Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-9, 10 mars 2022, n° 21/01408

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 1-9, 10 mars 2022, n° 21/01408
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 21/01408
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Marseille, JEX, 13 janvier 2021, N° 20/07981
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9

ARRÊT AU FOND

DU 10 MARS 2022

N° 2022/213

Rôle N° RG 21/01408 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BG3UB

S.A.S. CELLNEX FRANCE


C/

[…]


Copie exécutoire délivrée

le :

à :


Me Joseph MAGNAN


Me Yann REDDING

Décision déférée à la Cour :


Jugement du Juge de l’exécution de MARSEILLE en date du 14 Janvier 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 20/07981.

APPELANTE

S.A.S. CELLNEX FRANCE

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège […], ayant un établissement fermé sis 1 avenue de la Cristallerie 92310 SEVRES,

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, substitué par Me Alice DINAHET, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Emmanuelle BON-JULIEN, avocat au barreau de RENNES

INTIMEE

[…],

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social 8, […] représentée et plaidant par Me Yann REDDING, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR


L’affaire a été débattue le 19 Janvier 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Sophie TARIN-TESTOT, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.


La Cour était composée de :

Madame Evelyne THOMASSIN, Président

Madame Pascale POCHIC, Conseiller

Madame Sophie TARIN-TESTOT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.


Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Mars 2022.

ARRÊT


Contradictoire,


Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Mars 2022,


Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES


La société civile immobilière Saint Jean (ci-après SCI Saint Jean) a conclu un contrat de bail le 13 octobre 2003, portant sur un emplacement dépendant d’un immeuble dont elle est propriétaire situé […], au profit de la société Bouygues Telecom.


La société Bouygues Telecom a dans le cadre d’un partenariat conclu au cours de l’année 2017, avec la société Cellnex France, cédé au profit de celle-ci des droits et obligations issus de la convention susvisée, ainsi que l’ensemble des infrastructures implantées sur le site, notamment destinées au support d’antennes de télécommunication.


La SCI Saint Jean en a été informée par lettre recommandée en date du 17 mai 2017.


Par courrier du 21 juillet 2017, la SCI Saint Jean a fait part à la société Cellnex France de la résiliation du bail à compter du 13 octobre 2018.


Constatant le maintien dans les lieux de la société Cellnex France, en dépit d’une mise en demeure d’enlever les équipements litigieux, adressée par courrier du 19 décembre 2018, la SCI Saint Jean l’a assignée le 04 février 2019 devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Marseille afin, notamment, qu’il constate la résiliation du bail au 13 octobre 2018, l’occupation sans droit ni titre de la défenderesse et qu’elle soit condamnée sous astreinte à procéder au retrait de ses équipements et à remettre les emplacements mis à disposition en leur état initial.


Lors de cette instance, la société Cellnex France a formé une demande de sursis à statuer dans l’attente d’une réponse de la municipalité marseillaise à la demande de servitude adressée le 08 mars 2019 par la société Bouygues Telecom aux fins d’être autorisée à exploiter les fréquences et réseaux radioélectriques sur l’emplacement, et sollicité, subsidiairement des délais.


Selon ordonnance de référé du 10 mai 2019 le président du tribunal de grande instance de Marseille a :


- rejeté la demande de sursis à statuer,


- constaté la résiliation du bail au 13 octobre 2018 et dit que la société Cellnex France est occupante sans droit ni titre des emplacements dans l’immeuble appartenant à la SCI Saint Jean,


- condamné la société Cellnex France à payer à la SCI Saint Jean une indemnité d’occupation mensuelle de 1500 euros hors taxes,


- ordonné à la société Cellnex France de procéder au démontage et au retrait effectif et définitif de ses équipements et à remettre les emplacements mis à disposition en leur état primitif sous astreinte de 1000 euros par jour de retard, à compter de la signification de l’ordonnance,


- débouté la société Cellnex France de sa demande tendant à l’octroi de délais pour la libération des emplacements,


- débouté la SCI Saint Jean de sa demande en paiement d’une somme provisionnelle de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts,


- condamné la société Cellnex France à payer à la SCI Saint Jean la somme de 700 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.


Cette décision a été signifiée le 21 mai 2019. La société Cellnex France en a interjeté appel par déclaration au greffe en date du 28 mai 2019.


Par arrêt du 14 mai 2020, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a confirmé l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, excepté sur le point de départ de l’astreinte destinée à garantir l’exécution du démontage et de la remise en état imposés à la société Cellnex France, et statuant à nouveau a :


- Dit que l’obligation faite à la société Cellnex France, d’une part, de démonter et retirer effectivement et définitivement les équipements et, d’autre part, de remettre les lieux en leur état primitif, est assortie d’une astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de deux mois après la signification de l’ordonnance du 10 mai 2019.


Cette décision a été signifiée à la société Cellnex France le 09 juillet 2020. Elle fait l’objet d’un pourvoi initié le 28 août 2020.


La SCI Saint Jean a, par acte d’huissier du 08 septembre 2020, fait citer la société Cellnex France devant le juge de l’exécution en liquidation de l’astreinte.


Par jugement du 14 janvier 2021, dont appel, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Marseille a :
- liquidé l’astreinte prononcée à la somme de 310 000 euros,


- condamné la société Cellnex France à payer cette somme à la SCI Saint Jean,


- condamné la société Cellnex France aux dépens et à verser 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.


Pour l’essentiel le juge de l’exécution retient que les travaux ont été réalisés le 09 septembre 2020, que l’astreinte a couru pour la période du 21 juillet 2019 au 09 septembre 2020, en tenant compte toutefois de la période dite d’urgence sanitaire du 12 mars 2020 au 24 juin 2020, pendant laquelle le cours de l’astreinte a été suspendu, que la société Cellnex France ne justifie pas avoir rencontré de difficultés techniques pour démonter l’installation litigieuse et remettre les lieux en leur état primitif.


Le jugement a été notifié à la société Cellnex France le 26 janvier 2021 et celle-ci en a interjeté appel par déclaration au greffe en date du 29 janvier 2021.


Dans ses conclusions enregistrées par RPVA le 16 avril 2021 auxquelles il convient de se référer, la société Cellnex France demande à la cour, au visa des articles 1er et 4 de l’ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020, de l’article 4 de la loi n°2020 du 23 mars 2020, de l’article L.131-4 du code des procédures civiles d’exécution de :


- la déclarer recevable en son appel,


- infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,


- débouter la SCI Saint Jean de toutes ses demandes,


- subsidiairement : ramener à l’euro symbolique, ou à tout le moins à de plus justes proportions la liquidation de l’astreinte,


- condamner la SCI Saint Jean aux dépens d’instance et d’appel et à lui verser 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.


Pour l’essentiel l’appelante expose que :


- elle est un opérateur de communications électroniques qui gère des sites de réseau mobile en partenariat avec les opérateurs de téléphonie mobile,


- Bouygues Telecom est soumis pour le déploiement de son réseau de téléphonie mobile, à des engagements contraignants régulièrement vérifiés par des autorités de contrôle, parmi lesquels celui de l’obligation de bonne couverture, voix et SMS,


- préalablement à une implantation il est nécessaire d’obtenir la signature d’un bail pour l’installation d’infrastructures passives et actives, d’obtenir une autorisation d’urbanisme purgée de tout recours,


- l’opposition pour des questions sanitaires à ce type de projet rend difficile la possibilité d’implantation,


- le site propriété de la SCI Saint Jean lui a été cédé par la société Bouyges Telecom afin qu’elle assure à son profit la mise à disposition des équipements nécessaires à l’exploitation des fréquences et réseaux radioélectriques émis par les antennes demeurant la propriété de Bouygues Télécom,


- deux mois après cette cession, elle s’est vu notifier la résiliation du bail,
- elle a recherché dans le même secteur, un site de remplacement susceptible de recevoir ses équipements et les antennes de Bouygues Telecom,


- elle ne pouvait, sauf à priver la collectivité des usagers abonnés à Bouygues Télécom, procéder à la neutralisation et au démontage des installations disposées sur le toit terrasse de la SCI Saint Jean avant de trouver un nouvel emplacement dans le secteur, ce qui supposait la conclusion d’un nouveau bail, la constitution d’un dossier préalable pour obtenir une autorisation d’urbanisme, le dépôt d’un dossier d’information en mairie, la réalisation des prestations techniques correspondantes,


- elle a engagé ces démarches au cours de l’instance de référé pour finalement n’aboutir, après de nombreuses difficultés techniques, juridiques, et liées à la crise sanitaire, au démontage des installations litigieuses dans la semaine du 17 au 24 août 2020, constaté au contradictoire de la SCI Saint Jean selon procès-verbal d’huissier le 09 septembre 2020,


- elle ne conteste pas que le cours de l’astreinte se calcule à compter du 21 juillet 2019 pour s’achever le 09 septembre 2020, hors période de suspension du 12 mars au 24 juin 2020, liée à la crise sanitaire,


- le juge de l’exécution a commis une erreur dans l’appréciation des faits en ne prenant pas en considération les difficultés objectives auxquelles elle a été confrontée pour exécuter son obligation de faire à compter du 10 mai 2019,


- la cour d’appel a d’ailleurs retenu dans son arrêt que 'le démontage des installations concernées requiert effectivement et indéniablement des travaux, tout comme la réinstallation sur un nouveau site l’induit également',


- elle était soumise à deux obligations contradictoires : celle de démonter les installations, celle de faire perdurer les émissions d’ondes électromagnétiques dès lors que son cocontractant ne l’avait pas déliée de son obligation d’émettre à partir de ses antennes propres,


- elle était donc contrainte d’engager toutes les actions nécessaires à la mise en place d’un site de remplacement, mais sanc cesser unilatéralement le signal des antennes sur l’immeuble de la SCI Saint Jean,


- le juge de l’exécution a pris en considération à tort, l’absence de preuve qu’un site de substitution ne pouvait pas être prévu,


- la société Cellnex France n’a eu de cesse d’entreprendre toute diligence pour assurer le transfert de ses installations, se heurtant à l’opposition injustifiée de la ville de Marseille,


- elle démontre que loin de faire preuve d’une quelconque inertie elle n’a eu de cesse de mettre en oeuvre tous moyens lui permettant de satisfaire aussi rapidement que possible à l’injonction du juge des référés, l’ensemble de ces diligences démontrant sa bonne volonté.


Dans ses conclusions enregistrées par RPVA le 14 mai 2021auxquelles il convient de se référer, la SCI Saint Jean demande à la cour, au visa des articles L.131-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution de :


- confirmer la décision entreprise en l’ensemble de ses dispositions,


- y ajoutant débouter la société Cellnex France de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,


- condamner la société Cellnex France à lui verser la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens.
L’intimée, après un rappel de l’historique des faits et des procédures, fait valoir que :


- la société Cellnex ne conteste pas l’étendue de la période à retenir s’agissant du cours de l’astreinte, soit selon ses calculs 310 jours,


- l’astreinte doit être liquidée à hauteur de 310 000 euros,


- l’obligation pesant sur la société Cellnex était de démonter et de retirer les équipements, puis de remettre le site en son état primitif,


- informée de la résiliation du bail depuis le 31 juillet 2017, il lui a fallu plus de trois années pour démanteler les équipements,


- les difficultés alléguées mais non fondées pour trouver un site de substitution étaient parfaitement connues de la cour lorsqu’elle a statué,


- ces difficultés ne peuvent justifier un tel retard dans l’exécution par Cellnex France de ses obligations,


- ces difficultés sont antérieures au prononcé de l’astreinte, connues des juridictions qui l’ont prononcée, or le comportement du débiteur pris en considération par le juge liquidateur doit s’apprécier à compter du prononcé du jugement fixant l’injonction,


- une juridiction ne peut liquider une astreinte à une certaine somme en se fondant sur des faits antérieurs à la décision l’ayant prononcée (cass civ 2nième 17 mars 216 n°15-13.122),


- la société Cellnex ne justifie pas avoir rencontré des difficultés techniques pour démonter l’installation litigieuse et remettre les lieux en leur état primitif,


- l’opposition de la mairie pour trouver un nouveau site est indifférente,


- il appartenait à la société Cellnex d’anticiper les difficultés éventuelles,


- depuis le début du litige la société Cellnex tente de faire croire que le démontage de ses équipements nécessiterait impérativement un site de substitution sauf à priver les abonnés à Bouygues Télécom de toute source de télécommunication électronique sur le secteur, argument présenté devant la cour qui l’a expressément écarté,


- la société Cellnex a fait le choix de ne respecter ni ses engagements contractuels, ni les décisions judiciaires rendues afin d’éviter le paiement de pénalités desquelles elle est redevable envers Bouygues Telecom, ce qu’elle admet dans ses écritures évoquant le fait que la société Bouygues Télécom ne l’avait pas délié de son obligation d’émettre à partir de ses antennes propres,


L’ordonnance de clôture est intervenue le 21 décembre 2021.

MOTIVATION DE LA DÉCISION


Il résulte de l’article L.131-4 du Code des procédures civiles d’exécution que 'le montant de l’astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter'.


Les parties s’accordent sur l’étendue de la période à retenir s’agissant du cours de l’astreinte, soit du 21 juillet 2019 au 09 septembre 2020, hors période de suspension liée au contexte sanitaire Covid 19, du 12 mars au 24 juin 2020, soit selon leur calcul, 310 jours d’astreinte, représentant une somme de 310 000 euros.


La société Cellnex admet qu’elle n’a exécuté les obligations lui incombant que le 09 septembre 2020.


Elle fait cependant état de difficultés techniques et juridiques rencontrées au cours de la période précitée de nature à infirmer la décision entreprise, subsidiairement, à liquider l’astreinte à l’euro symbolique ou à de plus justes proportions.


Ce faisant, elle confond les obligations lui incombant du fait de décisions judiciaires et celles auxquelles elle s’est trouvée soumise de par sa relation contractuelle avec l’opérateur téléphonique Bouygues Telecom.


En effet selon l’ordonnance de référé du président du tribunal de grande instance de Marseille en date du 10 mai 2019, confirmée de ce chef par l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 14 mai 2020, la société Cellnex France était tenue, sous astreinte, de démonter et retirer effectivement et définitivement les équipements, de remettre les lieux en leur état primitif.


Or, l’ensemble des difficultés dont la société Cellnex France fait état n’est pas lié à l’accomplissement des obligations précitées, lesquelles ont été réalisées selon ses propres conclusions entre le 17 et le 24 août 2020 pour faire l’objet d’un procès-verbal de constat contradictoire le 09 septembre 2020, mais à ses recherches entreprises pour trouver un site de remplacement à proximité et ainsi maintenir la couverture réseau adéquate aux abonnés de téléphonie mobile de Bouygues Télécom, conformément à son engagement auprès de cet opérateur.


L’appelante le reconnaît expressément, exposant qu’elle était soumise à 'deux obligations contradictoires', l’une judiciaire : celle de démonter les installations, l’autre contractuelle : celle de faire 'perdurer l’émission des ondes électromagnétiques des antennes dès lors que son cocontractant, la société Bouygues Télécom, ne l’avait pas déliée de son obligation d’émettre à partir de ses antennes propres.'


De surcroît, les obstacles techniques et juridiques listés préalablement par la société Cellnex France dans une étude d’impact, tenant à la conclusion d’un nouveau bail sur un immeuble à proximité pour assurer le même service, à la constitution d’un dossier de déclaration préalable pour obtenir une autorisation d’urbanisme, au dépôt d’un dossier d’information en mairie, à la réalisation des prestations techniques correspondantes ont été portés à la connaissance des juridictions qui ont prononcé l’astreinte.


La cour d’appel d’Aix-en-Provence dans son arrêt confirmatif précité, a estimé que les circonstances relatives au démontage des installations n’étaient pas de nature à autoriser la société Cellnex France à se soustraire à ses obligations à l’égard du bailleur et à lui permettre de maintenir ses installations sur le toit-terrasse de l’immeuble de la SCI Saint Jean.


Elle statue en ses termes : 'la société Cellnex France invoque l’atteinte que porterait à l’intérêt collectif sa condamnation à enlever les installations et à remettre les lieux en l’état, avant qu’une solution de remplacement ne soit matériellement et juridiquement possible. D’une part pourtant, il ne peut s’agir ici de la défense d’un intérêt collectif, au sens d’intérêt général, dans la mesure où ne seraient potentiellement concernés que certains abonnés auprès de la SA Bouygues Télécom et pour une partie des services proposés, donc tout au plus une collectivité réduite de personnes. Au contraire, ce sont les dispositions contractuelles librement consenties qui ne sont pas respectées et l’intérêt privé de la SCI Saint Jean qui se trouve affecté, celle-ci expliquant avoir pour locataire principal un EHPAD qui ne souhaite plus d’antennes de téléphonie mobile sur le bien loué. D’autre part, il ressort de la seule étude d’impact émanant de la SA Bouygues Télécom que l’enlèvement des équipements sans solution immédiate de remplacement aurait pour conséquences 'une dégradation de la couverture 4G sur les axes de transport et une perte de service pour 760 habitants'. Dans l’étude d’impact produite par la SA Bouygues Télécom, document interne et dont l’impartialité ne peut être acquise, comprenant des éléments supplémentaires à la pièce versée par l’appelante, il est fait état des mêmes conséquences pour la 3G. Il existe donc une portée limitée et une incidence essentiellement commerciale d’ampleur modérée pour la SASU Cellnex France. Dès lors, il ne peut être considéré que l’enlèvement et la remise en état sollicités auraient pour conséquence de porter une atteinte excessive aux intérêts de la SASU Cellnex France. La condamnation de l’appelante est donc parfaitement fondée et justifiée, de sorte que l’ordonnance entreprise doit être confirmée de ce chef.'.


C’est donc en parfaite connaissance des problématiques liées à l’enlèvement des équipements se trouvant sur le toit-terrasse de la SCI Saint Jean, que la cour a confirmé la condamnation de la société Cellnex France à retirer les équipements litigieux et à remettre les lieux en l’état, lui accordant seulement du fait des travaux de démontage, un délai supplémentaire de deux mois pour l’enlèvement à proprement parler des équipements.


La présente cour statuant avec les pouvoirs le juge de l’exécution ne peut modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, de sorte qu’elle ne peut dans son appréciation de l’exécution par le débiteur des injonctions judiciaires lui incombant, tenir compte d’obligations contractuelles qui ont été écartées par le juge qui a prononcé l’astreinte.


La société Cellnex France ne justifie pas avoir rencontré de difficultés pour démonter l’installation litigieuse et remettre les lieux en leur état primitif.


Il s’ensuit la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a liquidé l’astreinte à son montant nominal.


Succombant en son appel la société Cellnex France sera tenue aux entiers dépens et condamnée à verser la somme de 3000 euros à la SCI Saint Jean en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS


La cour statuant après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe,


CONFIRME le jugement entrepris en l’ensemble de ses dispositions déférées,


Y ajoutant,


DÉBOUTE la société Cellnex France de ses demandes,


CONDAMNE la société Cellnex France à verser à la SCI Saint Jean la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,


CONDAMNE la société Cellnex France aux dépens.


LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
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