du domicile du défunt ou du lieu d’inhumation ou de crémation, la personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles ou son mandataire, si elle ne fait pas appel à la régie ou au concessionnaire de la commune du lieu de mise en bière, (…) peut s’adresser à la régie, au concessionnaire ou, en l’absence d’organisation du service, à toute entreprise de pompes funèbres soit de la commune du lieu d’inhumation ou de crémation, soit de la commune du domicile du défunt ". Aux termes de l’article R. 361-35 du code des communes, dans sa rédaction antérieure à la réforme de 1993, les chambres funéraires étaient définies comme les lieux destinés à recevoir, avant l’inhumation ou la crémation, le corps des personnes dont le décès n’a pas été causé par une maladie contagieuse. Depuis la loi du 8 janvier 1993, la gestion des chambres funéraires fait partie intégrante du service extérieur. Leur création ou leur extension est autorisée par décision préfectorale après avis du conseil

municipal (décret n° 94-1024 du 23 novembre 1994). L’autorisation ne peut être refusée qu’en cas d’atteinte à l’ordre public ou de danger pour la salubrité publique. 2. L’organisation des pompes funèbres à Marseille L’organisation du service extérieur a été confiée à Marseille à une régie municipale des pompes funèbres en 1905. Par délibération du 15 mars 1993, le conseil municipal a confié la gestion du service extérieur pendant la période transitoire de cinq ans à la direction des opérations funéraires. Pendant la période transitoire qui expire le 9 janvier 1998, la ville de Marseille ayant décidé d’assurer directement et seule le service extérieur, c’est le régime précédemment en vigueur qui s’applique, en vertu de l’article 28 de la loi de 1993. 3. Les caractéristiques du marché La population de la commune de Marseille s’élevait en 1990 à 807 726 habitants. Le nombre de décès comptabilisés sur la commune de Marseille est passé de 10 039 en 1991 à 9 848 en 1994. La direction des opérations funéraires regroupe les deux services – la direction des cimetières et la direction des pompes funèbres municipales – qui composaient la régie municipale fondée en 1905. Elle dépend de la direction générale des services à la population. Elle emploie 242 personnes dont 132 dans le service des pompes funèbres et 110 dans le service des cimetières. Le service des pompes funèbres comprend notamment 17 conseillers funéraires (régleurs), 50 porteurs, 6 thanatopracteurs. La direction des opérations funéraires gère la chambre funéraire municipale située dans le cimetière Saint-Pierre. La chambre funéraire comprend deux salles d’autopsie, deux salons de présentation des corps, une chapelle oecuménique, un bureau et une unité « post mortem » ( 24 cases réfrigérées). Entre 1991 et 1994, le nombre de convois traités par la direction des opérations funéraires est passé de 6 211 à 5 120 , ce qui représente, par rapport au nombre des décès à Marseille, 61,8 % en 1991 et 52 % en 1994. La société Agences Funéraires du Midi a traité pendant la même période un peu plus d’un millier de décès. Une quinzaine d’autres agences funéraires privées sont présentes sur la commune de Marseille. Elles réalisent chacune entre 200 et 300 convois par an. Globalement, elles assurent environ 3 600 convois. La chambre funéraire municipale est installée au cimetière Saint-Pierre et est gérée par la direction des opérations funéraires. Des chambres funéraires sont installées dans les établissements hospitaliers publics et privés. La chambre funéraire municipale a accueilli environ 1 000 corps de défunts entre 1991 et 1993. Le transport des corps des personnes décédées à la chambre funéraire municipale est assuré à plus de 70 % par la direction des opérations funéraires. Une convention a été signée le 15 mars 1995 dans " le but de formaliser l’accord aux termes duquel,

dès 1945, les pompes funèbres municipales avaient tacitement convenu avec l’Assistance publique de Marseille d’installer un premier poste de régleur à l’hôpital de la Conception, afin que les familles puissent accomplir l’ensemble des formalités administratives, juridiques, consécutives à un décès « . La convention précise qu' » eu égard aux résultats obtenus et à la portée d’intérêt général de cette mesure, il fut décidé, à partir des années 1950, de déployer de nouveaux postes de conseillers funéraires sur les sites suivants : Hôpital Sainte-Marguerite, puis Hôpital Michel Levy, puis Hôpital Nord, et enfin CHU de la Timone ". Les décès intervenus dans ces quatre hôpitaux ont représenté entre 1991 et 1994 environ 95 % des décès enregistrés dans l’ensemble des hôpitaux de l’Assistance publique et environ 29 % de l’ensemble des décès enregistrés à Marseille. II. – Les pratiques constatées A. -CONFUSION ENTRE LE SERVICE DE L’ÉTAT CIVIL ET LE SERVICE DES POMPES FUNÈBRES DANS LES HÔPITAUX DE L’ASSISTANCE PUBLIQUE Le rapport présenté au conseil municipal dans sa séance du 30 septembre 1994 et publié à l’extrait des registres des délibérations du conseil municipal expose : « Dans le cadre des dispositions de la loi du 28 décembre 1904, réglementant le service des pompes funèbres, la ville de Marseille a créé, le 16 juin 1905, par délibération du conseil municipal, une régie municipale des pompes funèbres afin d’exercer le monopole de l’organisation du service extérieur, conformément à cette loi. » Afin de répondre d’une manière complète aux impératifs fixés par le législateur – devenus une obligation de service public, dans la mesure où le service extérieur des pompes funèbres comprenait le transport des corps, la fourniture des corbillards, cercueils, tentures extérieures des maisons mortuaires, les voitures de deuil, ainsi que les fournitures et le personnel nécessaire aux inhumations, exhumations et crémations, c’est-à-dire les fournitures et prestations essentielles des funérailles – la ville de Marseille s’est, très tôt, organisée pour pouvoir satisfaire les demandes et attentes des administrés. " Parallèlement, avant la loi du 31 décembre 1982, dite loi Paris-Lyon-Marseille, elle a décentralisé le service de l’état civil au niveau des hôpitaux publics afin de se conformer aux obligations incombant aux

autorités publiques en matière d’évolution, d’adaptation et de modernisation des services publics. « C’est ainsi que l’administration a été rapprochée des administrés grâce à l’installation de conseillers funéraires au sein même des hôpitaux publics de Marseille dont la mission est, bien évidemment, de recevoir, orienter, conseiller des familles en matière de formalités administratives, juridiques, consécutives à un décès. » Au sein de celles-ci, les démarches liées à l’état civil des personnes décédées, ont pris une part prépondérante. « La loi n° 93-23 du 8 janvier 1993 a aboli le principe du monopole de la gestion du service extérieur des pompes funèbres confié aux communes mais a maintenu, dans son article 28, au titre des mesures transitoires, des droits d’exclusivité pouvant durer au maximum cinq années. » Par délibération n° 93/93/AG du 15 mars 1993, le conseil municipal de Marseille a habilité Monsieur le Maire à exercer les droits d’exclusivité pendant cette période de cinq ans, la gestion en étant confiée à la direction des opérations funéraires, entité nouvelle ayant fusionné les services des pompes funèbres et des cimetières de Marseille. « Cette évolution législative et les modifications qu’elle entraîne, nécessitent néanmoins le maintien d’un service public moderne et performant, apte à permettre la résolution rapide des difficultés d’ordre administratif, juridique, voire financier, que les familles peuvent connaître lors de la survenance d’un décès. » Tout ceci motive la conclusion d’une convention entre l’Assistance publique et la ville de Marseille, en vue de formaliser les relations entre ces deux administrations pour pérenniser l’existence du service public de proximité offert aux Marseillais ou à toute famille désireuse de le consulter « . Les vérifications effectuées par le service d’enquête ont permis de constater, qu’au sein de ces hôpitaux, les formalités concernant l’état civil et les obsèques étaient traités par la même personne. Cette constatation confirme les déclarations faites par des agences funéraires privées. Ainsi le responsable de la société Pompes Funèbres Phocéennes a déclaré par procès-verbal du 30 août 1994 : » L’une des raisons pour lesquelles nous effectuons peu de convois ayant pour origine les établissements de l’Assistance publique de Marseille, outre le fait que la régie municipale y possède des bureaux de règlement, est que lorsqu’une famille souhaite effectuer une réintégration de son défunt, les services hospitaliers appellent systématiquement la régie municipale « . De même, le gérant de la société Groupe Capelette a déclaré par procès-verbal du 12 avril 1994 : » … dans les hôpitaux publics où la régie dispose de bureaux je réalise très peu de convois ". B. -REMISE AUX FAMILLES DE DEVIS NE COMPORTANT PAS LES INDICATIONS DÉFINIES PAR LES TEXTES RELATIFS AUX PRIX DES POMPES FUNÈBRES

Les devis remis aux familles par la régie ne font pas ressortir le caractère obligatoire ou facultatif des fournitures et prestations. L’arrêté ministériel n° 85/24 A du 18 mars 1985 relatif aux prix et tarifs des pompes funèbres dispose dans son article 3. : « - 1. Une documentation simple et complète faisant apparaître le caractère facultatif ou obligatoire, les prix et tarifs et conditions de vente des principales prestations et fournitures devra être constamment présentée à la vue de la clientèle. » – 2. Avant toute opération funéraire, un devis écrit, gratuit, détaillé et chiffré, faisant apparaître pour chaque prestation ou fourniture la nature et le prix hors taxes, et pour l’ensemble du devis les prix hors taxes et TTC devra être présenté à la clientèle. " Pour les prestations et fournitures non soumises à un monopole, le devis doit en outre comporter : ● l’indication que ces prestations et fournitures sont facultatives et peuvent être demandées par la clientèle à d’autres entreprises ; ● les noms et qualités des entreprises tiers appelées à participer aux prestations et fournitures. Les prix des prestations et fournitures assurées par ces entreprises tiers seront indiqués pour le montant net facturé par celles-ci… ". Cet arrêté a été abrogé et remplacé par l’arrêté ministériel du 19 janvier 1994. Le nouveau texte maintient les dispositions relatives à la documentation et aux devis destinées à assurer l’information des familles et reconduit, par son article 4, pour les communes ayant choisi de conserver le monopole pendant la période transitoire prévue à l’article 28 de la loi de 1993, l’obligation d’informer les familles que certaines prestations ne relèvent pas du monopole et peuvent être demandées à d’autres entreprises : " … Le devis doit distinguer les prestations et fournitures relevant du régime d’exclusivité provisoirement maintenu au profit d’une régie ou d’un concessionnaire de celles qui n’en relèvent pas. Pour ces dernières le devis doit préciser en sus des indications prévues par l’article 3 que ces prestations et fournitures ne relèvent pas du champ de l’exclusivité du prestataire et peuvent être demandées par la clientèle à d’autres entreprises « . La direction des opérations funéraires remet aux familles un imprimé intitulé » devis « sur lequel figure deux listes de prestations et fournitures, l’une intitulée » service monopolisé « , l’autre » service libre ", mais ce document ne comporte pas les indications énumérées au 2. de l’article 3 de l’arrêté du 18 mars 1985 et à l’article 4 de l’arrêté du 19 janvier 1994. C. -IMPOSSIBILITÉ DE PROCÉDER À DES « RÉINTÉGRATIONS » DES CORPS EN DEHORS DES HEURES D’OUVERTURE DU SERVICE D’ÉTAT CIVIL EN RAISON DE L’ABSENCE D’UNE PERMANENCE D’UN OFFICIER DE L’ÉTAT CIVIL

Le transport du corps d’un défunt, avant ou après mise en bière, est une prestation libre mais doit faire l’objet d’une autorisation préalable délivrée par un officier d’état civil. Lorsqu’une entreprise privée a été sollicitée par une famille pour assurer le transport du corps du défunt à son domicile, elle doit obtenir les autorisations nécessaires auprès du service d’état civil. L’absence de permanence d’un officier d’état civil ne permet pas d’obtenir ces autorisations en dehors des heures d’ouverture des bureaux. Selon la Compagnie générale des pompes funèbres, cette situation est discriminatoire, dans la mesure où le service municipal procède à des réintégrations de corps en dehors des heures d’ouverture. L’examen des autorisations de transport avant mise en bière qui ont été communiquées au service d’enquête par la direction des opérations funéraires montre que cette dernière a effectivement procédé, au départ des établissements hospitaliers publics de Marseille, à plusieurs reprises, à des réintégrations de corps sans cercueil, en dehors des heures d’ouverture des bureaux d’état civil. D. -CONDITIONS D’ACCÈS AUX BUREAUX DE RÈGLEMENT DES OBSÈQUES Le service municipal des pompes funèbres a organisé des horaires d’accueil dans les bureaux différents pour les familles et les agences funéraires privées. Les horaires sont d’une plus grande amplitude pour les familles que pour les agences. Dans une lettre adressée au service municipal des pompes funèbres le 17 juillet 1991, la société Pincedé a relaté les difficultés rencontrées liées aux horaires. Par circulaire du 21 mars 1994, adressée aux agences, la ville de Marseille expose : " Le souci de la ville de Marseille est d’améliorer les relations entre l’administration et les administrés : c’est dans ce but qu’a été créé un bureau important de règlement d’obsèques dans les locaux de la direction des Opérations funéraires, au cimetière Saint-Pierre – 380, rue Saint-Pierre – 13005 Marseille. 1. A l’origine, ces bureaux se sont adressés principalement aux familles. « Toutefois, afin de tenir compte de la réalité économique et sociologique engendrée par les mandats confiés par les familles à des entreprises privées, il a été décidé de répartir géographiquement les lieux de règlement des convois, afin d’améliorer la qualité des prestations offertes aux utilisateurs du service public funéraire ». Dans un courrier adressé le 1er avril 1994 au conseiller municipal délégué aux convois et nécropoles la société Pincedé écrit : « Suite à la circulaire en date du 21 mars 1994 relative à la décentralisation des lieux de déclaration de décès, je suis au regret de constater votre décision de limiter les horaires d’ouverture des bureaux du cimetière Saint-Pierre à mon entreprise. Nous agissons pour le compte des familles et celles-ci ont les mêmes droits que les autres familles marseillaises. » Au nom de l’égalité qui doit être observée par un service public pour tous les citoyens, je vous prie de bien vouloir modifier cette décision totalement discriminatoire… "

« De plus, j’ai à vous faire part de ce qui s’est passé le 28 mars 1994 à 8 h 30 au guichet d’accueil des déclarations du cimetière où, respectant à la lettre votre circulaire, un de mes employés n’a pu être reçu par vos trois agents présents. L’un d’entre eux a préféré s’occuper d’une famille arrivée après notre employé alors qu’il y avait urgence à obtenir une autorisation de soins de conservation avant 10 h. Mieux encore, il lui a été conseillé de se rendre à vos bureaux de la Villette pour remplir cette formalité. Ce qu’il fit. Mais une fois à la Villette, on lui refusa de traiter ce dossier au prétexte qu’il concernait les bureaux de Saint-Pierre. Sans l’intervention d’un cadre du service municipal, M. Gaetta, nous n’aurions jamais pu faire cette déclaration ». Dans la réponse adressée à la société Pincedé le 12 avril 1994, ce conseiller municipal écrit : « … Vous invoquez le principe de l’égalité des citoyens devant le service public et n’hésitez pas à utiliser le terme » discriminatoire « : permettez-moi de vous indiquer qu’il n’existe aucune comparabilité entre l’administré-citoyen et les entreprises de pompes funèbres qui font commerce de l’activité d’entremise entre les familles et les services publics et dont le métier est, justement, d’être l’intermédiaire entre le citoyen et le service public. » Dans ces conditions, il est normal que la priorité soit donnée aux familles, dans la mesure où celles-ci sont totalement éprouvées, démunies devant les procédures administratives que constituent les formalités de décès… « . Dans un courrier adressé à la même société, le 22 avril 1994, le conseiller municipal délégué l’informe qu’elle ne pourra plus effectuer de déclaration de décès le samedi au bureau Saint-Pierre, accessible uniquement aux familles. Dans une déclaration par procès-verbal, du 5 juillet 1994, le directeur commercial des Pompes funèbres du Sud-Est explique : » En ce qui concerne les horaires d’ouverture des bureaux de la traverse de la Villette et du cimetière Saint-Pierre, une discrimination est opérée envers les agences de funérailles par une limitation de la planche horaire que la régie ne s’applique pas lorsqu’elle reçoit ses propres familles. Nous rappelons que nous sommes tenus d’obtenir certaines autorisations (permis d’inhumer, autorisation de transport, etc.) et d’organiser les obsèques suivant les horaires que met la régie à notre disposition. Les dispositions deviennent impossibles dès lors que les bureaux nous sont fermés. En conséquence, les familles désirant s’adresser à nous en dehors des horaires imposés par la régie ne peuvent être satisfaites alors qu’elles obtiendront sur le champ satisfaction dès lors qu’elles s’adresseront à la régie ". E. -INTERDICTION DE PROCÉDER À DES SOINS DE CONSERVATION DANS LA CHAMBRE FUNÉRAIRE MUNICIPALE La ville de Marseille a notifié aux agences funéraires privées une décision administrative datée du 24 avril 1989 et rédigée dans les termes suivants : " A la suite d’incidents qui se sont produits dans les deux établissements municipaux : Athanée Saint-Pierre et Morgue du Pharo, mon prédécesseur avait pris la décision d’interdire que des soins de thanatopraxie y soient effectués par du personnel d’entreprises privées.

« Je vous confirme cette décision, et vous informe que dès le 2 mai 1989, les agents de ces établissements qui ont satisfait aux épreuves de thanatopracteurs seront à la disposition des familles pour effectuer les soins de conservation et de toilettes mortuaires. » Je vous précise que conformément à la jurisprudence du Conseil d’État, les familles pourront toujours faire appel à des thanatopracteurs privés en prenant leur décision, soit avant le transfert dans un établissement municipal, soit dans le délai imparti pour le transport de corps avant mise en bière « . Aux termes de l’article R. 361-35 ancien du code des communes – applicable en l’espèce – les chambres funéraires sont destinées à recevoir, avant l’inhumation ou la crémation, les corps des personnes dont le décès n’a pas été causé par une maladie contagieuse. Aux termes de l’ancien article L. 362-1 du code des communes, les soins somatiques ne font pas partie du service extérieur et constituent des prestations libres. La description de la chambre funéraire municipale faite par le directeur des opérations funéraires, dans sa déclaration par procès-verbal du 26 juillet 1994, montre que la chambre funéraire exerce une fonction plus large que la mission de service public décrite ci-dessus et qu’en particulier y ont été introduites des activités de thanatopraxie qui relèvent des prestations libres. Les entreprises privées de pompes funèbres ont confirmé qu’elles n’avaient pas accès à la chambre funéraire municipale. La société Agences Funéraires du Midi a produit les sommations interpellatives faites par huissier et restées sans réponse à la suite d’un refus qui lui a été opposé le 20 décembre 1994. Le responsable de la société Pompes Funèbres du SudEst a déclaré par procès-verbal du 5 juillet 1994 : » … nous sommes contraints et forcés de commander la réalisation de ces soins au service municipal ". III. – Sur la base des constatations qui précèdent, le Conseil, Sur la compétence, Considérant que la ville de Marseille soutient que le Conseil est incompétent pour connaître des pratiques qui lui sont reprochées ; qu’en effet, l’organisation du service extérieur des pompes funèbres à Marseille a été confiée en 1905 à un service municipal organisé en régie directe ; que cette organisation a été prorogée par la délibération du conseil municipal du 15 mars 1993 en application de l’article 28 de la loi du 8 janvier 1993 ; que, dans son avis du 19 décembre 1995, le Conseil d’État a estimé que " les régies mentionnées par la loi du 8 janvier 1993 sont les régies municipales dotées ou non de l’autonomie financière ou de la personnalité morale, ainsi que les services, quelle que soit leur dénomination, par lesquels la commune assure directement, par application de l’article L. 362-1 du code des communes, le service extérieur des pompes funèbres tel qu’il est défini par cet article » ; que, toutefois, si le service municipal des pompes funèbres peut bénéficier de la qualification de régie municipale, " son statut de service public administratif demeure, ce qui semble constituer une limite à l’application de l’ensemble des règles énoncées par l’ordonnance du 1er décembre 1986 » ; qu’au surplus trois des griefs notifiés,

concernant les conditions d’accès aux bureaux de règlement des obsèques, les conditions d’accès à la chambre funéraire municipale pour les soins de conservation, l’installation de conseillers funéraires dans quatre hôpitaux de l’Assistance publique, mettent en cause directement l’organisation du service public municipal ; que les autres griefs notifiés, concernant l’absence d’information des familles sur le caractère obligatoire ou facultatif des fournitures ou prestations, les obstacles à la réintégration des corps par les familles en dehors des horaires d’ouverture du service d’état civil, " s’ils ne ressortent pas de l’organisation du service, n’en sont pas moins des éléments de sa gestion : ils sont rattachés à la théorie générale de l’incompétence du Conseil de la concurrence " ; Mais considérant qu’il est constant que l’activité de pompes funèbres constitue une « activité de production, de distribution et de services » au sens de l’article 53 de l’ordonnance du 1er décembre 1986 ; qu’en vertu de la réglementation en vigueur sur les pompes funèbres, cette activité peut être exercée ou bien par des entreprises privées lorsque la commune n’a pas choisi d’organiser le service extérieur ou bien par la commune, soit directement, soit par voie de concession, lorsqu’elle a décidé d’organiser le service extérieur ; que le fait que cette activité soit exercée par une personne publique ne la fait pas échapper à l’application de l’ordonnance précitée conformément à son article 53 ; que si, en application de l’article 28 de la loi du 8 janvier 1993, cité au I.A.1) de la présente décision, la municipalité de Marseille bénéficie du monopole du service extérieur jusqu’au 9 janvier 1998, les prestations contenues dans le service extérieur ont été limitativement énumérées par la dispositions législatives en vigueur avant la loi du 8 janvier 1993 ; qu’en conséquence, les prestations ne relevant pas du service extérieur mais qui sont néanmoins indispensables pour l’organisation des obsèques peuvent être exercées et sont effectivement exercées concurremment par les entreprises privées de pompes funèbres et la régie municipale ; qu’en outre la loi de 1986, citée au I.A.1) de la présente décision, a défini les cas dans lesquels les familles peuvent choisir librement le prestataire de pompes funèbres ; que, dès lors, le Conseil est compétent pour connaître des pratiques mises en oeuvre par la régie municipale des pompes funèbres de la ville de Marseille en ce qu’elles ont pu affecter la concurrence sur le marché des prestations funéraires sur lequel cette régie est en concurrence avec les entreprises privées de pompes funèbres ; qu’il importe peu que ces pratiques mettent en cause l’organisation du service public municipal, ou constituent des éléments de sa gestion, dès lors qu’elles n’en sont que des modalités dont la nécessité pour l’accomplissement du service public n’est ni alléguée, ni établie ; Sur la délimitation du marché pertinent, Considérant, en premier lieu, que les prestations funéraires comportent les prestations du service extérieur, celles qui relèvent du service intérieur dans les édifices religieux et, enfin, les prestations libres ; que ces diverses prestations, eu égard au comportement des familles et aux pratiques des opérateurs appelés à satisfaire la demande sont indissociables ; Considérant, en second lieu, qu’il est constant que les familles font appel dans la majorité des cas à des entreprises locales pour l’organisation des funérailles ; Considérant, en troisième lieu, que les possibilités de dérogation aux règles du service extérieur des

pompes funèbres, prévues par la loi du 9 janvier 1986 susmentionnée, n’existent que lorsque la commune du lieu de mise en bière n’est pas celle du domicile du défunt ou du lieu d’inhumation ou de crémation ; que, dans le cadre de ces dérogations, seuls la régie, le concessionnaire ou, en l’absence d’organisation du service, toute entreprise de pompes funèbres soit de la commune du lieu d’inhumation ou de crémation, soit de la commune du domicile du défunt peuvent assurer les prestations du service extérieur concurremment avec la régie ou le concessionnaire de la commune de mise en bière lorsque le service extérieur est organisé ; Considérant qu’il résulte de l’instruction que les décès survenus dans l’agglomération marseillaise concernent principalement des personnes domiciliées dans cette zone ; que le service extérieur des pompes funèbres, tel que défini par les dispositions légales en vigueur antérieurement à la loi du 8 janvier 1993, y est organisé jusqu’à la date d’expiration de la période transitoire définie à l’article 28-1 de la loi du 8 janvier 1993 ; que, sur ce territoire, le marché des pompes funèbres présente des caractéristiques telles que l’offre qui émane d’entreprises ou de régies municipales extérieures à cette zone n’est pas substituable, en droit ou en fait, à celle des entreprises locales ; Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ces éléments que le marché pertinent à prendre en considération comprend les prestations liées au service extérieur et les prestations libres et correspond géographiquement, en l’espèce, à l’agglomération marseillaise. Sur la position du service municipal des pompes funèbres de Marseille sur le marché de référence, Considérant que la part de marché du service municipal énoncée en pourcentage du nombre de décès traités par rapport aux décès enregistrés à Marseille était estimée à 61,8 % en 1991, 56,3 % en 1992, 52 % en 1993 et 1994 ; que la société Agences Funéraires du Midi, devenue Compagnie Générale des Pompes Funèbres, opérateur privé le plus important sur l’agglomération marseillaise, représentait environ 10 % du marché ; que le reste de l’activité était assuré par une quinzaine d’agences funéraires qui réalisent par an entre 200 et 500 convois chacune ; Considérant qu’il importe peu, contrairement à ce que soutient la ville de Marseille, que sa part de marché soit passée depuis 1987, date d’entrée en vigueur de la loi de 1986, de 70,99 % à 51,54 % en 1996 ; qu’en effet, malgré cette baisse de part de marché, le service municipal reste l’opérateur le plus important, le second réalisant seulement 10 % de part de marché ; que la régie municipale détient jusqu’au 9 janvier 1998 le monopole du service extérieur et gère la chambre funéraire municipale ; qu’en vertu d’une convention – tacite dans un premier temps puis formalisée le 15 mars 1995 – avec l’Assistance publique de Marseille, le service municipal dispose d’un accès privilégié aux familles des personnes décédées dans les quatre principaux hôpitaux de Marseille, qui enregistrent ensemble environ 30 % du nombre total des décès à Marseille ; qu’il résulte de l’ensemble de ces éléments que le service municipal des pompes funèbres occupe une position dominante sur le marché de référence ; Sur les griefs notifiés,

En ce qui concerne la confusion entre les services de l’état civil et le service municipal des pompes funèbres, Considérant que les éléments recueillis au cours de l’instruction, et qui ont été décrits au IC1) de la présente décision, montrent que les formalités concernant l’état civil et les obsèques sont traitées par la même personne au sein des quatre hôpitaux de l’Assistance publique représentant 30 % des décès enregistrés à Marseille ; Considérant que la ville de Marseille fait observer, que lorsqu’un décès intervient à l’hôpital, la déclaration est effectuée par la famille auprès de l’opérateur funéraire, qu’il soit public ou privé ; que ces déclarations permettent à l’officier d’état civil de dresser l’acte de décès qui est établi par la mairie d’arrondissement compétente, c’est-à-dire là où est situé le domicile mortuaire ; que, dans ces conditions, il ne peut y avoir de confusion possible entre la déclaration de décès et l’établissement de l’acte de décès ; Mais considérant que le rapport présenté au conseil municipal du 30 septembre 1994, et qui est cité au IC1) de la présente décision, précise que la ville de Marseille a " décentralisé le service d’état civil au niveau des hôpitaux publics… que l’administration a été rapprochée des administrés grâce à l’installation de conseillers funéraires au sein même des hôpitaux publics de Marseille, dont la mission est, bien évidemment, de recevoir, orienter, conseiller des familles en matière de formalités administratives, juridiques, consécutives à un décès. Au sein de celles--ci, les démarches liées à l’état civil des personnes décédées ont pris une part prépondérante… » ; que la volonté manifestée par la ville de Marseille d’adapter et de moderniser le service public n’impliquait pas le cumul des fonctions relevant d’un côté de l’état civil et de l’autre côté du services des pompes funèbres, par une même personne ; qu’en permettant au service municipal des pompes funèbres d’entrer en contact avec les familles des défunts, à l’occasion des formalités d’état civil, dès le constat du décès à l’hôpital, sans informer les familles sur leurs possibilités de choix, au regard de la réglementation en vigueur et sans permettre aux agences funéraires privées d’être présentes à l’hôpital, la ville de Marseille a créé des obstacles à l’exécution, par ces dernières, des prestations hors monopole, c’est-à-dire ne relevant pas du service extérieur ou pouvant être effectuées en dérogation en vertu de la loi de 1986 ; En ce qui concerne la remise aux familles de devis ne comportant pas les indications destinées à faciliter leur libre choix pour les prestations et fournitures hors monopole, Considérant que le service municipal remet aux familles des devis sur lesquels figurent deux listes, l’une intitulée « Service monopolisé » et l’autre « Service libre » ; que ces documents ne comportent, pour les prestations et fournitures hors monopole, ni les indications selon lesquelles ces prestations et fournitures peuvent être demandées à d’autres opérateurs, ni les noms de ces opérateurs et les prix qu’ils pratiquent et qui ont été définies par l’arrêté du 18 mars 1985, abrogé et remplacé par l’arrêté du 19 janvier 1994, cités au IC2) de la première décision ; Considérant que la ville de Marseille soutient que les modifications introduites par le décret du 9 mai 1995 relatif au règlement national des pompes funèbres n’ont pas été prises en compte ; que les

documents remis par le service municipal aux familles sont conformes aux nouvelles dispositions ; Mais considérant que les obligations contenues dans les arrêtés susmentionnés ont été maintenues par le décret du 9 mai 1995 ; que la circulaire du ministère de l’intérieur du 27 octobre 1995, relative à l’application dudit décret, précise : " Les articles 1er à 7 du décret n° 95-653 du 9 mai 1995 relatif au règlement national des pompes funèbres qui concernent la documentation générale, les devis et le bon de commande doivent être combinés avec les dispositions de l’arrêté du 19 janvier 1994 relatif à l’information sur les prix des prestations funéraires. Il est à noter que les infractions aux dispositions de l’arrêté précité sont punies des peines d’amendes prévues pour les contraventions de la cinquième classe, conformément aux termes du deuxième alinéa de l’article 33 du décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986, fixant les conditions d’application de l’ordonnance n° 86-124 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence " ; qu’en ne communiquant pas aux familles les informations prévues par les textes, le service municipal a influencé le choix des familles en sa faveur pour les prestations hors monopole ; En ce qui concerne les obstacles à la « réintégration » des corps des défunts en dehors des heures d’ouverture du service de l’état civil, Considérant qu’il résulte de l’instruction que le service municipal des pompes funèbres procède, en dehors des horaires d’ouverture du service de l’état civil, à des « réintégrations de corps » des personnes décédées ; que les agences funéraires privées, dans l’impossibilité d’obtenir les autorisations nécessaires en dehors des heures d’ouverture, ne peuvent assurer ces prestations dans les mêmes conditions que le service municipal ; Considérant que la ville de Marseille observe qu’aucune commune de France n’assure de permanence la nuit ou le dimanche ; que l’accès aux chambres funéraires a été organisé, en avril 1996, en application du décret du 23 novembre 1994 portant modification de dispositions réglementaires du code des communes relatives aux opérations funéraires ; que désormais les transports des corps ne sont pas assujettis à autorisation préalable ; qu’en conséquence les reproches adressés par la Compagnie Générale des Pompes Funèbres sont devenus caducs ; Mais considérant que le transport des corps avant mise en bière ne relevait pas, en vertu de la réglementation en vigueur pendant la période transitoire, décrite au IA1) de la présente décision, du monopole du service extérieur et pouvait en conséquence être assuré concurremment par le service municipal et les entreprises privées de pompes funèbres ; que la ville de Marseille qui organise les conditions d’accès au service de l’état civil et détenait à l’époque le monopole du service extérieur des pompes funèbres devait permettre aux opérateurs privés en concurrence avec le service municipal pour les prestations libres d’obtenir, dans les mêmes conditions que lui, les autorisations nécessaires à l’exécution de cette activité ; qu’en ayant donné à la seule régie municipale la possibilité d’assurer le transport des corps avant mise en bière en dehors des heures d’ouverture du service de l’état civil, la ville de Marseille a traité de façon discriminatoire les agences funéraires privées ;

En ce qui concerne les conditions d’accès aux bureaux de règlement des obsèques Considérant que les faits décrits au IC5 de la présente décision montrent que les horaires d’ouverture des bureaux de règlement des obsèques sont différents pour les familles et les entreprises de pompes funèbres et plus restrictifs pour ces dernières ; que cette situation crée un désavantage au détriment des agences funéraires privées ; qu’en effet, lorsqu’elles sont chargées par les familles d’assurer des prestations hors monopole, les agences funéraires doivent effectuer des démarches préalables dans les bureaux de règlement des obsèques ; qu’en conséquence, lorsque les agences ne peuvent accéder à ces bureaux, elles ne sont pas en mesure d’organiser les obsèques et de répondre aux demandes des familles qui sont dès lors incitées, surtout en cas d’urgence, à s’adresser à la régie municipale ; Considérant que la ville de Marseille fait état d’un jugement du tribunal administratif de Marseille reconnaissant, s’agissant de la circulaire du 21 mars 1994 mentionnée au IC4 de la présente décision, que la ville n’avait pas violé le principe de l’égalité des citoyens devant le service public ; qu’elle soutient en outre que les horaires inscrits sur la circulaire du 21 mars 1994 n’étaient donnés qu’à titre indicatif, car les entreprises de pompes funèbres savaient que, jusqu’en avril 1996, un conseiller funéraire assurait une permanence jusqu’à 17 h 30 ; que de nouveaux horaires sont entrés en vigueur le 2 mai 1996, l’heure de fermeture ayant été repoussée à 18 h ; qu’il est ainsi démontré que la régie municipale a cherché constamment à améliorer le fonctionnement du service et à assurer un équilibre entre les entreprises de pompes funèbres et les particuliers ; Mais considérant que les entreprises privées de pompes funèbres sont habilitées, en vertu de la réglementation en vigueur à fournir, concurremment avec le service municipal, des prestations funéraires ne relevant pas du monopole du service extérieur ou en dérogation au monopole et pour l’exécution desquelles elles sont tenues d’accomplir des démarches dans les bureaux de règlement des obsèques ; que la ville de Marseille, qui était en concurrence avec des opérateurs privés pour les prestations hors monopole ou exercées en dérogation au monopole, décidait de l’organisation et des horaires d’ouverture des bureaux de règlement des obsèques auxquels doivent obligatoirement s’adresser les entreprises de pompes funèbres pour effectuer les formalités préalables à l’organisation des obsèques ; qu’en établissant des horaires d’accès aux bureaux -et par conséquent également aux représentants de la régie municipale présents dans ces bureaux – plus larges pour les familles que pour les agences privées de pompes funèbres, elle a restreint artificiellement les capacités d’offre de ces dernières par rapport à celles de la régie municipale en ce qui concerne les prestations ne relevant pas du monopole ou pouvant être exercées en dérogation au monopole ; En ce qui concerne l’interdiction de procéder à des soins de conservation dans la chambre funéraire municipale Considérant que la chambre funéraire municipale accueille environ un millier de corps de personnes décédées par an, ce qui représente 10 % du nombre total de décès sur Marseille ; que le service municipal a assuré des soins de thanatopraxie dans la chambre funéraire municipale à partir de 1992 ; que la part de la régie municipale dans l’ensemble de l’activité de thanatopraxie à Marseille était évaluée à 12,4 %

en 1992 et à 17,8 % en 1993 ; qu’en vertu de la législation applicable en l’espèce décrite au IC5 de la présente décision, les soins somatiques ne faisaient pas partie du service extérieur et pouvaient en conséquence être exercées par des opérateurs privés ; qu’en ayant interdit aux agences funéraires privées d’effectuer ces prestations dans la chambre funéraire municipale, la ville de Marseille a traité les agences funéraires privées de façon discriminatoire, ce qui a eu pour conséquence de créer des obstacles à l’exercice de leur activité de thanatopraxie ; Considérant que l’ensemble de ces pratiques ont eu pour objet et ont pu avoir pour effet de détourner la clientèle au profit du service municipal des pompes funèbres dans le domaine des prestations et fournitures hors monopole ; que ces pratiques, mises en oeuvre par un opérateur détenant une position dominante sur le marché des pompes funèbres de Marseille, sont prohibées par l’article 8 de l’ordonnance du 1er décembre 1986 ; Sur les sanctions, Considérant, qu’aux termes de l’article 13 de l’ordonnance du 1er décembre 1986 : « Le Conseil de la concurrence peut ordonner aux intéressés de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai déterminé ou imposer des conditions particulières. Il peut infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit en cas d’inexécution des injonctions. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l’importance du dommage causé à l’économie et à la situation de l’entreprise ou de l’organisme sanctionné. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction. Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 5 % du montant du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France au cours du dernier exercice clos. Si le contrevenant n’est pas une entreprise, le maximum est de dix millions de francs » ; Considérant que la ville de Marseille qui détient une position dominante sur le marché des pompes funèbres de l’agglomération marseillaise a abusé de sa position dominante en imposant aux agences funéraires privées des conditions d’accès discriminatoires aux divers services publics municipaux, qui ont contribué à restreindre leur activité dans le domaine des prestations ne relevant pas du service extérieur ou pouvant être exercées en dérogation au monopole commercial ; que, dès lors, il y a lieu de faire application des dispositions de l’article 13 de l’ordonnance précitée en enjoignant à la ville de Marseille, d’une part, de dissocier au sein des hôpitaux de l’Assistance publique l’activité qui relève de l’état civil de celle des pompes funèbres et, d’autre part, d’organiser l’accès aux bureaux d’état civil, aux bureaux de règlement des obsèques et à la chambre funéraire municipale dans des conditions identiques pour la régie municipale et pour les agences privées de pompes funèbres ; Considérant que la gravité des pratiques doit être appréciée en prenant en considération l’importance du marché des prestations funéraires de l’agglomération marseillaise, la population étant évaluée à plus de 800 000 habitants et le nombre de décès à 10 000 par an, sur lequel la ville de Marseille a réalisé en 1996 des recettes d’un montant de 65 057 484 F ; qu’il y a lieu également de prendre en considération le fait que la ville de Marseille, qui détient le monopole du service extérieur depuis 1904 et jouit d’une forte

notoriété, a fait obstacle au développement ou au maintien d’entreprises concurrentes du service municipal des pompes funèbres ; que pour apprécier le dommage à l’économie, il y a lieu de tenir compte du fait que toutes les familles, y compris les plus modestes et les plus démunies, sont concernées par ces pratiques ; que les familles des défunts se trouvent au moment où elles accordent leur confiance à une entreprise de pompes funèbres dans un état de dépendance lié d’une part à la nécessité d’organiser les funérailles dans un délai souvent très bref, d’autre part au désarroi que le deuil est de nature à leur causer ; qu’elles se trouvent ainsi dans une position de faiblesse vis-à-vis des offreurs ; Considérant qu’il y a lieu, au vu des éléments d’appréciation exposés ci-dessus, d’infliger à la ville de Marseille une sanction pécuniaire de 400 000 F, DÉCIDE : Article 1 : Il est établi que la ville de Marseille a enfreint les dispositions du 1 de l’article 8 de l’ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986. Article 2 : Il est enjoint à la ville de Marseille : ● de dissocier, dans les quatre hôpitaux de l’Assistance publique dans lesquels sont installés des postes de conseillers funéraires, l’activité relevant de l’état civil de celle relevant des pompes funèbres ; ● de garantir aux agences funéraires privées des conditions d’accès identiques à celles dont bénéficie le service municipal des pompes funèbres, dans les bureaux d’état civil, les bureaux de règlement des obsèques et dans la chambre funéraire municipale ; Article 3 : Une sanction pécuniaire de 400 000 F est infligée à la ville de Marseille. Délibéré, sur le rapport de Mme Marie-Hélène Mathonnière, par MM. Barbeau, président, Cortesse et Jenny, vice-présidents. Le rapporteur Général, Le président, Marie Picard Charles Barbeau © Conseil de la concurrence

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    • Décision n° 97D92 du 16 décembre 1997

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ADLC, Décision du 16 décembre 1997 relative à des pratiques mises en oeuvre par la règie municipale des pompes funèbres de Marseille, 97-D-92