Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15e chambre a, 20 décembre 2013, n° 13/17760

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 15e ch. a, 20 déc. 2013, n° 13/17760
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 13/17760
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Grasse, 7 août 2013, N° 2013/313
Dispositif : Sursis à statuer
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
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Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

15e Chambre A

ARRÊT DE SURSIS A STATUER

DU 20 DECEMBRE 2013

N° 2013/658

Rôle N° 13/17760

[R] [T] [F]

[C] [B] épouse [F]

C/

[W] [I]

Grosse délivrée

le :

à : Me Françoise BOULAN

Me Laurence LEVAIQUE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l’exécution du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 08 Août 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 2013/313.

APPELANTS

Monsieur [R] [T] [F]

né le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 1], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Françoise BOULAN, avocat au barreau d’AIX-EN- PROVENCE, plaidant par Me David DANA, avocat au barreau de PARIS

Madame [C] [B] épouse [F]

née le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 3], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Françoise BOULAN, avocat au barreau d’AIX-EN- PROVENCE, plaidant par Me David DANA, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Maître [W] [I] en sa qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la Société LANDSBANKI LUXEMBOURG, désignée à cette fonction par jugement prononcé par le Tribunal d’arrondissement du Luxembourg, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Laurence LEVAIQUE de la SCP ERMENEUX-CHAMPLY – LEVAIQUE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Valérie DESFORGES, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 30 Octobre 2013 en audience publique. Conformément à l’article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Olivier COLENO, Président, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier COLENO, Président (rédacteur)

Monsieur Christian COUCHET, Conseiller

Madame Françoise BEL, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Décembre 2013

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Décembre 2013,

Signé par Monsieur Olivier COLENO, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

Par le jugement d’orientation dont appel du 8 août 2013, le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Grasse a ordonné la vente forcée de l’immeuble saisi à l’encontre des époux [F] sur les poursuites du liquidateur judiciaire de la société LANDSBANKI LUXEMBOURG pour recouvrement d’une créance de 720.529,75 €, après avoir rejeté :

la demande de sursis dans l’attente de l’issue de l’instance pénale en cours à l’instruction, au motif qu’il ne s’impose pas en matière de saisie immobilière,

la demande de suspension à la suite de la saisie pénale de la créance prononcée par le juge d’instruction, aux motifs que c’est le droit mobilier incorporel constitué par la créance qui fait l’objet de la saisie, et non l’immeuble affecté à titre de sûreté réelle, que l’article 706-153 qui institue la saisie pénale est d’interprétation stricte et ne permet pas d’étendre les effets de la saisie aux accessoires de la créance, ajoutant que le juge pénal en l’état n’a pas fait droit à la saisie des hypothèques,

la demande de compensation, faute de créance liquide et exigible, et de litispendance avec l’instance au fond en cours parallèlement s’agissant d’une procédure d’exécution,

comme irrecevables les demandes de dommages-intérêts formées postérieurement à la liquidation judiciaire de LANDSBANKI au mépris du principe de suspension des poursuites,

la contestation du titre exécutoire, retenant que les époux [F] étaient informés des risques de l’opération,

les demandes de délai, faute du moindre versement,

et de vente amiable faute de la moindre justification,

L’action fait suite à la souscription auprès d’une banque luxembourgeoise filiale d’une banque islandaise, LANDSBANKI, d’un crédit hypothécaire multidevises remboursable en capital in fine ou equity release mortgage pour satisfaire à un besoin de financement.

Schématiquement, le principe de ce produit d’ingénierie financière spéculatif est d’assurer le remboursement du prêt grâce aux revenus du placement des trois quarts de la somme prêtée tandis que l’emprunteur ne supporte que la charge du paiement d’intérêts.

A la suite de la crise financière internationale, la banque a été mise en liquidation judiciaire et son liquidateur a été amené à considérer que les garanties prises en vertu du contrat ne suffisaient plus à couvrir l’encours, ce qui l’a conduit à réclamer paiement du tout avant le terme contractuel de 20 ans puis à entreprendre la réalisation des garanties.

Vu la remise faite au greffe le 29 octobre 2013 de l’assignation à jour fixe délivrée sur autorisation présidentielle du 10 septembre 2013 à la suite de l’appel interjeté le 2 septembre 2013,

Vu les dernières conclusions déposées le 30 octobre 2013 par les époux [F] tendant à l’infirmation de cette décision et demandant à la Cour :

— à titre principal de juger que la saisie pénale de la créance suspend la procédure de saisie immobilière, et de surseoir à statuer sur toutes les autres demandes y compris les dépens,

— à titre subsidiaire de juger que la procédure de saisie immobilière est nulle et d’ordonner la radiation du commandement valant saisie immobilière, aux motifs :

*de l’absence de déchéance du terme du contrat de prêt faute pour le liquidateur de justifier que la baisse de valeur des fonds donnés en garantie la justifie, le mode de calcul qu’il a employé à cette fin, avec application à un calcul purement unilatéral d’un coefficient de pondération qui n’est pas contractuel et d’une valorisation des valeurs mobilières qui n’est justifiée par aucun élément objectif alors qu’elles faisaient l’objet de placements « maison » , et la clause de déchéance du terme s’avérant ainsi purement potestative,

*de la prescription biennale de l’action, la déchéance du terme remontant au 8 juillet 2009 et le commandement ayant été délivré le 23 août 2011,

*de l’absence de titre exécutoire, que ne vaut pas l’acte notarié d’affectation hypothécaire qui ne mentionne que quelques éléments du prêt et l’annexion de l’acte sous seing privé ne conférant pas caractère authentique à celui-ci,

*de la nullité du prêt en raison du fait que seule une partie de la somme, 30%, leur a été versée,

— à titre infiniment subsidiaire d’autoriser la vente amiable du bien saisi,

Vu les dernières conclusions déposées le 30 octobre 2013 par M°[I], liquidateur de la société LANSBANKI LUXEMBOURG, tendant à la confirmation du jugement dont appel, à l’irrecevabilité et au rejet des contestations élevées,

soutenant notamment

que la demande de sursis n’a pas été présentée en première instance et est irrecevable,

que la saisie pénale n’a pas été faite de l’immeuble mais de la créance, se référant aux dispositions de l’article 706-145 et 706-146 du code de procédure pénale, d’où il résulte que seules sont interdites les procédures d’exécution sur le bien faisant l’objet de la saisie pénale et non sur les biens donnés en garantie du recouvrement de la créance,

que l’importance des fluctuations quotidiennes de la valeur des titres oblige la banque à adapter ses taux de pondération dans des laps de temps très court, souvent dans la journée, ce qui se fait sur la base d’éléments d’appréciation interne des risques, que les taux de décote sont d’usage -40% pour l’immeuble, de 10 à 100% pour les valeurs mobilières-, que la clause de déchéance n’est donc pas purement potestative,

que le moyen de prescription n’a pas été soulevé devant le premier juge et est donc irrecevable, que le droit du contrat est luxembourgeois, lequel prévoit une prescription décennale,

que l’acte d’affectation hypothécaire vaut titre exécutoire,

que la demande de vente amiable n’est pas justifiée au regard de mandats de vente anciens,

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu, sur la demande de suspension tiré de la saisie pénale de la créance de la banque par le juge d’instruction, qu’est versée aux débats une ordonnance du juge d’instruction du tribunal de grande instance de Paris du 4 septembre 2012 emportant « saisie pénale de la créance appartenant à la LANDSBANKI LUXEMBOURG sur Monsieur et Madame [F] selon contrat de prêt en date du 7 août 2007 » dans le cadre d’une information suivie contre la société LANDSBANKI LUXEMBOURG des chefs d’exercice illégal de l’activité de prestataire de services d’investissement en France et escroquerie ;

Attendu qu’il résulte des dispositions de l’article 706-145 du code de procédure pénale que nul ne peut valablement disposer des biens saisis dans le cade d’une procédure pénale hors les cas prévus par ledit code,

et des dispositions de l’article 706-158 du code de procédure pénale que s’agissant d’une saisie sans dépossession, le gardien du bien saisi -qui est soit le propriétaire soit le détenteur- a charge de l’entretien et de la conservation du bien saisi et ne peut en user que si la décision de saisie le prévoit ;

Attendu qu’en poursuivant la saisie immobilière de l’immeuble affecté à la garantie de la créance saisie et alors d’une part que son caractère échu est contesté et d’autre part que ses droits sont préservés par une inscription d’hypothèque, le créancier exerce une action sur sa créance tendant à en mobiliser le montant à son profit, et de la sorte prétend appréhender le bien saisi pour en user ou en disposer, ainsi en violation des articles précités faute d’être en mesure de se prévaloir des exceptions prévues par la loi ;

que si l’exercice d’une mesure d’exécution est par principe considéré comme un acte d’administration aux termes de l’article L111-9 du code des procédures civiles d’exécution, le juge d’instruction a expressément exclu que la société LANDSBANKI, qui ne prétend pas que la mesure d’exécution serait nécessaire à la conservation de la créance, agisse pour mobiliser sa créance et ne lui a en conséquence conféré aucun droit d’usage ;

Attendu toutefois que le commandement avait été délivré le 23 août 2011 avant que soit rendue l’ordonnance de saisie ;

qu’il en résulte que la saisie pénale n’est pas génératrice d’une irrecevabilité des poursuites engagées par la délivrance du commandement, dont la validité ne s’en trouve pas affectée, mais seulement de leur continuation ;

qu’elle en suspend donc la continuation ;

Attendu que les époux [F] sont fondés en leur principal ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Déclare l’appel recevable ;

Infirme le jugement dont appel, mais seulement en ce qu’il a débouté les époux [F] de leur demande tendant à la suspension des poursuites et, statuant à nouveau du chef infirmé,

Vu l’ordonnance rendue par le juge d’instruction du tribunal de grande instance de Paris le 4 septembre 2012 emportant saisie pénale de la créance appartenant à la LANDSBANKI LUXEMBOURG sur Monsieur et Madame [F] selon contrat de prêt en date du 7 août 2007,

Ordonne la suspension de la procédure de saisie immobilière engagée par commandement valant saisie immobilière délivré le 23 août 2011 aux époux [F] pour obtenir paiement de la somme de 645.991,96 € due en vertu de l’acte notarié du 27 août 2007, publié au service de la publicité foncière de [Localité 2] II volume 2011 S numéro 47 ;

Sursoit à statuer sur toutes les autres demandes, y compris les dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

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