ADLC, Avis 23-A-14 du 05 octobre 2023 relatif à une demande d’avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse portant sur le septième cycle d’analyse des marchés de gros du haut et du très haut débit fixes

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Sur la décision

Référence :
Aut. conc., avis n° 23-A-14 du 5 oct. 2023
Numéro(s) : 23-A-14
Textes appliqués :
463-7 du code de commerce
Identifiant ADLC : 23-A-14
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Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Avis n° 23-A-14 du 5 octobre 2023 relatif à une demande d’avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse portant sur le septième cycle d’analyse des marchés de gros du haut et du très haut débit fixes L’Autorité de la concurrence (commission permanente), Vu la lettre enregistrée le 29 juin 2023 sous le numéro 23/0038 A, par laquelle l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse a sollicité l’avis de l’Autorité de la concurrence ; Vu le livre IV du code de commerce ; Vu les autres pièces du dossier ; Les représentants des sociétés Bouygues Télécom, SFR, Free, Altitude, Colt et Orange, et de l’Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l’audiovisuel (Avicca) entendus sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 463-7 du code de commerce ; Les rapporteurs, la rapporteure générale adjointe, les représentants de l’Arcep et le commissaire du Gouvernement entendus lors de la séance de l’Autorité de la concurrence du 26 septembre 2023 ;

Est d’avis de répondre à la demande présentée dans le sens des observations suivantes :

Résumé1

L’Autorité de la concurrence se prononce par un avis à la suite d’une saisine de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ci-après « l’Arcep »), sur trois projets de décisions adoptés dans le cadre de la procédure d’analyse des marchés de gros du haut et très haut débit fixes (le marché « 1 » de fourniture en gros d’accès local en position déterminée ; le marché « 2 » de fourniture en gros d’accès de haute qualité en position déterminée ; et le marché de fourniture en gros d’accès aux infrastructures physiques de génie civil pour le déploiement de réseaux de communications électroniques). La demande d’avis porte, d’une part, sur l’identification et la délimitation des marchés de produits et de services pour lesquels une intervention ex ante est nécessaire afin de développer la concurrence et, d’autre part, sur la désignation de l’opérateur considéré comme « exerçant une influence déterminante » sur les différents marchés. À titre liminaire, l’Autorité remarque que certaines nouveautés marquent les projets de décision proposés par l’Arcep pour le cycle de régulation à venir. En premier lieu, l’Autorité constate que l’Arcep prolonge la durée de son cycle de régulation des marchés fixes de trois à cinq ans, à un moment où ce cycle est source d’incertitudes nombreuses, notamment sur les modalités et le rythme de fermeture du réseau cuivre. En deuxième lieu, l’Autorité note que l’Arcep laisse en suspens la poursuite de la régulation du marché des offres de gros d’accès central en position déterminée à destination du marché de masse, dit marché « 3b », faisant ainsi reposer sa régulation, en ce qui concerne les marchés de masse, uniquement sur les marchés où peut se jouer une concurrence par les infrastructures. En troisième lieu, l’Autorité remarque que l’Arcep recourt pour la première fois à la procédure d’engagements prévue à l’article L. 38-1-1 du code des postes et des communications électroniques pour une partie de la régulation tarifaire du marché 1. Enfin, l’Autorité note que le cadre de régulation symétrique n’a pas fait l’objet de modification ou de complément depuis 2020, et pourrait être adapté en tant que de besoin en fonction des évolutions de marchés observées, en particulier la prédominance maintenant avérée des réseaux en fibre optique dans les réseaux fixes. En ce qui concerne la délimitation des marchés, l’Autorité estime qu’il est possible de retenir l’existence d’une substituabilité entre les offres haut et très haut débit, comme le propose l’Arcep, aussi bien sur le segment généraliste que sur le segment entreprise. En ce qui concerne le marché de masse, l’Arcep s’est principalement fondée sur le fait que les usages restent comparables (absence de services uniquement disponibles en très haut débit), que les conditions de commercialisation des deux types d’offres sont proches et que les différences de prix restent limitées à des cas circonscrits. En ce qui concerne les offres à destination de la clientèle entreprise, l’autorité de régulation a constaté que le support physique du réseau ou le débit des accès proposé, ne sont pas des critères de choix prioritaires pour les entreprises, contrairement aux prestations adossées à l’offre d’accès qui présentent un caractère déterminant. Si l’Autorité de la concurrence souscrit à l’analyse de la substituabilité proposée par l’Arcep, elle reste toutefois nuancée sur le caractère parfait de cette substituabilité au regard de la difficulté à faire migrer une part non négligeable de clients vers la fibre. La confirmation de ce constat au cours du cycle à venir pourrait être de nature à remettre en cause cette analyse de la substituabilité.

1 Ce résumé a un caractère strictement informatif. Seuls font foi les motifs de l’avis numérotés ci-après. 2

Concernant le marché de produits, l’Arcep a maintenu une analyse séparée du marché de fourniture en gros d’accès aux infrastructures physiques de génie civil pour le déploiement des réseaux de communications électroniques. L’Autorité soutient la définition séparée de ce marché au regard du caractère structurant de l’accès aux infrastructures de génie civil pour garantir la poursuite des déploiements des réseaux en fibre optique et assurer leur fiabilité dans le temps. Concernant la délimitation géographique des marchés, l’Autorité approuve la délimitation nationale du marché de l’accès au génie civil. L’Autorité soutient également la délimitation nationale, fondée sur une analyse infranationale, des marchés 1 et 2, notamment en ce qu’elle permet de garantir un certain niveau de stabilité et de prévisibilité pour l’ensemble du cycle. L’Autorité souscrit à la démonstration conduisant à la désignation d’Orange comme seul opérateur exerçant une influence significative sur chacun des marchés délimités. S’agissant des principales évolutions de la régulation, l’Autorité accueille favorablement les propositions de l’Arcep, sur le marché de l’accès au génie civil, permettant aux opérateurs de poursuivre et d’achever leurs déploiements en fibre optique. L’Autorité soutient ainsi l’introduction d’une prestation d’accès spécifique adaptée aux conditions de mobilisation des infrastructures à des fins de raccordement, l’introduction d’une obligation financière à la charge d’Orange concernant le remboursement d’interventions de maintenance sur les infrastructures mobilisables à des fins de raccordement final et l’encadrement, en termes de délais et de quotas, des obligations d’Orange relatives au génie civil aérien et souterrain spécifique au raccordement final. L’Autorité soutient également la mise en place d’obligations d’information et de transparence en ce qui concerne la fermeture du cuivre, qui devraient améliorer la visibilité des opérateurs, la mise en place de mesures relatives aux modalités financières de la réparation du génie, ainsi que d’obligations d’information relative aux opérations de maintenance une fois réalisées, même si ces dernières auraient pu comprendre les opérations de maintenance à venir pour garantir une meilleure prévisibilité aux opérateurs. L’Autorité note que la fermeture à grande échelle du réseau cuivre d’Orange constitue un enjeu majeur pour le cycle de régulation qui s’ouvre. Si sa fermeture commerciale intégrale devrait intervenir en cours de cycle, sa fermeture technique s’étalera en revanche sur une période plus longue. À ce sujet, nombreux sont les acteurs du secteur qui regrettent que les modalités et le processus du « plan de fermeture » d’Orange semblent lui conférer une trop grande latitude (en particulier en ce qui concerne la composition des lots de communes pour la fermeture et la visibilité globale sur le plan). L’Autorité rappelle que les impératifs de transparence et de prévisibilité sont essentiels à la mise en œuvre du plan de fermeture du réseau cuivre d’Orange et ne doivent pas conduire à l’instauration de marges de manœuvre ou d’interprétation trop importantes au détriment des conditions de concurrence dans les zones de fermeture concernées. L’Autorité invite donc l’Arcep à s’assurer de la bonne mise en œuvre du plan d’Orange et à intervenir lorsque les choix ou l’application de critères suivis par l’opérateur ne garantissent pas les conditions de la dynamique concurrentielle à l’occasion de la bascule vers les réseaux à très haut débit. À travers plusieurs mesures d’accompagnement de la fermeture du réseau cuivre, l’Arcep entend par ailleurs prendre en compte certains freins opérationnels rendant difficile une couverture à 100 % des locaux en fibre optique. D’une manière générale, l’ensemble des opérateurs appellent de leurs vœux cette transition afin de limiter l’utilisation en parallèle de deux réseaux distincts et d’offrir à leur clientèle les avantages (débits accrus, confort d’utilisation, etc.) qui résultent de l’utilisation des réseaux en fibre optique. Si ces mesures 3

ont vocation à faciliter cette dynamique, l’Autorité relève que certaines d’entre elles doivent faire l’objet d’une vigilance particulière lors de leur mise en œuvre. Parmi les questions qui se posent figurent leur impact sur la part des lignes cuivre qui perdureront dans le temps, la difficulté éventuelle de recourir à des technologies alternatives à très haut débit et la disponibilité réelle d’offres adaptées aux besoins des utilisateurs. En ce qui concerne la portée de certaines mesures liées à la fermeture du cuivre, en particulier celles relatives à son niveau de qualité de service et à son encadrement tarifaire, l’Autorité constate que les scénarios concurrentiels qu’elle avait évoqués sur ces points dans son avis n° 20-A-07 qui comportent notamment un risque de rente semblent se confirmer depuis la publication par Orange du plan de fermeture de son réseau. L’absence de recul sur la dynamique concurrentielle qui accompagnera la fermeture du réseau cuivre, les incertitudes sur la part des lignes de cuivre qui resteront actives dans le temps – le nombre de clients réticents au changement pouvant aller jusqu’à 15-20 % – ou celles sur les délais réels qui s’écouleront entre la fermeture commerciale et la fermeture technique du réseau, apparaissent comme autant d’aléas susceptibles de jouer sur les incitations des opérateurs et de leurs clients à migrer vers la fibre. Aussi, l’Autorité invite l’Arcep à veiller à ce que les allègements de l’encadrement de la qualité de service et du cadre tarifaire du dégroupage ne créent pas de déséquilibres sur le marché. L’Autorité relève que la poursuite des déploiements pour rendre l’ensemble des locaux éligibles est centrale pour pouvoir faire migrer l’ensemble des clients vers la fibre le moment venu. À ce titre, l’Autorité souligne qu’il paraît nécessaire que les fichiers d’information relatifs à l’éligibilité des locaux aux réseaux en fibre optique (fichiers IPE) soient exhaustifs, c’est-à-dire qu’ils comprennent l’ensemble des locaux, et contiennent une information détaillée à propos de chaque local, en particulier un éventuel statut de gel commercial. En outre, l’Autorité soutient les propositions de l’Arcep relatives à la gratuité de la résiliation des accès à la boucle locale d’Orange pour les opérateurs là où ils n’ont pas d’autre choix que de résilier cet accès, et au remboursement du trop-perçu par Orange lorsqu’Orange a bénéficié d’une levée du contrôle tarifaire pour une durée plus importante que le délai prévu initialement, en raison d’une absence de fermeture technique du réseau cuivre. Ces mesures semblent de nature à ne pas faire peser sur les opérateurs un surcoût lié à la fermeture du réseau cuivre, ce qui devrait participer à la migration vers le réseau en fibre optique. L’Autorité constate que le marché entreprise est considéré, comme dans les cycles précédents, comme un marché visqueux où la concurrence est peu développée. Toutefois, l’Autorité relève que la période de migration vers la fibre constitue une fenêtre inédite d’ouverture à la concurrence, à l’occasion de laquelle un nombre important d’entreprises pourraient envisager un changement d’opérateur. L’analyse de l’Autorité fait ressortir deux axes majeurs permettant de favoriser cette dynamique potentielle de migration. Il s’agit tout d’abord de renforcer l’éligibilité des entreprises en s’assurant que tous les locaux d’activité soient répertoriés et identifiés de manière précise et exhaustive dans les fichiers d’éligibilité aux réseaux en fibre optique. Par ailleurs, la faculté, pour les entreprises, de souscrire des offres effectives proposant sur la fibre des prestations au moins équivalentes à celles dont elles disposaient sur le cuivre et correspondant à leurs besoins (en particulier les liens de sécurisation de bout en bout, le multi-accès, et le multi-sites) est nécessaire. L’Autorité appelle donc l’Arcep à une vigilance particulière sur ces deux axes, afin que tous les opérateurs puissent poursuivre leurs déploiements et les raccordements, et qu’ils puissent ensuite proposer leurs offres commerciales dans des conditions similaires.

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SOMMAIRE

I. PRESENTATION ……………………………………………………………………… 11 A. CONTEXTE DE LA SAISINE …………………………………………………………………………11 1. LA PERSPECTIVE DE LA FERMETURE DU RESEAU CUIVRE ………………………………11 2. LES RESEAUX EN FIBRE OPTIQUE DEVIENNENT LES RESEAUX DE REFERENCE SUR LE MARCHE …………………………………………………………………………………………………12 3. UN CYCLE DE REGULATION MARQUE PAR DIFFERENTES SPECIFICITES …………..14 a) Le présent cycle porte sur une durée de cinq ans ………………………….. 14 b) La poursuite de la régulation du marché 3b reste en suspens ………… 15 S’agissant du premier critère relatif à la présence d’obstacles à l’entrée importants et non transitoires d’ordre structurel, juridique ou réglementaire ..15 S’agissant du deuxième critère relatif à l’évolution vers une concurrence effective au cours de la période visée …………………………………………………………16 S’agissant du troisième critère relatif à l’incapacité du droit de la concurrence à remédier à lui seul, de manière adéquate, aux défaillances du marché constatées. ………………………………………………………………………………………………………………16 c) L’Arcep utilise pour la première fois la procédure d’engagements prévue à l’article L. 38-1-1 du CPCE dans le cadre de la régulation des marchés à haut et très haut débit …………………………………………………. 17 d) La stabilité du cadre symétrique ………………………………………………….. 18 B. DELIMITATION DES MARCHES ET PUISSANCE DES ACTEURS ……………..19 1. LES MARCHES DE PRODUITS ET DE SERVICES ………………………………………………..19 2. LES MARCHES GEOGRAPHIQUES ………………………………………………………………….20 3. LA DESIGNATION DE L’ACTEUR PUISSANT SUR LES MARCHES REGULES ………….21 C. LES EVOLUTIONS ENVISAGEES CONCERNANT LES REMEDES …………….22 1. LES EVOLUTIONS PROPOSEES SUR LE MARCHE DU GENIE CIVIL ……………………..22 a) Obligations relatives au processus de rénovation ou de réparation du génie civil …………………………………………………………………………………….. 22 Obligation générale et délais spécifiques au raccordement final …………………..23 Obligation relative au génie civil aérien spécifique au raccordement final ……23 Obligation relative au génie civil souterrain spécifique au raccordement final 23 Obligation financière spécifique au raccordement final ………………………………23 Rappel de l’obligation financière s’agissant de la rénovation des infrastructures ………………………………………………………………………………………………………………23 Modalités financières relatives à la réparation du génie civil ……………………….24 b) Obligations d’informations et de transparence ……………………………… 24 Obligation d’information dans la mise en œuvre de la fermeture du réseau cuivre ………………………………………………………………………………………………………………24 5

Délai de prévenance en cas de modification tarifaire dans le cadre de la fermeture du réseau cuivre ……………………………………………………………………….24 c) Obligation relative à la qualité des services …………………………………… 24 Obligations d’information dans le cadre de travaux ou d’opérations de maintenance ……………………………………………………………………………………………25 Obligations relatives aux pénalités pour mauvaise qualité des informations transmises ……………………………………………………………………………………………….25 2. LES EVOLUTIONS PROPOSEES SUR LE MARCHE DE FOURNITURE EN GROS D’ACCES LOCAL EN POSITION DETERMINEE (MARCHE 1) ……………………………………………..26 a) Allègements relatifs aux demandes d’accès raisonnables ………………. 26 Levée de l’obligation d’accès à une offre de qualité de services renforcée …….26 Levée de l’obligation d’une offre de migration vers le dégroupage ……………….26 Assouplissement des demandes d’accès à la sous-boucle en bi-injection ……….26 b) Accompagnement de la fermeture du réseau cuivre ………………………. 26 Modalités de mises en œuvre …………………………………………………………………….27 Renforcement des obligations de transparence …………………………………………..29 c) Évolution des conditions tarifaires ……………………………………………….. 31 Accès avec levée de la régulation tarifaire ………………………………………………….31 Accès avec régulation tarifaire en non-excessivité ………………………………………31 Principe de reproductibilité tarifaire ………………………………………………………….32 Adaptation de la méthode de tarification au vidage du réseau cuivre ……………32 d) Accès passif aux boucles locales optiques ……………………………………… 32 Allègement sur les accès passifs aux boucles locales optiques ………………………32 Accès avec qualité renforcée ……………………………………………………………………..32 Levée des principes de non-discrimination pour l’accès passif aux boucles locales optiques mutualisées ……………………………………………………………………..33 e) Qualité des services ……………………………………………………………………… 33 Application des pénalités de manière équitable …………………………………………..33 Précision sur l’appréciation de la QS en fonction des marchés …………………….33 Ressources et services associés d’hébergement au sein des locaux d’Orange …33 3. LES EVOLUTIONS PROPOSEES SUR LE MARCHE DE FOURNITURE EN GROS D’ACCES DE HAUTE QUALITE (MARCHE 2) …………………………………………………………………..34 a) Accompagnement de la fermeture du réseau cuivre ………………………. 34 b) Allègement des obligations d’accès ……………………………………………….. 35 Fin de l’obligation de raccordement des stations de base des réseaux mobiles .35 Fin de l’obligation de proposer des offres en technologie ATM ……………………35 c) Conditions relatives aux tarifs ……………………………………………………… 35 Obligations relatives aux tests de reproductibilité ……………………………………….35 Levée de l’obligation de tarifaire dans certaines ZC3 ………………………………….36 6

Obligation de transparence pour les hausses tarifaires dans les zones non régulées …………………………………………………………………………………………………..36 Application du principe de non-régression …………………………………………………36 d) Allègement des obligations de qualité de service ……………………………. 37 II. ANALYSE …………………………………………………………………………………. 37 A. REMARQUES PREALABLES LIEES AUX PARTICULARITES DU NOUVEAU CYCLE DE REGULATION …………………………………………………………………………….37 1. SUR LA DUREE DU CYCLE …………………………………………………………………………….37 2. SUR LES INCERTITUDES ENTOURANT LA REGULATION DU MARCHE 3B ……………40 3. SUR LE CARACTERE SUFFISANT DU CADRE SYMETRIQUE ……………………………….43 B. SUR LA DELIMITATION DES MARCHES ……………………………………………………45 1. SUR LA SUBSTITUABILITE ENTRE LE HAUT ET TRES HAUT DEBIT …………………….45 2. CONCERNANT LE MAINTIEN D’UNE DEFINITION SEPAREE D’UN MARCHE DU GENIE CIVIL ………………………………………………………………………………………………………….46 3. SUR LA DELIMITATION GEOGRAPHIQUE DES MARCHES …………………………………47 C. SUR LA DESIGNATION DE L’ACTEUR PUISSANT SUR LES MARCHES REGULES ……………………………………………………………………………………………………….48 D. SUR LA REGULATION ENVISAGEE…………………………………………………………….49 1. SUR L’ACCES AUX INFRASTRUCTURES DE GENIE CIVIL ………………………………….49 2. SUR LA FERMETURE DU RESEAU CUIVRE ………………………………………………………51 a) Sur la transparence et la prévisibilité du plan de fermeture du réseau cuivre ………………………………………………………………………………………….. 51 b) Sur l’accompagnement de la fermeture du cuivre …………………………. 52 c) Sur la portée incitative de certaines mesures du cadre de régulation 54 Sur l’encadrement de la qualité de service du réseau cuivre ………………………..54 Sur l’évolution de la tarification du dégroupage …………………………………………57 3. SUR LA MIGRATION VERS LA FIBRE ………………………………………………………………60 4. SUR LE MARCHE ENTREPRISE ………………………………………………………………………62 a) La dynamique de changement des entreprises : migration technologique et changement d’opérateur …………………………………….. 63 b) Les conditions de poursuite de cette dynamique concurrentielle ……. 64 Renforcer l’éligibilité des entreprises à la fibre …………………………………………..64 Assurer l’effectivité des offres de substitution aux offres cuivre existantes ……65 CONCLUSION …………………………………………………………………………………. 67 GLOSSAIRE …………………………………………………………………………………….. 69

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1. Par lettre du 29 juin 2023, enregistrée sous le numéro 23/0038 A, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ci-après « l’Arcep ») a sollicité l’avis de l’Autorité de la concurrence (ci-après « l’Autorité ») sur : − deux projets de décisions adoptés dans le cadre de la procédure d’analyse portant sur les marchés de gros du haut et très haut débit fixes, identifiés par la Commission européenne, dans sa recommandation n° 2020/2245/UE du 18 décembre 2020, comme étant susceptibles de faire l’objet d’une régulation ex ante par les régulateurs sectoriels des États membres de l’Union européenne, à savoir : o le marché « 1 » (anciennement dénommé marché « 3a » dans le cadre du précédent cycle de régulation) de fourniture en gros d’accès local en position déterminée ; o le marché « 2 » (anciennement marché « 4 ») de fourniture en gros d’accès de haute qualité ; − un projet de décision portant sur l’analyse du marché de fourniture en gros d’accès aux infrastructures physiques de génie civil pour le déploiement de réseaux de communications électroniques, qui n’est pas listé en annexe de la recommandation n° 2020/2245/UE de la Commission européenne, mais qui a été recensé par l’Arcep après application, conformément à cette recommandation, du test des trois critères2. 2. La demande d’avis de l’Arcep porte, conformément aux articles

L. 37-13, D. 3014 et D. 3025 du code des postes et des communications électroniques (ci-

2 La recommandation n° 2014/710/UE, considérant 21 et point 2, indique que : « Lorsqu’elles recensent des marchés autres que ceux énumérés en annexe, les autorités réglementaires nationales doivent démontrer — et la Commission vérifiera — que les trois critères suivants sont remplis en même temps : a) il existe des barrières élevées et non provisoires à l’entrée, qu’elles soient de nature structurelle, légale ou réglementaire ; b) la structure du marché ne présage pas d’évolution vers une concurrence effective dans un délai déterminé, compte tenu de la situation de la concurrence fondée sur les infrastructures et autres facteurs, indépendamment des barrières à l’entrée ; c) le droit de la concurrence ne permet pas de remédier à lui seul aux défaillances du marché constatées. »

3 L’article L. 37-1 du CPCE dispose notamment que : « L’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse détermine, au regard notamment des obstacles au développement d’une concurrence effective, et après avis de l’Autorité de la concurrence, les marchés du secteur des communications électroniques pertinents, en vue de l’application des articles L. 38, L. 38-1 et L. 38-2. Après avoir analysé l’état et l’évolution prévisible de la concurrence sur ces marchés, l’autorité établit, après avis de l’Autorité de la concurrence, la liste des opérateurs réputés exercer une influence significative sur chacun de ces marchés, au sens des dispositions de l’alinéa suivant. […] » 4 L’article D. 301 du CPCE dispose notamment que : « […] Les projets de mesures pris en application du premier alinéa de l’article L. 37-1 font l’objet d’une consultation publique dans les conditions prévues aux articles L. 32-1. Ils sont soumis pour avis à l’Autorité de la concurrence et, lorsqu’ils incluent la diffusion de la radio et de la télévision dans le périmètre d’un marché pertinent, au Conseil supérieur de l’audiovisuel, qui se prononcent dans un délai de six semaines. […] » 5 L’article D. 302 du CPCE prévoit notamment que : « […] Les projets de mesures pris en application du deuxième alinéa de l’article L. 37-1 font l’objet d’une consultation publique dans les conditions prévues à l’article L. 32-1. Ils sont soumis pour avis à l’Autorité de la concurrence et, lorsqu’ils concernent des marchés 8

après « CPCE ») relatifs à la régulation ex ante, d’une part, sur l’identification des marchés de produits et de services pour lesquels une intervention ex ante est nécessaire pour développer la concurrence et, d’autre part, sur la désignation des opérateurs considérés comme étant puissants sur les marchés. 3. La procédure relative à la régulation ex ante a été définie en 2002 au sein du corpus de droit dérivé de l’Union européenne, désigné sous l’appellation de « paquet télécom », regroupant plusieurs directives relatives au secteur des communications électroniques6. Cette procédure prévoit que chacun des régulateurs sectoriels des États membres de l’Union européenne conduit une analyse en trois volets : (i) identification des marchés de produits et de services du secteur des communications électroniques pour lesquels une intervention ex ante est nécessaire pour développer la concurrence au vu des circonstances nationales, (ii) désignation des opérateurs qui, le cas échéant, sont considérés comme étant « puissants sur le marché », (iii) définition des obligations ex ante qui sont imposées à ces opérateurs puissants. 4. La directive (UE) 2018/1972 du 11 décembre 20187 établissant le « code des communications électroniques européen » a procédé à l’actualisation et à la refonte du « paquet télécom ». Elle a remplacé, tout en s’inscrivant dans leur continuité, l’ensemble des directives relatives au secteur des communications électroniques avec effet au 21 décembre 20208. L’ordonnance n° 2021-650 du 26 mai 20219 a transposé en droit français les nouveaux éléments de la directive, parmi lesquels la création d’un mécanisme d’engagements que les entreprises puissantes sur un marché peuvent prendre en matière de co-investissement. Si l’Autorité de régulation nationale rend ces derniers contraignants, elle peut ne pas imposer d’obligations aux entreprises puissantes dans le cadre des analyses de marché (article L. 38-2-2 du CPCE). 5. Cette transposition a également permis d’adapter la procédure de détermination des marchés pertinents, avec la modification, par décret du 30 septembre 202110, de l’article D. 301 du CPCE, permettant à l’Arcep de déclarer un marché pertinent « pour une durée maximale de

pertinents sur lesquels elle a été saisie en application de l’article D. 301, au Conseil supérieur de l’audiovisuel, qui se prononcent dans un délai de 6 semaines. […] ». 6 Notamment la directive 2002/21/CE du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive « cadre »), modifiée par la directive 2009/140/CE du 25 novembre 2009, et la directive 2002/19/CE du 7 mars 2002 relative à l’accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu’à leur interconnexion (directive « accès »), modifiée par la directive 2009/140/CE du 25 novembre 2009. 7 Directive (UE) 2018/1972 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 établissant le code européen des communications électroniques. 8 En plus des directives 2002/19/CE et 2002/21/CE, la directive abroge également la directive 2002/20/CE du 7 mars 2002 relative à l’autorisation de réseaux et de services de communications électroniques (directive « autorisation »), et la directive 2002/22/CE du 7 mars 2002 concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques (directive « service universel »). 9 Ordonnance n° 2021-650 du 26 mai 2021 portant transposition de la directive (UE) 2018/1972 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 établissant le code des communications électroniques européen et relative aux mesures d’adaptation des pouvoirs de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse, précisée par le décret n° 2021-1281 du 30 septembre 2021 modifiant les obligations des opérateurs de communications électroniques conformément au code des communications électroniques européen. 10 Décret n° 2021-1281 du 30 septembre 2021 modifiant les obligations des opérateurs de communications électroniques conformément au code des communications électroniques européen, article 17. 9

cinq ans » contre trois ans auparavant. L’Arcep doit réviser11 son analyse de sa propre initiative « lorsque l’évolution de ce marché le justifie » ou « dans les trois ans suivant la modification de la recommandation de la Commission européenne précitée » s’agissant des marchés qu’elle n’a pas identifiés comme étant susceptibles de faire l’objet d’une régulation ex ante. 6. Pour compléter ce cadre procédural, la Commission européenne a adopté plusieurs recommandations ainsi que des lignes directrices : − une recommandation du 20 septembre 2010 relative à la prise en compte des réseaux de nouvelle génération dans la définition des obligations ex ante (troisième volet du processus d’analyse des marchés)12 ; − une recommandation du 11 septembre 2013 relative aux obligations de non-discrimination et aux méthodes de calcul des coûts cohérentes pour promouvoir la concurrence et encourager l’investissement dans le haut débit13 ; − une recommandation du 18 décembre 2020 concernant les marchés pertinents de produits et de services dans le secteur des communications électroniques susceptibles d’être soumis à une réglementation ex ante14 ; − des lignes directrices du 7 mai 2018 sur l’analyse du marché et l’évaluation de la puissance sur le marché en application du cadre réglementaire communautaire pour les réseaux et les services de communications électroniques15. 7. Le dispositif de régulation envisagé par l’Arcep, sur lequel porte la demande d’avis, concerne la période 2024-2028 et constitue le septième cycle d’analyse des marchés fixes du haut et du très haut débit. Il vise à remplacer les décisions de l’Arcep n° 2020-1445 (pour le marché du génie civil), n° 2020-1446 (pour le marché 1) et n° 2020-1448 (pour le marché 2), adoptées le 15 décembre 2020. 8. Après avoir exposé quelques éléments de contexte et présenté l’essentiel du contenu des projets de décisions soumis à son avis (I), l’Autorité formulera ses observations sur les principales évolutions que l’Arcep propose d’apporter au dispositif actuel de régulation asymétrique des deux marchés de gros du haut et du très haut débit fixes et du marché de gros d’accès au génie civil et sur les perspectives de développement de ces marchés (II).

11 Article D. 301, alinéa 6 du CPCE. 12 Recommandation de la Commission européenne n° 2010/572/UE du 20 septembre 2010 sur l’accès réglementé aux réseaux d’accès de nouvelle génération (NGA). 13 Recommandation de la Commission européenne n° 2013/466/UE du 11 septembre 2013 sur des obligations de non-discrimination et des méthodes de calcul des coûts cohérentes pour promouvoir la concurrence et encourager l’investissement dans le haut débit. 14 Recommandation de la Commission n° 2020/2245/UE du 18 décembre 2020 concernant les marchés pertinents de produits et de services dans le secteur des communications électroniques susceptibles d’être soumis à une réglementation ex ante conformément à la directive (UE) 2018/1972 du Parlement européen et du Conseil établissant le code des communications électroniques européen. 15 Lignes directrices n° 2018/C 159/01 de la Commission européenne du 7 mai 2018 sur l’analyse du marché et l’évaluation de la puissance sur le marché en application du cadre réglementaire communautaire pour les réseaux et les services de communications électroniques. 10

I. Présentation 9. Après avoir introduit des éléments du contexte dans lequel s’inscrit la saisine de l’Arcep concernant ses analyses des marchés du haut débit et très haut débit fixes (A), seront présentées les analyses de l’Arcep relatives à la délimitation des marchés et à la puissance des acteurs sur ceux-ci (B), ainsi que les principales évolutions que l’Arcep envisage d’apporter au cadre actuel de régulation asymétrique (C). A. CONTEXTE DE LA SAISINE 10. Alors que s’annonce la fermeture du réseau cuivre (1), les réseaux de fibre optique jusqu’à l’abonné (pour « Fiber to the Home » ou FttH) sont déjà devenus les réseaux de référence sur le marché (2). C’est dans ce contexte que le nouveau cycle de régulation proposé par l’Arcep se distingue par différentes particularités (3). 1. LA PERSPECTIVE DE LA FERMETURE DU RESEAU CUIVRE 11. La fourniture des accès à internet via un réseau fixe peut être réalisée selon différents supports technologiques. À côté des réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné et, dans une moindre mesure, des réseaux en câble coaxial, la boucle locale cuivre constitue le réseau fixe historique en France. 12. Jusqu’au précédent cycle d’analyse de marché, la paire de cuivre du réseau téléphonique d’Orange constituait le principal réseau de boucle locale utilisé pour la fourniture des accès à haut débit, par le biais de la technologie DSL (« Digital subscriber line » ou ligne d’accès numérique d’abonné) permettant d’atteindre un débit pouvant aller à plus de 8 Mbit/s et, à très haut débit, via la technologie VDSL2 (« Very High Speed Digital Subscriber line 2 ») qui permet d’atteindre des débits descendants16 supérieurs à 30 Mbit/s. 13. La transition de la boucle locale cuivre vers les réseaux en fibre optique fait l’objet d’une attention particulière depuis plusieurs années dans la mesure où les réseaux en fibre optique ont tendance à devenir progressivement les infrastructures fixes de référence. Pour accompagner cette bascule technologique, l’Arcep avait fixé dans sa décision n° 2020-1446 du 15 décembre 2020 les conditions devant être respectées par Orange avant de procéder à la fermeture de son réseau cuivre et imposé l’obligation pour l’opérateur de lui notifier son programme de fermeture de la boucle locale cuivre en vue d’une consultation publique des acteurs du secteur. 14. Par courrier du 31 janvier 2022, Orange a transmis à l’Arcep le plan de fermeture de son réseau de boucle locale cuivre. À la suite d’une consultation publique organisée par l’Arcep du 7 février au 4 avril 2022, Orange a répondu à différentes interrogations du régulateur en

16 Le débit descendant est le flux de données internet qu’un utilisateur reçoit sur sa ligne (il va du réseau vers l’utilisateur). 11

précisant ou complétant son plan, ces éléments ayant été publiés par l’Arcep le 29 juillet 202217. 15. Ce plan prévoit la fermeture progressive du réseau cuivre par zones et en deux temps. Dans un premier temps, le plan passera par une phase de fermeture commerciale du réseau correspondant à l’arrêt des ventes de nouveaux abonnements utilisant le réseau cuivre, quel que soit l’opérateur (les abonnements déjà souscrits étant en revanche maintenus). Au plan national, Orange prévoit une fermeture commerciale concernant l’ensemble des lignes cuivre en janvier 2026. Dans un second temps, le plan passera par une phase de fermeture technique du réseau correspondant à son extinction, les services (téléphonie, abonnement Internet ADSL, etc.) véhiculés sur le réseau de cuivre cessant alors de fonctionner. Cette fermeture technique interviendra progressivement et Orange prévoit qu’elle devrait concerner l’ensemble des lignes au plan national d’ici à la fin 2030. 16. Le plan de fermeture proposé par Orange devrait donc conduire en six à sept ans à l’extinction totale du réseau de boucle locale cuivre, ce qui représente un enjeu majeur pour l’ensemble des acteurs du secteur, en particulier pour les opérateurs qui l’utilisent encore pour fournir des services tant sur le marché de détail que sur le marché de gros. La migration des accès du réseau cuivre vers les réseaux en fibre optique soulève des enjeux importants. En effet, le cuivre reste une technologie encore largement utilisée sur la boucle locale. Selon l’Arcep, « les technologies DSL, déployées sur la boucle locale de cuivre, sont toujours les technologies les plus répandues pour la fourniture d’accès haut débit, et représentaient 11,6 millions d’accès haut débit au 31 décembre 2022 », soit environ 36 % du marché de détail des abonnements internet haut et très haut débit. À cette même date, il apparaît également que « les offres de dégroupage représentaient encore environ 40 % des accès vendus sur le marché de gros d’accès aux réseaux fixes ». Concernant le marché de gros des accès activés de haute qualité, la part des accès cuivre apparaît encore plus importante. Comme le souligne l’Arcep, « le nombre d’accès cuivre commercialisés sur le marché de gros est estimé à environ 135 000 à fin 2022 (sur un total de 315 000 accès cuivre sur le marché de détail) »18 alors que « le nombre d’accès optiques commercialisés sur le marché de gros activés est estimé à environ 120 000 à fin 2022 (sur un total de 290 000 accès optiques sur le marché de détail) ». 17. Encore à l’état de projet lors du précédent cycle d’analyse des marchés, la fermeture du réseau de boucle locale cuivre d’Orange fait dorénavant l’objet d’un véritable plan concret dont l’ampleur, les modalités de mise en œuvre et l’impact sur la concurrence pourront être analysés avec davantage de précision qu’en 2020. 2. LES RESEAUX EN FIBRE OPTIQUE DEVIENNENT LES RESEAUX DE REFERENCE SUR LE MARCHE 18. Avec le développement des nouveaux usages, qui requièrent des débits plus importants qu’auparavant, les opérateurs de communications électroniques ont développé, au cours des précédents cycles d’analyse de marché, les réseaux à très haut débit (ci-après, « THD »). Au

17 https://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/questions-reponses-Arcep-Orange-consultation-fermeture- cuivre_juil2022.pdf. 18 Le parc d’accès cuivre de haute qualité commercialisé sur le marché de gros est constitué d’accès DSL à 97 % du parc et d’accès LPT (Liaisons Partielles Terminales ; une LPT est un accès de haute qualité à interface traditionnelle reliant le site du client d’un opérateur tiers à un centre d’Orange ouvert au service d’aboutement) à 3 % du parc. 12

31 décembre 2022, 37 millions de logements ou locaux à usage professionnel y étaient éligibles contre environ 25 millions en juin 2020. Selon l’Arcep, le très haut débit représentait 67 % des abonnements internet haut et très haut débit en décembre 2022. 19. Plusieurs types d’infrastructures permettent de fournir des services à très haut débit. 20. En premier lieu, les services à très haut débit peuvent être délivrés en réutilisant la dernière partie de la boucle locale cuivre. L’introduction de la technologie VDSL2, dont la commercialisation a été autorisée progressivement à partir du 1er octobre 2013, peut ainsi permettre d’atteindre des débits descendants supérieurs à 30 Mbit/s dans le cas d’un utilisateur final titulaire d’une ligne suffisamment courte et raccordée à un répartiteur collecté en fibre optique. 21. À l’instar du très haut débit sur cuivre, il existe en deuxième lieu la possibilité de réutiliser la partie terminale des réseaux en câble coaxial (soit la plus proche des abonnés). SFR a retenu cette approche en déployant de la fibre optique jusqu’aux immeubles (FTTLA pour « Fiber To The Last Amplifier ») à la place de son ancien réseau de câble coaxial, tout en conservant la partie terminale en câble coaxial, ce qui lui permet aujourd’hui, sur la base de la technologie DOCSIS 3.0, d’offrir un débit descendant pouvant atteindre 1 Gbit/s et 100 Mbit/s en débit remontant pour les mises à niveau les plus récentes de ce réseau FttB. 22. Il existe en troisième lieu des technologies non filaires d’accès au THD fixe (satellite, THD radio, 4G et 5G fixe). Selon l’Arcep, elles « sont utilisées principalement par les opérateurs pour raccorder les locaux isolés dont le raccordement par liaison filaire pourrait s’avérer complexe ». 23. Enfin, les opérateurs ont déployé des réseaux FttH, ce qui permet d’offrir aujourd’hui généralement des débits descendants pouvant atteindre 1 Gbit/s et des débits remontants de l’ordre de 200 Mbit/s. L’Arcep estimait déjà à l’occasion du précédent cycle d’analyse de marché, dans un contexte d’accélération des déploiements des réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné et de future extinction du réseau cuivre, que l’infrastructure FttH avait vocation à devenir la « prochaine infrastructure fixe de référence »19. 24. Les déploiements FttH des opérateurs de ces dernières années et l’adoption de cette nouvelle infrastructure par le marché ne démentent pas cette anticipation. Selon le dernier observatoire des marchés publié par l’Arcep le 6 juillet 2023, « la fibre optique de bout en bout représente près de 60 % du nombre total des abonnements internet en France »20 et apparaît comme le seul vecteur de croissance du marché, la baisse du nombre d’accès à haut débit se poursuivant par ailleurs, notamment sur les réseaux DSL. Ainsi, plus de la moitié des 35,3 millions de locaux raccordables à la fibre sont équipés d’un abonnement actif à la fibre, soit 19 millions au premier trimestre 2023, comme le montre le graphique suivant.

19 Avis n° 20-A-07 du 15 septembre 2020 relatif à une demande d’avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse portant sur le sixième cycle d’analyse des marchés de gros du haut et du très haut débit et sur le projet de décision précisant les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique. 20 « Les services de communications électroniques en France, 1er trimestre 2023. Observatoire des marchés des communications électroniques », Arcep, 6 juillet 2023, page 4. 13

Source : Arcep 25. Dans la perspective de la fermeture du réseau cuivre, la dynamique de commercialisation des réseaux en fibre optique, tant auprès de la clientèle résidentielle qu’entreprise, représente pour beaucoup d’acteurs une opportunité de remettre en cause les équilibres concurrentiels du marché. Mais elle constitue aussi un moment charnière de fonctionnement du secteur où d’éventuels dysfonctionnements de marché peuvent durablement amoindrir l’exercice du jeu de la concurrence. L’Autorité prêtera donc une attention particulière aux différents mécanismes concurrentiels susceptibles de jouer au cours du cycle à venir dans le cadre de la bascule du haut vers le très haut débit. 3. UN CYCLE DE REGULATION MARQUE PAR DIFFERENTES SPECIFICITES a) Le présent cycle porte sur une durée de cinq ans 26. Jusqu’au précédent cycle, les analyses de marché de l’Arcep intervenaient pour une durée maximale de 3 ans. À la suite de la modification de l’article D. 301 du CPCE par l’article 17 du décret n° 2021-1281 du 30 septembre 2021, l’Arcep peut dorénavant déclarer un marché pertinent « pour une durée maximale de cinq ans ». 27. L’Arcep a donc décidé, pour la première fois, de faire porter son analyse sur une durée substantiellement plus longue. Elle considère en l’espèce qu’une durée de cinq années est « pertinente, au regard de l’absence d’évolution prévisible, en l’absence de régulation du marché, vers une situation de concurrence effective »21. 28. Au vu du processus de fermeture du réseau cuivre d’Orange et de développement des réseaux à très haut débit, cette nouvelle durée de cinq ans fait ressortit le caractère prospectif de l’analyse menée par l’Arcep, que certains acteurs entendus dans le cadre de l’instruction du présent avis considèrent comme restant assujettie à des incertitudes particulièrement nombreuses.

21 Projet de décision relatif au marché 1, page 12. 14

29. Il apparaît néanmoins que le régulateur garde la possibilité de réviser son analyse de sa propre initiative, en particulier « lorsque l’évolution de ce marché le justifie ». L’Arcep annonce ainsi qu’elle pourra « en tant que de besoin, par exemple en cas d’évolution significative de la structure du marché ou de ses acteurs […] se donner la possibilité d’effectuer une nouvelle analyse avant la fin de la période envisagée et, le cas échéant, prendre de nouvelles décisions »22. b) La poursuite de la régulation du marché 3b reste en suspens 30. Le marché 3b (anciennement marché 5) comprend les offres de gros d’accès central en position déterminée à destination du marché de masse, ou grand public. Il regroupe les offres livrées au niveau infranational, qu’elles soient fondées sur le cuivre en DSL, le câble coaxial ou la fibre optique, et qu’elles soient livrées en IP (« Internet protocol ») ou en Ethernet. 31. Ce marché a toujours été régulé par l’Arcep, comme en témoignent notamment ses décisions pour les deux précédents cycles d’analyse de marché23. L’Arcep prévoyait également la régulation de ce marché dans son bilan du marché du haut et du très haut débit publié le 13 juillet 2022 et dans la première consultation publique relative aux premiers projets d’analyses de ces marchés mis en consultation publique le 20 février 2023. 32. Dans ces deux phases d’analyse préalables, la poursuite de la régulation du marché 3b était envisagée par l’Arcep sur la base d’une définition d’un marché géographique infranational sur lequel Orange continuerait à être désigné comme l’opérateur puissant. Bien que ce marché ne soit pas recensé par la Commission européenne dans sa recommandation « marchés pertinents », l’Arcep considérait en effet qu’il était susceptible, pour le cycle à venir, d’être soumis à une régulation ex ante au regard du test des trois critères24. S’agissant du premier critère relatif à la présence d’obstacles à l’entrée importants et non transitoires d’ordre structurel, juridique ou réglementaire 33. Dans son projet de décision soumis à consultation publique en février 2023, l’Arcep considère qu’il est difficile pour un nouvel entrant de réaliser des économies d’échelle suffisantes pour amortir les investissements élevés à effectuer pour la fourniture d’une offre de gros d’accès central à partir d’un déploiement en propre ou par l’intermédiaire du dégroupage de la boucle locale de cuivre ou optique. Ce constat est renforcé par l’effort supplémentaire qu’un nouvel entrant devrait engager pour compléter ses capacités de collecte alors que, dans le même temps, Orange est susceptible de bénéficier d’économie de gamme dans le cadre du lancement de sa nouvelle offre bitstream sur fibre (offre « FTTH Access ») en réutilisant la même offre de collecte pour la fourniture de ses accès bitstream sur cuivre et sur FttH.

22 Projet de décision relatif au marché 1, page 13. 23 Voir les décisions n° 2017-1348 du 14 décembre 2017 et n° 2020-1447 du 15 décembre 2020 portant sur la définition du marché pertinent de fourniture en gros d’accès central en position déterminée à destination du marché de masse, sur la désignation d’un opérateur exerçant une influence significative sur ce marché et sur les obligations imposées à cet opérateur à ce titre. 24 Recommandation n° 2014/710/UE, considérant 21 et point 2 : « [l]es autorités réglementaires nationales peuvent recenser des marchés autres que ceux énumérés dans la présente recommandation et leur appliquer le test des trois critères ». 15

S’agissant du deuxième critère relatif à l’évolution vers une concurrence effective au cours de la période visée 34. Comme le souligne l’Arcep dans son projet de décision soumis à consultation publique en février 2023, Orange conserve une part de marché de gros élevée, toutes technologies confondues. Sur le cuivre, Orange est en mesure de fournir une offre de bitstream cuivre couvrant l’ensemble des locaux des zones moins denses alors qu’aucun opérateur proposant actuellement une offre bitstream cuivre n’a dégroupé l’ensemble des locaux de ces mêmes zones. En ce sens, l’annonce par Orange de la fermeture de son réseau cuivre au plus tard en 2030 n’incitera pas à poursuivre l’investissement dans le dégroupage pour ces locaux. Un certain nombre de locaux ne sont et ne resteront donc accessibles que via les offres bitstream cuivre d’Orange. En ce qui concerne les réseaux FttH, l’offre bitstream « FttH Access » d’Orange présente une couverture significativement plus étendue que les offres bitstream FttH des opérateurs alternatifs, en particulier au regard de ses propres déploiements (79 % des lignes FttH des zones moins denses couvertes par l’initiative privée) ou au regard de la part de locaux éligibles aux offres de détail FttH d’Orange qui est la plus élevée (94 % de l’ensemble des lignes éligibles au FttH au deuxième trimestre 2022). Orange est donc en mesure de proposer une offre de gros présentant la couverture la plus large, ce qui est un critère essentiel pour les opérateurs demandeurs sur le marché de fourniture en gros d’accès central, en particulier ceux utilisant ces offres de gros pour construire des offres de détail visant spécifiquement les entreprises. 35. L’Arcep considère par ailleurs, dans son projet de décision de février 2023, que la mise en perspective de ces constats avec la phase de migration du cuivre vers la fibre milite également pour le maintien de la régulation ex ante de ce marché. Les opérateurs ayant souscrit une offre bitstream cuivre d’Orange pourraient en effet être nombreux à souhaiter rester chez Orange tant en raison de la couverture des offres d’Orange qu’en raison de la qualité de l’image de marque dont elle bénéficie auprès des clients finaux sur le marché de détail, en particulier en ce qui concerne le marché entreprise. 36. Au terme de son analyse de février 2023, l’Arcep conclut à l’absence d’évolution vers une situation de concurrence effective à l’horizon du 7ème cycle d’analyse et à une pression concurrentielle qui restera insuffisante, en particulier de la part des solutions sans fil et des solutions d’accès virtuel. S’agissant du troisième critère relatif à l’incapacité du droit de la concurrence à remédier à lui seul, de manière adéquate, aux défaillances du marché constatées. 37. L’Arcep considère dans son projet de décision soumis à consultation publique en février 2023 qu’une intervention ex ante permet de mettre en œuvre des outils dont ne dispose pas le droit de la concurrence pour remédier à lui seul aux défaillances de ce marché pour lequel elle n’identifie pas encore une tendance suffisamment claire vers une concurrence effective, combinée à un abaissement insuffisamment prononcé des barrières à l’entrée. Selon l’Arcep, la régulation ex ante, via l’imposition d’obligations d’accès, de non-discrimination, d’orientation des tarifs vers les coûts ou encore de qualité de service, est en particulier de nature à s’assurer qu’Orange, en tant qu’opérateur exerçant une influence significative, ne restreigne pas ou ne détériore pas l’accès de ses concurrents à ses infrastructures sur le marché de gros amont. 38. Dans son communiqué de presse du 29 juin 2023 mettant en consultation publique une seconde version de son projet de régulation des marchés du haut et très haut débit fixes, l’Arcep a annoncé que « [l]es travaux concernant le marché « 3b » des offres activées généralistes se prolongent selon un calendrier différé, afin de pouvoir mesurer et prendre 16

en compte les évolutions en cours que ce marché connaît depuis un an ». L’Autorité n’a donc pas été saisie pour avis sur un projet de décision concernant la régulation du marché 3b et n’a pas connaissance, à ce jour, du choix que l’Arcep opérera en fonction des évolutions de marché qu’elle évoque. La possibilité d’une absence de régulation du marché 3b serait alors une première et cette hypothèse, qui semble être appréciée diversement par les acteurs du marché, fera l’objet de différentes remarques de la part de l’Autorité dans la suite du document (voir paragraphes 149 et suivants ci-après). c) L’Arcep utilise pour la première fois la procédure d’engagements prévue à l’article L. 38-1-1 du CPCE dans le cadre de la régulation des marchés à haut et très haut débit 39. Le I de l’article L. 38-1-1 du CPCE dispose : « [l’Arcep] peut accepter les engagements souscrits auprès d’elle par les opérateurs, réputés exercer une influence significative sur un ou plusieurs marchés pertinents en application de l’article L. 37-1 relatifs au co-investissement ou aux conditions d’accès à leurs réseaux lorsqu’elle établit que ces engagements sont de nature à contribuer à la réalisation des objectifs mentionnés à l’article L. 32-1 et notamment au développement d’une concurrence effective dans le secteur des communications électroniques ». Le III de l’article L. 38-1-1 du CPCE dispose qu’après avoir procédé à l’évaluation des engagements proposés par l’opérateur concerné, l’Arcep « peut décider de rendre contraignant tout ou partie de ces engagements, pour une période donnée qui ne peut dépasser la durée proposée par l’opérateur ». 40. Si l’Arcep a déjà utilisé la procédure d’engagements précitée en 2021 pour la régulation ex ante du marché de gros amont des services de diffusion hertzienne terrestre de programmes télévisuels en mode numérique25, c’est la première fois qu’elle l’applique à la régulation des marchés du haut et très haut débit. 41. Contrairement aux engagements de 2021 qui visaient à réguler à eux seuls l’entièreté du marché de gros amont des services de diffusion hertzienne terrestre de programmes télévisuels en mode numérique, les engagements relatifs à la présente saisine ont un périmètre plus restreint, puisqu’ils visent uniquement à compléter la régulation envisagée par l’Arcep. Comme le rappelait l’Autorité dans son avis n° 21-A-17, les engagements de l’article L. 38-1-1 du CPCE « ne sont pas exclusifs d’autres mesures de régulation »26. 42. En l’espèce, le projet de décision d’analyse du marché 1 de fourniture en gros d’accès local en position déterminée prévoit un allègement du contrôle tarifaire d’Orange dans les zones où le niveau de concurrence le permet27. Pour les zones dans lesquelles elle serait soumise à une obligation de non-excessivité des tarifs (voir paragraphe 109 ci-après) Orange a proposé, par courrier du 23 juin 2023 (annexe 8 du projet de décision), de s’engager à respecter un

25 Voir l’avis n° 21-A-17 du 17 décembre 2021relatif à une demande d’avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse en application des articles L. 37-1, D. 301 et D. 302 du code des postes et des communications électroniques portant sur la régulation ex ante du marché de gros amont des services de diffusion hertzienne terrestre de programmes télévisuels en mode numérique. 26 Avis n° 21-A-17 précité, paragraphe 170. 27 La régulation de l’Arcep prévoit en effet une répartition des accès en 3 catégories : (i) les accès qui demeurent en orientation vers les coûts, (ii) les accès soumis à une obligation de non-excessivité du tarif et (iii) les accès pour lesquels l’obligation de contrôle tarifaire est levée. 17

plafond tarifaire pour les années 2024 et 2025. Cette proposition d’engagement entrerait en vigueur à compter de la décision de l’Arcep la rendant contraignante. 43. Comme l’Autorité a déjà eu l’occasion de l’indiquer, s’il ne lui appartient pas de se prononcer sur le choix opéré par l’Arcep de fonder la régulation sur des engagements, « il lui incombe, en revanche, d’apprécier si l’option retenue par l’Arcep présente, s’agissant des moyens de contrôle et du pouvoir de sanction conférés au régulateur sectoriel, des garanties suffisantes pour que soient préservés l’effet utile de la régulation ex ante […] et, partant, le développement d’une concurrence pérenne et effective sur ce même marché »28. 44. L’Autorité reviendra dans la suite de son avis (voir paragraphes 239 et suivants ci-après) sur l’allègement de la régulation envisagé par l’Arcep et évoquera, au vu des craintes exprimées par les acteurs du secteur, la durée de deux ans de l’engagement proposée par Orange dans le cadre d’un cycle de régulation de cinq années. d) La stabilité du cadre symétrique 45. La loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie (LME) a prévu que les modalités de déploiement de la partie terminale des réseaux en fibre optique feraient l’objet d’une régulation dite « symétrique », c’est-à-dire applicable à l’ensemble des opérateurs déployant des réseaux en fibre optique. Elle a confié à l’Arcep et au ministre chargé des communications électroniques (ce dernier disposant d’un pouvoir d’homologation) la mission de fixer un cadre réglementaire relatif à ces modalités de déploiement, applicable à l’ensemble des opérateurs présents sur le marché. 46. L’Arcep a ainsi élaboré un cadre règlementaire symétrique en adoptant cinq décisions depuis 200929. Ce cadre est par ailleurs complété par sept recommandations de l’Arcep (en 2009, 2011, 2013, 2014, 2015, 2018 et 2020), dont la dernière en date, relative aux modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, remonte au 8 décembre 202030. 47. L’Autorité a eu l’occasion de rendre plusieurs avis sur les décisions et recommandations encadrant la régulation symétrique mise en place par l’Arcep. C’est dans son avis n° 20-A-07 portant sur le précédent cycle d’analyse de marché que l’Autorité a été amenée à formuler ses remarques sur les derniers textes adoptés par l’Arcep31. 48. La présente demande d’avis ne comporte aucune modification du cadre symétrique, ce qui témoigne de sa stabilité depuis 2020 et laisse augurer d’une certaine pérennité pour les années qui viennent. L’Autorité aura néanmoins l’occasion d’apprécier l’adaptabilité de ce

28 Avis n° 21-A-17 précité, paragraphe 172. 29 Il s’agit de la décision n° 2009-1106, modifiée par la décision n° 2013-1475, qui précise le cadre général de l’accès aux lignes à très haut débit en fibre optique, la décision n° 2010-1312, qui précise les modalités d’accès à ces réseaux en zones moins denses, la décision n° 2015-0776, qui précise les processus techniques et opérationnels applicables à ces réseaux, et la décision n° 2020-1432 en date du 8 décembre 2020 précisant les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique. La liste des communes des zones très denses définie par la décision n° 2009-1106 en date du 22 décembre 2009 a par la suite été modifiée par la décision n° 2013-1475 de l’Arcep en date du 10 décembre 2013. 30 Pour une présentation plus précise de l’ensemble du cadre symétrique relatif à la régulation du FttH, l’Autorité renvoie aux paragraphes 22 à 30 de son avis n° 20-A-07 du 15 septembre 2020. 31 Décision n° 2020-1432 de l’Arcep en date du 8 décembre 2020 précisant les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique et recommandation du 8 décembre 2020 sur les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique. 18

cadre dans le temps, en particulier dans un contexte marqué par la fermeture du réseau cuivre et le développement toujours plus important des réseaux en fibre optique (voir paragraphes 165 et suivants). B. DELIMITATION DES MARCHES ET PUISSANCE DES ACTEURS 1. LES MARCHES DE PRODUITS ET DE SERVICES 49. Le marché 1 est le marché de gros de l’accès local en position déterminée, à savoir le marché des offres d’accès aux infrastructures physiques constitutives de la boucle locale filaire. Ce marché est ainsi composé (i) des offres d’accès passif à la boucle et à la sous-boucle locale cuivre, quels que soient le mode de dégroupage utilisé ou la qualité de service proposée, et (ii) des offres d’accès passif aux boucles locales optiques. Ce marché couvre à la fois les offres destinées au grand public, mais également au bas du marché des entreprises, à savoir les professionnels (artisans, indépendants, etc.) et les PME. 50. S’agissant des marchés regroupés au sein du marché 2, qui concerne la fourniture en gros d’accès de haute qualité, l’Arcep propose de considérer que l’ensemble des offres de gros des accès de haute qualité du segment terminal pour le raccordement de sites entreprises ou éléments de réseau, avec des exigences en termes de débit et de qualité de service distinctes des offres de masse, notamment caractérisées par une garantie de temps de rétablissement inférieure ou égale à 4 heures, appartiennent au même marché. Ainsi, ce marché vise à répondre aux besoins des entreprises qui ne se satisfont pas des offres généralistes ou professionnelles évoquées au paragraphe précédent. 51. Enfin, l’Arcep inclut dans le marché de fourniture en gros d’accès aux infrastructures physiques de génie civil en boucle locale, le génie civil mobilisable tant pour le déploiement de réseaux de boucle locale que pour la collecte32. L’Arcep considère que relèvent de ce marché les offres d’accès aux infrastructures de génie civil, que ces infrastructures soient souterraines ou aériennes, qu’elles soient proposées par des opérateurs de communications électroniques, des collectivités territoriales ou Enedis, dès lors qu’elles sont mobilisables pour le déploiement de réseaux de boucle locale et de collecte. En revanche, l’Arcep exclut du périmètre de ce marché les offres d’occupation de galeries visitables des réseaux d’assainissement et les offres d’accès au génie civil de réseaux autres que des réseaux de communications électroniques, et autres que les offres d’accès aux appuis aériens exploités par Enedis. 52. Le tableau ci-dessous représente les types d’accès haut et très haut débit utilisés dans les offres de détail ainsi que leurs correspondances sur le marché de gros. Le marché 3b, régulé jusqu’ici, est grisé en raison de l’incertitude liée à la poursuite de sa régulation.

32 Le génie civil de collecte est situé en amont des NRA ou NRO. Il correspond aux infrastructures de génie civil permettant d’acheminer et collecter l’ensemble des flux des boucles locales d’une zone pour les relier aux infrastructures d’envergure nationale. 19

2. LES MARCHES GEOGRAPHIQUES 53. Comme pour les décisions d’analyse de marché du précédent cycle, l’Arcep applique une méthode d’analyse de la délimitation géographique des marchés en se fondant sur les lignes directrices de la Commission européenne du 7 mai 201833, à tout le moins en ce qui concerne les marchés 1 et 2. 54. Pour rappel, la méthodologie appliquée par l’Arcep l’a conduite à étudier à titre liminaire les marchés de détail. La première étape de son raisonnement conduit ensuite l’Arcep à procéder à une analyse des marchés de gros. Elle retient la maille de la commune comme unité de base, puis procède à un regroupement des communes présentant des caractéristiques similaires en application de trois critères : les principaux opérateurs d’infrastructure présents, les technologies effectivement ou prospectivement déployées (cuivre, fibre ou câble), le schéma de déploiement retenu et la densité de l’habitat. Dans la seconde étape de son raisonnement, l’Arcep analyse l’homogénéité des conditions de concurrence des différentes zones de regroupement en se fondant sur des critères quantitatifs. 55. Si l’Arcep parvient à des conclusions similaires à celles énoncées en 2020, l’Autorité relève néanmoins certaines évolutions. D’abord, l’analyse effectuée par l’Arcep à la première étape de son raisonnement prend en compte différents mouvements de consolidation du secteur, ce qui la conduit dorénavant à regrouper les communes en 13 zones homogènes, et non plus en 14 zones comme lors du cycle précédent34. Les 13 zones sont les mêmes pour les

33 Lignes directrices n° 2018/C 159/01. 34 Le passage de 14 à 13 zones est motivé par l’Arcep par les évolutions de marché suivantes : « Ainsi, la zone 13 définie dans les décisions n° 2020-1446, n° 2020-1447 et n° 2020-1448 susvisées, qui regroupait les communes des zones moins denses d’initiative publique pour lesquelles Covage était l’opérateur d’infrastructure déployant l’infrastructure FttH, n’apparaît plus dans la liste des zones pour ce cycle. En effet, Altice a acquis l’opérateur Covage le 9 décembre 2020. Cette acquisition avait été autorisée par la Commission européenne le 27 novembre 2020 , en la subordonnant au respect d’une série d’engagements incluant la cession à un acquéreur approprié de 25 filiales et d’actifs représentant au total environ 95 % de 20

marchés 1 et 2. Ensuite, l’Arcep a complété la seconde étape de son raisonnement en ce qui concerne le marché 1, en définissant un nouveau critère permettant d’évaluer la situation concurrentielle sur l’ensemble du territoire. En effet, considérant que le critère 1 relatif à « la part des locaux desservis dans la zone par au moins trois opérateurs commerciaux FttH » n’était pas suffisant pour rendre compte de la pression concurrentielle exercée par la fibre sur le marché, l’Arcep a ajouté le critère de « la part des abonnés au détail à la fibre parmi les abonnés aux solutions filaires haut et très haut débit » (nommé critère 2). Selon l’autorité de régulation, « [d]ans le contexte du cycle à venir, centré sur l’accompagnement de la transition vers la fibre, le suivi de la part des abonnés à la fibre parmi l’ensemble des abonnés haut et très haut débit (sur cuivre, sur câble ou sur fibre) permet ainsi d’apprécier la progression de la migration effective vers cette infrastructure de référence dans chaque zone, et par là la dépendance sur le marché de détail à l’infrastructure cuivre d’Orange ». 56. Au terme de son analyse, l’Arcep conclut à nouveau à la dimension nationale des marchés 1 et 2 : − en ce qui concerne le marché 1 : elle souligne notamment, d’une part, qu’aucune zone ne présente un niveau de concurrence suffisant pour être distinguée du reste du territoire et, d’autre part, que la forte variabilité des conditions concurrentielles ne permet pas de définir des marchés géographiques infranationaux aux frontières stables pour le cycle. En outre, elle note que la dépendance à l’infrastructure cuivre de l’opérateur historique est très importante sur l’ensemble du territoire. Enfin, elle souligne que les différences qui peuvent apparaître d’une zone à une autre selon certains critères ne sont le résultat que d’un décalage temporel dans le déploiement de la fibre entre ces zones ; − en ce qui concerne le marché 2 : l’Arcep souligne en particulier, d’une part, qu’aucune zone ne présente un niveau de concurrence suffisant et, d’autre part, que la forte variabilité des conditions concurrentielles ne permet pas de définir des marchés géographiques infranationaux aux frontières stables pour le cycle. En outre, elle note que la dépendance des opérateurs alternatifs à l’infrastructure d’Orange ainsi qu’aux offres de gros activées d’Orange est très importante sur l’ensemble du territoire. 57. Enfin, l’Arcep estime que le marché de la fourniture en gros d’accès aux infrastructures physiques de génie civil de boucle locale revêt une dimension nationale, en raison de l’homogénéité au niveau national des offres de gros d’accès au génie civil et des conditions de concurrence, ainsi que de la demande. 3. LA DESIGNATION DE L’ACTEUR PUISSANT SUR LES MARCHES REGULES 58. L’Arcep identifie Orange comme opérateur exerçant une influence significative sur les marchés précédemment définis, et propose de la considérer comme seul opérateur puissant sur ces marchés.

l’activité BLOD de Covage. Ces filiales et actifs ont été acquis par l’opérateur Altitude le 30 septembre 2021. Les communes de la zone 13 définie au précédent cycle sont désormais intégrées pour une part dans les zones moins denses d’initiative publique déployées par Altice (zone 10 du tableau ci-dessus), et pour une autre part dans les zones moins denses d’initiative publique déployées par Altitude (zone 11 du tableau ci-dessus). De plus, la zone 8 était définie lors du cycle précédent comme regroupant les communes des zones AMEL sur lesquelles des opérateurs d’infrastructure (non verticalement intégrés) autres que Orange et Altice déployaient l’infrastructure FttH. Elle représente ici des zones AMEL sur lesquelles Altitude est désormais le seul opérateur d’infrastructure présent, du fait du rachat de Covage. » (projet de décision relatif au marché 1, page 39 et projet de décision relatif au marché 2, pages 33 et 34). 21

59. Du fait de son ancien statut de monopole, Orange a hérité d’infrastructures de génie civil et de réseau cuivre qui lui confèrent une position particulière. À cet égard, l’Arcep rappelle qu’Orange est « le seul opérateur à détenir des infrastructures de génie civil permettant de déployer une boucle locale et de s’y raccorder via un réseau de collecte de façon continue » et ne subit donc pas de pression concurrentielle sur ce marché. 60. Comme rappelé au paragraphe 24 ci-avant, la dynamique concurrentielle, à l’horizon du prochain cycle, continuera d’être portée par le segment du très haut débit. 61. L’Arcep note à cet égard que le segment du très haut débit, en particulier du fait de l’accélération du déploiement de réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné, est porté par une croissance significative. En effet, au 30 juin 2022, 32 millions de locaux sont désormais éligibles aux offres à très haut débit en fibre optique jusqu’à l’abonné, ce qui représente une augmentation de 92 % par rapport aux précédentes analyses de marché. L’Arcep note ensuite qu’Orange est exploitante, sur le réseau FttH, de 61 % du parc total des locaux éligibles. 62. L’Arcep relève également que la prévalence et le rôle structurant d’Orange dans le déploiement de la fibre optique jusqu’à l’abonné valent pour l’ensemble des zones du territoire. Par ailleurs, Orange couvre en tant qu’opérateur commercial 94 % de l’ensemble des lignes éligibles au FttH au deuxième trimestre 2022. 63. S’agissant du marché des accès de haute qualité, l’Arcep relève que « l’apparition des offres de gros d’accès activés de haute qualité sur les réseaux FttH ne semble pas susceptible de remettre en cause l’importance du marché de gros des accès de haute qualité ou la position d’Orange sur ce marché ». Au dernier trimestre 2021, Orange détenait, comme au cycle précédent, la majorité absolue des parts de ce marché, à savoir entre 55 % et 60 %. C. LES EVOLUTIONS ENVISAGEES CONCERNANT LES REMEDES 64. L’Autorité présentera successivement les principales évolutions envisagées par l’Arcep en ce qui concerne la régulation du marché de l’accès aux infrastructures de génie civil (1), du marché 1 (2) et du marché 2 (3). 1. LES EVOLUTIONS PROPOSEES SUR LE MARCHE DU GENIE CIVIL 65. L’Autorité renvoie au projet de texte de l’Arcep pour une lecture complète et détaillée des évolutions proposées pour la régulation asymétrique du marché du génie civil. a) Obligations relatives au processus de rénovation ou de réparation du génie civil 66. L’Arcep propose de compléter l’obligation, déjà imposée à Orange dans la précédente analyse de marché, de faire droit « aux demandes raisonnables de rénovation » pour remise en état des infrastructures de génie civil souterraines et aériennes mobilisées pour le déploiement des réseaux de fibre optique, en particulier en ce qui concerne le dernier segment correspondant au raccordement final des locaux.

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Obligation générale et délais spécifiques au raccordement final 67. Dans le cadre de la généralisation des déploiements FttH, l’Arcep propose de compléter et d’adapter les modalités opérationnelles relatives à la rénovation du génie civil s’agissant des prestations mobilisables à des fins de raccordement final. Elle demande à Orange de proposer des modalités non discriminatoires et qui permettent effectivement à un opérateur de réaliser ces opérations dans des délais « représentatifs de ceux observés lorsqu’Orange réalise des opérations de rénovation pour ses propres besoins ». Le caractère raisonnable « des délais d’instruction d’une demande de rénovation et des délais de réalisation des travaux seront appréciés au regard des contraintes économiques et techniques d’une telle demande pour Orange et du bénéfice attendu pour les acteurs concernés »35. Obligation relative au génie civil aérien spécifique au raccordement final 68. L’Arcep relève les difficultés des opérateurs à disposer de suffisamment de visibilité quant au volume de raccordements finals à réaliser ; elle estime, en conséquence, que les opérations de rénovation « ne devront pas être conditionnées à la transmission à Orange d’une volumétrie prévisionnelle de rénovation à réaliser. »36 Obligation relative au génie civil souterrain spécifique au raccordement final 69. L’Arcep appuie le besoin de cohérence de la rénovation d’infrastructures de génie civil souterrain dont Orange est propriétaire ou gestionnaire avec les besoins industriels. À cet égard, elle propose à Orange de fixer, avec elle, une grille de typologie d’interventions relatives aux raccordements finals, avec des délais de réalisation des travaux et des quotas quant au respect de ces délais37. 70. L’Arcep précise qu’Orange disposera d’un délai de cinq jours ouvrés pour instruire toute demande de rénovation et d’un délai de deux mois pour réaliser les travaux une fois l’instruction terminée38. Obligation financière spécifique au raccordement final 71. L’Arcep estime que les coûts relatifs aux interventions de maintenance sur des infrastructures mobilisables à des fins de raccordement final peuvent être supérieurs aux autres opérations de maintenance. Dès lors, Orange devra réaliser une grille de remboursements propre à ces opérations39. Rappel de l’obligation financière s’agissant de la rénovation des infrastructures 72. Pour rappel, le processus de rénovation permet à l’opérateur soit de demander à Orange de faire la rénovation ou réparation, soit d’intervenir lui-même de manière autonome en tant que sous-traitant d’Orange et de se faire alors rétribuer sur une base de coûts efficaces. L’Arcep indique à cet égard dans son projet de décision qu’il appartient à Orange de définir « une rémunération forfaitaire justifiée et proportionnée des opérateurs pour leurs prises en

35 Projet de décision portant sur l’accès aux infrastructures de génie civil, page 50. 36 Projet de décision portant sur l’accès aux infrastructures de génie civil, page 50. 37 Projet de décision portant sur l’accès aux infrastructures de génie civil, page 50. 38 Projet de décision portant sur l’accès aux infrastructures de génie civil, page 50. 39 Projet de décision portant sur l’accès aux infrastructures de génie civil, page 52. 23

charge des opérations de maintenance réalisées en tant que sous-traitant, pour des situations relevant d’une demande raisonnable de maintenance »40. Modalités financières relatives à la réparation du génie civil 73. Les opérateurs ont également fait part à l’autorité de régulation d’une « différence significative entre les coûts de réalisation des travaux de rénovation, préalables au déploiement dans le respect des règles d’ingénierie fixées par Orange, et ceux des travaux de réparation réalisés sur des infrastructures de génie civil déjà mobilisées pour un déploiement  ». En conséquence, l’Arcep demande à Orange d’établir une grille de forfaits de remboursements spécifique aux opérations de réparation41. b) Obligations d’informations et de transparence 74. Dans le contexte du « plan de fermeture » de réseau cuivre présenté par Orange, l’Arcep propose de compléter les obligations de transparence et d’information concernant l’accès, qui affectent notamment le marché du génie civil. Obligation d’information dans la mise en œuvre de la fermeture du réseau cuivre 75. L’Arcep demande42 à Orange de fournir aux opérateurs des informations sur les interventions prévues dans le cadre de la dépose du cuivre, qui doivent présenter le même degré de visibilité que celui dont il dispose, et de respecter un délai de prévenance de 36 mois en cas de fermeture d’un nœud de raccordement d’abonnés (« NRA »)43. Délai de prévenance en cas de modification tarifaire dans le cadre de la fermeture du réseau cuivre 76. La fermeture du réseau cuivre d’Orange pourrait entrainer une diminution du parc des NRA d’Orange. La grille tarifaire prenant en compte la taille des NRA reliés par les liens fibre optique (« LFO »)44 mise à disposition des opérateurs, l’Arcep convient qu’Orange puisse adapter sa grille tarifaire au cours du présent cycle moyennant le respect d’un délai raisonnable d’information des opérateurs, ne pouvant être inférieur à 3 mois45. c) Obligation relative à la qualité des services 77. L’Arcep rappelle qu’une « situation dans laquelle Orange bénéficierait sur le marché de gros d’une qualité de service meilleure que celle qu’elle assure aux opérateurs alternatifs

40 Projet de décision portant sur l’accès aux infrastructures de génie civil, page 51. 41 Projet de décision portant sur l’accès aux infrastructures de génie civil, page 53. 42 Projet de décision portant sur l’accès aux infrastructures de génie civil, page 74. 43 Le NRA est un local technique permettant de desservir les lignes des abonnés d’une zone géographique déterminée. Ces locaux sont utilisés dans le cadre du réseau cuivre. Ils seront transformés ou fermés et remplacés par les Nœuds de Raccordement Optiques (NRO) dans le cadre des déploiements en fibre optique. 44 L’offre de référence LFO est l’offre de collecte d’Orange. Elle permet aux opérateurs clients de cette offre de collecter le trafic de leurs abonnés, de relier entre eux l’ensemble des NRA ou NRO qu’ils ont dégroupés et de les relier à leurs points de présence. 45 Projet de décision portant sur l’accès aux infrastructures de génie civil, page 65. 24

risquerait de biaiser le choix des utilisateurs finals et de distordre la concurrence sur le marché de détail. » L’Arcep entend donc maintenir les obligations relatives à la qualité des services imposées dans les précédents cycles et les compléter46. Obligations d’information dans le cadre de travaux ou d’opérations de maintenance 78. Dans le cadre de ses obligations relatives aux opérations de maintenance, l’Arcep propose d’imposer à Orange de nouvelles obligations d’information concernant la réalisation de travaux à la suite d’une opération de contrôle, ainsi que les études préventives réalisées sur son patrimoine. Ces informations devront être transmises de manière trimestrielle47. Orange devra également s’engager sur « un délai raisonnable de mise à jour de ses données numériques vectorielles géolocalisées à la suite de la réalisation de travaux sur ses infrastructures de génie civil », et ce délai ne pouvant être supérieur à un mois48. 79. S’agissant des opérations de maintenance préventive49, Orange sera également tenue au respect d’une obligation de transparence en informant l’Arcep et en publiant les éléments justifiant le choix du site objet de la maintenance au regard du principe de non-discrimination50. Obligations relatives aux pénalités pour mauvaise qualité des informations transmises 80. Pour rappel, dans le cadre des engagements contractuels sur la qualité des services vis-à-vis des opérateurs clients, Orange peut se voir imposer des pénalités pour ne pas avoir respecté ses engagements mais Orange peut aussi imposer des pénalités aux opérateurs tiers en cas de mauvaise qualité des informations transmises. 81. Pour le présent cycle, l’Arcep précise également les principes qu’Orange devra respecter afin d’améliorer le processus de pénalités des opérateurs tiers en cas de mauvaise qualité des informations transmises dans le cadre des dossiers décrivant les travaux qu’ils ont réalisés. L’opérateur tiers en cause et Orange devront échanger sur l’ensemble des points à corriger et Orange ne pourra appliquer de pénalités qu’à partir de la troisième itération ou version du dossier51.

46 Projet de décision portant sur l’accès aux infrastructures de génie civil, page 82. 47 Projet de décision portant sur l’accès aux infrastructures de génie civil, page 55. 48 Projet de décision portant sur l’accès aux infrastructures de génie civil, page 58. 49 Selon l’Arcep, les travaux de maintenance préventive réalisés par Orange comprennent l’ensemble des opérations réalisées par Orange qui visent à entretenir et réparer les infrastructures de génie civil sans avoir nécessairement fait l’objet de demandes de rénovation ou de réparation de la part d’un opérateur alternatif. 50 Projet de décision portant sur l’accès aux infrastructures de génie civil, page 70. 51 Projet de décision portant sur l’accès aux infrastructures de génie civil, page 84. 25

2. LES EVOLUTIONS PROPOSEES SUR LE MARCHE DE FOURNITURE EN GROS D’ACCES LOCAL EN POSITION DETERMINEE (MARCHE 1) a) Allègements relatifs aux demandes d’accès raisonnables Levée de l’obligation d’accès à une offre de qualité de services renforcée 82. Les entreprises ayant besoin d’un certain niveau de qualité de services, l’Arcep imposait à Orange de proposer une offre de dégroupage entreprises (« Accès Total Entreprises »). Cette offre n’étant pas utilisée et les opérateurs ne souhaitant pas réaliser les travaux d’adaptation dans leurs systèmes d’information et outils de passage et de suivi des commandes, l’Arcep propose de lever cette obligation52. Levée de l’obligation d’une offre de migration vers le dégroupage 83. Au regard de la fermeture du réseau cuivre, du déploiement des boucles locales de fibre et du niveau de NRA dégroupés (82 % au troisième trimestre 2022), l’Arcep considère qu’il n’est plus nécessaire d’imposer à Orange de proposer une offre de migration des offres de bitstream53 vers le dégroupage54. Assouplissement des demandes d’accès à la sous-boucle en bi-injection 84. L’accès à la sous-boucle55 en bi-injection56 n’ayant fait l’objet que d’une seule opération depuis 2010, l’Arcep entend assouplir l’obligation de faire droit aux demandes d’accès à une telle offre et demande à l’opérateur qui le requiert de démontrer le caractère raisonnable de sa demande57. b) Accompagnement de la fermeture du réseau cuivre 85. L’Arcep entend poursuivre son encadrement de la fermeture du réseau cuivre présenté par Orange pour « préserver l’intérêt des utilisateurs en s’assurant notamment de la disponibilité de solutions de substitution au réseau cuivre, et maintenir la dynamique

52 Projet de décision relatif au marché 1, page 65. 53 Les offres bitstream permettent aux opérateurs de proposer une offre commerciale aux abonnés d’une zone qu’ils n’ont pas dégroupée (pour le réseau cuivre) ou dans laquelle ils n’ont pas déployé (pour le réseau fibre). Les offres bitstream sont dites activées en opposition à la location d’infrastructure passive (dégroupage). 54 Projet de décision relatif au marché 1, page 73. 55 L’accès à la sous-boucle consiste en la mise à disposition au bénéfice d’un opérateur tiers d’un accès direct à la sous-boucle, notamment au niveau du sous-répartiteur dans le cas de la boucle locale de cuivre. Compte tenu des contraintes d’atténuation des signaux, fonction des caractéristiques physiques du cuivre, les technologies DSL ont des performances liées à la longueur et à la section de la paire de cuivre. Aussi l’accès à la sous-boucle, qui réduit la distance entre le point d’injection des signaux DSL et l’abonné, permet concrètement à un opérateur de proposer, pour une ligne donnée, de meilleurs débits et services que dans le cas de l’accès à la boucle locale. 56 Il est techniquement possible d’envisager que les accès DSL des abonnés situés en aval d’un sous-répartiteur puissent être activés dans le même temps au niveau du NRA et au niveau du sous-répartiteur : on parle de bi- injection. Cette technique suppose notamment que les signaux DSL injectés au niveau du sous-répartiteur soient techniquement modifiés pour ne pas perturber les signaux DSL injectés depuis le NRA. 57 Projet de décision relatif au marché 1, page 78. 26

concurrentielle du marché du haut et du très haut débit fixe lors du processus de bascule entre les deux infrastructures. »58 86. L’Arcep précise que si Orange entend modifier son « plan de fermeture » de manière substantielle, ces modifications devront lui être transmises par Orange au préalable59. Modalités de mises en œuvre Maille géographique retenue pour la fermeture du réseau cuivre 87. En considération du « plan de fermeture » du réseau cuivre d’Orange et de la position des autres acteurs, l’Arcep entend modifier les mailles technique et commerciale de fermeture. Elle retient la maille du NRA et ajoute la maille communale, la maille de l’arrondissement pour les communes les plus peuplées et la maille du groupement d’IRIS60 contigus contenant la zone arrière d’un NRA pour les communes ou arrondissements de plus de 50 000 locaux61. 88. L’Arcep précise que la fermeture à la maille du groupement infra-communale sera conditionnée à la fourniture aux opérateurs de la liste des adresses des locaux appartenant à la zone en question62. Ajustement du délai de prévenance pour les zones les plus avancées 89. Afin de permettre aux opérateurs commerciaux de se raccorder aux boucles locales FttH sur la zone de fermeture, l’Arcep continue d’imposer à Orange un délai de prévenance de 36 mois pour la fermeture commerciale et la fermeture technique. Cependant, l’Arcep entend ajuster ce délai pour les zones les plus avancées en l’abaissant à 18 mois pour la fermeture commerciale et à 30 mois pour la fermeture technique63. 90. Pour pouvoir bénéficier de ce délai réduit, l’Arcep estime que la zone en question doit avoir, au moment de l’annonce de la fermeture, un taux de couverture FttH supérieur à 95 % et que la fermeture doit intervenir au niveau de la maille de la commune ou de l’arrondissement municipal. Fermeture technique rapide à l’adresse sur la zone arrière d’un point de mutualisation FttH 91. Dans son plan de fermeture, Orange prévoit la fermeture commerciale nationale dès 2026 alors que la fermeture technique nationale n’est prévue que pour 2029 et 2030. Afin de permettre une migration plus progressive entre le réseau cuivre et les réseaux FttH, l’Arcep propose une fermeture technique « rapide » à la maille de l’adresse des locaux pour les lignes concernées par une fermeture commerciale « rapide ». Pour mémoire, les fermetures

58 Projet de décision relatif au marché 1, page 82. 59 Projet de décision relatif au marché 1, page 83. 60 Les Ilots Regroupés pour l’Information Statistique (IRIS) sont une maille infra-communale définie par l’INSEE. Il s’agit d’une partition du territoire des communes les plus peuplées en zones stables dans le temps comptant environ 2 000 habitants. 61 Projet de décision relatif au marché 1, page 85. 62 Projet de décision relatif au marché 1, page 85. 63 Projet de décision relatif au marché 1, page 87. 27

commerciales « rapides » concernent les adresses des locaux desservis par le réseau cuivre pour lesquels les opérateurs « [investissent] pour être présents sur les réseaux de boucle locale FttH au niveau des points de mutualisation sur l’ensemble du territoire national […] et sont déjà présents sur le réseau de boucle locale FttH »64. 92. Une fermeture technique à l’adresse peut intervenir 12 mois après la fermeture commerciale (par zone ou à l’adresse), moyennant un délai de prévenance de 24 mois « afin de laisser le temps aux opérateurs commerciaux de communiquer vers leurs clients et aux utilisateurs de migrer vers l’infrastructure de substitution disponible »65. Condition de fermeture commerciale : disponibilité d’une infrastructure FttH de substitution 93. Pour répondre aux attentes de la majorité des acteurs du secteur et permettre une meilleure coordination entre la fermeture du réseau cuivre et le déploiement des réseaux FttH, l’Arcep propose de modifier les critères relatifs à l’infrastructure FttH de substitution disponible66. 94. Le premier critère porte sur la présence d’un réseau FttH complet en dehors des zones très denses « afin de faciliter la migration des utilisateurs et de s’assurer de la bonne coordination des calendriers d’arrêt du cuivre et du déploiement de la fibre ». L’Arcep renvoie aux dispositions du cadre symétrique67 s’agissant de l’appréciation du critère de complétude. 95. L’Arcep estime néanmoins « qu’un réseau FttH peut être complet bien que tous les logements et locaux à usage professionnel ne soient pas raccordables au réseau FttH ». Aussi considère-t-elle que la fermeture du réseau peut malgré tout intervenir pour les locaux « raccordables sur demande », les locaux « raccordables sur demande à tarif spécifique » et les locaux faisant l’objet de refus ou de blocages ne relevant pas de la responsabilité de l’opérateur d’infrastructure. Néanmoins, l’Arcep conditionne cet allègement à la disponibilité, dans la zone considérée, d’une offre commerciale s’appuyant sur une offre technique alternative. La même approche est adoptée en ce qui concerne les locaux à usage professionnel. 96. Un autre critère permet la fermeture, sous conditions, de certains locaux ne disposant pas ou plus de ligne cuivre active. À cette fin, l’Arcep propose d’imposer un délai d’inactivité d’au moins 24 mois. Là encore, l’Arcep requiert la disponibilité d’une offre commerciale s’appuyant sur une offre technique alternative ainsi que « la disponibilité d’une offre de gros permettant de commander la pose du PBO permettant de rendre le local raccordable au FttH en moins de 6 mois et d’une offre de détail effective » (local raccordable sur demande)68.

64 Projet de décision relatif au marché 1, page 87. 65 Projet de décision relatif au marché 1, page 89. 66 Projet de décision relatif au marché 1, pages 90 à 93. 67 Décision n° 2010-1312 de l’Arcep en date du 14 décembre 2010 précisant les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique sur l’ensemble du territoire à l’exception des zones très denses et décision n° 2020-1432 de l’Arcep en date du 8 décembre 2020 précisant les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique. 68 Le PBO est le point de raccordement optique. Dans les immeubles de plusieurs logements ou locaux à usage professionnel comprenant une colonne montante, cet équipement est généralement situé dans les boitiers d’étage de la colonne montante et permet de raccorder le câblage vertical avec le câblage de branchement. Le 28

97. L’Arcep précise néanmoins que les cas précédents ne doivent pas être assimilés à une « exonération par les opérateurs d’infrastructure FttH du respect de leurs obligations liées à la complétude des déploiements en zones moins denses notamment en matière de délai raisonnable de déploiement pour les locaux concernés. » Condition de fermeture commerciale : disponibilité d’une offre de détail sur l’ensemble des locaux raccordables 98. L’Arcep constate que la condition relative à la disponibilité d’une infrastructure FttH de substitution pour la fermeture commerciale du réseau cuivre n’est pas toujours suffisante pour assurer des conditions concurrentielles semblables à celles du réseau cuivre. L’Arcep pose ainsi une condition supplémentaire consistant en la disponibilité d’une offre de détail de service sur fibre optique sur tous les locaux raccordables69. 99. De plus, l’Arcep fait écho à sa recommandation du 8 décembre 202070 et appelle les opérateurs d’infrastructure à « lever les éventuels blocages contractuels, opérationnels et informatiques qui empêcheraient la commande par un client final de plusieurs accès dans le même local » afin que les entreprises puissent bénéficier de plusieurs accès FttH71. Limitation du report de la fermeture du réseau cuivre 100. La fermeture technique ou commerciale ne peut avoir lieu que si certaines conditions sont respectées, autrement elle est reportée. Dans ces circonstances, Orange pourra proposer une nouvelle date de fermeture en respectant un délai de prévenance de trois mois72. 101. L’Arcep convient néanmoins qu’Orange ne doit pas être déraisonnablement empêchée de procéder à la fermeture de son réseau cuivre. L’Arcep propose alors que le délai de report soit limité à 24 mois « à la condition de s’assurer de la disponibilité d’un produit d’accès de substitution d’une qualité au moins comparable aux services offerts sur la boucle locale de cuivre ». Si cette condition n’est pas remplie, la fermeture continue d’être repoussée. Dans ce cas aussi, Orange devra respecter un délai de prévenance de trois mois avant la fermeture de son réseau cuivre73. Renforcement des obligations de transparence Obligation d’information de l’Arcep sur le projet de trajectoire de fermeture 102. Afin de contrôler la trajectoire de fermeture définie par Orange et de veiller à ce qu’elle ne tire pas à son avantage la fermeture de son réseau cuivre s’agissant de ses boucles locales,

PBO peut également se trouver à l’extérieur de l’habitat à proximité immédiate du logement ou local à usage professionnel, en général à quelques mètres ou quelques dizaines de mètres du logement ; dans ce cas, il permet de raccorder le câblage installé en amont dans le réseau avec le câble de branchement. 69 Projet de décision relatif au marché 1, page 93. 70 Recommandation du 8 décembre 2020 sur les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique. 71 Projet de décision relatif au marché 1, page 94. 72 Projet de décision relatif au marché 1, page 94. 73 Projet de décision relatif au marché 1, page 95. 29

l’Arcep impose à Orange de publier et de mettre à jour des informations relatives à la fermeture commerciale et technique, en amont du lancement des délais de prévenance74. Obligation de transparence quant à la définition des lots 103. En réponse à la consultation publique de l’Arcep relative à l’analyse des marchés pertinents du haut et du très haut débit fixe, menée du 20 février 2023 au 3 avril 2023, Orange a indiqué la mise en place de « phases de partage » d’informations avec les opérateurs et les communes afin d’affiner la définition d’un lot de communes avant le lancement des délais de prévenance. L’Arcep propose qu’à cette occasion, Orange partage d’autres informations visant à « i) permettre l’identification des accès cuivre appelés à fermer et les codes immeubles IPE correspondants, ii) constater que des réseaux de substitution sont ou seront bien présents, correctement dimensionnés, et proposant les services attendus »75, ou à défaut avant le début de la période de prévenance, afin que ceux-ci soient définis de manière non- discriminatoire. Elle souligne également l’importance de consulter les maires concernés pour qu’ils puissent faire remonter toute difficulté sur leur commune76. Obligation de communication des données pour le suivi des fermetures annoncées 104. L’Arcep propose d’imposer à Orange des obligations de transparence pour qu’elle s’assure du respect des conditions de mise en œuvre de la fermeture du cuivre. Ces données devront être transmises dans un format « ouvert et réutilisable »77. Obligation d’information pour une évolution de la grille tarifaire de l’offre LFO 105. La mise en œuvre de la fermeture du réseau cuivre d’Orange pourrait entrainer une réduction du parc de ses NRA et de la taille des NRA reliés par des liens commercialisés par le biais de l’offre LFO. La grille tarifaire de l’offre LFO pourrait donc évoluer. L’Arcep propose ainsi qu’Orange respecte un délai de prévenance raisonnable, ne pouvant être inférieur à trois mois pour la mise en application de la nouvelle grille78. Transmission d’informations supplémentaires préalablement à l’accès aux services et ressources associés à l’accès dégroupé aux boucles locales de cuivre 106. S’agissant de l’offre d’informations préalables, l’Arcep considère nécessaire qu’Orange fournisse des informations sur « la pérennité de son parc de NRA, notamment ceux dans lesquels les opérateurs tiers ont installé ou envisagent d’installer leurs propres équipements actifs ». Afin d’offrir autant de visibilité sur la fermeture de son réseau cuivre que possible, Orange devra donc respecter un délai de prévenance de 36 mois en cas de fermeture technique d’un NRA79.

74 Projet de décision relatif au marché 1, page 96. 75 Pour mémoire, les fichiers d’informations préalables enrichies (IPE) constituent une base de données précisant l’éligibilité des locaux aux réseaux en fibre optique. Ces fichiers sont remplis et mis à jour par les opérateurs d’infrastructures au fil de leurs déploiements sur une zone donnée. 76 Projet de décision relatif au marché 1, page 97. 77 Projet de décision relatif au marché 1, page 97. 78 Projet de décision relatif au marché 1, page 105. 79 Projet de décision relatif au marché 1, page 122. 30

c) Évolution des conditions tarifaires 107. Pour le présent cycle, l’Arcep anticipe un déploiement massif des réseaux fibre et la fermeture progressive du réseau cuivre qui s’achèvera d’ici 2030 selon le plan de fermeture d’Orange. Dès lors, l’Arcep estime qu’il est justifié de moduler géographiquement les obligations tarifaires d’Orange suivant le niveau de maturité du réseau fibre. L’Arcep distingue trois types d’accès : ceux pouvant bénéficier d’une levée de la régulation tarifaire, ceux pouvant bénéficier d’une simple obligation de non-excessivité et ceux restant soumis à une obligation tarifaire orientée vers les coûts en raison de conditions concurrentielles insuffisantes80. Accès avec levée de la régulation tarifaire 108. La levée de la régulation tarifaire porte sur « les accès faisant partie d’une zone dont, d’une part, la fermeture commerciale est effective depuis plus de 6 mois, et dont, d’autre part, la fermeture technique a été annoncée par Orange et est prévue pour dans moins de 2 ans ». L’Arcep rappelle toutefois que les conditions relatives à la fermeture technique et à la fermeture commerciale du réseau cuivre ainsi que le délai de prévenance doivent avoir été respectés81. Accès avec régulation tarifaire en non-excessivité 109. La notion de tarif excessif renvoie à l’idée qu’une tarification peut présenter une disproportion manifeste entre le prix et la valeur du service correspondant, c’est-à-dire entre le coût effectivement supporté et le prix effectivement réclamé. Cette disproportion peut notamment apparaître par comparaison avec des produits concurrents ou à la suite d’une comparaison effectuée sur une base homogène dans le cadre d’une analyse des composants du prix pratiqué. Conditions d’application 110. Le remède tarifaire de non-excessivité s’applique pour les accès situés dans les communes dont au moins 95 % des locaux sont raccordables à l’infrastructure FttH depuis plus de neuf mois82. 111. S’agissant des accès précités, l’Arcep prend également note de la proposition d’engagement d’Orange du 23 juin 2023 sur « un plafond pour le tarif récurrent mensuel de l’accès à la boucle locale en dégroupage total » pour 2024 et 202583. Modalités de révision de la liste des communes 112. L’Arcep estime pertinent de réviser la liste des communes concernées par la régulation tarifaire en non-excessivité en fonction du déploiement du réseau FttH et donc de la croissance des offres de gros d’accès sur fibre optique, au maximum une fois par trimestre.

80 Projet de décision relatif au marché 1, pages 134 à 139. 81 Projet de décision relatif au marché 1, pages 136 et 137. 82 Projet de décision relatif au marché 1, page 138. 83 Projet de décision relatif au marché 1, page 138. 31

Cette liste devra être transmise à l’Arcep par Orange et publiée au moins trois mois avant l’application d’un changement tarifaire84. Principe de reproductibilité tarifaire 113. Pour les zones dans lesquelles les remèdes tarifaires pour l’accès à la boucle locale cuivre ont été levés, l’Arcep envisage d’imposer à Orange d’assurer la reproductibilité des tarifs de ses offres de détail sur cuivre afin de ne pas créer de déséquilibre concurrentiel sur le marché. À cette fin, elle devra conduire un test de reproductibilité dans les zones où elle pratique « des tarifs supérieurs à ceux de la zone soumise à une obligation de non-excessivité »85. 114. L’Arcep précise que le test de reproductibilité tarifaire devra être réalisé et lui être transmis préalablement à toute évolution à la hausse des tarifs de gros d’accès local à la boucle locale cuivre ou à la baisse des tarifs de détail d’Orange. Si l’Arcep estime que le test n’a pas été réalisé correctement, elle pourra demander qu’Orange reproduise le test ou elle pourra le faire elle-même. De même, si le test n’est pas concluant, Orange ne pourra pas mettre en œuvre l’évolution tarifaire envisagée. Adaptation de la méthode de tarification au vidage du réseau cuivre 115. Pour rappel, la méthode de tarification est fondée sur la modélisation ascendante de la boucle locale optique mutualisée. L’Arcep estime néanmoins que cette méthode pourrait ne plus être adaptée compte tenu de la fermeture du réseau cuivre parce qu’elle ne permettrait pas à Orange de recouvrer ses dépenses courantes et souhaite en tenir compte dans l’appréciation des coûts pour la tarification du dégroupage86. d) Accès passif aux boucles locales optiques Allègement sur les accès passifs aux boucles locales optiques 116. L’Arcep constate une amélioration de la situation concurrentielle avec l’émergence d’offres de gros d’accès activées et propose en conséquence de lever l’obligation d’Orange de proposer des « offres de gros en marque blanche permettant à un opérateur tiers de reproduire les offres d’accès sur infrastructure FttH sans adaptation qu’il commercialise au détail à destination du marché des professionnels et des entreprises »87. Accès avec qualité renforcée 117. La décision n° 2020-1432 du 8 décembre 2020 impose à l’ensemble des opérateurs de rendre disponibles « des offres de gros d’accès passif à leur réseau FttH incluant un délai garanti de temps de rétablissement des pannes en 10 heures ouvrées » ainsi que « des offres d’accès passifs incluant un délai garanti de temps de rétablissement des pannes en 4 heures ouvrées (4HO) et, en option, en 4 heures non ouvrées (4HNO) ». L’Arcep n’estime donc pas

84 Projet de décision relatif au marché 1, page 126. 85 Projet de décision relatif au marché 1, page 118. 86 Projet de décision relatif au marché 1, pages 141 et 142. 87 Projet de décision relatif au marché 1, page 100. 32

pertinent de maintenir ces obligations pour Orange pour l’infrastructure FttH dont elle est propriétaire ou gestionnaire88. Levée des principes de non-discrimination pour l’accès passif aux boucles locales optiques mutualisées 118. Au regard de l’évolution concurrentielle sur le marché de détail FttH et de l’existence d’obligations similaires imposées aux opérateurs par la régulation symétrique89 et par la recommandation du 8 décembre 202090 permettant de garantir la non-discrimination opérationnelle et technique, l’Arcep envisage d’alléger en conséquence le cadre de la régulation asymétrique et de ne pas y maintenir « l’obligation de mettre en œuvre un principe d’équivalence des intrants (EoI) sur les offres point-à-point avec GTR 4HO/HNO, commercialisées sur une infrastructure FttH avec adaptation »91. e) Qualité des services Application des pénalités de manière équitable 119. L’Arcep rappelle que les opérateurs peuvent imposer, en vertu de leurs contrats, des pénalités à Orange si elle ne respecte pas ses engagements en termes de qualité de service mais qu’Orange peut aussi imposer des pénalités aux opérateurs pour mauvaise qualité des informations transmises. L’Arcep précise, pour le présent cycle, que le niveau des pénalités appliquées doit être proportionné à la responsabilité d’Orange et des opérateurs92. Précision sur l’appréciation de la QS en fonction des marchés 120. L’Arcep précise que le calendrier de régulation du marché « 3b » étant différé de celui du marché 1, il serait pertinent de dissocier l’appréciation de la qualité de service des offres de ces marchés93. Ressources et services associés d’hébergement au sein des locaux d’Orange 121. Pour mémoire, Orange propose, dans son offre de référence d’accès à la boucle locale de cuivre ou dans son offre d’hébergement au sein de ses locaux pour l’exploitation des boucles locales en fibre optique, les prestations suivantes : − « fourniture d’emplacements pour l’installation des équipements actifs ;

88 Projet de décision relatif au marché 1, page 101. 89 Décision n° 2020-1432 de l’Arcep en date du 8 décembre 2020 précisant les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique et recommandation du 8 décembre 2020 sur les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, section II. 90 Recommandation du 8 décembre 2020 sur les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique. 91 Projet de décision relatif au marché 1, page 120. 92 Projet de décision relatif au marché 1, page 130. 93 Projet de décision relatif au marché 1, page 131. 33

fourniture de câbles de renvoi entre le répartiteur général et le répartiteur cuivre opérateur (RCO) installé au niveau des emplacements de dégroupage ; fourniture de lien intra-bâtiment (LIB) entre le répartiteur optique et le répartiteur numérique opérateur (RNO) installé au niveau des emplacements ; fourniture d’énergie ;

fourniture de climatisation ou de ventilation ;

fourniture d’un système d’accès sécurisé aux sites. »94 122. L’Arcep rappelle qu’il est possible d’adapter ces prestations aux évolutions des standards techniques proposés par les principaux équipementiers et modifie la formulation de l’obligation relative à la mise en œuvre de cette possibilité. L’obligation faite à Orange d’étudier « les conditions d’accroissement des ressources affectées à chaque emplacement afin d’éviter à un opérateur tiers de commander un emplacement inutilisé pour avoir accès à plus de ressources affectées »95 devient ainsi l’obligation d’étudier, « en concertation avec les opérateurs, les conditions d’évolution des ressources affectées à chaque emplacement afin d’optimiser la surface allouée à un opérateur tiers commandant des espaces d’hébergement »96. 3. LES EVOLUTIONS PROPOSEES SUR LE MARCHE DE FOURNITURE EN GROS D’ACCES DE HAUTE QUALITE (MARCHE 2) a) Accompagnement de la fermeture du réseau cuivre 123. Comme pour le marché 1, l’Arcep entend poursuivre son encadrement de la fermeture du réseau cuivre pour « préserver l’intérêt des utilisateurs en s’assurant notamment de la disponibilité de solutions de substitution au réseau cuivre, et maintenir la dynamique concurrentielle du marché du haut et du très haut débit fixe lors du processus de bascule entre les deux infrastructures »97. 124. Dans cette perspective, l’Arcep propose de prendre, pour le marché 2, des mesures de même nature que celles prises dans le cadre du marché 1 pour accompagner la fermeture du réseau cuivre, en les adaptant en tant que de besoin aux spécificités du marché régulé. 125. Comme pour le marché 1, les mesures d’accompagnement proposées portent d’abord sur les modalités de mise en œuvre du plan de fermeture d’Orange en précisant (i) la maille géographique retenue pour la fermeture du réseau cuivre98, (ii) l’ajustement du délai de prévenance pour les zones les plus avancées99, les conditions de fermeture commerciale

94 Projet de décision relatif au marché 1, page 106. 95 Décision n° 2020-1446 du 15 décembre 2020 portant sur la définition du marché pertinent de fourniture en gros d’accès local en position déterminée, sur la désignation d’un opérateur exerçant une influence significative sur ce marché et sur les obligations imposées à cet opérateur à ce titre, page 108. 96 Projet de décision relatif au marché 1, page 106. 97 Projet de décision relatif au marché 2, pages 61 et 62. 98 Projet de décision relatif au marché 2, page 65. 99 Projet de décision relatif au marché 2, page 67. 34

liées, d’une part, à la disponibilité d’une infrastructure FttH de substitution100 et, d’autre part, à la disponibilité d’une offre de détail sur l’ensemble des locaux raccordables101 et (iii) la limitation du report de la fermeture du réseau cuivre102. 126. De la même manière que pour le marché 1, les mesures d’accompagnement de la fermeture du réseau cuivre de l’Arcep portent ensuite sur le renforcement des obligations de transparence en précisant (i) l’obligation d’information de l’Arcep sur le projet de trajectoire de fermeture103, (ii) l’obligation de transparence quant à la définition des lots104 et (iii) l’obligation de communication des données pour le suivi des fermetures annoncées105. b) Allègement des obligations d’accès Fin de l’obligation de raccordement des stations de base des réseaux mobiles 127. L’Arcep constate que les offres de gros d’accès activés ne sont presque plus utilisées par les opérateurs mobiles alternatifs à Orange ; seuls 2 % des sites radio déployés dépendent de ces offres. Dès lors, elle propose de supprimer l’obligation de raccordement des stations de base des réseaux mobiles au-delà du 1er janvier 2025. Cependant, l’Arcep précise que ces offres seront maintenues pour les sites des opérateurs déjà raccordés via ces offres106. Fin de l’obligation de proposer des offres en technologie ATM 128. Orange a annoncé la fermeture technique de son réseau ATM (Asynchronous Transfer Mode)107 pour fin 2022, l’Arcep estime donc qu’il n’est plus nécessaire de maintenir les offres reposant sur cette technologie108. c) Conditions relatives aux tarifs 129. Pour mémoire, Orange prévoit l’extinction totale de son réseau cuivre d’ici à 2030, ce qui pourrait entrainer une augmentation du prix des accès de haute qualité sur cuivre. L’Arcep relève également la difficulté pour les opérateurs de détail de répercuter une hausse des tarifs des offres de gros sur les utilisateurs finals. Obligations relatives aux tests de reproductibilité 130. L’Arcep rappelle qu’Orange doit effectuer un test de reproductibilité tarifaire visant à « assurer qu’un opérateur [puisse] répliquer les tarifs des offres de détail sur boucle locale

100 Projet de décision relatif au marché 2, pages 69 à 72. 101 Projet de décision relatif au marché 2, page 73. 102 Projet de décision relatif au marché 2, page 74. 103 Projet de décision relatif au marché 2, page 75. 104 Projet de décision relatif au marché 2, page 75. 105 Projet de décision relatif au marché 2, page 76. 106 Projet de décision relatif au marché 2, page 56. 107 L’ATM (en français : mode de transfert asynchrone) est une technique de transfert asynchrone pour des communications à haut débit d’informations numérisées, organisées en paquets courts et de longueur fixe. 108 Projet de décision relatif au marché 2, page 53. 35

optique dédiée proposées par Orange en s’approvisionnant via les offres de gros activées à interface alternative sur boucle locale optique dédiée fournies par Orange ». L’Arcep précise qu’Orange doit justifier la méthodologie utilisée pour ces tests et se réserve la possibilité de lui enjoindre de recommencer si elle estime qu’ils n’ont pas été réalisés correctement, ou de les faire elle-même109. Levée de l’obligation de tarifaire dans certaines ZC3 131. S’agissant des zones où Orange est le seul opérateur proposant des offres bitstream cuivre spécifiques entreprises (i.e. zones correspondant à la zone arrière des NRA ou « ZC3 »), l’Arcep envisage de lever l’obligation de tarification orientée vers les coûts étant donné l’évolution des conditions concurrentielles, avec la disponibilité d’infrastructures alternatives aux accès de haute qualité sur cuivre DSL. Elle précise que cet allègement sera possible pour les zones fermées commercialement depuis plus de douze mois et dont la fermeture technique a été annoncée et est prévue dans moins de deux ans110. 132. Dans ce cadre et en vertu de ses obligations de transparence et de publication d’informations, Orange devra préciser dans son offre de référence qu’elle s’engage à restituer les sommes « indûment perçues » si elle n’a pas réalisé la fermeture technique de son réseau cuivre à l’échéance du délai de prévenance annoncé alors qu’elle a bénéficié de la levée de l’obligation de contrôle tarifaire111. Obligation de transparence pour les hausses tarifaires dans les zones non régulées 133. S’agissant des zones non soumises à une obligation tarifaire (c’est-à-dire les zones où Orange n’est pas le seul opérateur à proposer des offres de bitstream cuivre spécifiques entreprises ou « ZC1 »), l’Arcep prévoit d’adapter les délais de prévenance imposés à Orange selon le niveau de la hausse de tarif envisagée. L’Arcep précise qu’une évolution des tarifs de plus de 15 % devra être annoncée au moins six mois à l’avance112. Application du principe de non-régression 134. S’agissant des accès activés de haute qualité sur support fibre optique dédiée (boucle locale optique dédiée ou « BLOD »), l’Arcep a défini des zones selon leur situation concurrentielle avec des principes tarifaires adaptés selon leur situation concurrentielle. Il existe une première subdivision entre les zones avec un degré de concurrence par les infrastructures jugé respectivement satisfaisant et insuffisant pour les zones « ZF1 » et « ZF2 ». La seconde catégorie est elle-même divisée en deux suivant que l’intensité concurrentielle est en développement ou pas (« ZF2-A » et « ZF2-B »). Le périmètre de ces zones est révisé annuellement par Orange. Dans ce cadre et pour assurer la continuité des zones, l’Arcep estime qu’il est justifié de mettre en place un principe de non-régression d’un an pour les communes qui devraient être rétrogradées de la « ZF2-A » vers la « ZF2-B »113, à l’instar de

109 Projet de décision relatif au marché 2, page 84. 110 Projet de décision relatif au marché 2, pages 99 à 101. 111 Projet de décision relatif au marché 2, page 100. 112 Projet de décision relatif au marché 2, page 90. 113 Projet de décision relatif au marché 2, page 105. 36

celui qui était déjà présent entre la « ZF1 » et la « ZF2 » dans la décision d’analyse de marché de 2020. d) Allègement des obligations de qualité de service 135. L’Arcep rappelle l’importance des indicateurs et des seuils de qualité de service pour « assurer un accès effectif aux offres d’accès activés de haute qualité ». Elle propose néanmoins de lever l’obligation pour Orange de respecter ces seuils si le nombre d’occurrences de production par trimestre pour les accès cuivre DSL n’atteint pas un nombre minimal114. II. Analyse 136. L’Autorité entend formuler, dans un premier temps, des observations préalables liées aux particularités du nouveau cycle de régulation envisagé (A). Par la suite, elle abordera les questions soulevées par la délimitation des marchés opérée par l’Arcep (B), par la désignation de l’acteur puissant sur les marchés régulés (C) et par les principales mesures de régulation envisagées (D). A. REMARQUES PREALABLES LIEES AUX PARTICULARITES DU NOUVEAU CYCLE DE REGULATION 1. SUR LA DUREE DU CYCLE 137. Comme relevé au paragraphe 27 ci-avant, l’Arcep décide, pour la première fois, de faire porter son analyse sur une durée de cinq ans, ce que lui permet dorénavant l’article D. 301 du CPCE modifié, sans pour autant l’y obliger. 138. Même si l’Arcep considère cette durée comme « pertinente, au regard de l’absence d’évolution prévisible, en l’absence de régulation du marché, vers une situation de concurrence effective », il n’en demeure pas moins qu’elle nécessite une analyse ex ante particulièrement fine. La difficulté de cet exercice est amplifiée par les circonstances actuelles liées au processus de fermeture du réseau cuivre et la bascule sous-jacente vers les réseaux à très haut débit. Ces processus restent marqués par plusieurs incertitudes susceptibles d’affecter les évolutions de marché envisagées et l’intensité des mesures de régulation proposées, qu’ont confirmé plusieurs acteurs du secteur entendus dans le cadre de l’instruction. 139. En effet et en premier lieu, pratiquement tous les acteurs entendus soulignent l’absence de recul sur la dynamique concurrentielle qui accompagnera la fermeture du réseau cuivre et la migration de la clientèle vers les réseaux FttH. Si de premiers enseignements peuvent être tirés des expérimentations de fermeture du cuivre menées jusqu’à présent sur six communes,

114 Projet de décision relatif au marché 2, page 95. 37

chacun des opérateurs auditionnés s’accorde à dire que ceux-ci ne sauraient être généralisés dans le cadre d’un processus de fermeture à grande échelle. Les opérateurs déclarent notamment être dans l’incapacité de fournir, dans un tel cadre, l’accompagnement personnalisé qu’ils ont proposé à leurs clients à l’occasion de ces expérimentations. 140. En deuxième lieu, de nombreux acteurs s’interrogent sur le calendrier du processus de bascule entre cuivre et FttH, en particulier en ce qui concerne les délais réels qui surviendront entre la fermeture commerciale et la fermeture technique. Comme indiqué précédemment, le plan de fermeture du réseau cuivre d’Orange s’organise en deux temps, le premier portant sur la fermeture commerciale du réseau, et le second actant sa fermeture technique. Si Orange a confirmé dans le cadre de l’instruction son intérêt à limiter la durée entre ces deux étapes afin de limiter les coûts engendrés par l’exploitation de deux réseaux en parallèle, plusieurs opérateurs craignent en revanche que la fermeture technique n’intervienne en pratique qu’après plusieurs années, certains opérateurs avançant des durées moyennes de cinq à six ans. Or, pour la plupart des acteurs interrogés, certaines mesures de régulation envisagées par l’Arcep sont de nature à avoir une portée différente selon le calendrier dans lequel s’inscrira la fermeture technique du réseau cuivre d’Orange (voir paragraphes 225 et suivants). 141. En troisième lieu, de nombreuses interrogations portent sur la part des lignes de cuivre susceptibles de rester actives dans le temps et qui ne feraient pas l’objet d’une fermeture technique par Orange, certains éléments laissant même penser que leur nombre pourrait ne pas être négligeable. 142. D’abord, tous les opérateurs ayant participé aux expérimentations de fermeture du réseau cuivre sur six communes relèvent que la part des clients réticents au changement de technologie est importante. Il ressort de l’instruction du présent avis qu’entre 15 et 20 % des clients cuivre attendront le dernier moment, c’est-à-dire la fermeture technique du réseau cuivre, pour choisir de faire migrer leur abonnement sur un réseau en fibre optique de bout en bout. Ce constat réalisé par les opérateurs renforce d’ailleurs l’importance des délais qui surviendront entre la fermeture commerciale et la fermeture technique du réseau cuivre précédemment abordée, puisqu’une partie non négligeable des clients cuivre ne migre que lorsqu’elle y est contrainte. 143. Ensuite, l’assouplissement envisagé par l’Arcep de la notion de complétude du réseau FttH parmi les critères exigés pour fermer le réseau cuivre sur une zone donnée est également de nature à influer sur le nombre de lignes cuivre qui perdureront jusqu’à la fermeture technique du réseau, qui peut s’avérer lointaine. Même si les opérateurs interrogés reconnaissent que cet assouplissement vise à remédier à l’incomplétude des déploiements FttH et permettra ainsi d’enclencher le processus de fermeture du réseau cuivre sur davantage de zones, il acte dans le même temps l’existence d’un certain nombre de locaux non raccordés aux réseaux, parfois de manière durable. 144. Enfin, la part des lignes cuivre qui resteront actives dépendra également directement du rythme avec lequel les opérateurs continueront à déployer les réseaux de boucle locale optique. Il apparaît à cet égard que si les déploiements des opérateurs continuent à progresser sur l’ensemble du territoire, force est de constater qu’ils ont tendance à ralentir, en particulier dans les zones d’initiative privée, l’essentiel de la dynamique actuelle des déploiements étant porté par les réseaux d’initiative publique. Ces éléments ressortent clairement du dernier observatoire des « Services fixes haut et très haut débit : abonnements et déploiements » publié par l’Arcep le 8 juin 2023, comme l’illustre le graphique suivant : 38

Source : Arcep 145. Néanmoins, l’Autorité note que l’Arcep souhaite limiter la possibilité, sous certaines conditions, d’un report de la fermeture du réseau au-delà de 24 mois même si les critères de fermeture ne sont pas remplis. 146. En dernier lieu, plusieurs acteurs du secteur ont manifesté leurs craintes quant aux incertitudes liées à l’évolution du marché entreprise dans le temps. La plupart des acteurs interrogés souligne à cet égard que la migration des entreprises vers les réseaux à très haut débit répond à une logique et à des incitations différentes de celles de la clientèle grand public. Viscosité du marché, réticence au changement, processus de migration plus long, exigences de continuité et de garantie de service accrues, existence de besoins spécifiques (offres multi-sites et multi-accès, existence de liens de sécurisation des sites) et durée d’engagement contractuel plus longue sont autant de spécificités susceptibles de jouer au moment où la clientèle entreprise envisage de basculer vers les réseaux à très haut débit. La complexité de fonctionnement du marché entreprise considérée dans le contexte de fermeture du réseau cuivre rend ainsi l’exercice d’analyse ex ante particulièrement délicat, a fortiori lorsque son horizon temporel est lointain. 147. Il ressort donc de l’ensemble de ces éléments un certain nombre d’incertitudes susceptibles de jouer tant sur les paramètres pris en compte par l’Arcep dans son analyse prospective que sur l’intensité des mesures de régulation qu’elle envisage à l’occasion du cycle à venir. Ces éléments d’incertitude méritent une attention particulière alors que la fermeture du réseau cuivre et la bascule vers les réseaux FttH qui l’accompagnera constituent une période sensible du point de vue concurrentiel. En effet, tout dysfonctionnement sur le marché qui aurait été insuffisamment anticipé du fait des incertitudes précitées risque d’avoir des effets durables sur le marché alors qu’une phase charnière est en cours, en particulier sur le marché entreprise. 148. Plus que jamais, l’Autorité invite l’Arcep à rester vigilante et à modifier le cas échéant son analyse en cours de cycle pour l’adapter aux évolutions du marché. L’Autorité relève à cet égard que l’Arcep annonce qu’elle entend, « en tant que de besoin, par exemple en cas d’évolution significative de la structure du marché ou de ses acteurs […] se donner la 39

possibilité d’effectuer une nouvelle analyse avant la fin de la période envisagée et, le cas échéant, prendre de nouvelles décisions »115. 2. SUR LES INCERTITUDES ENTOURANT LA REGULATION DU MARCHE 3B 149. Comme l’Autorité a eu l’occasion de le rappeler à plusieurs reprises116, la régulation ex ante déroge au fonctionnement normal des marchés et doit rester proportionnée, dans son champ d’application comme dans ses outils. Cet impératif de proportionnalité implique en particulier un ajustement permanent de la régulation sectorielle aux évolutions du marché. C’est ainsi à mesure que la concurrence se développe sur les marchés des communications électroniques, grâce à la régulation sectorielle, que le champ de celle-ci a vocation à se réduire et, le cas échéant, à se déplacer vers de nouveaux enjeux. 150. Dans le cadre de la présente saisine, la poursuite de la régulation du marché 3b n’est donc plus immédiatement envisagée. L’Autorité prend acte de ce choix de l’Arcep et regrette que les raisons de la prolongation des travaux de l’Arcep ne soient pas précisées, en particulier en ce qui concerne les éléments nouveaux susceptibles de modifier l’analyse des trois critères précédemment décrite. 151. Même si la dérégulation de ce marché n’est pas encore certaine, l’Autorité souhaite rappeler que la concurrence dans le secteur des communications électroniques s’est historiquement développée grâce à la combinaison d’une concurrence par les infrastructures et d’une concurrence par les services permettant la présence d’acteurs économiques complémentaires sur l’échelle des investissements. Comme le rappelait l’Autorité dans son avis n° 14-A-06, « [l]es analyses de marché proposées par l’Arcep visent, in fine, à assurer le développement de la concurrence sur les marchés de détail du haut et du très haut débit, soit par le moyen de la régulation des offres de gros amont sur la base desquelles les opérateurs construisent leur propre infrastructure en concurrence avec celle de l’opérateur historique (concurrence par les infrastructures) soit, lorsqu’ils ne souhaitent pas investir dans leur propre infrastructure, par la régulation des offres de gros sur la base desquelles ils constituent leurs offres de détail à destination des clients résidentiels et des entreprises (concurrence par les services) »117. 152. Si la concurrence par les infrastructures apparaît comme la plus pérenne, la concurrence par les services a, depuis l’ouverture du secteur à la concurrence, offert un complément utile pour permettre aux opérateurs tiers d’animer le marché et de progresser dans l’échelle des investissements. L’Autorité soulignait à cet égard dans son avis n° 14-A-06 que « [l]e développement de la concurrence passe pour les opérateurs alternatifs par l’« échelle des investissements ». Au départ, les nouveaux opérateurs n’ont que des parts de marché limitées et ne peuvent donc investir dans des infrastructures qui représentent des coûts importants, notamment en termes de génie civil. Ils ne peuvent donc exercer qu’une

115 Voir par exemple le projet de décision relatif au marché 1, page 13. 116 Voir en particulier l’avis n° 11-A-05 du 8 mars 2011 relatif à une demande d’avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) portant sur le troisième cycle d’analyse des marchés de gros du haut débit et du très haut débit, paragraphes 39 et 40. 117 Avis n° 14-A-06 du 15 avril 2014 relatif à une demande d’avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes portant sur le quatrième cycle d’analyse des marchés de gros du haut débit, du très haut débit et des services de capacités, paragraphe 10. 40

concurrence par les services, qui passe par la fourniture d’offres de gros « activées » par l’opérateur dominant. Ce n’est qu’au fur et à mesure de leur développement qu’ils peuvent progressivement investir dans des réseaux ou des infrastructures en propre »118. 153. S’agissant plus particulièrement du marché de masse, les cycles de régulation précédents ont ainsi toujours combiné l’existence d’offres de gros complémentaires, les unes assurant le développement de la concurrence par les infrastructures (marché de l’accès aux infrastructures de génie civil et marché 1), les autres permettant une présence minimale et progressive sur l’échelle des investissements grâce à la concurrence par les services (marché 3b). 154. Si la perspective d’une dérégulation du marché 3b semble traduire, au fil des cycles de régulation successifs, un développement satisfaisant de la concurrence par les services et une montée en puissance progressive des acteurs du marché dans l’échelle des investissements pouvant justifier un ajustement de l’intervention de l’Arcep, elle est de nature à aboutir à un cadre de régulation reposant sur la seule concurrence par les infrastructures (marché de l’accès aux infrastructures de génie civil et marché 1), à tout le moins en ce qui concerne le marché de masse (la fourniture d’offres de gros d’accès central en position déterminée continuant à être régulée en ce qui concerne le marché entreprise dans le cadre de la régulation du marché 2). 155. Cette évolution du périmètre de la régulation est susceptible de poser, à terme, la question de la complétude des offres de gros, en particulier dans le cadre de la fermeture progressive du réseau cuivre d’Orange et du basculement sous-jacent de l’animation concurrentielle du marché vers les réseaux en fibre optique. Il conviendra notamment, au regard du processus de fermeture du réseau cuivre, de vérifier que le cadre de régulation est de nature à créer une dynamique concurrentielle de laquelle peuvent émerger spontanément les offres de gros attendues par les acteurs actuels ou d’éventuels nouveaux entrants, ce qui permettra d’assurer le caractère complet de la gamme des offres disponibles pour ceux-ci. Dans cette perspective, il apparaît en particulier important de s’assurer que les offres de gros qui seraient disponibles, à terme, sur le seul segment du marché à très haut débit soient en mesure de garantir cette dynamique concurrentielle. 156. L’Autorité relève à ce stade que, selon l’Arcep, « [l]es offres bitstream d’Orange occupent une place centrale pour les opérateurs n’ayant pas les économies d’échelle suffisantes pour investir dans le dégroupage des infrastructures de boucles locales »119. 157. De leur côté, les acteurs du secteur apprécient diversement l’hypothèse d’une éventuelle levée de la régulation du marché 3b. 158. Concernée au premier chef par la question en tant qu’opérateur susceptible d’être désigné puissant sur ce marché, Orange estime que la dynamique concurrentielle observée pousse à la levée de la régulation du marché 3b. D’abord, elle souligne que les lignes de cuivre concernées par des offres activées connaissent une importante concurrence et que leur nombre ne cessera de diminuer dans le temps. Orange note par ailleurs la forte dynamique concurrentielle qui existe déjà sur les réseaux FttH puisqu’il ressort du document « Bilan et perspectives » de l’Arcep que 85 % des lignes FttH ont une offre bitstream par deux opérateurs. Selon elle, cette dynamique concurrentielle est de nature à permettre l’émergence spontanée d’offres de gros susceptibles de répondre aux besoins du marché. Toutefois, si Orange estime que cela pourrait être le cas en ce qui concerne les besoins du bas de marché

118 Avis n° 14-A-06 précité, paragraphe 12. 119 Projet de décision relatif au marché 3b soumis à consultation publique en février 2023, page 42. 41

entreprise, elle reste plus mesurée en ce qui concerne les besoins du marché grand public où l’émergence d’offres de gros pourrait se limiter aux seuls réseaux d’initiative publique. 159. Qu’ils soient de taille nationale où qu’ils aient un périmètre d’action régional, les opérateurs tiers apparaissent en revanche plus inquiets par la perspective d’une levée de la régulation du marché 3b. 160. Au-delà de la puissance qu’Orange conserve sur ce marché et qui justifierait selon eux de poursuivre la régulation en place, les opérateurs s’inquiètent des conséquences qui résulteraient d’une dérégulation. En premier lieu, il apparaît que l’offre de bitstream cuivre d’Orange reste utilisée par de nombreux acteurs. Pour certains acteurs nationaux, cela représente plusieurs centaines de milliers de lignes. Pour certains opérateurs régionaux, cela peut représenter jusqu’à 40 % de leur parc de clients. En second lieu, ils estiment qu’une levée de la régulation entrainerait une hausse des tarifs de bitstream cuivre pratiqués par Orange, ce qui serait problématique à plusieurs titres. D’abord, sur certaines zones du territoire (zones non dégroupées), il est probable qu’Orange reste le seul offreur, en particulier au regard de l’incomplétude de couverture des réseaux FttH par endroits. Ensuite, plusieurs opérateurs soulignent la difficulté pour eux de répercuter une éventuelle hausse tarifaire sur leurs clients, ce qui conduirait à une perte de marge et à une capacité d’investissement amoindrie. 161. Les opérateurs tiers manifestent par ailleurs leurs inquiétudes relatives à la dynamique concurrentielle sur les réseaux FttH. Tous soulignent d’abord l’existence de l’offre bitstream fibre d’Orange « FttH access ». Bien que proposée tardivement par Orange (début 2023), les opérateurs tiers notent le potentiel de cette offre qui fera d’Orange un acteur incontournable du marché, ne serait-ce qu’au regard de sa couverture significativement plus étendue que les offres bitstream FttH des opérateurs alternatifs. Nonobstant l’existence de cette offre, les acteurs doutent ensuite que des offres répondant pleinement aux besoins du marché émergeront spontanément en l’absence d’une intervention du régulateur. 162. Enfin, plusieurs opérateurs tiers estiment qu’à défaut d’une régulation du marché 3b, la voie du règlement de différends devant l’Arcep120 prévue à l’article L. 36-8 du CPCE n’offrirait pas suffisamment de garanties pour corriger les dysfonctionnements du marché. Contrairement à la procédure de sanction prévue à l’article L. 36-11 du CPCE qui vise notamment à sanctionner le manquement par un opérateur puissant d’une de ses obligations, un règlement de différend a vocation à s’appliquer en cas de refus d’accès ou d’interconnexion, d’échec des négociations commerciales ou de désaccord sur la conclusion ou l’exécution d’une convention d’interconnexion ou d’accès à un réseau de communications électroniques. 163. Au regard de l’ensemble de ces éléments, il apparaît donc important de s’assurer que le dispositif envisagé pour le 7ème cycle d’analyse des marchés du haut et du très haut débit est en mesure de garantir que la dynamique concurrentielle ne soit pas amoindrie, même si la régulation envisagée ne repose plus sur l’articulation de la concurrence par les infrastructures avec celle assurant une concurrence complémentaire par les services. À cet égard, il appartient au régulateur sectoriel « de définir, pour chaque marché, le bon équilibre et le phasage adéquat entre concurrence par les infrastructures et concurrence par les services, dans l’objectif d’inciter à l’investissement sans pour autant laisser le marché se restreindre

120 La procédure de règlement de différends devant l’Arcep est encadrée par l’article L. 36-8 du CPCE. 42

exagérément »121. L’Autorité encourage donc l’Arcep à analyser avec une attention accrue l’éventuelle levée de la régulation du marché 3b. 164. Au vu des enjeux soulignés plus haut et de l’importance historique de ce marché, l’Autorité invite l’Arcep, dans le cas d’une levée de la régulation du marché 3b, à exposer les raisons l’ayant conduit à prendre cette décision, dans un objectif de transparence et de pédagogie vis-à-vis des acteurs du secteur. Dans cette hypothèse, il serait également tout à fait indispensable qu’elle puisse instaurer à nouveau une régulation de ce marché en cas d’évolution significative de sa structure ou de ses acteurs. 3. SUR LE CARACTERE SUFFISANT DU CADRE SYMETRIQUE 165. À l’occasion du 6ème cycle d’analyse des marchés du haut et très haut débit, l’Arcep avait proposé et soumis pour avis à l’Autorité un ensemble de mesures complémentaires portant tant sur le cadre de régulation asymétrique que sur le cadre de régulation symétrique, sur lesquelles l’Autorité s’était prononcée dans le cadre de son avis n° 20-A-07. 166. S’agissant plus particulièrement du cadre symétrique relatif au déploiement et à l’accès aux réseaux FttH, l’Autorité avait alors noté la volonté de l’Arcep, « dans un contexte d’accélération des déploiements des réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné et de future extinction du réseau cuivre » et « estimant que l’infrastructure FttH a vocation à devenir la future infrastructure fixe de référence, […] de consolider le cadre symétrique de la fibre optique applicable à tous les opérateurs »122. 167. Les évolutions du cadre symétrique proposées en 2020, saluées dans l’ensemble par l’Autorité au vu des enjeux du précédent cycle de régulation, ont notamment conduit à introduire différentes mesures visant à renforcer : − les garanties de non-discrimination en matière de systèmes d’information et de processus opérationnels et techniques (obligation de mettre en place des outils communs, respect de l’obligation de mettre en place une « muraille de Chine », non-discrimination en matière de commercialisation des lignes, en particulier en ce qui concerne les délais de livraisons composantes de l’accès en zones moins denses) ; − la disponibilité de la fibre dans les zones moins denses (mesures relatives à l’obligation de complétude) ; − le renforcement des obligations comptables symétriques ; − l’adduction par les opérateurs commerciaux des points de mutualisation intérieurs aux immeubles dans les zones très denses ; − la dynamique concurrentielle sur le marché entreprise (obligation faite à tous les opérateurs d’infrastructure de fournir des offres d’accès passif à leur réseau FttH avec deux niveaux de qualité de service renforcée). 168. Comme précédemment observé, la présente saisine relative au 7ème cycle de régulation porte uniquement sur le cadre asymétrique et ne s’accompagne pas de mesures complémentaires visant le cadre symétrique. En ce qui concerne plus particulièrement le segment de marché des offres d’accès passif aux boucles locales optiques, l’Arcep souligne « le caractère

121 Voir l’avis n° 11-A-05, paragraphe 45, et l’avis n° 14-A-06, paragraphe 206. 122 Avis n° 20-A-07 précité, paragraphe 72. 43

suffisant de la régulation symétrique » lorsqu’est envisagé le contenu du cadre asymétrique relatif au marché de masse : « Lors du précédent cycle, l’Autorité a considéré que l’obligation, issue du cadre symétrique, de faire droit aux demandes raisonnables d’accès à la boucle locale optique répondrait aux besoins des acteurs en période d’accélération du déploiement de la boucle locale optique et qu’il n’était pas nécessaire d’imposer à Orange une obligation spécifique au titre de son influence significative sur le marché des offres d’accès aux infrastructures constitutives de la boucle locale filaire permettant de desservir le marché de masse. Pour le présent cycle, l’Autorité considère qu’il convient de maintenir cette approche, au vu de la dynamique concurrentielle constatée sur le marché de masse »123. En ce qui concerne le marché entreprise, si l’Arcep estime que « la persistance des difficultés sur le marché de détail à destination des entreprises rend pertinente la poursuite d’un schéma de régulation asymétrique » portant sur les offres de gros d’accès à la boucle locale optique mutualisée d’Orange, elle ne prévoit pas de modifier le cadre symétrique applicable à l’ensemble des opérateurs d’infrastructure. 169. Comme la fermeture progressive du réseau cuivre est de nature à limiter progressivement la portée concrète des mesures de régulation asymétriques, principalement axées sur l’accès de la boucle locale cuivre et, dans le même temps, à transférer progressivement l’animation concurrentielle vers l’infrastructure FttH, il apparaît essentiel de maintenir un cadre de régulation symétrique garantissant que l’intensité de la concurrence ne soit pas amoindrie. 170. Par ailleurs, plusieurs acteurs entendus dans le cadre de l’instruction soulèvent que des sujets encadrés par la régulation symétrique tels que la complétude des déploiements FttH, la qualité de service des accès passifs délivrés par les opérateurs d’infrastructures et la fiabilité des fichiers d’éligibilité aux réseaux en fibre optique (fichiers IPE) figurent parmi les enjeux les plus importants pour l’animation concurrentielle du marché de masse, et de manière plus accrue en ce qui concerne le marché entreprise. L’Autorité soulignait déjà en 2020 « l’importance du contrôle effectif du respect des obligations prévues par le cadre de régulation envisagé pour cette période décisive pour l’avenir des marchés du haut et du très haut débit »124. Dans l’hypothèse d’une stabilité du cadre de régulation symétrique sur ces points pour le cycle à venir, l’attention que portera l’Arcep sur le respect effectif des obligations qu’elle entend imposer apparait primordiale dans la perspective de la poursuite de la bascule vers les réseaux en fibre optique qui accompagnera l’extinction du réseau cuivre d’Orange. 171. De la même manière que pour le cadre de régulation asymétrique, l’Autorité invite donc l’Arcep à rester plus que jamais vigilante aux évolutions de marché et à adapter, en tant que de besoin, les mesures d’encadrement symétrique. L’Autorité précise qu’une éventuelle évolution du cadre symétrique n’est pas exclusive, lorsque cela s’avère nécessaire et proportionné, du maintien ou du renforcement du cadre de régulation asymétrique, à travers l’imposition d’obligations spécifiques à un acteur au titre de son influence significative sur le marché.

123 Projet de décision relatif au marché 1, page 60. 124 Avis n° 20-A-07 précité, paragraphe 217. 44

B. SUR LA DELIMITATION DES MARCHES 1. SUR LA SUBSTITUABILITE ENTRE LE HAUT ET TRES HAUT DEBIT 172. Comme lors des précédents cycles d’analyse des marchés, l’Arcep conclut à la substituabilité de la demande relativement aux offres haut débit et très haut débit aussi bien sur le segment généraliste que sur le segment entreprise. 173. En ce qui concerne les offres grand public (marché résidentiel), l’Arcep souligne en particulier les éléments suivants. D’abord, elle constate qu’il n’existe toujours pas de services exclusivement disponibles sur le très haut débit et que les usages restent comparables, l’amélioration de débit représentant avant tout une amélioration de confort pour la majorité des utilisateurs. Ensuite, elle note que les conditions de commercialisation apparaissent proches à l’échelle nationale, les catalogues d’offres haut débit et très haut débit semblant quasiment superposables à l’échelle nationale. Elle souligne par ailleurs que s’il peut exister une différence de prix entre les offres haut débit et très haut débit pour certains opérateurs, cela reste limité aux offres dépassant des durées d’engagement de douze mois. Les offres primo-abonnés sont généralement au même prix entre haut et très haut débit. 174. En ce qui concerne les offres à destination des professionnels et des entreprises, l’Arcep conclut également à leur substituabilité pour les principales raisons suivantes. D’abord, elle souligne que les entreprises restent principalement préoccupées par la performance et la qualité de service des offres commercialisées, le support physique (cuivre ou fibre et donc haut débit ou très haut débit) de leur accès n’apparaissant pas comme un critère prioritaire. Ainsi, le débit n’apparaît pas comme l’unique critère de segmentation des offres (HD et THD encore moins), les entreprises évaluant leurs besoins à partir d’autres caractéristiques de service (GTR125, débits garantis, débits asymétriques/symétriques, double accès, etc.). Par ailleurs, elle note que les besoins en débits des entreprises et les prix des offres forment un continuum, de sorte qu’il n’est pas possible d’identifier un point de rupture entre haut et très débit. 175. L’Autorité prend note des arguments conduisant à maintenir une substituabilité entre le haut et très haut débit pour le cycle à venir et observe que les acteurs entendus dans le cadre de l’instruction partagent globalement ce constat. Certains soulignent néanmoins que cette substituabilité semble, dans une certaine mesure, revêtir un caractère imparfait au vu des difficultés à faire migrer la part des clients réticents au changement de technologie (voir paragraphe 142 ci-avant), y compris dans l’hypothèse où l’offre FttH serait moins chère que l’offre cuivre. La confirmation de cette tendance pourrait être de nature à remettre en cause, avant la fin du 7éme cycle dans 5 ans, l’analyse menée par l’Arcep en ce qui concerne la substituabilité des offres d’accès à la boucle locale de cuivre et des offres d’accès aux boucles locales optiques. 176. L’Autorité invite donc l’Arcep à observer le maintien dans le temps des arguments existants en faveur de cette substituabilité, en particulier dans le cadre du processus de fermeture à grande échelle du réseau de boucle locale cuivre et, dans le cas inverse, à en tirer toutes les conséquences.

125 Garantie Temps de Rétablissement 45

2. CONCERNANT LE MAINTIEN D’UNE DEFINITION SEPAREE D’UN MARCHE DU GENIE CIVIL 177. Comme pour le précédent cycle, l’Arcep continue à effectuer une analyse séparée du marché de fourniture en gros d’accès aux infrastructures physiques de génie civil pour le déploiement des réseaux en fibre optique. Bien que n’étant pas listé en annexe de la recommandation n° 2020/2245/UE de la Commission européenne du 9 octobre 2014, ce marché a été recensé par l’Arcep après application du « test des trois critères »126. Le périmètre du marché analysé n’a pas évolué et continue en particulier d’inclure les infrastructures de génie civil mobilisables pour le déploiement des réseaux de collecte. 178. L’analyse relative au test des trois critères de l’Arcep n’ayant pas fondamentalement changé, l’Autorité renvoie à la présentation qu’elle en avait faite dans son avis n° 20-A-07127. 179. L’Autorité soutient à nouveau la définition proposée par l’Arcep d’un marché séparé de fourniture en gros d’accès aux infrastructures physiques de génie civil pour le déploiement de réseaux en fibre optique. Elle souligne le caractère primordial et structurant de l’accès à ces infrastructures sur lesquelles Orange détient un quasi-monopole, et plus particulièrement sur deux points. D’abord, la régulation de l’accès à ces infrastructures doit permettre de garantir et d’encadrer les déploiements des réseaux en fibre optique que les opérateurs projettent de réaliser pour compléter la couverture du territoire, la rapidité de mise en œuvre du plan de fermeture du réseau cuivre pouvant en dépendre. Ensuite, elle doit permettre de garantir et d’organiser cet accès dans la durée pour assurer aux réseaux en fibre optique qui y sont déployés un niveau de fiabilité et de longévité à la hauteur des attentes générées par cette nouvelle infrastructure de référence. La maintenance préventive et les modalités de la maintenance curative de ces infrastructures apparaissent essentielles à cet égard. 180. Enfin, pour assurer une parfaite efficacité de la régulation des infrastructures physiques de génie civil mobilisables pour le déploiement des réseaux en fibre optique, l’Autorité appelle l’attention de l’Arcep sur la connaissance incomplète du périmètre des infrastructures concernées. Plusieurs opérateurs ont en effet souligné, dans le cadre de l’instruction, que les informations préalables fournies par Orange pouvaient parfois fluctuer et porter sur un périmètre d’infrastructures différent. Selon eux, le périmètre des infrastructures accessibles n’est pas toujours le même selon la date de communication des informations préalables de la part d’Orange. Au-delà de ces témoignages, la question du périmètre des infrastructures régulées est importante dans le contexte du déploiement des réseaux en fibre optique. 181. Si l’Arcep souligne dans son projet de décision que les infrastructures de génie civil auxquelles Orange doit donner accès incluent à la fois les infrastructures qu’elle détient et celles qui sont mises à sa disposition et qu’elle exploite pour le déploiement de réseaux de boucles locales et de collecte128, encore faut-il connaitre le périmètre de ces deux types

126 Recommandation n° 2014/710/UE, considérant 21 et point 2 : « [l]es autorités réglementaires nationales peuvent recenser des marchés autres que ceux énumérés dans la présente recommandation et leur appliquer le test des trois critères ». 127 Avis n° 20-A-07 précité, paragraphe 142. 128 Selon l’Arcep, « [i]l s’agit par exemple des NRA34 pour lesquels Orange n’est plus propriétaire des bâtiments mais bénéficie de droits d’usage pérennes, des infrastructures d’hébergement et de collecte construites dans le cas de l’accès à la sous-boucle, de certaines infrastructures de génie civil souterraines (chambres, fourreaux…) mises à la disposition d’Orange dans certaines zones d’aménagement concerté 46

d’infrastructures et son évolution dans le temps. À tout le moins, il conviendrait de clarifier ces différentes hypothèses auprès de l’ensemble des acteurs, de manière à ne pas laisser à Orange une marge d’appréciation trop importante qui pourrait conduire, selon les zones de déploiement considérées, à des interprétations différentes. 182. L’Autorité a conscience que la question peut être délicate à traiter, en particulier sur le plan juridique, mais estime qu’elle mérite d’être étudiée par le régulateur. À titre de comparaison, l’Autorité note que l’Arcep avait conduit en 1998 des travaux de cette nature sur la propriété des réseaux filaires constitutifs de la boucle locale cuivre au moment de la mise en place du dégroupage. Ces travaux, encore accessibles sur le site de l’Arcep129, avaient apporté aux acteurs du secteur un certain nombre d’éclairages importants. 3. SUR LA DELIMITATION GEOGRAPHIQUE DES MARCHES 183. L’Arcep estime, comme pour le cycle d’analyse précédent, que les marchés de la fourniture en gros d’accès local en position déterminée (marché 1) et de la fourniture en gros d’accès de haute qualité (marché 2) revêtent une dimension nationale (voir paragraphes 53 et suivants). 184. Comme en 2020, l’Autorité accueille favorablement la méthode de l’Arcep pour délimiter les marchés géographiques à des fins de régulation ex ante. Si l’Autorité a pris note de l’analyse alternative proposée par Orange conduisant à un résultat différent, elle considère néanmoins que les éléments d’analyse utilisés par le régulateur (à savoir les 13 zones identifiées et les critères associés) semblent convenir à une analyse ex ante ainsi qu’à une vision prospective des conditions de concurrence sur les marchés considérés. L’Autorité observe en particulier que l’Arcep s’est attachée à retenir, dans le cadre de ses développements, des critères présentant la meilleure stabilité dans le temps, ce qui revêt une importance accrue au vu de la durée du cycle. L’Autorité soutient donc la définition nationale proposée par l’Arcep pour les marchés 1 et 2. 185. Comme dans le cadre de son avis n° 20-A-07, l’Autorité observe en revanche que l’Arcep n’a pas appliqué cette même méthodologie pour effectuer la délimitation géographique du marché de l’accès aux infrastructures de génie civil. Néanmoins, l’analyse proposée par l’Arcep conduisant à retenir la dimension nationale de ce marché, en considérant en particulier que les offres de gros d’accès au génie civil présentent des conditions relativement identiques à l’échelle nationale, n’appelle pas de remarques particulières de la part de l’Autorité.

(ZAC), de certaines infrastructures verticales dans les immeubles (conduites, goulottes, etc.), mais également de certains appuis aériens ». 129 « La desserte et le câblage des immeubles par les opérateurs de télécommunications et de télévision par câble », étude réalisée par le cabinet Freshfields pour l’Autorité de régulation des télécommunications, décembre 1998. Disponible ici : https://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/etude-freshfields_01.pdf. 47

C. SUR LA DESIGNATION DE L’ACTEUR PUISSANT SUR LES MARCHES REGULES 186. Sur les trois marchés précédemment délimités, l’Arcep identifie Orange comme un opérateur exerçant une influence significative et propose de le considérer comme seul opérateur puissant. 187. En ce qui concerne le marché 1, l’influence significative d’Orange se maintient sur le marché à l’horizon du cycle. 188. D’abord, comme pour les cycles précédents, force est de constater qu’Orange possède et contrôle la quasi-intégralité du réseau de la boucle locale de cuivre. L’Arcep souligne ainsi que l’accès en gros à la boucle locale cuivre « est largement [plébiscité] par les opérateurs alternatifs puisqu’au 31 décembre 2022, sur les plus de 6 millions d’accès de gros dont bénéficient les opérateurs alternatifs, plus de 5 millions – soit environ 85 % – le sont à partir des offres de dégroupage des paires de cuivre »130. 189. Ensuite, la dynamique concurrentielle sur les réseaux en fibre optique ne devrait pas remettre en cause l’influence significative d’Orange. Bien que la proportion diminue par rapport au précédent cycle d’analyse, l’Arcep souligne que « les locaux pour lesquels Orange est exploitant du réseau FttH représentent 59 % du parc total des locaux éligibles au FttH au 31 décembre 2022 » et estime qu’à horizon de ce cycle, « la part des locaux pour lesquels Orange est exploitant du réseau FttH devrait légèrement baisser, tout en restant supérieure à 50 % »131. L’Arcep note à cet égard que les mécanismes de cofinancement qui interviennent dans le cadre de la mutualisation des réseaux en fibre optique ne changent pas fondamentalement la portée de la puissance d’Orange en ce qu’ils ne sauraient être pleinement comparés à des droits de copropriété irrévocable (ou IRU pour « Indefeasible rights of use ») pour différentes raisons. L’Autorité renvoie en tant que de besoin aux différents éléments développés sur cette question par l’Arcep en page 51 de son projet de décision. 190. L’Arcep souligne enfin qu’une levée de la régulation sur le marché de fourniture en gros d’accès local en position déterminée présenterait différents risques132 : − Orange pourrait d’abord « augmenter significativement le tarif du dégroupage, ou laisser se dégrader la qualité de service des accès cuivre des opérateurs commerciaux tiers, en particulier dans les zones où la fibre n’est pas encore déployée et où un grand nombre d’abonnés au détail restent dépendants de l’infrastructure cuivre d’Orange » ; − Orange pourrait ensuite « tirer profit de la maîtrise du calendrier et des conditions de la fermeture du réseau de cuivre pour renforcer sa position de marché lors de la migration des abonnés du cuivre vers la nouvelle infrastructure de référence FttH ». 191. En ce qui concerne le marché 2, Orange demeure là encore le premier fournisseur du marché des accès de haute qualité pris dans son ensemble (cuivre et fibre). L’Arcep souligne ainsi que « Fin 2022, la majorité des accès activés de haute qualité utilisés par les opérateurs alternatifs est fournie par Orange. La part de marché en volume d’Orange sur le marché de

130 Projet de décision relatif au marché 1, page 47. 131 Projet de décision relatif au marché 1, page 48. 132 Projet de décision relatif au marché 1, page 52. 48

gros des accès activés de haute qualité est de 50 à 55 % »133. Même si l’analyse quantitative de la position d’Orange apparaît en retrait par rapport au précédent cycle, l’analyse qualitative des caractéristiques économiques du marché pertinent permet à l’Arcep de confirmer sa conclusion sur l’influence significative de l’opérateur sur le marché. Au-delà de l’intégration verticale d’Orange et de l’existence d’économies d’échelle sous-jacentes, l’Autorité note à nouveau que le marché des accès de haute qualité se caractérise par un coût de changement d’opérateur élevé, qui confère un avantage à Orange en tant qu’offreur initial pour des raisons historiques, ce que l’Arcep présente comme étant l’« avantage du précurseur »134. 192. En ce qui concerne enfin le marché pertinent de la fourniture en gros d’accès aux infrastructures physiques de génie civil pour le déploiement de réseaux de boucle locale et de collecte, la situation n’a pas évolué par rapport au précédent cycle et confère toujours à Orange une influence significative sur le marché. À de rares exceptions près, Orange apparaît en effet toujours comme le seul opérateur à détenir des infrastructures de génie civil permettant de déployer une boucle locale et de s’y raccorder via un réseau de collecte de façon continue. Au-delà de ce premier aspect quantitatif, l’Arcep souligne que l’analyse des différentes options de contournement (comme l’utilisation de techniques de génie civil allégé, l’occupation du domaine public non routier ou l’accès aux poteaux de distribution d’électricité) « démontre l’absence de concurrence potentielle pour Orange sur ces infrastructures incontournables à l’échelle du territoire national et qu’il serait techniquement difficile, économiquement non viable et dans un cadre temporel inadapté de répliquer à cette même échelle »135. D. SUR LA REGULATION ENVISAGEE 1. SUR L’ACCES AUX INFRASTRUCTURES DE GENIE CIVIL 193. L’Autorité a déjà souligné que l’accès aux infrastructures de génie civil présente un caractère primordial et structurant pour le secteur à l’heure de la poursuite et de l’achèvement du déploiement des réseaux en fibre optique et dans la perspective d’en faire les réseaux de référence pour les prochaines décennies. 194. En premier lieu, l’accès aux infrastructures de génie civil devrait permettre de garantir et d’encadrer les déploiements des réseaux en fibre encore nécessaires à la couverture la plus complète possible du territoire, la rapidité de mise en œuvre complète du plan de fermeture du réseau cuivre d’Orange pouvant en dépendre. 195. Tout en accueillant favorablement les différentes mesures proposées par l’Arcep (voir paragraphes 65 et suivants), l’Autorité souligne néanmoins que la réussite de la régulation de l’accès aux infrastructures de génie civil semble également passer, au-delà des nouvelles obligations proposées, par le parfait fonctionnement opérationnel de l’offre de gros d’Orange et son adaptation rapide face à d’éventuels blocages techniques ou processuels qui surviendraient au fil de l’eau. Il apparaît en effet important que tout éventuel blocage

133 Projet de décision relatif au marché 2, page 45. 134 Projet de décision relatif au marché 2, page 49. 135 Projet de décision relatif au marché de l’accès au génie civil, page 27. 49

opérationnel soit rapidement levé afin de ne pas limiter artificiellement l’accès des opérateurs tiers aux infrastructures d’Orange. Selon plusieurs opérateurs entendus, la réussite de la régulation dépend à cet égard de la bonne conduite et de l’issue des travaux multilatéraux menés sous l’égide de l’Arcep. 196. De manière plus générale, la finalisation des déploiements pourra également se heurter dans certains cas à l’absence de tronçons de génie civil de raccordement final. Au-delà de la question de la connaissance du périmètre de génie civil accessible (voir paragraphes 180 et suivants), les acteurs soulignent les investissements très importants que cela peut nécessiter et l’équation financière délicate à laquelle ils devront faire face dans ce cas. Plusieurs acteurs ont souligné l’existence de projets en cours de discussion pouvant le cas échéant nécessiter directement ou indirectement des financements publics. Cette question doit faire l’objet d’une attention particulière et l’Autorité renvoie à son avis n° 12-A-02 relatif à une demande d’avis de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire du Sénat concernant le cadre d’intervention des collectivités territoriales en matière de déploiement des réseaux à très haut débit. 197. En deuxième lieu, l’accès aux infrastructures de génie civil devrait permettre de garantir et d’organiser cet accès dans la durée pour assurer aux réseaux en fibre optique qui y sont déployés un niveau de fiabilité et de longévité à la hauteur des attentes engendrées par cette nouvelle infrastructure de référence. Les acteurs entendus dans le cadre de l’instruction ont confirmé que la maintenance préventive, les modalités de maintenance curative et plus généralement la question de la rénovation de ces infrastructures apparaissent essentielles à cet égard. 198. L’Autorité soutient donc les mesures de régulation proposées par l’Arcep allant en ce sens. Elle note en particulier les nouvelles mesures portant sur les obligations d’information dans le cadre de travaux ou d’opérations de maintenance (obligations de transmissions trimestrielles d’informations concernant la réalisation de travaux suite à une opération de contrôle et les études préventives réalisées par Orange sur son patrimoine, ainsi que les informations relatives à la mise à jour de ses données numériques vectorielles géolocalisées à la suite de la réalisation de travaux sur ses infrastructures de génie civil) ou les modalités financières relatives à la réparation du génie civil (mise en place d’une grille de forfaits de remboursements spécifique aux opérations de réparation réalisées sur des infrastructures de génie civil déjà mobilisées pour un déploiement). 199. L’Autorité note que plusieurs acteurs regrettent que les mesures de l’Arcep n’aient pas été plus ambitieuses, notamment pour garantir une non-discrimination géographique de la maintenance des infrastructures d’Orange entre les différents territoires. D’autres estiment que les obligations de transparence proposées auraient gagné à être plus précises et à être communiquées en avance de phase. En effet, en ne portant que sur les opérations de maintenance déjà réalisées, les informations qui seraient transmises ne permettraient pas aux opérateurs d’anticiper les interventions d’Orange dans le cadre de leurs déploiements. 200. L’Autorité approuve les mesures proposées par l’Arcep portant sur les obligations d’informations et de transparence liées à la fermeture du réseau cuivre, en particulier celles permettant aux acteurs du secteur d’anticiper les opérations de dépose du réseau cuivre et de fermeture NRA. Dans tous les cas, la fermeture de la boucle locale cuivre et les interventions sous-jacentes au niveau des infrastructures de génie civil qui l’accueillent ne doivent pas conduire à une dégradation de ces infrastructures dont l’accès doit être garanti dans le temps. 201. En dernier lieu, l’Autorité rappelle l’importance de maintenir l’application du principe d’équivalence des intrants pour l’accès aux infrastructures de génie civil pour le déploiement du segment des boucles locales optiques, imposé depuis la décision d’analyse de marché 50

n° 2008-0835 du 24 juillet 2008 de l’Arcep. Même si l’accès au génie civil pour le déploiement des réseaux de collecte n’est de son côté encadré que par l’application de l’obligation d’équivalence des extrants, les garanties de non-discrimination proposées par l’Arcep restent dans leur ensemble essentielles, à l’heure de la poursuite des déploiements des réseaux en fibre optique et de la fermeture des réseaux cuivre. 2. SUR LA FERMETURE DU RESEAU CUIVRE 202. Les modalités et le processus de fermeture du réseau cuivre, tels qu’ils ressortent du plan de fermeture d’Orange, semblent lui conférer, aux dires de plusieurs acteurs du secteur, une trop grande latitude dans sa mise en œuvre. 203. Après avoir abordé les questions relatives au calendrier de fermeture du réseau cuivre et à la composition des lots de communes pour la fermeture par zone (a), l’Autorité s’interrogera sur les mesures liées à l’accompagnement de la fermeture du cuivre (b) et sur la portée incitative de certains allègements de la régulation proposés dans ce cadre (c). a) Sur la transparence et la prévisibilité du plan de fermeture du réseau cuivre 204. Le plan de fermeture du réseau cuivre établi par Orange ainsi que les précisions que l’opérateur y a apportées ont été publiés par l’Arcep en juillet 2022. Orange y prévoit, après une première phase d’expérimentations sur six communes, la fermeture progressive de l’ensemble de son réseau à travers un allotissement par groupes de communes. 205. Même si le choix des lots de communes opéré au fil de l’eau par Orange répond en théorie à différents critères, qu’il s’inscrit dans un calendrier prévisionnel et qu’il a fait l’objet d’une consultation de l’ensemble des acteurs concernés, les acteurs entendus dans le cadre de l’instruction ont formulé plusieurs critiques sur l’ensemble de ce processus. 206. D’après l’ensemble des opérateurs auditionnés, Orange disposerait d’abord d’un pouvoir discrétionnaire dans la mise en œuvre de son plan, en particulier dans la composition des lots de communes. Selon ces opérateurs, les lots proposés ne seraient pas représentatifs des déploiements de l’ensemble des acteurs et auraient tendance à surreprésenter les communes couvertes par Orange. Cet allotissement résulterait d’une absence de transparence dans l’application des critères utilisés par Orange. À cet égard, les opérateurs plaident pour la publication d’une liste exhaustive de critères qui devraient être objectifs et appliqués de manière automatique, afin de limiter la marge de manœuvre d’Orange dans ses choix. 207. Orange conteste cette appréciation, soutenant qu’elle a associé tous les acteurs, y compris dans la composition des lots, et que l’Arcep était présente à chaque étape du processus. Orange souligne en particulier que l’allotissement auquel elle procède est représentatif de l’état concurrentiel du marché de gros au regard des parts de marché de chacun. Ainsi, les lots qu’elle propose à la fermeture contiennent une proportion de communes couvertes par Orange qui se rapproche de sa part de marché sur le réseau. 208. D’une manière générale, les opérateurs pointent un manque de visibilité globale sur le plan de fermeture du réseau cuivre, ce qui les empêcherait, contrairement à Orange, d’anticiper les futures étapes et d’adapter leur stratégie de déploiement. En particulier, certains opérateurs dénoncent une absence de visibilité relative à la fermeture des NRA. La fermeture des NRA ayant un impact sur le réseau des opérateurs, il est essentiel que l’annonce de leur fermeture intervienne selon des modalités suffisamment claires et précises et dans un calendrier anticipé permettant à chaque opérateur concerné de prévoir le réaménagement de 51

son réseau en fonction. Plusieurs opérateurs tiers dénoncent également une absence de visibilité liée à la fermeture technique du réseau cuivre. En effet, comme souligné ci-avant, si la fermeture commerciale du réseau cuivre interviendra dans son ensemble au plus tard en janvier 2026, la fermeture technique risque quant à elle d’intervenir selon un calendrier plus lointain et incertain, alors même qu’elle semble constituer le signal primordial pour la migration de la clientèle réticente au changement, dont la part n’est pas négligeable. 209. Les impératifs de transparence et de prévisibilité sont essentiels à la mise en œuvre du plan de fermeture du réseau cuivre d’Orange et ne doivent pas conduire à l’instauration de marges de manœuvre ou d’interprétation trop importantes au détriment des conditions de concurrence dans les zones de fermeture concernées. L’Autorité invite donc l’Arcep à s’assurer de la bonne mise en œuvre du plan d’Orange et à intervenir lorsque les choix ou l’application de critères suivis par l’opérateur ne garantissent pas les conditions de la dynamique concurrentielle à l’occasion de la bascule vers les réseaux à très haut débit. b) Sur l’accompagnement de la fermeture du cuivre 210. Pour assurer le basculement entre les réseaux à haut et très haut débit, l’Arcep prévoit des mesures pour accompagner la fermeture du réseau de boucle locale cuivre. À ce titre, il convient de souligner que l’ensemble des opérateurs appellent de leurs vœux cette transition afin de limiter l’utilisation en parallèle de deux réseaux distincts et d’offrir à leur clientèle les avantages (débits accrus, confort d’utilisation, etc.) qui résultent de l’utilisation des réseaux en fibre optique. 211. Certaines de ces mesures ont plus particulièrement été abordées dans le cadre de l’instruction par différents acteurs du secteur. 212. En premier lieu, l’Arcep prévoit d’alléger certaines conditions de fermeture du réseau. En particulier, l’Arcep prévoit un assouplissement du critère lié à la disponibilité d’une infrastructure de substitution. Ainsi, un réseau pourra être fermé même si 100 % des locaux de la zone considérée ne sont pas raccordables au FttH. L’Arcep prend notamment en compte les locaux raccordables sur demande, les locaux raccordables sur demande à tarif spécifique et les locaux n’ayant pas fait l’objet d’un déploiement en raison de blocages et refus ne relevant pas de la responsabilité de l’opérateur d’infrastructure. 213. Si un tel assouplissement est compréhensible, car une couverture à 100 % de chaque zone semble difficilement réalisable, ce que confirment les témoignages des acteurs dans le cadre de l’instruction, l’Autorité appelle l’Arcep à rester vigilante quant aux effets potentiellement induits par cet assouplissement. En effet, il peut apparaître paradoxal qu’une mesure destinée à favoriser la bascule entre le haut et très haut débit conduise potentiellement à maintenir en service des lignes cuivre de manière durable par l’intermédiaire du jeu de ces exceptions. Les interpréter de manière stricte offrirait à cet égard plus de garanties et limiterait la possibilité qu’elles soient utilisées, par les opérateurs, comme un moyen de contourner l’obligation de complétude en termes de déploiements. 214. À ce titre, plusieurs acteurs ont souligné dans le cadre de l’instruction que la vérification de l’obligation de complétude dépendait pour partie du caractère exhaustif des bases de données associées aux déploiements des réseaux (en particulier la base IPE), sans quoi l’identification de locaux non répertoriés (et donc non raccordables) pourrait venir remettre en cause la complétude constatée sur une zone à un instant donné. Cette situation semble plus particulièrement susceptible de se présenter s’agissant des locaux des entreprises qui semblent, aux dires de plusieurs acteurs entendus, surreprésentés parmi les locaux non raccordables restants (voir paragraphe 276). 52

215. En deuxième lieu, l’Arcep entend également alléger le critère de disponibilité d’une offre de substitution, en permettant la fermeture du réseau cuivre si une offre fondée sur une technologie alternative (satellite, 4G fixe, hertzien) est disponible là où il n’est pas possible ou pas encore possible de raccorder certains locaux à la fibre. 216. Beaucoup d’acteurs entendus dans le cadre de l’instruction ont formulé un certain nombre de réserves sur ce point. 217. D’abord, il a été soulevé que la mesure proposée par l’Arcep consistait à recourir à des technologies alternatives à très haut débit (satellite, 4G fixe, hertzien) qui ne constituent pas des solutions substituables au cuivre ou à la fibre, tel que cela ressort de l’analyse même du régulateur portant sur la définition du marché de produits et de services. Ainsi, plusieurs opérateurs ont souligné que l’utilisation de ces solutions de substitution pouvait s’avérer limitée (ne permet pas de répondre à l’ensemble des usages, problèmes de dimensionnement des réseaux 4G dans la perspective d’une utilisation trop importante, le recours aux solutions satellitaires est limité en zone très urbaine, notamment du fait de règles d’urbanisme liées à la pose de paraboles, etc.), en particulier pour répondre aux besoins de la clientèle entreprise. 218. Ensuite, certains opérateurs ont avancé l’existence de barrières liées à la possibilité même de recourir à ces solutions techniques alternatives à très haut débit. Au-delà de la barrière consistant à disposer d’un réseau mobile, plusieurs opérateurs ont souligné la difficulté d’acheter des capacités satellitaires sur le marché de gros, car cela nécessite d’engager un investissement important (durée de la négociation, maîtrise d’une nouvelle technologie, coût d’achat de la capacité, etc.) pour une rentabilité incertaine au vu du volume de clients potentiellement concernés. 219. Dans ce contexte, l’Autorité note avec satisfaction que l’Arcep indique dans ses projets de décisions que le recours aux solutions techniques alternatives doit rester transitoire. Limiter dans le temps la possibilité de recourir à ces solutions peut réduire les risques associés à leur utilisation, en particulier au regard des avantages concurrentiels dont pourraient disposer les opérateurs en mesure de proposer des offres de détails fondées sur ces technologies. Certains acteurs entendus dans le cadre de l’instruction s’interrogent néanmoins sur la portée concurrentielle d’éventuelles offres transitoires de couplage technologique consistant, pour un opérateur, à commercialiser une offre de détail sur une technologie de substitution dans l’attente de la fourniture de sa part d’une offre FttH. 220. Au regard des différentes limites précitées, l’Autorité invite donc l’Arcep à être particulièrement vigilante sur la dynamique concurrentielle qui pourrait naître de la mise en œuvre de la mesure qu’elle propose, de sorte que l’utilisation de solutions techniques alternatives ne pénalise pas les opérateurs susceptibles de rencontrer des difficultés à y recourir. 221. En dernier lieu, l’Autorité souhaite revenir sur le critère relatif à la disponibilité d’offres adaptées aux besoins des utilisateurs. Ce critère constitue, selon l’Arcep, un complément du critère précédemment évoqué relatif à la disponibilité de l’infrastructure FttH de substitution, ce dernier pouvant « ne pas être suffisant pour garantir l’émergence de conditions concurrentielles équivalentes à celles observées sur la boucle locale de cuivre ». C’est ainsi qu’il apparaît important pour l’Arcep de compléter son dispositif en « permettant aux opérateurs tiers de reproduire de façon comparable les offres principales qu’ils fournissaient sur la boucle locale cuivre »136. Pour ce faire, l’Arcep propose plusieurs conditions à remplir avant toute fermeture, en particulier :

136 Projet de décision relatif au marché 1, page 93. 53

− la disponibilité sur la zone considérée d’« au moins une offre de détail de service sur fibre optique jusqu’à l’abonné […] sur l’ensemble des locaux raccordables, « raccordables sur demande » et « raccordables sur demande à tarif spécifique » de la zone » ; − le caractère satisfaisant des conditions d’accès proposées aux opérateurs tiers qui se manifesterait par deux éléments : (i) par « la présence d’au moins deux opérateurs commerciaux distincts de l’opérateur d’infrastructure sur l’offre d’accès concernée » et (ii), par « un nombre d’accès actifs (hors opérateur d’infrastructure) d’au moins 10 000 lignes ou 10 % des lignes concernées par l’offre d’accès », ces conditions s’appliquant sur l’ensemble de la zone sur laquelle cette offre est proposée et non uniquement sur la zone de fermeture considérée. 222. En application de ces conditions, il apparaît que la fermeture commerciale d’une zone donnée pourrait donc intervenir, au titre du critère relatif à la disponibilité d’offres adaptées aux besoins des utilisateurs, dès lors qu’un opérateur est en mesure de proposer une offre de détail FttH sur l’ensemble des locaux de la zone, sans pour autant qu’il y ait la garantie d’une concurrence par les opérateurs tiers puisque leur présence sur la zone fermée n’est pas exigée aux termes de la rédaction proposée par l’Arcep (l’utilisation de l’offre par deux opérateurs distincts s’appréciant au niveau de l’empreinte géographique de l’offre sans qu’elle recoupe nécessairement la zone de fermeture considérée). 223. Au regard de ce qui précède, l’Autorité s’interroge sur les réelles garanties concurrentielles qu’offre ce critère, a fortiori lorsqu’il est lui-même censé pallier les limites du critère relatif à la disponibilité de l’infrastructure FttH de substitution, dont il a précédemment été souligné les limites. 224. À l’instar de son avis n° 20-A-07, l’Autorité ne peut que rappeler à l’Arcep l’importance particulière de la présence d’un nombre suffisant de concurrents sur le réseau fibre lors de la fermeture du cuivre, et ce afin d’« assurer une intensité concurrentielle au moins équivalente à celle qui prévalait lorsque les services de communications électroniques fixes s’appuyaient sur le réseau cuivre »137. Ainsi, l’allègement des critères permettant la fermeture du cuivre ne doit pas conduire artificiellement à un affaiblissement de la dynamique concurrentielle par rapport à celle présente sur le cuivre. c) Sur la portée incitative de certaines mesures du cadre de régulation 225. Comme cela ressort de l’avis de l’Autorité n° 20-A-07, la modulation de certaines mesures de régulation est de nature à jouer sur les mécanismes concurrentiels dans un contexte marqué par la fermeture du réseau cuivre, en particulier lorsqu’elle porte sur de qualité de service et de tarification. Pour le cycle de régulation à venir, l’encadrement de ces dernières proposé par l’Arcep semble ne pas offrir suffisamment de garanties quant à leur portée concurrentielle, ce qui inquiète les opérateurs alternatifs. Sur l’encadrement de la qualité de service du réseau cuivre 226. La qualité de service des offres de gros est structurante pour le secteur et fait l’objet d’une attention particulière depuis plusieurs cycles de régulation. Différentes interventions de

137 Avis n° 20-A-07 précité, paragraphe 167. 54

l’Arcep l’illustrent, comme la mise en demeure faite à Orange en 2018138 de se conformer à ses obligations concernant la qualité de service de ses offres de gros activées sur le marché de gros à destination des entreprises et de ses offres de gros d’accès généraliste à la boucle locale cuivre, mais également l’introduction, lors du précédent cycle de régulation, d’une obligation saluée par l’Autorité conduisant Orange à respecter des seuils chiffrés de qualité de service pour les offres généralistes cuivre (de dégroupage et activées) et FttH avec qualité de service renforcée. De son côté, l’Autorité continue de considérer « que le maintien ou le rétablissement de la qualité de service est une des conditions de la dynamique concurrentielle du marché »139. 227. Malgré l’importance attachée à ce sujet, il ressort de l’instruction que de nombreux opérateurs clients des offres d’Orange continuent à exprimer leur mécontentement à propos du niveau de qualité de service insuffisant de ces offres, notamment sur le réseau cuivre. 228. L’Autorité note que le cadre de régulation proposé par l’Arcep pour le cycle à venir ne modifie pas fondamentalement les obligations de qualité de service préexistantes sur le marché 1, celles-ci étant reconduites pour l’essentiel. À défaut d’un renforcement du périmètre de ces obligations, l’application effective des mesures en vigueur reste donc essentielle. Dans ce cadre, l’Autorité rappelle « que la mesure de la qualité de service et le contrôle de son respect par l’Arcep sont primordiaux »140 et invite le régulateur à être vigilant sur ce point. 229. Considérée dans le cadre de la transition entre le haut débit et le très haut débit, la qualité de service sur l’ensemble des réseaux revêt une importance accrue. Comme le rappelait l’Autorité dans son avis n° 20-A-07, la « qualité de service est importante à la fois pour Orange, qui, du fait de sa puissance significative sur le marché de l’accès, qui comprend aujourd’hui tant le cuivre que la fibre, occupera une position privilégiée pour maîtriser la fermeture de son réseau historique et la bascule vers la fibre, que pour tous les autres opérateurs d’infrastructures FttH, du fait du contrôle dont ils jouissent sur leur réseau aval au point de mutualisation »141. 230. S’agissant spécifiquement de l’encadrement de la qualité de service du réseau cuivre, plusieurs acteurs s’interrogent sur la portée de certaines mesures de régulation en lien avec sa fermeture. C’est en particulier le cas des allègements des obligations relatives à la qualité de service pesant sur Orange en cas de fermeture commerciale de son réseau. 231. Ce sujet n’est pas nouveau et avait déjà conduit l’Autorité à émettre, dans son avis n° 20-A-07, des réserves invitant « l’Arcep à ne pas exclure totalement l’obligation de respecter des seuils de qualité de service sur les accès sur cuivre concernés par une fermeture commerciale effective »142.

138 Décision n° 2018-1596-RDPI de l’Arcep en date du 18 décembre 2018 portant mise en demeure de la société Orange de se conformer à ses obligations concernant la qualité de service de ses offres de gros activées sur le marché de gros à destination des entreprises et ses offres de gros d’accès généraliste à la boucle locale cuivre. 139 Avis n° 20-A-07 précité, paragraphe 179. 140 Avis n° 20-A-07 précité, paragraphe 176. 141 Avis n° 20-A-07 précité, paragraphe 176. 142 Avis n° 20-A-07 précité, paragraphe 177. 55

232. Pour le cycle à venir, l’Autorité souhaite distinguer la situation des accès généralistes et la situation des accès dégroupés avec garantie de temps de rétablissement (GTR 4H et GTR 10H) utilisés dans le cadre du marché entreprise. 233. S’agissant d’abord des accès avec GTR, l’Autorité accueille favorablement la précision apportée par l’Arcep dans le présent projet de décision, par rapport au projet soumis à consultation publique le 20 février 2023. Répondant aux inquiétudes exprimées par plusieurs opérateurs, l’Arcep précise la rédaction de la dernière version de son document en soulignant que « Les offres de gros d’accès dégroupés avec garantie de temps de rétablissement (GTR 4H et GTR 10H) incluent par nature un délai de réparation rapide en cas d’interruption du service » et « seront donc exclues du dispositif d’adaptation du service de rétablissement des dérangements »143. Cette modification vise à tenir compte des enjeux du marché entreprise où la question de qualité de service est plus prégnante. 234. S’agissant ensuite des accès dégroupés généralistes, la situation apparaît en revanche plus incertaine. Dans son projet de décision, l’Arcep permet à Orange, « dans un souci d’allègement de l’obligation d’accès »144 qui lui est imposée, de modifier, pour les zones concernées et sous certaines conditions, le service de rétablissement des dérangements des accès généralistes à partir de la date de fermeture commerciale de son réseau. De manière plus générale, l’Arcep prévoit, comme pour le cycle d’analyse précédent, que les accès sur cuivre concernés par une fermeture commerciale effective sont exclus du respect des seuils de qualité de service définis par ailleurs dans le projet de décision. Selon l’Arcep, ces mesures apparaissent proportionnées pour tenir compte de la fermeture commerciale de réseau cuivre dès lors qu’elles s’inscrivent « dans une démarche non-discriminatoire et incitative responsabilisant les opérateurs tiers sur l’arbitrage concernant la migration des abonnés cuivre vers la nouvelle boucle locale optique ou éventuellement une solution alternative ». L’Autorité avait par ailleurs noté en 2020 qu’une diminution de la qualité de service sur les lignes cuivre pouvait inciter les opérateurs tiers à basculer leur clientèle vers l’infrastructure fibre, pour éviter de subir une dégradation de leur accès au réseau145. 235. Néanmoins, l’allègement du niveau de qualité de service des accès cuivre dans les zones concernées par une fermeture commerciale suscite des préoccupations, ainsi que l’Autorité l’a souligné dans son avis n° 20-A-07. Dans cet avis, l’Autorité soulignait l’importance « de disposer de garanties contre toute situation dans laquelle l’opérateur n’assurerait pas de façon suffisante la qualité de service sur son réseau cuivre, de façon à éviter de le mettre dans une position plus avantageuse que celle de ses concurrents pour vanter les mérites de ses offres FttH et ainsi conquérir des clients sur le marché de détail en fibre optique »146. 236. En effet, comme souligné dans le présent avis (voir paragraphes 139 et suivants), la démarche incitative visée à travers ces mesures dans le cadre de la fermeture du réseau cuivre est affectée de plusieurs aléas. Ainsi, l’absence de recul sur la dynamique concurrentielle qui accompagnera la fermeture du réseau cuivre et la migration de la clientèle vers les réseaux FttH, l’incertitude sur la part des lignes de cuivre qui resteront actives dans le temps (part des clients réticents pouvant aller jusqu’à 15-20 %, rythme avec lequel les opérateurs continueront à déployer les réseaux FttH, difficultés liées aux raccordements finaux, etc.) ou sur les délais réels qui s’écouleront entre la fermeture commerciale et la fermeture technique

143 Projet de décision relatif au marché 1, page 97. 144 Projet de décision relatif au marché 1, page 97. 145 Avis n° 20-A-07 précité, paragraphe 172. 146 Avis n° 20-A-07 précité, paragraphe 177. 56

du réseau (certains opérateurs évoquant une durée moyenne de 5 à 6 ans), joueront sur les incitations des opérateurs, en particulier sur l’arbitrage concernant la migration des abonnés cuivre vers la nouvelle boucle locale optique. 237. Même si Orange restera soumis à d’autres types d’obligations de qualité de service sur son réseau cuivre, tels que des engagements contractuels, la grande majorité des opérateurs tiers interrogés dans le cadre de l’instruction craint que celles-ci ne suffisent pas à limiter les risques concurrentiels, estimant insuffisamment dissuasif le niveau des pénalités contractuelles encourues. Néanmoins, l’Autorité note à cet égard que l’Arcep annonce qu’elle « restera attentive à ce que le niveau des pénalités proposées par Orange dans ses offres de référence et leurs modalités de mise en œuvre soient suffisamment dissuasifs pour garantir qu’Orange respecte ses obligations de fourniture et en particulier ses engagements de niveau de qualité de service sur la production et le service après-vente de l’accès »147. Sur cette question, l’Arcep entend imposer à Orange de préciser dans ses offres « les mécanismes d’établissement et de recouvrement des pénalités, s’appliquant à Orange et aux opérateurs tiers, proportionnés à l’importance des manquements observés, incitatifs pour l’amélioration de la qualité de service et préservant l’attractivité de ces offres »148. 238. À défaut d’évolution de son projet de décision sur la question de la qualité de service du réseau cuivre à la suite de sa fermeture commerciale, l’Autorité invite à tout le moins l’Arcep à surveiller les évolutions du marché sur ce point et à s’assurer, le cas échéant, que les engagements contractuels constituent de réelles garanties contre toute situation dans laquelle l’opérateur historique n’assurerait pas de façon suffisante la qualité de service sur son réseau cuivre, de façon à éviter de le mettre dans une position plus avantageuse que celle de ses concurrents pour vanter les mérites de ses offres FttH et ainsi conquérir des clients sur le marché de détail en fibre optique. Sur l’évolution de la tarification du dégroupage 239. Le projet de décision d’analyse du marché 1 prévoit que l’intensité de l’encadrement tarifaire du dégroupage varie selon les zones du territoire considérées, au regard de l’amélioration des conditions concurrentielles attendues pour certains accès du fait des déploiements des réseaux en fibre optique. 240. L’Arcep distingue ainsi trois types de zones, évolutives au fil du temps, appelant chacune un encadrement tarifaire propre : − les accès pour lesquels l’orientation actuelle vers les coûts est maintenue. Il s’agit des accès ne présentant pas un développement suffisant des conditions de concurrence ; − les accès présentant des évolutions des conditions concurrentielles pour lesquels le maintien de l’obligation d’orientation vers les coûts n’est plus justifié, mais pour lesquels il apparaît pertinent, compte tenu du niveau concurrentiel constaté, d’imposer une obligation de « non-excessivité ». Il s’agit, selon l’Arcep, des accès situés dans les communes dont au moins 95 % des locaux sont raccordables à l’infrastructure FttH depuis plus de neuf mois. C’est sur ces accès que porte l’engagement d’Orange exposé précédemment (paragraphes 39 à 44 ci-avant). Pour rappel, Orange a proposé, par courrier du 23 juin 2023 (annexe 8 du projet de décision), de s’engager à respecter un

147 Projet de décision relatif au marché 1, page 130. 148 Projet de décision relatif au marché 1, page 152. 57

plafond tarifaire pour les années 2024 et 2025. Cet engagement entrerait en vigueur à compter de la décision de l’Arcep le rendant contraignant ; − les accès présentant des évolutions des conditions concurrentielles pour lesquels il n’est plus justifié de maintenir une obligation de contrôle tarifaire pour l’accès à la boucle locale cuivre. Il s’agit des accès faisant partie d’une zone dont, d’une part, la fermeture commerciale est effective depuis plus de six mois, et dont, d’autre part, la fermeture technique a été annoncée par Orange et est prévue pour dans moins de deux ans. L’Arcep accompagne la levée de l’encadrement tarifaire par trois mesures complémentaires. D’une part, l’Arcep propose d’imposer à Orange de mettre en œuvre dans ces zones un test de reproductibilité tarifaire visant à garantir la reproductibilité de ses offres de détail sur cuivre DSL par ses concurrents. D’autre part, elle précise qu’Orange devra restituer aux opérateurs dégroupeurs les sommes indûment perçues lorsqu’il a bénéficié d’une levée de l’obligation de contrôle tarifaire sans qu’il procède, à l’échéance du délai de prévenance annoncé, à la fermeture technique effective du réseau cuivre dans les zones concernées par cette annonce. Enfin, l’Arcep considère qu’il n’est pas justifié qu’Orange facture de frais de résiliation de l’accès dès lors que les opérateurs clients de ses offres n’auront pas d’autre choix que de résilier leurs contrats du fait de la fermeture technique. 241. Pour rappel, la question de l’encadrement tarifaire du dégroupage considéré dans le cadre de la fermeture du réseau cuivre d’Orange a déjà fait l’objet de développements détaillés de la part de l’Autorité. L’Autorité relevait ainsi dans son avis n° 20-A-07 « qu’il existe un jeu complexe d’incitations liées au contexte de la fermeture du réseau cuivre. La hausse du tarif du dégroupage cuivre pourrait être à même d’inciter les opérateurs tiers à migrer plus rapidement leur clientèle vers l’infrastructure fibre pour éviter de leur faire subir une hausse des prix de détail sur le cuivre, notamment, dans un contexte actuel marqué par de nombreux investissements dans les réseaux à très haut débit en fibre optique. Un maintien ou une baisse du tarif du dégroupage pourrait réduire les incitations de l’opérateur historique à maintenir la qualité de service sur les lignes cuivre concernées par une fermeture commerciale, ce qui pourrait également inciter les opérateurs tiers à basculer leur clientèle vers l’infrastructure fibre, pour éviter de leur faire subir une dégradation de leur accès au réseau »149. L’Autorité avait par ailleurs relevé l’existence d’aléas, en particulier celui lié à « la maîtrise du rythme de bascule de leurs clients, dont certains se montrent réticents face aux travaux d’installation de la fibre », ces aléas « laissant craindre, en cas de hausse du tarif cuivre, la création d’une rente temporaire au profit d’Orange » pouvant créer des « déséquilibres financiers susceptibles de distordre la concurrence qui se développe sur les infrastructures en fibre optique »150. 242. Les éléments recueillis dans le cadre de l’instruction montrent que les acteurs du secteur, hormis Orange, s’inquiètent très fortement des conséquences de la modification de l’encadrement tarifaire proposée par l’Arcep. Pour l’essentiel, les critiques portent sur la deuxième zone, celle concernant les accès pour lesquels le maintien de l’obligation d’orientation vers les coûts n’est plus justifié, mais pour lesquels l’Arcep estime pertinent, compte tenu du niveau concurrentiel constaté, d’imposer une obligation de non-excessivité. 243. Au regard de ce contexte, l’évolution de l’encadrement tarifaire prévue pour ces accès conduit l’Autorité à formuler un certain nombre de remarques.

149 Avis n° 20-A-07 précité, paragraphe 172. 150 Avis n° 20-A-07 précité, paragraphe 172. 58

244. En premier lieu, le fait d’appliquer aux accès concernés un critère de couverture d’au moins 95 % de locaux raccordables à l’infrastructure FttH à la maille de la commune ne semble pas pour autant minimiser complètement le risque d’effets de levier pouvant jouer lorsqu’un même opérateur contrôle l’ensemble des réseaux d’accès sur une zone donnée. En effet, il ressort du projet de décision que la part des lignes des opérateurs alternatifs dépendants de l’infrastructure de l’opérateur historique Orange (toutes technologies confondues) reste importante. Au 4ème trimestre 2002, l’Arcep indique qu’elle se situait à près de 70 % sur l’ensemble du territoire. Sur les 13 zones identifiées par l’Arcep dans le cadre de son analyse relative à la définition géographique (voir paragraphe 55 ci-avant), 7 d’entre elles présentent même une part de lignes des opérateurs alternatifs dépendants des infrastructures d’Orange supérieure à 70 %. Dans ces zones, une augmentation du tarif du dégroupage pourrait jouer sur les mécanismes concurrentiels au profit de l’opérateur qui contrôle les infrastructures. Tel pourrait plus particulièrement être le cas en ce qui concerne les zones de déploiements d’Orange où les opérateurs sont dépendants de ses infrastructures, même s’il s’agit de communes où les locaux sont raccordables au FttH à au moins 95 %. 245. En second lieu, force est de constater que l’existence d’aléas, comme celui évoqué en 2020 par l’Autorité relatif à la maîtrise du rythme de bascule des clients cuivre vers la fibre, semble se confirmer pour le cycle à venir. Il apparaît en effet, au terme de l’instruction, que les incertitudes sur la part des lignes de cuivre qui resteront actives dans le temps (part des clients réticents pouvant aller jusqu’à 15-20%, difficultés liées aux raccordements finaux, etc.) ou découlant du plan de fermeture proposé par Orange en ce qui concerne les délais réels qui s’écouleront entre la fermeture commerciale et la fermeture technique (certains opérateurs évoquant une durée moyenne de 5 à 6 ans), apparaissent comme autant d’éléments laissant craindre, en cas de hausse du tarif cuivre, la création d’une rente au profit d’Orange. 246. Par ailleurs, l’assouplissement de l’encadrement tarifaire du dégroupage semble à tout le moins contre-intuitif par rapport aux mises en demeure adressées par l’Arcep à différents opérateurs, concernant le respect de leurs engagements de déploiements FttH, en particulier en ce qui concerne Orange151. En effet, la mise en œuvre de ce type de procédure par l’Arcep semble acter, au moins temporairement, des retards de déploiement FttH susceptibles de repousser la perspective d’une extinction rapide du réseau cuivre. 247. Or, l’Autorité note que l’Arcep envisageait, en 2020, d’augmenter le tarif du dégroupage cuivre si Orange présentait un plan « concret et ambitieux » de fermeture du réseau cuivre, « et en fonction des garanties qu’il présenterait quant à la rapidité de la transition entre cuivre et fibre ». Force est de constater que le plan de fermeture du réseau cuivre présenté depuis par Orange interroge en ce qui concerne les garanties relatives à la rapidité de la transition entre cuivre et fibre, en particulier au regard du délai de plusieurs années pouvant intervenir entre la fermeture commerciale et la fermeture technique. Les opérateurs tiers estiment à cet égard que l’augmentation du tarif du dégroupage n’incitera pas la part de clients réticents à migrer au moment de l’annonce de la fermeture commerciale du réseau, seule la fermeture technique apparaissant comme le réel élément déclencheur et incitatif. Les représentants de l’Arcep ont d’ailleurs reconnu, lors de la séance, la portée limitée du caractère incitatif attaché à l’allègement de l’encadrement tarifaire pour le prochain cycle, ce qui n’est pas de nature à garantir la préservation de la dynamique du secteur au regard des

151 Voir notamment la décision n° 2022-0573-RDPI de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse en date du 17 mars 2022 portant mise en demeure de la société Orange de se conformer à ses engagements souscrits au titre de l’article L. 33-13 du CPCE et acceptés par l’arrêté du 26 juillet 2018. 59

scenarios concurrentiels exposés par l’Autorité dans son avis de 2020 (voir paragraphe 241 ci-avant). 248. En dernier lieu, l’engagement proposé par Orange visant à respecter un plafond tarifaire pour les années 2024 et 2025 suscite des interrogations de la part des acteurs du secteur en ce qui concerne sa durée. Alors que le III de l’article L. 38-1-1 du CPCE dispose qu’après avoir procédé à l’évaluation des engagements proposés par l’opérateur concerné, l’Arcep « peut décider de rendre contraignant tout ou partie de ces engagements, pour une période donnée qui ne peut dépasser la durée proposée par l’opérateur », force est de constater que l’engagement d’Orange est de deux ans et que cette durée ne couvre pas la durée du cycle à venir qui est dorénavant de cinq ans. La durée de l’engagement proposé par Orange apparaît ainsi limitée alors qu’il s’inscrit déjà dans un contexte d’allègement tarifaire qui lui est favorable et dont les conséquences concurrentielles restent incertaines au regard des délais de mise en œuvre de son « plan de fermeture du réseau cuivre », en particulier en ce qui concerne la fermeture technique. 249. Au regard de ces éléments, l’Autorité invite l’Arcep à s’assurer que les évolutions de l’encadrement tarifaire qu’elle prévoit ne créent pas de déséquilibres, en particulier financiers, susceptibles de distordre la concurrence. 3. SUR LA MIGRATION VERS LA FIBRE 250. Au-delà de l’accompagnement de la fermeture du réseau cuivre d’Orange réalisé par l’Arcep, la limitation des risques concurrentiels liés à la bascule entre les réseaux à haut et très haut débit dépendra également, pour partie, de la vitesse avec laquelle la migration vers les réseaux FttH interviendra. En effet, plus les acteurs du marché basculeront leur clientèle vers la nouvelle infrastructure de référence, moins la dynamique concurrentielle du secteur sera susceptible d’être perturbée par la coexistence de deux infrastructures de boucle locale parallèles dont la maîtrise dépend en grande partie d’un seul acteur. Les conditions de la migration vers la fibre apparaissent ainsi comme un enjeu majeur pour les prochaines années. 251. D’une manière générale, cette migration intervient de manière naturelle pour une large partie de la clientèle. Plusieurs opérateurs soulignent ainsi qu’il existe une dynamique de migration vers la fibre qui conduit à une bascule d’environ 80 % des accès dans les cinq premières années d’existence du réseau FttH sur une zone donnée. Orange précise à cet égard que ce rythme de migration constaté est encourageant et démontre qu’une grande majorité des clients migrent vers la fibre sans contrainte, ce qui semble être confirmé par le fait que la fibre optique de bout en bout représente aujourd’hui près de 60 % du nombre total des abonnements internet en France (voir paragraphe 24 ci-avant). Néanmoins, force est de constater que cette dynamique se ralentit dans le temps, entre 15 et 20 % de clients apparaissant comme réticents au changement de technologie. Pour cette frange de la clientèle, la majorité des opérateurs considèrent que la fermeture technique est le seul signal pertinent les conduisant à se porter sur une offre fibre. 252. Dans un objectif de migration rapide du réseau haut débit vers le réseau très haut débit, la durée entre la fermeture commerciale et la fermeture technique du réseau cuivre apparaît donc comme un élément moteur pour renforcer la dynamique conduisant à la migration de l’ensemble des clients. 253. Au-delà de ce constat qui a déjà fait l’objet de différents développements dans le cadre du présent avis (voir notamment les paragraphes 140, 142 et 247 ci-avant), il ressort de l’instruction que plusieurs éléments peuvent permettre de renforcer cette dynamique et ainsi 60

répondre à l’objectif annoncé de fermeture rapide du réseau cuivre, au profit d’une animation concurrentielle accrue. 254. En premier lieu, la dynamique de migration semble conditionnée par la poursuite des déploiements des opérateurs, qui permettra d’augmenter le nombre de locaux éligibles. Les constats réalisés par l’Arcep montrent à cet égard un ralentissement des déploiements issus de l’initiative privée (en 2022, les opérateurs ont déployé environ 15 % de lignes en moins qu’en 2021), la progression des déploiements étant essentiellement portée par les réseaux d’initiative publique (RIP) sur l’année qui vient de s’écouler152. L’Autorité observe que l’Arcep attache une grande importance à cette question comme le démontrent les procédures de mises en demeure qu’elle a engagées à l’encontre de plusieurs opérateurs sur le respect de la complétude de leurs engagements de déploiement153. 255. Comme précédemment évoqué, la poursuite des déploiements dépendra également en partie d’un accès effectif aux infrastructures de génie civil, la problématique du raccordement final apparaissant à cet égard comme un enjeu important pour le cycle à venir. 256. En deuxième lieu, les opérateurs ont déclaré que la fiabilité et l’exhaustivité des bases de données liées à l’éligibilité des réseaux FttH apparaissaient comme un enjeu majeur pour le cycle à venir dans la mesure où elles conditionnent en grande partie l’efficacité de leurs déploiements. 257. En effet, les opérateurs ont souligné l’importance d’accéder à une information complète concernant le caractère éligible des locaux, puisque c’est cette information qui leur permet de commercialiser leurs offres ou, le cas échéant, de compléter leurs déploiements. Ils ont ainsi indiqué qu’il était déterminant que la base IPE, qui indique l’éligibilité à la fibre de chaque local, soit exhaustive, c’est-à-dire qu’elle contienne toutes les adresses et leur statut d’éligibilité. 258. À cet égard, les opérateurs ont notamment indiqué la présence d’erreurs dans la base IPE concernant le caractère éligible à la fibre de certains locaux et ont pointé des problèmes de concordance entre les adresses contenues dans la base IPE pour le réseau fibre, et celles contenues dans les bases historiques de la boucle locale cuivre développées par Orange au fil du temps, comme la base 42C, cette dernière apparaissant plus complète. Ils ont également signalé l’absence de précisions, dans la base IPE, sur le caractère actif ou non de la ligne concernée, ainsi que l’absence d’information sur les locaux gelés commercialement et sur lesquels seul l’opérateur d’infrastructure de la zone considérée est susceptible d’avoir une visibilité complète. Par ailleurs, la majorité des opérateurs a indiqué qu’un nombre non négligeable de locaux d’entreprises était absent de la base IPE, ce qui ne leur permet pas

152 Arcep, Observatoire haut et très haut débit : abonnements et déploiements (T1 2023), juin 2023, page 6 : les opérateurs ont déployé 4,562 millions de lignes en 2022 contre 5,46 millions de lignes en 2021. 153 Décision n° 2018-1597-RDPI de l’Arcep en date du 18 décembre 2018 portant mise en demeure de la société Orange de se conformer à son obligation en matière de complétude des réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné en dehors des zones très denses ; décision n° 2019-0631-RDPI de l’Arcep en date du 23 avril 2019 portant mise en demeure de la société SFR de se conformer à son obligation en matière de complétude des réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné en dehors des zones très denses ; décision n° 2019-0939-RDPI de l’Arcep en date du 18 juillet 2019 portant mise en demeure de la société Free Infrastructure de se conformer à ses obligations en matière de complétude des réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné en dehors des zones très denses et en matière de mise à disposition des informations à la maille de l’immeuble aux opérateurs tiers ; décision n° 2022-0573-RDPI de l’Arcep en date du 17 mars 2022 portant mise en demeure de la société Orange de se conformer à ses engagements souscrits au titre de l’article L. 33-13 du CPCE et acceptés par l’arrêté du 26 juillet 2018. 61

d’avoir une vision exhaustive de ces locaux et de leur situation d’éligibilité (voir paragraphes 275 et suivants ci-avant). 259. L’Autorité approuve le fait que l’Arcep aborde le contenu de la base d’éligibilité des réseaux FttH dans ses projets de décision. L’Autorité note en particulier que l’Arcep impose à Orange une obligation de faire ses « meilleurs efforts d’appariement entre les informations de référence des lignes cuivre concernées par les projets de fermeture et celles des lignes fibre disponibles en substitut »154. Même si plusieurs opérateurs regrettent que cette obligation reste de moyen et ne revête pas le caractère d’une obligation de résultat, la mesure envisagée par l’Arcep est de nature à améliorer la précision et l’exhaustivité des fichiers IPE. L’Autorité invite néanmoins l’Arcep à demeurer vigilante sur sa mise en œuvre, de sorte que l’existence d’informations non partagées ne confère pas un avantage indu à l’opérateur qui la détiendrait, à la fois dans la poursuite de ses déploiements, mais également dans l’identification des locaux éligibles pour commercialiser leurs offres FttH. Il est à cet égard important que tous les opérateurs se trouvent dans une situation comparable d’accès aux données pour leur permettre de poursuivre leurs déploiements et d’aborder de manière efficace la commercialisation de leurs offres de détail. Comme cela sera abordé ci-après (voir paragraphes 275 et suivants), cette question revêt une importance particulière concernant les locaux des entreprises. 260. En dernier lieu, en ce qui concerne les aspects financiers, l’Arcep a fait évoluer son projet d’analyse du marché 1 entre la première et la deuxième consultation publique. Elle prévoit désormais deux mesures supplémentaires, à savoir la gratuité de la résiliation de l’accès à sa boucle locale pour les zones où Orange a annoncé la fermeture technique et pour lesquelles « les opérateurs clients n’auront pas d’autre choix que de résilier leur contrat » et la restitution du trop-perçu par Orange lorsqu’Orange « a bénéficié d’une levée de l’obligation de contrôle tarifaire sans qu’il ne procède, à l’échéance du délai de prévenance annoncé, à la fermeture effective du réseau cuivre dans les zones concernées ». L’Autorité soutient ces amendements en ce qu’ils permettent aux opérateurs alternatifs de ne pas subir, au profit d’Orange, un surcoût dû à la fermeture du réseau cuivre. Ces mesures sont également de nature à participer à la migration vers la fibre. 4. SUR LE MARCHE ENTREPRISE 261. À titre liminaire, et ce depuis maintenant plusieurs cycles155, il ressort aussi bien des auditions des acteurs du secteur que du projet de décision d’analyse de marché que la concurrence sur le marché 2 est limitée, dans un marché entreprise décrit comme particulièrement visqueux. 262. Les analyses qualitative et quantitative menées par l’Arcep montrent qu’Orange reste l’opérateur exerçant une influence déterminante, en occupant une part d’au moins 50 %. En revanche, si Orange continue d’occuper entre 75 et 80 % du marché 2 sur le segment cuivre, tel n’est pas le cas sur le segment fibre, avec une part de marché située entre 20 et 25 %. Cette part de marché sur le segment fibre est à relativiser toutefois, puisque l’Arcep fait le constat que le réseau de boucle locale optique dédiée (BLOD), qui est l’infrastructure sous-

154 Projet de décision relatif au marché 1, page 168. 155 Voir notamment l’avis n° 17-A-09 du 5 mai 2017, paragraphes 123 à 129, et l’avis n° 20-A-07, paragraphes 32 et 33. 62

tendant les offres fibre de haute qualité, est détenu en grande majorité par Orange et semble difficile à répliquer à l’horizon de ce nouveau cycle de régulation. 263. Au vu de ces éléments, l’Arcep compte alléger la régulation applicable à l’opérateur dominant sur le marché 2, dans la lignée des cycles précédents. 264. Dans ce contexte, les acteurs auditionnés ont fait part de leur inquiétude à l’aube d’une période charnière pour le marché, pendant laquelle une réelle opportunité pour dynamiser la concurrence devrait s’ouvrir, avant que le marché ne retrouve une dynamique plus statique. a) La dynamique de changement des entreprises : migration technologique et changement d’opérateur 265. Le marché entreprise est un marché qui connaît une certaine inertie au changement, du fait de caractéristiques spécifiques des clients entreprise. Les opérateurs ont mis en avant plusieurs d’entre elles lors de leurs auditions. Les projets consistant à choisir une nouvelle technologie ou un nouvel opérateur sont des processus longs, complexes et coûteux en ressources au sein des entreprises. Les choix effectués au cours de ce processus sont donc durables, à la fois au niveau de l’opérateur sélectionné, mais également en ce qui concerne le choix d’architecture réseau qui est effectué. De ce fait, les clients entreprise s’engagent contractuellement pour une durée plus longue que les clients grand public afin de sécuriser les choix effectués et la fourniture de leur accès. Ainsi, la décision de changement d’opérateur par une entreprise est freinée par la durée d’engagement contractuel, de sorte que les entreprises ont une capacité moindre que les clients particuliers à changer d’opérateur de manière fréquente. 266. Toutefois, cette inertie du marché entreprise ne se vérifie pas en période de migration technologique. Il faut noter tout d’abord que d’après le baromètre IFOP réalisé pour Covage en juillet 2023156, 63 % des entreprises avaient déjà migré vers la fibre en avril 2023. Si cette dynamique de migration a été particulièrement forte à la suite de la crise liée à la Covid-19, avec une augmentation de 49 % des entreprises qui ont adopté la fibre (37 % en 2021 contre 55 % en 2022), la dynamique s’affaiblit sur l’année qui s’est écoulée, mais reste importante. Ce passage à la technologie fibre est d’autant plus important que l’entreprise est de grande taille, puisque seules 60 % des entreprises de moins de 5 salariés sont équipées en fibre, contre 85 % des entreprises d’au moins 100 salariés. 267. Par ailleurs, si les entreprises ont une faible propension au changement d’opérateur une fois qu’elles ont choisi de contracter avec un opérateur pour les services dont elles ont besoin, elles sont plus propices à changer d’opérateur en cas de passage du haut débit vers le très haut débit. En effet, le baromètre IFOP précité indique que seules 9 % des entreprises envisagent de changer d’opérateur, à technologie identique, dans les 12 mois qui suivent (et seulement 6 % pour les entreprises déjà passées à la fibre), alors qu’elles sont 41 % à envisager de changer d’opérateur au moment du passage à la fibre. 268. Il s’agit donc d’un moment charnière pour la dynamique concurrentielle du marché entreprise puisque, de manière inédite, les entreprises sont plus de 40 % à envisager un changement d’opérateur, et donc à faire jouer la concurrence. En ce sens, puisque la propension des entreprises à changer d’opérateur est beaucoup plus faible après avoir été équipées en fibre et que les durées d’engagement contractuel les contraignent, l’Autorité

156 Baromètre 2023 sur les usages de la fibre optique en entreprise, IFOP pour Covage-Infranum, juillet 2023. Accessible ici : https://www.covage.com/wp-content/uploads/2023/07/Presentation-Barometre-Fibre- Entreprise-3-juillet-VDEF.pdf. 63

alerte l’Arcep sur le fait que le comportement des acteurs lors de cette période aura des effets durables sur le marché. b) Les conditions de poursuite de cette dynamique concurrentielle 269. Malgré l’existence d’une dynamique importante de migration des entreprises vers les réseaux en fibre optique, des réticences subsistent parmi celles qui n’ont pas encore migré. Plusieurs raisons viennent expliquer cette réticence. 270. D’après le baromètre IFOP précité, l’une des causes principales réside dans le coût que ce basculement représente, tant au niveau du prix de l’offre fibre en elle-même que du coût engendré par le changement de réseau (mobilisation de ressources en interne, coût des éventuels changements de l’architecture réseau, coût anticipé ou réel du raccordement…). Ce frein au changement est mentionné par 58 % des entreprises qui ne souhaitent pas basculer vers la fibre, en hausse de 25 points par rapport à 2022. 271. Les entreprises expliquent également ne pas souhaiter basculer vers la fibre car elles pensent ne pas être éligibles à la fibre (33 %, en hausse de 10 points par rapport à 2022), craignent une rupture du service (11 %) ou ont contracté des offres cuivre qui ont encore une certaine durée, et dont elles ne peuvent se départir avant leur terme (9 %). 272. Par ailleurs, les entreprises ont besoin de plus de temps que les clients grand public pour migrer. Certains opérateurs ont expliqué lors de l’instruction de cet avis qu’il ne s’agit pas d’une décision unique et immédiate, mais d’un processus long, dans lequel, selon certains opérateurs, les entreprises hésitent à se lancer, dès lors que les gains du passage à la fibre qu’elles perçoivent sont faibles voire nuls, et que l’extinction technique du réseau cuivre n’est pas annoncée. De même, ces opérateurs ont indiqué qu’au vu de leur taille limitée, certaines entreprises n’opèrent pas ce basculement car les services dont elles bénéficient sur le cuivre leur suffisent, et qu’elles ne voient donc pas l’intérêt de passer à une technologie plus performante et à des débits supérieurs pour un coût plus élevé. 273. Enfin, les entreprises établies en zone rurale peuvent se situer dans des zones qui n’ont pas encore été raccordées ou qui sont difficilement raccordables. Dans ce cadre, il ressort des auditions des acteurs du secteur qu’elles peuvent craindre de devoir engager des coûts supplémentaires pour financer le raccordement de leur site. 274. Ainsi, afin d’alimenter cette dynamique de migration des entreprises, il est crucial de répondre aux craintes des entreprises, en particulier en renforçant leur éligibilité à la fibre et en garantissant l’effectivité des offres de substitution aux offres cuivre. Renforcer l’éligibilité des entreprises à la fibre 275. Pour assurer l’éligibilité des entreprises à la fibre, certains opérateurs ont précisé qu’il était important que le réseau cuivre ne soit pas fermé tant qu’un pourcentage important des entreprises n’a pas été raccordé à la fibre. Si un tel critère de fermeture existe dans le cadre du marché 2, le bas du marché entreprise (PME, indépendants, artisans, etc.) ne souscrit pas des offres de haute qualité, mais des offres « professionnelles », dont le marché de gros est régulé dans le cadre du marché 1. Selon ces opérateurs, l’ajout d’un tel critère dans les critères de fermeture du marché 1 pourrait permettre d’éviter que les entreprises soient largement surreprésentées dans les locaux non raccordés au moment de la fermeture du réseau cuivre sur une zone et donc leur permettre d’organiser leur migration. 276. À ce titre, l’un des acteurs auditionnés a cité l’exemple de la ville d’Evry, située en zone très dense, dans laquelle 93 % des locaux sont raccordables, mais où, s’il y a 7 % de locaux non 64

raccordables au total, 44 % des locaux d’activité sont non raccordables contre 6 % des locaux du marché grand public. La part de locaux non raccordables au sein des locaux d’entreprises est donc environ sept fois plus élevée qu’au sein des locaux destinés au grand public. Cet exemple montre, selon cet acteur, l’importance d’introduire un tel critère dans le choix des communes dans lesquelles le réseau cuivre est fermé techniquement, afin d’éviter que les entreprises soient négligées dans le processus de migration vers le réseau fibre. 277. En outre, les acteurs auditionnés dans le cadre de l’instruction ont indiqué que, d’un point de vue opérationnel, l’un des problèmes essentiels concernant l’éligibilité à la fibre des locaux entreprise réside dans le caractère incomplet, imprécis ou incorrect des informations présentes dans la base IPE (voir paragraphes 256 et suivants ci-avant). En effet, certains opérateurs ont signalé des problèmes de non-concordance des adresses, entre celles présentes dans la base 42C relative au réseau cuivre et celles de la base IPE pour le réseau fibre, mais également et surtout l’absence dans la base IPE des adresses d’entreprises. D’après les opérateurs, ces manques ne sont pas négligeables, puisqu’ils concernent environ 3 à 5 % de ces locaux au global, et jusqu’à 40 % sur certaines zones, pouvant aboutir à des zones d’activité entièrement absentes de la base et donc non raccordables immédiatement. 278. Enfin, l’éligibilité des entreprises à la fibre peut être freinée par les priorités fixées dans les déploiements, en particulier dans les zones RIP. Dans ces zones, les opérateurs ont indiqué que l’éligibilité des entreprises dépendait de la volonté du délégant et des priorités qu’il a établies dans les déploiements à effectuer par l’opérateur délégataire. 279. Au vu de l’ensemble de ces éléments, l’Autorité invite l’Arcep à la vigilance sur la situation d’éligibilité des entreprises, tant dans leur présence dans les bases de données accessibles aux opérateurs que dans leur représentation au sein des locaux non raccordables. Assurer l’effectivité des offres de substitution aux offres cuivre existantes 280. Afin d’alimenter la dynamique de migration des entreprises vers la fibre, les opérateurs ont souligné qu’il est déterminant qu’elles puissent souscrire des offres fibre proposant des caractéristiques au moins équivalentes à celles dont elles disposaient avec le réseau cuivre. L’existence d’offres fibre réellement substituables est essentielle pour ne pas amoindrir une concurrence déjà insuffisante, dans une période qui s’annonce charnière pour le marché entreprise. 281. Dans cette optique, les entreprises cherchent à retrouver différentes garanties et différents services, sans lesquels il est difficilement envisageable d’opérer ce basculement, car l’absence de solutions fibre de substitution au niveau national entrainera une absence d’homogénéité sur le territoire, tant au niveau des offres proposées que de la qualité de service. 282. En premier lieu, les opérateurs ont insisté sur le fait qu’ils doivent être en mesure de proposer des services équivalents sur l’infrastructure fibre, et en particulier que les entreprises accèdent à des offres adaptées à leurs besoins élevés en débit pour les plus grandes entreprises. En ce sens, certains opérateurs ont indiqué que l’absence de mention d’une offre de référence pour ce type de besoins dans le projet de décision d’analyse du marché 2 engendre un problème de réplicabilité tarifaire et technique de l’offre d’Orange pour ses concurrents, limitant ainsi la concurrence pour cette catégorie de clients sur ce type de services. 283. À cet égard, ces opérateurs ont indiqué que les critères de disponibilité d’une offre de substitution définis par l’Arcep restent vagues, et semblent centrés sur des solutions de FttH 65

pour professionnels, alors que le marché de fourniture en gros d’accès de haute qualité nécessite des offres bien plus puissantes et élaborées. 284. Par ailleurs, certaines prestations ne sont offertes que partiellement sur la fibre, ce qui renvoie à la question des déploiements. En effet, en ce qui concerne les services multi-sites, les opérateurs ont noté que certaines entreprises ne peuvent pas souscrire des offres globales pour l’ensemble de leurs sites en raison des différences de déploiement entre les différentes zones géographiques, alors que le dégroupage facilitait ce type d’offres. Dans ce cadre, ils notent que les déploiements doivent se poursuivre à une vitesse soutenue, afin d’éviter des disparités de connectivité entre les différents sites d’une même entité et que ces entreprises puissent ainsi souscrire des offres pour l’ensemble de leurs sites. 285. De plus, en ce qui concerne les prestations de multi-accès157 et la possibilité d’offrir des liens de sécurisation de bout en bout, certains opérateurs ont regretté que ces prestations ne fassent pas partie de l’offre de référence d’Orange et que ce type de prestations ne soit pas encore industrialisé, ne pouvant actuellement faire l’objet que d’offres particulières. Cela contribuerait à ralentir la migration des entreprises, puisque les opérateurs ne disposent pas d’une offre « prête à l’emploi » et sont obligés de procéder au cas par cas. 286. Plus spécifiquement au sujet des services de multi-accès, certains opérateurs auditionnés ont insisté sur la nécessité que ce type de services soit disponible rapidement à grande échelle sur le réseau fibre, car elle est adoptée par une grande partie des locaux d’activité. Dans la perspective de la fermeture du cuivre, ces opérateurs s’inquiètent qu’une prestation aussi importante que celle-ci ne puisse toujours pas être proposée par les opérateurs de manière systématique, ce qui risque de créer une absence d’homogénéité. À cet égard, un opérateur remarque que le projet de décision d’analyse du marché 2 sur lequel l’Autorité a été saisie ne contient qu’une référence à une recommandation sur le multi-accès dans le cadre de la fermeture du cuivre, mais ne propose rien de contraignant. 287. Pour pallier l’impossibilité de proposer cette prestation à grande échelle, certains opérateurs ont indiqué avoir réfléchi à se tourner vers une offre bitstream, mais que les incertitudes relatives à sa future régulation ne leur permettaient pas de s’appuyer de manière certaine sur ce type d’offres pour proposer aux entreprises des offres correspondant à leurs besoins. L’Autorité invite donc l’Arcep à s’assurer que des prestations qui étaient des standards du marché entreprise sur le cuivre deviennent rapidement disponibles sur le réseau fibre, afin de favoriser la migration des entreprises. 288. En deuxième lieu, en l’absence d’offre fibre, certains opérateurs indiquent qu’il n’existe actuellement pas d’offre de substitution qui permette aux opérateurs de proposer aux entreprises une offre en adéquation avec leurs besoins. En effet, les opérateurs indiquent que les solutions alternatives fondées sur le réseau en faisceaux hertziens ou le réseau mobile ne sont pas dimensionnées pour répondre aux besoins des clients entreprise, et que les offres fondées sur la technologie satellitaire ne sont pas encore suffisamment développées pour suppléer l’absence de fibre. Par ailleurs, l’incertitude entourant la régulation des offres bitstream n’invite pas les opérateurs à considérer cette solution comme viable. 289. Ainsi, certains opérateurs auditionnés ont indiqué qu’à défaut de disponibilité de réelles offres de substitution équivalentes aux offres cuivre (que ce soient des offres fibre ou à partir de technologies alternatives) au moment de la fermeture de ce réseau, il leur serait difficile de faire migrer leurs clients, au risque même de les perdre. Il est donc crucial que les offres fibre qui existeront sur le marché soient compatibles avec ces exigences alors que le réseau

157 Le multi-accès correspond au fait de pouvoir disposer de plusieurs accès dans un même local. 66

cuivre va progressivement s’éteindre et que la régulation du marché 3b n’est plus envisagée à ce jour. 290. En troisième lieu, les entreprises recherchent des garanties en matière de qualité de service, car la crainte d’une rupture du service est l’un des freins principaux à la migration pour les entreprises qui n’ont pas encore basculé vers la fibre, selon le baromètre IFOP précité. Les opérateurs soulignent qu’il est essentiel que ces garanties soient apportées spécifiquement pour la fibre, au vu des discours et des actualités pointant les nombreux problèmes de qualité de service sur cette infrastructure. 291. La qualité de service pour le marché entreprise doit également être considérée au niveau des infrastructures de génie civil, puisque certains opérateurs ont indiqué que les délais de réparation des morceaux de génie civil nécessaires au raccordement des entreprises devraient être compatibles avec les besoins de ce marché. 292. En dernier lieu, certains opérateurs ont relevé que le délai de prévenance applicable aux évolutions tarifaires décidées par Orange devrait être défini de telle sorte qu’il soit compatible avec les spécificités du marché et proportionné à la hausse envisagée dans les zones non régulées sur le plan tarifaire. En ce sens, ils ont estimé que le délai utilisé comme exemple par l’Arcep dans son projet de décision, à savoir un délai de prévenance de 6 mois pour une augmentation tarifaire de 15 %, n’était pas suffisant, notamment au vu de l’ampleur de l’augmentation, mais également au vu de la difficile répercussion de cette hausse sur le prix de leurs offres. 293. À ce titre, certains acteurs ont appelé l’attention de l’Autorité sur le fait que peu de temps après qu’ils ont commencé à démarcher les clients dans certaines communes, Orange a proposé à plusieurs reprises à l’Arcep d’inclure ces communes dans la zone où les tarifs ne sont plus régulés sur la fibre (ZF1). 294. L’Autorité appelle ainsi l’Arcep à garantir un délai de prévenance suffisant avant toute évolution tarifaire et à mener un contrôle étroit du basculement de ces communes vers la zone dérégulée sur le plan tarifaire pour s’assurer qu’il existe bien une concurrence effective. L’Autorité invite ainsi l’Arcep à s’assurer que les demandes de requalification d’une commune en ZF1 ne visent pas à évincer des concurrents, notamment au vu des critères de non-régression entre les zones tarifaires (voir paragraphe 134 ci-avant) qui pourraient avoir pour effet de maintenir au moins pour une durée d’un an des communes en zone de dérégulation tarifaire alors même qu’elles ne remplissent pas tous les critères définis pour entrer dans le périmètre de cette zone.

Conclusion 295. L’Autorité partage, avec l’Arcep et l’ensemble des acteurs entendus dans le cadre de l’instruction, l’appréciation selon laquelle le cycle de régulation qui s’annonce correspond à une période charnière pour l’animation concurrentielle du secteur en raison de l’extinction à 67

grande échelle du réseau cuivre, qui fait dorénavant l’objet d’un véritable « plan de fermeture » de la part d’Orange. 296. Malgré de nombreuses incertitudes liées à l’évolution du marché, découlant en particulier de l’absence de garanties sur la vitesse de fermeture du réseau cuivre (fermeture technique) et de migration de l’ensemble de la clientèle vers les réseaux de boucle locale optique, l’Arcep a décidé, pour ce nouveau cycle de régulation, de modifier différents paramètres de sa régulation, comme la durée du cycle (qui passe de trois à cinq ans) ou le nombre de marchés régulés (dérégulation possible du marché 3b). 297. Ce nouveau cycle est également le moment choisi par l’Arcep pour faire évoluer un certain nombre de mesures de régulation. Si certaines sont saluées par les opérateurs (renforcement des obligations de transparence imposées à Orange, prise en compte des questions soulevées par le raccordement final des locaux, etc.), d’autres soulèvent de fortes inquiétudes (allègement de l’encadrement tarifaire du cuivre, problème d’effectivité des offres de substitution aux offres cuivre existantes en ce qui concerne le marché entreprise, etc.) lorsqu’elles sont mises en regard de la fermeture du réseau cuivre, dont la mise en œuvre par Orange ne serait pas assez encadrée. 298. C’est parce que la période qui s’ouvre s’annonce structurante pour le secteur et que tout dysfonctionnement est de nature à affecter durablement le jeu de la concurrence que l’Autorité invite l’Arcep à prêter la plus grande vigilance aux évolutions de marché et, le cas échéant, à modifier son analyse en cours de cycle pour s’y adapter.

Délibéré sur le rapport oral de M. Franck Bertrand et M. Samuel Daudey, rapporteurs, et l’intervention de Mme Pascale Déchamps, rapporteure générale adjointe, par

Mme Irène Luc, vice-présidente, présidente de séance, M. Henri Piffaut et M. Thibaud Vergé, vice-présidents.

La chargée de séance, La présidente de séance,

Caroline Orsel Irène Luc

 Autorité de la concurrence

68

Glossaire ADSL (Asymmetric Digital Subscriber Line)

Service d’accès à l’Internet utilisant les lignes téléphoniques classiques, sur une bande de fréquence plus élevée que celle utilisée pour la téléphonie. Le débit descendant est plus élevé que le débit ascendant. Arcep (Autorité de Régulation des Communications Électroniques et des Postes et de la distribution de la presse)

Autorité administrative indépendante chargée depuis le 5 janvier 1997 de réguler les communications électroniques et postales et depuis le 18 octobre 2019 la distribution de la presse en France. ATM (Asynchronous Transfer Mode)

L’ATM est une technique de transfert asynchrone pour des communications à haut débit d’informations numérisées, organisées en paquets courts et de longueur fixe. BLOD (Boucle Locale Optique Dédiée)

Désigne les déploiements de réseaux optiques dédiés à la clientèle professionnelle, également appelés réseaux FttO (Fiber to the Office). BLOM (Boucle Locale Optique Mutualisée)

Désigne les déploiements capillaires (c’est-à-dire l’ensemble des sites clients d’une zone) d’accès optique ; il s’agit des réseaux FttH déployés dans le cadre de régulation symétrique établi par l’Arcep, qui doivent desservir à la fois les locaux d’habitation et les professionnels. CPCE (Code des Postes et des Communications Électroniques)

Code regroupant les dispositions législatives et réglementaires relatives au service postal et aux communications électroniques. DSL (Ligne numérique d’abonné)

La notion de ligne numérique d’abonné désigne une famille de techniques permettant la transmission de données numériques via les câbles cuivre du réseau de téléphonie locale. Une même ligne téléphonique permet l’utilisation simultanée de techniques DSL et d’appels téléphoniques classiques. En effet, les services DSL fonctionnent sur des bandes haute fréquence, tandis que les appels téléphoniques utilisent les basses fréquences. La technique DSL la plus répandue est l’ADSL (ou ligne numérique asymétrique d’abonné), présentant des débits différents (asymétriques) d’envoi et de réception de données. DOCSIS 3.0 (Data Over Cable Service Interface Specifications)

Norme de technologie en vigueur permettant d’utiliser les réseaux câblés pour distribuer du Très haut débit. EOI (Equivalence of Inputs)

L’équivalence des intrants (EoI) constitue l’un des moyens de mettre en œuvre une obligation de non-discrimination. Il s’agit pour les demandeurs d’accès d’être en mesure de concurrencer l’activité en aval de l’opérateur disposant d’une puissance sur le marché verticalement intégré en recourant exactement au même ensemble de produits de gros réglementés, aux mêmes tarifs et aux mêmes processus transactionnels. Une autre 69

possibilité, moins contraignante pour l’opérateur disposant d’une puissance sur le marché, consiste à appliquer le concept d’équivalence des extrants (EoO). Dans cette hypothèse, les demandeurs d’accès n’utilisent pas les mêmes systèmes et processus que l’opérateur disposant d’une puissance sur le marché. Néanmoins, les extrants de gros qui leur sont fournis doivent être comparables, en termes de fonctionnalité et de prix. FttH (Fiber to the Home)

Fibre déployée jusqu’à l’abonné. FttLA (Fiber To The Last Amplifier)

Technologie visant à réutiliser le réseau câblé existant notamment sur la partie terminale en installant de la fibre optique plus près de l’abonné tout en conservant le câble coaxial des réseaux câblés sur le dernier segment. GTR (Garantie de Temps de Rétablissement)

Disposition des contrats que les FAI destinent à la clientèle professionnelle. Cette obligation de résultat prévoit qu’en cas d’interruption, le service sera rétabli dans un délai défini (moins de 4 heures en général). IPE (Informations Préalables Enrichies)

Dans le cadre de la mutualisation des réseaux FttH, les opérateurs échangent régulièrement des fichiers IPE sur l’installation de lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique : type d’ingénierie, nombre de fibres de la colonne montante, type de zone, etc. Comme les fichiers « LME », ils contiennent l’information de l’identifiant de l’adresse ainsi que, selon les opérateurs, des informations liées à l’immeuble. IRIS (Ilots Regroupés pour l’Information Statistique)

Les IRIS sont une maille infra-communale définie par l’INSEE. Il s’agit d’une partition du territoire des communes les plus peuplées en zones stables dans le temps comptant environ 2 000 habitants. IRU (Indefeasible rights of use)

Droit d’usage irrévocable d’utiliser une partie des capacités d’un réseau, notamment en fibres optiques, sur une période de temps déterminée. Les IRU acquis bénéficient de dispositions comptables les assimilant largement à des investissements. LFO (Lien Fibre Optique)

L’offre de gros de référence LFO est l’offre de collecte d’Orange. Elle permet aux opérateurs clients de cette offre de collecter le trafic de leurs abonnés, de relier entre eux l’ensemble des NRA ou NRO qu’ils ont dégroupés et de les relier à leurs points de présence. NRA (Nœud de Raccordement d’Abonnés)

Local technique permettant de desservir les lignes des abonnés d’une zone géographique déterminée. Ces locaux sont utilisés dans le cadre du réseau cuivre. Ils seront transformés ou fermés et remplacés par les Nœuds de Raccordement Optiques (NRO) dans le cadre des déploiements en fibre optique. NRO (Nœud de Raccordement Optique)

Point de concentration d’un réseau en fibre optique où sont installés les équipements actifs permettant à un opérateur d’acheminer le signal depuis son réseau vers les abonnés. Les NRO desservent généralement plusieurs milliers de prises. 70

PBO (Point de raccordement optique)

Le PBO est le point de raccordement optique. Dans les immeubles de plusieurs logements ou locaux à usage professionnel comprenant une colonne montante, cet équipement est généralement situé dans les boitiers d’étage de la colonne montante et permet de raccorder le câblage vertical avec le câblage de branchement. Le PBO peut également se trouver à l’extérieur de l’habitat à proximité immédiate du logement ou local à usage professionnel, en général à quelques mètres ou quelques dizaines de mètres du logement ; dans ce cas, il permet de raccorder le câblage installé en amont dans le réseau avec le câble de branchement. RIP (réseaux d’initiative publique)

Réseaux de communications électroniques établis et exploités par des collectivités territoriales et leurs groupements, dans le cadre de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales. VDSL2 (Very High Speed Digital Subscriber line 2)

Technologie sur paire de cuivre permettant un débit moyen de 30 Mbit/s descendant et 5 Mbit/s montant à une distance de 700 m.

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  • Avis n 23-A-14 du 5 octobre 2023 relatif à une demande d’avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse portant sur le septième cycle d’analyse des marchés de gros du haut et du très h…
    • I. Présentation
      • A. Contexte de la saisine
        • 1. La perspective de la fermeture du réseau cuivre
        • 2. les réseaux en fibre optique deviennent les réseaux de référence sur le marché
        • 3. Un cycle de régulation marqué par différentes spécificités
          • a) Le présent cycle porte sur une durée de cinq ans
          • b) La poursuite de la régulation du marché 3b reste en suspens
            • S’agissant du premier critère relatif à la présence d’obstacles à l’entrée importants et non transitoires d’ordre structurel, juridique ou réglementaire
            • S’agissant du deuxième critère relatif à l’évolution vers une concurrence effective au cours de la période visée
            • S’agissant du troisième critère relatif à l’incapacité du droit de la concurrence à remédier à lui seul, de manière adéquate, aux défaillances du marché constatées.
          • c) L’Arcep utilise pour la première fois la procédure d’engagements prévue à l’article L. 38-1-1 du CPCE dans le cadre de la régulation des marchés à haut et très haut débit
          • d) La stabilité du cadre symétrique
      • B. Délimitation des marchés et puissance des acteurs
        • 1. Les marchés de produits et de services
        • 2. Les marchés géographiques
        • 3. La désignation de l’acteur puissant sur les marchés régulés
      • C. Les évolutions envisagées concernant les remèdes
        • 1. Les évolutions proposées sur le marché du génie civil
          • a) Obligations relatives au processus de rénovation ou de réparation du génie civil
            • Obligation générale et délais spécifiques au raccordement final
            • Obligation relative au génie civil aérien spécifique au raccordement final
            • Obligation relative au génie civil souterrain spécifique au raccordement final
            • Obligation financière spécifique au raccordement final
            • Rappel de l’obligation financière s’agissant de la rénovation des infrastructures
            • Modalités financières relatives à la réparation du génie civil
          • b) Obligations d’informations et de transparence
            • Obligation d’information dans la mise en œuvre de la fermeture du réseau cuivre
            • Délai de prévenance en cas de modification tarifaire dans le cadre de la fermeture du réseau cuivre
          • c) Obligation relative à la qualité des services
            • Obligations d’information dans le cadre de travaux ou d’opérations de maintenance
            • Obligations relatives aux pénalités pour mauvaise qualité des informations transmises
        • 2. Les évolutions proposées sur le marché de fourniture en gros d’accès local en position déterminée (marché 1)
          • a) Allègements relatifs aux demandes d’accès raisonnables
            • Levée de l’obligation d’accès à une offre de qualité de services renforcée
            • Levée de l’obligation d’une offre de migration vers le dégroupage
            • Assouplissement des demandes d’accès à la sous-boucle en bi-injection
          • b) Accompagnement de la fermeture du réseau cuivre
            • Modalités de mises en œuvre
              • Maille géographique retenue pour la fermeture du réseau cuivre
              • Ajustement du délai de prévenance pour les zones les plus avancées
              • Fermeture technique rapide à l’adresse sur la zone arrière d’un point de mutualisation FttH
              • Condition de fermeture commerciale : disponibilité d’une infrastructure FttH de substitution
              • Condition de fermeture commerciale : disponibilité d’une offre de détail sur l’ensemble des locaux raccordables
              • Limitation du report de la fermeture du réseau cuivre
            • Renforcement des obligations de transparence
              • Obligation d’information de l’Arcep sur le projet de trajectoire de fermeture
              • Obligation de transparence quant à la définition des lots
              • Obligation de communication des données pour le suivi des fermetures annoncées
              • Obligation d’information pour une évolution de la grille tarifaire de l’offre LFO
              • Transmission d’informations supplémentaires préalablement à l’accès aux services et ressources associés à l’accès dégroupé aux boucles locales de cuivre
          • c) Évolution des conditions tarifaires
            • Accès avec levée de la régulation tarifaire
            • Accès avec régulation tarifaire en non-excessivité
              • Conditions d’application
              • Modalités de révision de la liste des communes
            • Principe de reproductibilité tarifaire
            • Adaptation de la méthode de tarification au vidage du réseau cuivre
          • d) Accès passif aux boucles locales optiques
            • Allègement sur les accès passifs aux boucles locales optiques
            • Accès avec qualité renforcée
            • Levée des principes de non-discrimination pour l’accès passif aux boucles locales optiques mutualisées
          • e) Qualité des services
            • Application des pénalités de manière équitable
            • Précision sur l’appréciation de la QS en fonction des marchés
            • Ressources et services associés d’hébergement au sein des locaux d’Orange
        • 3. Les évolutions proposées sur le marché de fourniture en gros d’accès de haute qualité (marché 2)
          • a) Accompagnement de la fermeture du réseau cuivre
          • b) Allègement des obligations d’accès
            • Fin de l’obligation de raccordement des stations de base des réseaux mobiles
            • Fin de l’obligation de proposer des offres en technologie ATM
          • c) Conditions relatives aux tarifs
            • Obligations relatives aux tests de reproductibilité
            • Levée de l’obligation de tarifaire dans certaines ZC3
            • Obligation de transparence pour les hausses tarifaires dans les zones non régulées
            • Application du principe de non-régression
          • d) Allègement des obligations de qualité de service
    • II. Analyse
      • A. Remarques préalables liées aux particularités du nouveau cycle de régulation
        • 1. Sur la durée du cycle
        • 2. Sur les incertitudes entourant la régulation du marché 3b
        • 3. Sur le caractère suffisant du cadre symétrique
      • B. Sur la délimitation des marchés
        • 1. Sur la substituabilité entre le haut et très haut débit
        • 2. Concernant le maintien d’une définition séparée d’un marché du génie civil
        • 3. Sur la délimitation géographique des marchés
      • C. Sur la désignation de l’acteur puissant sur les marchés régulés
      • D. Sur la régulation envisagée
        • 1. Sur l’accès aux infrastructures de génie civil
        • 2. Sur la fermeture du réseau cuivre
          • a) Sur la transparence et la prévisibilité du plan de fermeture du réseau cuivre
          • b) Sur l’accompagnement de la fermeture du cuivre
          • c) Sur la portée incitative de certaines mesures du cadre de régulation
            • Sur l’encadrement de la qualité de service du réseau cuivre
            • Sur l’évolution de la tarification du dégroupage
        • 3. Sur la migration vers la fibre
        • 4. Sur le marché entreprise
          • a) La dynamique de changement des entreprises : migration technologique et changement d’opérateur
          • b) Les conditions de poursuite de cette dynamique concurrentielle
            • Renforcer l’éligibilité des entreprises à la fibre
            • Assurer l’effectivité des offres de substitution aux offres cuivre existantes
    • Conclusion
    • Glossaire

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ADLC, Avis 23-A-14 du 05 octobre 2023 relatif à une demande d’avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse portant sur le septième cycle d’analyse des marchés de gros du haut et du très haut débit fixes