Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1 7, 14 novembre 2019, n° 19/04287

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 1 7, 14 nov. 2019, n° 19/04287
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 19/04287
Importance : Inédit
Sur renvoi de : Cour de cassation, 20 février 2019, N° 16/09328
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 15 octobre 2022
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Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

SUR RENVOI DE COUR DE CASSATION

DU 14 NOVEMBRE 2019

N°2019/ 450

Rôle N° RG 19/04287 – N° Portalis DBVB-V-B7D-

BD6M5

SCI DELFIMMO

C/

SASU MARIONNAUD LAFAYETTE

Copie exécutoire délivrée le :

à :

SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON

SCP ERMENEUX-ARNAUD- CAUCHI & ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Jugement rendu le 15 Juin 2015 par le Tribunal de Grande Instance de Nice n°15/00624 (RG n°13/04372).

Saisine de la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence sur renvoi de l’arrêt n° 138 F-D rendu par la Cour de Cassation en date du Jeudi 21 Février 2019 qui a cassé et annulé, mais seulement en ce qu’il rejette la demande de la Société DELFIMMO en paiement de la somme de 235.355 Euros à titre d’indemnité d’occupation, l’arrêt n°2017/341 (RG n°16/09328) rendu le 23 Novembre 2017, entre les parties, par la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence qui avait confirmé en toutes ses dispositions le jugement n°15/00624 (RG n°13/04372) rendu le 15 Juin 2015 par le Tribunal de Grande Instance de Nice

APPELANTE

SCI DELFIMMO Immatriculée au RCS d’Antibes sous le n°428.782.684, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

assistée par Me Michel MONTAGARD, avocat au barreau de NICE, plaidant

INTIMEE

SASU MARIONNAUD LAFAYETTE immatriculée au R.C.S. de PARIS sous le numéro 348 674 169, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualité au siège social sis, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX-ARNAUD- CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

assistée par Me Pascale BANIDE, avocat au barreau de Paris,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 Septembre 2019 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Yves BENHAMOU, Président de Chambre, et Madame Carole MENDOZA, Conseillère, chargés du rapport.

Monsieur Yves BENHAMOU, Président de Chambre, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Yves BENHAMOU, Président de Chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Madame Laurence DEPARIS, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Novembre 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Novembre 2019.

Signé par Monsieur Yves BENHAMOU, Président de Chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

— FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

La société DELFIMMO est propriétaire dans le [Localité 1] d’un local commercial constituant le lot n°41 d’une surface de 146,10 m².

Selon acte sous seing privé en date du 29 septembre 2010, la société DELFIMMO a consenti à la société MARIONNAUD un bail commercial d’une durée de 9 années commençant à courir à compter du 1er octobre 2010 et moyennant un loyer de 130.000 euros HT, le versement d’un pas de porte de 820.000 euros et un dépôt de garantie de 32.500 euros.

Subséquemment de multiples décisions de justice sont intervenues à la suite de ce bail dans des instances entre les parties, étant précisé que sur appel de la société MARIONNAUD à l’encontre d’un jugement du tribunal de grande instance de Nice en date du 16 juin 2011, la cour d’appel d’Aix en Provence par arrêt en date du 2 décembre 2011, a confirmé pour partie le jugement entrepris et le réformant pour le surplus a prononcé l’annulation du bail en date du 29 septembre 2010.

Le 21 décembre 2011, la société MARIONNAUD restituait les lieux en cause à la société DELFIMMO selon procès verbal de remise des clés dressé par acte d’huissier.

Par exploit d’huissier en date du 24 juillet 2013, la société DELFIMMO a fait assigner la société MARIONNAUD afin de voir dire que cette dernière devait restituer par équivalent à la société DELFIMMO la jouissance du local, objet du bail annulé, pour la période allant du 29 septembre 2010 au 21 décembre 2011 et de la condamner en conséquence au paiement de la somme de 235.355 euros à titre d’indemnité d’occupation outre intérêts de droit ainsi que la somme de 78.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par jugement en date du 15 juin 2015, le tribunal de grande instance de Nice, a :

— débouté la SCI DELFIMMO de sa demande de condamnation au paiement de la somme de 235.355 euros à titre d’indemnité d’occupation à l’encontre de la S.A.R.L. MARIONNAUD LAFAYETTE,

— débouté la SCI DELFIMMO de sa demande de dommages et intérêts à hauteur de 78.000 euros à l’encontre de la S.A.R.L. MARIONNAUD LAFAYETTE,

— rejeté toute autre ou plus ample demande de la SCI DELFIMMO,

— condamné la SCI DELFIMMO à verser S.A.R.L. MARIONNAUD LAFAYETTE une somme de 122.828,15 euros,

— débouté la S.A.R.L. MARIONNAUD LAFAYETTE du surplus de ses demandes,

— condamné la SCI DELFIMMO à payer à la S.A.R.L. MARIONNAUD LAFAYETTE une somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 19 juin 2015, la SCI DELFIMMO a interjeté appel de cette décision.

Par arrêt en date du 23 novembre 2017, la cour d’appel d’Aix en Provence, a :

— confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions,

— rejeté toute autre demande,

— condamné la SCI DELFIMMO aux entiers dépens.

Sur pourvoi de la SCI DELFIMMO par arrêt en date du 21 février 2019, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation, a cassé l’arrêt de la cour d’appel d’Aix en Provence en date du 23 novembre 2017 mais seulement en ce qu’il rejette la demande de la société DELFIMMO en paiement de la somme de 235.355 euros à titre d’indemnité d’occupation, et renvoyé l’affaire devant la même cour autrement composée.

Par déclaration de saisine en date du 14 mars 2019, la SCI DELFIMMO a saisi ladite cour d’appel afin qu’elle statue sur renvoi après cassation.

Dans ses dernières conclusions en date du 10 septembre 2019, la SCI DELFIMMO demande à la cour de :

— infimer le jugement querellé,

Statuant à nouveau,

— dire que la société MARIONNAUD doit restituer par équivalent à la société DELFIMMO la jouissance du local objet du bail commercial annulé pour la période allant du 29 septembre 2010 au 21 décembre 2011, date de restitution de clés du local,

— dire que la société MARIONNAUD a restitué à la SCI DELFIMMO le 21 décembre 2011, un local commercial détérioré par rapport à sa valeur au 29 septembre 2010 du fait de sa non exploitation par le preneur pendant près de 15 mois,

En conséquence,

— condamner la société MARIONNAUD à payer à la SCI DELFIMMO la somme de 235.355 euros à titre d’indemnité d’occupation majorée des intérêts au taux légal à compter du 24 juillet 2013, date de l’assignation devant le tribunal de grande instance de Nice,

— condamner la société MARIONNAUD à payer à la SCI DELFIMMO la somme de 78.000 euros au titre de la dégradation du fonds de commerce par la faute de la société MARIONNAUD majorée des intérêts au taux légal à compter du 24 juillet 2013,

— ordonner la capitalisation des intérêts en application de l’article 1154 du code civil,

— condamner la société MARIONNAUD au paiement d’une indemnité de 10.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Elle indique notamment que :

' l’absence d’exploitation des locaux pendant la période considérée par la société MARIONNAUD comme l’absence d’aménagement du local répondait à des choix stratégiques du preneur pour éviter un investissement,

' toutefois cela ne signifie en aucune manière que la société MARIONNAUD n’avait pas la jouissance des lieux dans la mesure où elle était en possession des clés et d’autre part elle n’avait pas restitué les locaux dont elle avait indiscutablement la jouissance,

' la société MARIONNAUD est donc redevable à l’égard de la SCI DELFIMMO de la somme de 235.355 euros à titre d’indmenité d’occupation.

Dans ses dernières conclusions en date du 27 août 2019, la société MARIONNAUD LAFAYETTE demande notamment à la cour de débouter la société DELFIMMO de sa demande de condamnation de la société intimée au paiement d’une indemnité d’occupation pour la période allant du 29 septembre 2010 au 21 septembre 2011.

Elle indique notamment que :

' la jouissance ne peut se résumer à la seule possession des clés,

' jouir d’un local en vertu d’une convention d’occupation qu’il s’agisse d’un bail commercial ou d’un autre type de contrat, consiste à pouvoir s’y installer pour y exercer son activité,

' il n’est pas contesté que les locaux n’ont jamais été aménagés et ils étaient inexploitables dans leur état de livraison,

' il n’y a donc pas eu matériellement de jouissance du preneur,

' il convient en conséquence de débouter la société DELFIMMO de sa demande de condamnation de la société intimée au paiement d’une indemnité d’occupation pour la période allant du 29 septembre 2010 au 21 septembre 2011.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 11 septembre 2019.

— MOTIFS DE LA COUR :

— SUR L’EXACTE ETENDUE DE LA SAISINE DE LA COUR DANS LE CADRE DE LA PROCÉDURE D’APPEL SUR RENVOI APRES CASSATION :

Il convient de rappeler cette règle de principe qui veut que la censure qui s’attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation et laisse subsister les dispositions non attaquées par le pourvoi.

Dans le cas présent il convient de souligner qu’on se trouve en présence d’une cassation partielle de l’arrêt de la cour d’appel d’Aix en Provence du 23 novembre 2017 étant entendu que la Cour de cassation dans son arrêt du 21 février 2019 a indiqué expressément dans son dispositif que l’arrêt déféré était cassé 'mais seulement en ce qu’il rejette la demande de la société DELFIMMO en paiement de la somme de 235.355 euros à titre d’indemnité d’occupation'.

Dès lors au regard de cette cassation partielle les dispositions de l’arrêt de la cour d’Aix en Provence précité qui n’ont pas été cassées sont passés en force de chose jugée et sont, par suite, étrangers à la saisine de la cour.

Il est donc bien entendu que la cour saisie sur renvoi après cassation ne pourra statuer que sur la seule demande de la société DELFIMMO tendant au paiement d’une indemnité d’occupation.

— SUR LE MONTANT DE L’INDEMNITÉ D’OCCUPATION DUE A LA SOCIÉTÉ DELFIMMO :

Compte tenu du caractère rétroactif de la nullité du bail commercial en cause prononcée judiciairement, les parties doivent être remises dans l’état où elles se trouvaient avant la conclusion du contrat.

Par suite, au regard de l’annulation du bail commercial, le 'locataire’ qui ne peut pas rendre en nature la prestation qu’il a reçue, doit la restituer par équivalent en versant au bailleur une indemnité d’occupation en contrepartie de la jouissance des locaux. Ce principe résulte clairement des dispositions de l’article 1352-8 du code civil qui prévoit que la restitution d’une prestation de service a lieu en valeur.

Dans le cas présent il est constant que le preneur s’est vu remettre les clés afférentes au local commercial en cause le 29 septembre 2010 et a restitué ces clés au bailleur le 21 décembre 2011, soit près de 15 mois plus tard.

Le fait que la société MARIONNAUD ait délibérément fait le choix de ne pas exploiter le local commercial en cause entre le 29 septembre 2010 et le 21 décembre 2011 est manifestement sans aucune incidence sur le fait que pendant toute cette période, la société MARIONNAUD à l’exclusion de toute autre personne morale ou personne physique avait la jouissance des lieux de telle manière qu’elle est incontestablement redevable d’une indemnité d’occupation.

Le montant de l’indemnité d’occupation est en ce cas fixé au regard de la prestation fournie au locataire étant entendu que celle-ci est appréciée à la date à laquelle elle a été fournie ( en application des dispositions de l’article 1352-8 du code civil précité). Il résulte par ailleurs d’une jurisprudence bien établie que cette indemnité d’occupation n’est pas forcément égale au montant du loyer commercial et ce d’autant plus dans le cas présent que le bail commercial a été annulé et donc se trouve anéanti rétroactivement.

Au regard des circonstances particulières de l’espèce, et du fait que la société n’a pas eu d’activité commerciale dans les locaux en cause, il convient d’arbitrer de façon juste l’indemnité d’occupation à hauteur de la somme de 32.500 euros (soit environ 20 % du montant annuel du loyer commercial rapportée à une période de 15 mois). Il y a lieu dès lors après réformation sur ce point du jugement querellé du 15 juin 2015, de condamner la société MARIONNAUD LAFAYETTE à payer à la SCI DELFIMMO la somme de 32.500 euros à titre d’indemnité d’occupation outre intérêts au taux légal à compter du 24 juillet 2013, date de l’assignation devant le tribunal de grande instance de Nice.

— SUR LE SURPLUS DES DEMANDES :

Au regard des observations qui précédent, il y a lieu de débouter les parties du surplus de leurs demandes.

— SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE:

L’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel.

— SUR LES DÉPENS :

Il convient de condamner la société MARIONNAUD LAFAYETTE qui succombe aux entiers dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, et par mise à disposition au greffe,

— DIT que la cour au regard de la cassation partielle résultant de l’arrêt de la Cour de cassation en date du 21 février 2019 voit sa saisine limitée la seule demande de la société DELFIMMO tendant au paiement de la somme de 235.355 euros à titre d’ indemnité d’occupation,

— INFIRME le jugement querellé rendu par le tribunal de grande instance de Nice le 15 juin 2015 en ce qu’il a débouté la SCI DELFIMMO de sa demande de condamnation au paiement de la somme de 235.355 euros à titre d’indemnité d’occupation à l’encontre de la S.A.R.L. MARIONNAUD LAFAYETTE,

Statuant à nouveau sur ce seul point :

— CONDAMNE la société MARIONNAUD LAFAYETTE à payer à la SCI DELFIMMO la somme de 32.500 euros à titre d’indemnité d’occupation outre intérêts au taux légal à compter du 24 juillet 2013, date de l’assignation devant le tribunal de grande instance de Nice,

Y ajoutant,

— DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel,

— CONDAMNE la société MARIONNAUD LAFAYETTE aux entiers dépens d’appel.

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,

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