Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 26 février 2021, n° 17/14632

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4-3, 26 févr. 2021, n° 17/14632
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 17/14632
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Martigues, 22 juin 2017, N° 16/00108
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 26 FEVRIER 2021

N° 2021/ 64

RG 17/14632

N° Portalis DBVB-V-B7B-BA7WO

A Y

C/

B X

Association UNEDIC-AGS CGEA DE MARSEILLE

AGS CGEA DE LILLE -Unédic – Délégation AGS-CGEA

Copie exécutoire délivrée le 26 février 2021 à :

-Me Florence BUTIGNOT, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

- Me Jérôme FERRARO, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me C LACROIX, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MARTIGUES en date du 23 Juin 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 16/00108.

APPELANT

Maître A Y, Liquidateur judiciare de la SAS PMP

né en à , demeurant […]

Représenté par Me Florence BUTIGNOT, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Monsieur B X, né le […] à Martigues, demeurant […]

Représenté par Me Jérôme FERRARO, avocat au barreau de MARSEILLE

Association UNEDIC-AGS CGEA DE MARSEILLE, demeurant […]

Représentée par Me C LACROIX, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

AGS CGEA DE LILLE -Unédic – Délégation AGS-CGEA -, demeurant Administrations du travail et de l’emploi – […]

Représenté par Me C LACROIX, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

Les parties ont été avisées de ce que l’affaire serait jugée selon la procédure sans audience prévue par l’article 6 de l’ordonnance n°2020-1400 du 18 novembre 2020 et ne s’y sont pas opposées dans le délai de quinze jours.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Février 2021.

COMPOSITION DE LA COUR

Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

qui en ont délibéré.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Février 2021,

Signé par Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La Société PMP a été créée afin de reprendre les actifs de la Société PROFESSION MENUISIER PROVENCE qui avait fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire suivant jugement du Tribunal de Commerce de DOUAI le 27 juin 2012.

Par décision du 28 septembre 2012, un plan de cession a ainsi été arrêté comprenant la reprise des 40 contrats de travail qui étaient attachés au fonds de commerce.

La nouvelle Société PMP, spécialisée dans les travaux de menuiserie, fait partie du groupe PROFESSION MENUISIER composée dès lors de trois sociétés d’exploitation réparties sur toute la France, à savoir :

— Société PMP (Profession Menuisier Provence)

— Société PMCA (profession […]

— Société PMR (Profession Menuisier Roussillon).

Le contrat de travail à durée indéterminée de Monsieur B X a ainsi été repris par la Société PMP, étant précisé qu’il avait initialement été engagé sous contrat à durée indéterminée du 3 septembre 2004.

Au dernier état de ses fonctions, Monsieur X occupait le poste de « métreur », catégorie Employés niveau IV coefficient 270.

La convention collective applicable est la convention collective nationale des employés, techniciens et agents de maîtrise du négoce des matériaux de construction.

La Société PMP a mis en place, au dernier trimestre 2015, un projet de réorganisation de son entreprise conduisant à la mise en oeuvre d’une procédure de licenciement économique : 3 suppressions de poste étaient envisagées.

La Société PMP a convoqué les délégués du personnel aux fins d’information et de consultation sur le projet de réorganisation.

A l’issue de la réunion du 21 septembre 2015, les 4 délégués du personnel ont rendu un avis favorable au projet.

Parmi les 3 suppressions de postes envisagées, figuraient deux postes de « métreur».

Le 30 septembre 2015, une réunion de présentation est intervenue au cours de laquelle une note d’information sur le motif économique et les mesures applicables a été remise à Monsieur X.

Dans le cadre de son obligation de recherche de reclassement interne, la Société PMP a transmis à Monsieur X des propositions de postes disponibles au sein des sociétés du groupe (postes de VRP). Elle a également procédé à une recherche de reclassement externe.

Le 20 novembre 2015, en l’absence de poste de reclassement interne accepté par Monsieur X, la Société PMP a notifié, suite à un entretien préalable, son licenciement pour motif économique.

Monsieur X a adhéré au Contrat de Sécurisation Professionnelle (CSP), emportant rupture du contrat de travail le 1er décembre 2015.

Une indemnité de licenciement d’un montant de 11 494,02 € brute lui a été versée.

Le 1er février 2016, Monsieur B X a saisi le Conseil de Prud’hommes de MARTIGUES afin de réclamer :

— la somme de 60 000 € à titre « d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à titre principal » « contestation du licenciement économique »

— Subsidiairement, la somme de 60 000 € à titre de « dommages et intérêts pour violation des critères d’ordre »

— ainsi que la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Par jugement du 23 juin 2017, le Conseil de Prud’hommes MARTIGUES a statué comme suit :

— dit et juge que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse

— dit et juge que les critères de choix sont empreints d’une violation à l’égard des dispositions de l’article L1233-5 du code du travail

— condamne en conséquence la société PMP prise en la personne de son représentant légal en exercice au paiement des sommes suivantes :

—  33.288 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse

—  1.500 euros à titre d’indemnité pour frais de procédure

— ordonne l’exécution provisoire de la décision

— déboute Monsieur X du surplus de ses demandes

— déboute la Société PMP de sa demande reconventionnelle.

La Société PMP a interjeté appel du jugement le 27 juillet 2017.

Par ordonnance d’incident du 6 juillet 2018, le Conseiller de la Mise en Etat a déclaré irrecevables les conclusions déposées dans l’intérêt de Monsieur X.

Par arrêt du 20 décembre 2018, la Cour a confirmé l’ordonnance déférée en ce qu’elle a déclaré irrecevables les conclusions de Monsieur C X remises et notifiées le 25 janvier 2018, sauf à ajouter et les pièces listées au bordereau annexé et a condamné Monsieur X à payer à la Société PMP la somme de 800 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de l’incident et du déféré.

Par jugement du 3 juin 2020, le Tribunal de Commerce de DOUAI a prononcé le redressement judiciaire de la Société PMP.

La SELAS BMA ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES, prise en la personne de Maître MIQUEL a été désignée en qualité d’Administrateur Judiciaire avec une mission d’assistance, et Maître Y a été désignée en qualité de Mandataire Judiciaire.

Ils sont intervenus volontairement devant la Cour.

L’AGS CGEA a par ailleurs été appelée dans la cause.

Par jugement du 15 juillet 2020, le Tribunal de Commerce de DOUAI a toutefois converti la procédure de redressement judiciaire ouverte à l’encontre de la société PMP en liquidation judiciaire. Par même jugement, Maître Y a été désignée aux fonctions de Liquidateur Judiciaire.

Dans leurs dernières conclusions en date du 20 novembre 2020, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, la société PMP et Maître Y, ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société, demandent à la cour de :

- infirmer le jugement du Conseil de Prud’hommes de MARTIGUES du 23 juin 2017 en ce qu’il a :

— dit et jugé que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse

— dit et jugé que les critères de choix sont emprunts d’une violation à l’égard des dispositions de l’article L1233-5 du code du travail

— condamné la Société PMP au paiement des sommes suivantes :

33.288 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse

1.500 € à titre d’indemnité pour frais de procédure

— débouté la Société PMP de sa demande reconventionnelle

— mis les dépens à la charge de la Société PMP

STATUANT A NOUVEAU :

— juger que le licenciement pour motif économique de Monsieur X est justifié

— juger que la Société PMP a satisfait à son obligation de recherche de reclassement

— juger que les critères d’ordre ont été respectés

— rejeter l’intégralité des demandes de Monsieur X

— condamner Monsieur X à verser à la Société PMP et à Maître Y es qualité de liquidateur judiciaire la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— condamner Monsieur X aux entiers dépens de 1re instance et d’appel

— déclarer l’arrêt à intervenir opposables à l’UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA de LILLE et à l’UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA de MARSEILLE, lesquelles seront tenues dans la limite de leurs obligations légales.

Dans ses dernières conclusions en date du 22 septembre 2020 , auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, l’UNEDIC DÉLÉGATION AGS C.DE.A. de MARSEILLE et l’UNEDIC-AGS CGEA DE LILLE demandent à la cour de :

Vu l’appel de la société PMP S.A.S ;

Vu les jugements de redressement judiciaire du 03/06/2020 et de liquidation judiciaire du 15/04/2020 rendus par le Tribunal de commerce de DOUAI à l’encontre de la société PMP S.A.S

SUR L’INTERVENTION VOLONTAIRE DE L’UNEDIC-AGS CGEA DE LILLE

Vu l’article 554 du code de procédure civile ;

Vu les articles L. 3253-6 et suivants de code du travail ;

Vu l’assignation en intervention forcée du 15/07/2020 de l’UNEDIC-AGS CGEA DE MARSEILLE, en application des articles L. 625-3 et L. 641-14 (L.J) du code de commerce ;

Vu la constitution de l’avocat soussigné le 23/07/2020 ;

— admettre l’intervention volontaire l’UNEDIC-AGS CGEA DE LILLE compétente pour la procédure

collective de la société PMP et de mettre hors de cause l’UNEDIC-AGS CGEA DE MARSEILLE non

concernée ;

SUR LA VÉRIFICATION DES CRÉANCES

Vu les articles 6, 9, 15, 16 et 132 du code de procédure civile ;

Vu les articles L. 1233-2 et suivants du code du travail ;

— infirmer le jugement du conseil des prud’hommes de MARTIGUES du 23/06/2017, juger légitime le licenciement de M. B X et le débouter de toute demande d’appel incident ;

Subsidiairement,

Vu les art. L. 622-21 et suivants du code de commerce ;

— fixer en tant que de besoin, les dommages et intérêts dus à M. G. X dans le cadre des articles ou L.

1235-3 ou L. 1235-5 du Code du travail dans leur rédaction applicable aux faits de la cause ;

SUR LA GARANTIE AGS

Vu les articles L. 3253-6 et suivants du code du travail,

— débouter l’appelant de toute demande de garantie sur la totalité de ses créances, dès lors qu’en application de l’article L. 3253-17 du code du travail, la garantie AGS est limitée, toutes sommes et créances avancées confondues, à un ou des montants déterminés par décret (art. l’article D. 3253-5 du Code du travail), en référence au plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions du régime d’assurance chômage, et inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d’origine légale, ou d’origine conventionnelle imposées par la loi ;

— débouter l’appelant de toutes demande de paiement directement formulée contre l’AGS dès lors que l’obligation de l’UNEDIC-AGS CGEA DE MARSEILLE de faire l’avance de montant total des créances

définies aux articles L. 3253-6 et suivants du Code du travail, compte tenu du plafond applicable (articles L. 3253-17 et D. 3253-5), ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé de créances par le mandataire judiciaire, et sur justification par ce celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l’article L. 3253-19 du Code du travail ;

— débouter l’appelant de toutes demandes au titre des frais irrépétibles visés à l’article 700 du CPC, des dépens, de l’astreinte, des cotisations patronales ou résultant d’une action en responsabilité, dès lors qu’elles n’entrent pas dans le cadre de la garantie de l’UNEDIC-AGS CGEA DE MARSEILLE ;

— débouter l’appelant de toute demande accessoire au titre des intérêts dès lors que le jugement d’ouverture

de la procédure collective opère arrêt des intérêts légaux et conventionnels (art. L. 622-28 C.COM) ;

— débouter M. G. X de toute demande contraire et le condamner aux dépens ;

Vu l’article 455 du code de procédure civile ;

Vu l’ordonnance de clôture du 18 janvier 2021 ;

SUR CE

- Sur la mise hors de cause de L’AGS CGEA de Marseille et l’intervention volontaire de L’AGS CGEA de Lille

Au vu des jugements de redressement judiciaire du 03/06/2020 et de liquidation judiciaire du 15/04/2020 rendus par le Tribunal de commerce de DOUAI, il résulte que la garantie AGS de la procédure collective de la société PMP, est gérée par l’UNEDIC-CGEA DE LILLE ;

Il y a donc lieu d’accueillir son intervention volontaire, et de mettre hors de cause l’UNEDIC-AGS CGEA DE MARSEILLE ;

- Sur le licenciement économique

Selon l’article L1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.

A la liste de ces motifs économiques, s’ajoutent, de principe, la réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité.

En l’espèce, la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige énonce :

« la Société PMP a été créée pour reprendre à la barre du tribunal Ie 28 septembre 2012, la société Profession Menuisier Provence. Cette dernière avait été déclarée en redressement judiciaire par jugement du 27 juin 2012, la Société nouvelle PMP fait partie du groupe Profession Menuisier qui compte aujourd’hui trois sociétés d’exploitation, réparties sur toute la France: PMP (Profession menuisier Provence), […]).

Si le premier exercice d’activité de chacune des 3 sociétés du groupe s’est avéré plus ou moins conforme aux prévisions, grâce aux conditions avantageuses de la reprise, cette situation n’a pas résisté à al crise qui sévit dans l’activité du bâtiment, l’année 2014 s’est d’ailleurs traduite par une perte au niveau du groupe aux alentours des – 200 000 €..

La société PMP est particulièrement concernée par cette situation dans la mesure où :

Son résultat net a été négatif à fin 2014. Toutefois, le résultat s’est effondré sur le deuxième semestre car la société étant encore bénéficiaire à fin juin 2014

les commandes entre Novembre 2014 et Juillet 2015 ont été très mauvaises (nous sommes à – 10 %)

le CA qui en plus l’année dernière avait été amorti par un bon carnet de commandes début 2014 s’est de fait complètement effondré également (nous sommes à – 23 % de CA entre janvier et juillet comparativement 2014 et 2015)

Ainsi le carnet de commandes actuel est non seulement très inférieur à n-1 (lui-même en retrait par rapport à l’année d’avant), mais il est également très inférieur aux prévisions pour le budget 2014 (lequel était en retrait par rapport au premier exercice)

A fin juillet, le résultat d’exploitation de la société s’établie déjà aux alentours de – 150000 €

En réalité, la charge de travail est imprévisible et baisse de l’ordre d'1/4 à 1/3, en l’état actuel de la situation.

En d’autres termes, si aucune mesure n’est à nouveau prise, le résultat d’exploitation ne pourra que s’aggraver et PMP risquera de rencontrer de sérieuses difficultés économiques.

Après l’établissement d’un budget prévisionnel pour 2016, on voit nettement que la société, sans mesure prise arrive à la fin de l’exercice à un résultat net négatif de presque – 200000 €.

II est clair que la faible ancienneté de notre société ne lui permet pas d’assumer un déficit de l’ordre de celui auquel nous seront confrontés dès son troisième exercice. En effet, d’une part notre capital confiance serait mis à mal chez nos partenaires financiers et chez nos fournisseurs, et, d’autre part, pour compenser notre déficit, nous augmentons nos prix, nous perdrions en compétitivité par rapport aux prix de marchés et donc nous perdrions des parts de marché.

D’où la nécessaire réorganisation de l’entreprise pour sauvegarder sa compétitivité, les mesures déjà prises ne suffisent pas. Ainsi en est-il du plan de réduction de nos frais généraux complémentaires à ceux déjà effectuées l’an dernier (déménagement pour réduction des loyers, renégociation avec certains fournisseurs, non renouvellement de certains départs naturels et en particulier au niveau des contrats pros, utilisation jusqu’à « épuisement» de notre parc automobile, etc …

Pour résumer et dans un tel contexte de baisse de commandes et de baisse de marges, une réorganisation de l’entreprise s’impose.

Cette réorganisation passe par :

1. Une adaptation de notre effectif à notre charge de travail au niveau du service technique, ce qui conduit à envisager la suppression de deux postes de métreurs

2. Un déménagement de notre base technique qui permet une réorganisation générale du service technique

3. La suppression du poste de magasinier liée à cette réorganisation, combinée à la baisse importante de nos flux

A ce jour, sont donc envisagés 3 suppressions de postes.

En ce qui vous concerne,

Votre poste de métreur est concerné par cette nouvelle organisation liée au déménagement de notre base technique combiné à la baisse des flux.

C’est dans ce contexte que votre licenciement pour motif économique est donc envisagé.'

La société PMP qui se prévaut de la menace qui pèse sur la compétitivité de l’entreprise et de la nécessité de prévenir des difficultés économiques à venir entraînant la réorganisation de l’entreprise en justifie par les pièces qu’elle verse aux débats qui montrent tant au niveau de la société PMP que du secteur d’activité des entreprises du groupe auquel elle appartient, pour la société PMP :

une baisse des commandes

une baisse du chiffre d’affaires

une baisse du résultat d’exploitation et un résultat net négatif.

Ainsi , elle produit ses liasses fiscales 2013/2014/2015 permettant de constater une baisse importante

de son chiffre d’affaires :

Bilan 2014 :

— Baisse du Chiffre d’affaires de ' 30 % par rapport à 2013 (de 5 309 473 € à 3 760 464 €)

— Passage d’un bénéfice de +214 K€ à une perte de ' 7 K€

— Baisse de trésorerie de 115 K€

Bilan 2015 :

— Nouvelle baisse du Chiffre d’affaires de 15 %

— Perte de -190 K€

— Baisse de la trésorerie de 286 K€ (baisse cumulée de 401 K€)

A fin 2015, les capitaux propres sont inférieurs à la moitié du capital social.

La Société PMP verse également un tableau comparatif 2014 / 2015 des commandes et facturations qui montre que les commandes entre novembre 2014 et juillet 2015 ont baissé (- 10%).

Le carnet de commandes pour le dernier trimestre 2015 était très inférieur à celui de l’année précédente (lui-même en retrait par rapport à l’année d’avant).

Il était également très inférieur aux prévisions budgétaires (- 14 %).

L’analyse de la situation au milieu de l’exercice 2015 de la Société PMP permettait au surplus de constater que :

— le chiffre d’affaires à mai 2015 avait baissé de 32 % (540 K€) comparativement celui de mai 2014 (1 697 K€ / 1.157 K€)

— fin juillet, le résultat d’exploitation de la société s’établissait déjà aux alentours de – 150 000€.

Au niveau du secteur d’activité du groupe PROFESSION MENUISIER auquel la Société PMP appartient, le constat est le même, à savoir :

Au vu des liasses fiscales des Sociétés PMR et PMCA :

' La Société PMR :

— Baisse de 28 % du chiffre d’affaires par rapport à 2013

— Passage d’un résultat de 303 K€ à -213 K€

Au cours de l’exercice 2015, une baisse du chiffre d’affaires de 435 K€ (-30 %) a été enregistrée :

— Chiffre d’affaires de Janvier à Mai 2014 : 1.498 K€

— Chiffre d’affaires de Janvier à Mai 2015 : 1.063 K€

— Baisse du chiffre d’affaires de 15 % entre 2014 et 2015

— Perte supplémentaire de 15 K€ au niveau du résultat

' La Société PMCA :

— Baisse du Chiffre d’affaires de 22 % par rapport à 2013

— Passage d’un résultat de + 533 K€ à 56 K€

Au cours de l’exercice 2015, une baisse de 130 K€ (- 5 %) du chiffre d’affaires a été enregistrée, laissant présager un résultat négatif à la clôture de l’exercice :

— Chiffre d’affaires de janvier à mai 2014 : 2.564 K€

— Chiffre d’affaires de janvier à mai 2015 : 2.431 K€.

Dès lors, au niveau du groupe auquel la Société PMP appartient, au cours de l’exercice 2015, il y a lieu de constater l’existence :

— d’une trésorerie dégradée constatée à fin 2014 par rapport à fin 2013 de 324 K€

— d’une baisse de chiffres d’affaires à fin mai 2015 sur l’ensemble du groupe par rapport à fin mai 2014 de 1.105 K€ , soit une baisse de 20 % de l’activité .

Ces éléments nécessitaient donc une réorganisation de l’activité pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise .

La lettre de licenciement, en sus de l’élément causal, indique la nécessité, entre autres, de supprimer trois postes au sein de l’entreprise dont celui du salarié.

Ces postes ont été réellement supprimés comme cela résulte du registre d’entrée et de sortie du personnel.

En outre, il n’appartient pas à la cour de contrôler le choix effectué par l’employeur de supprimer une catégorie de postes et la suppression du poste du salarié est un choix qui relève de son seul pouvoir de direction et de gestion.

Si l’employeur avait connaissance des difficultés de l’entreprise qu’il a racheté en 2012, le premier exercice d’activité n’a pas été mauvais et les difficultés du groupe montrent qu’elles sont sans rapport avec le rachat de la société PMP mais avec le secteur d’activité , le marché étant en perte de vitesse.

Il s’en suit que le motif économique du licenciement est justifié par une cause réelle et sérieuse.

- Sur l’obligation de reclassement

En application de l’article L1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l’entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l’entreprise fait partie et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie de l’entreprise.

En application de l’article 1315 du code civil, il incombe à l’employeur de justifier des recherches par lesquelles il prétend s’être entièrement libéré de son obligation, laquelle s’impose à lui dès que le licenciement est envisagé.

Les offres de reclassement doivent être écrites, précises et individualisées.

En l’espèce, la société PMP justifie qu’elle ne disposait pas de postes disponibles en son sein et qu’elle a proposé au salarié plusieurs postes de reclassement que le salarié n’a pas accepté.

Il s’agissait de postes de VRP situés dans toute la France.

La société démontre encore qu’elle a interrogé toutes les sociétés du groupe, à savoir PMR et PMCA, la société LA FINANCIÈRE DE DISTRIBUTION n’étant qu’une société holding sans salarié.

Ce sont ces sociétés du groupe qui ont proposé les postes de VRP que le salarié a refusé.

Allant au-delà de ses obligations, la société PMP a recherché un reclassement externe en interrogeant la société FABRIPLAST et la commission paritaire nationale de l’emploi.

Cette société tierce a proposé un poste de métreur qui a été soumis au salarié qui ne l’a pas plus accepté.

Il s’en suit que l’employeur justifie avoir complètement et loyalement rempli son obligation de reclassement.

Le licenciement prononcé est donc fondé sur une cause réelle et sérieuse.

- Sur les critères d’ordre

L’article L 1233-5 du code du travail dispose que :

« Lorsque l’employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l’absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements, après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel.

Ces critères prennent notamment en compte :

1° Les charges de famille, en particulier celles des parents isolés ;

2° L’ancienneté de service dans l’établissement ou l’entreprise ;

3° La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés

4° Les qualités professionnelles appréciées par catégorie.

L’employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l’ensemble des autres critères prévus au présent article »

De principe, l’employeur peut compléter cette liste par d’autres critères à condition d’avoir pris en compte chacun des critères légaux.

Il peut aussi, après avoir pris en compte l’ensemble des critères légaux, privilégier un ou plusieurs d’entre eux.

En l’espèce, les critères retenus par l’employeur ont été portés à la connaissance des représentants du personnel, à savoir en l’espèce l’application des seuls critères légaux.

A l’unanimité, ils ont rendu un avis favorable.

Le projet de réorganisation impliquait notamment la suppression de deux postes de métreurs.

Trois personnes étaient concernées par la catégorie professionnelle « métreur ».

Monsieur X et Monsieur Z ont été ceux qui ont obtenu le moins de points.

Il résulte du tableau communiqué que l’employeur n’a pas pris en considération un seul critère, à savoir la qualification professionnelle mais que les critères légaux ont été pris en considération.

En outre, seuls les métreurs devaient être pris en considération et non l’ensemble des ETAM , notion générale qui regroupe diverses catégories professionnelles.

En conséquence, les critères d’ordre ont bien été respectés.

- Sur les autres demandes

M. X qui succombe supportera les entiers dépens.

L’équité ne commande pas d’allouer à la société PMP une somme au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, en matière prud’homale,

Accueille l’intervention volontaire l’UNEDIC-AGS CGEA DE LILLE compétente pour la procédure collective de la société PMP et MET HORS DE CAUSE l’UNEDIC-AGS CGEA DE MARSEILLE.

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a débouté la Société PMP de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Statuant à nouveau, y ajoutant,

Dit que le licenciement pour motif économique de Monsieur X est fondé sur une cause réelle et sérieuse

Dit que la Société PMP a satisfait à son obligation de recherche de reclassement

Dit que les critères d’ordre ont été respectés

Déboute Monsieur X de toutes ses demandes.

Déboute la Société PMP et à Maître Y es qualité de liquidateur judiciaire de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Condamne Monsieur X aux entiers dépens de 1re instance et d’appel

Déclare la présente décision opposable à l’UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA de LILLE.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 26 février 2021, n° 17/14632