Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 9 novembre 2021, n° 21/00052

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Amiens, 2e protection soc., 9 nov. 2021, n° 21/00052
Juridiction : Cour d'appel d'Amiens
Numéro(s) : 21/00052
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Lille, 31 janvier 2018
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

ARRET

N° 1399

CPAM LILLE-DOUAI

C/

Société TEMPORIS LILLE

VC

COUR D’APPEL D’AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 09 NOVEMBRE 2021

*************************************************************

N° RG 21/00052 – N° Portalis DBV4-V-B7F-H6LT

JUGEMENT DU TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE LILLE EN DATE DU 01 février 2018

ARRÊT DE LA 2IÈME CHAMBRE DE LA PROTECTION SOCIALE DE LA COUR D’APPEL D’AMIENS EN DATE DU 22 Janvier 2020

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

La CPAM LILLE-DOUAI, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représentée et plaidant par Mme Anne-Sophie BRUDER dûment mandatée

ET :

INTIMEE

La Société SGV ( Enseigne TEMPORIS LILLE), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

( AT : M. Z X)

[…]

[…]

Représentée et plaidant par Me Aude TONDRIAUX-GAUTIER avocat au barreau d’AMIENS substituant Me Virginie GAY-JACQUET, avocat au barreau de BORDEAUX

DEBATS :

A l’audience publique du 21 Septembre 2021 devant Mme A B, Conseiller, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 09 Novembre 2021.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme C-D E

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme A B en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Madame Jocelyne RUBANTEL, Président,

Mme Chantal MANTION, Président,

et Mme A B, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 09 Novembre 2021, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme C-D E, Greffier.

*

* *

DECISION

Le 9 mars 2015, M. Z X, salarié intérimaire de la société SGV (TEMPORIS LILLE) en qualité de man’uvre, a été victime d’un accident du travail dans les circonstances suivantes (selon la déclaration du travail établie le 10 mars 2015) : « M. X portait une cheminée de broyeur pour la mettre en hauteur afin de la peindre, M. X a ressenti une douleur dans l’épaule gauche quand il a porté la cheminée ». Le certificat médical initial en date du 9 mars 2015 mentionne : 'douleur brutale bicipital gauche après port d’une charge lourde. Impotence fonctionnelle'.

Le 15 mars 2015, la caisse primaire d’assurance maladie de Lille-Douai (ci-après la CPAM) a notifié à la société SGV (TEMPORIS LILLE) la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l’accident du 9 mars 2015.

La société SGV (TEMPORIS LILLE) a saisi la commission de recours amiable de la CPAM aux fins d’inopposabilité des soins et arrêts de travail en raison de leur durée excessive.

Statuant sur le recours de l’employeur contre la décision de rejet de la commission, le tribunal des

affaires de sécurité sociale de Lille a, par jugement du 1er février 2018 :

— dit qu’à compter du 2 juillet 2015, les soins et arrêts de travail prescrits à Monsieur Z X au titre de son accident du travail du 9 mars 2015 et pris en charge par la Caisse d’assurance maladie de LILLE-DOUAI sont inopposables à la société TEMPORIS LILLE,

— invité la Caisse d’assurance maladie de LILLE-DOUAI à donner des informations utiles à la CARSAT compétente pour la rectification du taux de cotisations ATMP de la société TEMPORIS LILLE.

Par courrier recommandé expédié le 23 juillet 2018, la CPAM a interjeté appel du jugement qui porte mention d’une notification expédiée le 22 juin 2018.

En application des articles 12 de la loi du 18 novembre 2016, L142-2 du code de la sécurité sociale, 114 de la loi du 18 novembre 2016, 16 du décret n°2018-928 du 29 octobre 2018 relatif au contentieux de la sécurité sociale et de l’aide sociale ainsi que du décret n° 2018-772 du 4 septembre 2018 désignant les tribunaux de grande instance et cours d’appel compétents en matière de contentieux général et technique de la sécurité sociale et d’admission à l’aide sociale, le dossier de la présente procédure a été transféré par le greffe de la cour d’appel de Douai à la présente cour.

Les parties ont été convoquées à l’audience du 16 décembre 2019 et par un arrêt du 22 janvier 2020, la cour d’appel d’Amiens a ordonné la radiation de l’affaire du rôle. Celle-ci a fait l’objet d’une remise au rôle le 6 janvier 2021.

A l’audience du 21 septembre 202, par conclusions communiquées au greffe le 17 septembre 2021 soutenues oralement, la CPAM demande à la cour de :

— infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le TASS de Lille le 1er février 2018,

— dire que le TASS de Lille était mal-fondé à déclarer inopposable à la société SGV TEMPORIS, la durée des soins et arrêts de travail relatifs à l’accident du travail du 9 mars 2015 sans rechercher si la caisse n’établissait pas, par les pièces qu’elle produisait, si les soins et arrêts de travail n’étaient pas en relation de causalité avec l’accident du travail,

— déclarer opposable à l’employeur, la durée des soins et arrêts de travail relatifs à l’accident du travail du 9 mars 2015 dont a été victime M. X

— Si la Cour s’estimait insuffisamment informée, ordonner la mise en 'uvre d’une mesure d’expertise sur l’imputabilité des soins et arrêts au fait accidentel.

Par conclusions communiquées au greffe le 17 septembre 2021 et soutenues oralement à l’audience, la société SGV (enseigne TEMPORIS LILLE) demande à la cour de :

— à titre principal, juger que la CPAM n’a plus d’intérêt à agir,

— à titre subsidiaire, confirmer le jugement du TASS en ce qu’il a déclaré les arrêts de travail pris en charge par la caisse pour Monsieur X au-delà du 2 juillet 2015, inopposables à l’employeur la société SGV (TEMPORIS LILLE).

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour l’exposé des moyens.

MOTIFS

- Sur l’intérêt à agir de la CPAM

Aux termes de l’article 31 du code de procédure civile, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

Il est constant que l’intérêt à faire appel doit s’apprécier au jour de l’appel dont la recevabilité ne peut dépendre de circonstances postérieures qui l’auraient rendu sans objet.

La société SGV (TEMPORIS LILLE) conteste l’intérêt à agir de la CPAM au motif que les taux AT de la société ont été modifiés par la CARSAT en octobre 2020 soit avant la demande de réinscription de l’affaire au rôle par la CPAM et qu’il est étonnant que la CARSAT ne se soit pas rapprochée de la CPAM avant d’intervenir sur ces taux.

En l’espèce, le tribunal a déclaré inopposable à l’employeur la prise en charge des soins et arrêts de travail à compter du 2 juillet 2015.

Partie succombante, la CPAM a un intérêt à agir pour voir rétablir l’opposabilité à l’employeur de l’intégralité de sa décision de prise en charge de l’accident. Et il importe peu que la CARSAT ait modifié les taux AT après la radiation et la réinscription de l’affaire au rôle.

Le moyen est rejeté.

- Sur le fond

L’article L.411-1 du code de la sécurité sociale dispose qu’est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise.

En application des dispositions des articles L.411-1, L.431-1 et L.433-1 du code de la sécurité sociale, la présomption d’imputabilité s’applique aux lésions initiales, à leurs complications, à l’état pathologique antérieur aggravé par l’accident du travail ou la maladie professionnelle, pendant toute la période d’incapacité précédant la guérison complète ou la consolidation, et postérieurement, aux soins destinés à prévenir une aggravation et plus généralement, à toutes les conséquences directes de l’accident ou la maladie. Elle fait obligation à la caisse de prendre en charge au titre de la législation sur les accidents du travail les dépenses afférentes à ces lésions.

La présomption d’imputabilité trouve à s''appliquer dès lors que l’arrêt de travail a été prolongé de manière ininterrompue ou qu’il est justifié de l’existence d’une continuité de soins et de symptômes.

Il appartient à l’employeur qui conteste cette présomption d’apporter la preuve contraire, à savoir de l’existence d’un état pathologique préexistant évoluant pour son propre compte sans lien avec l’accident ou d’une cause postérieure totalement étrangère, auxquels se rattacheraient exclusivement les soins et arrêts postérieurs.

Seule la circonstance d’une lésion totalement étrangère au travail permet en effet d’écarter la présomption d’imputabilité.

Dans le jugement dont appel, le tribunal a retenu une discontinuité dans les arrêts de travail de M. Z X, dit que la présomption d’imputabilité ne pouvait donc pas s’appliquer aux arrêts et soins lui ayant été prescrits à compter du 2 juillet 2015 et a déclaré inopposables à l’employeur les arrêts et soins à compter de cette date.

La CPAM soutient que le tribunal ne pouvait écarter la présomption d’imputabilité en se fondant uniquement sur l’absence de continuité dans les prescriptions de repos sans considérer la continuité des soins qui résulte de la prescription médicale du 28 juillet 2015 indiquant «'rééducation en cours'» et sans considérer la continuité des symptômes.

Elle ajoute que même si le tribunal considérait que la présomption d’imputabilité des lésions à l’accident du travail n’était pas applicable au cas d’espèce, il ne pouvait valablement déclarer les arrêts de travail inopposables à l’employeur sans rechercher si la preuve de l’imputabilité des lésions à l’accident était rapportée par les pièces figurant à son dossier.

En l’espèce, M. Z X, né le […], a subi un accident du travail le 9 mars 2015 à l’origine d’une douleur au niveau de l’épaule et du biceps gauche. Le certificat médical initial du centre hospitalier de Roubaix prescrivant un arrêt de travail initial du 9 mars au 13 mars 2015 fait état d’une «'douleur brutale bicipital gauche après port d’une charge lourde'-impotence fonctionnelle'». M. Z X a bénéficié d’ arrêts de travail du 9 mars 2015 au 1er juillet 2015 et du 28 juillet 2015 au 17 octobre 2015.

Il n’est pas contesté qu’il existe une interruption des arrêts de travail entre le 2 juillet 2015 et le 27 juillet 2015.

Toutefois, la CPAM établit une continuité de soins et de symptômes par la production à compter du certificat médical initial précité, de certificats de prolongation qui émanent du médecin traitant ou de son remplaçant, à savoir :

— certificat de prolongation du 13 mars 2015 avec arrêt de travail jusqu’au 8 avril 2015 mentionnant «' en soulevant du lourd, violente douleur de l’épaule gauche et du bras gauche, douleur et impotence fonctionnelle du membre supérieur gauche évoquant une lésion de la coiffe des rotateurs'»,

— certificat de prolongation du 7 avril 2015 avec arrêt de travail jusqu’au 26 avril 2015 mentionnant «'suspicion rupture coiffe des rotateurs gauche'»,

— certificat de prolongation du 24 avril 2015 avec arrêt de travail jusqu’au 18 mai 2015 mentionnant «' persistance douleur et impotence fonctionnelle de l’épaule gauche post traumatique sur tendinopathie'», étant précisé que ce certificat comportant une nouvelle lésion a été transmis au service médical qui a confirmé l’analyse du médecin traitant et que la CPAM a reconnu cette lésion imputable à l’accident du 9 mars 2015,

— certificat de prolongation du 17 juin 2015 avec arrêt de travail jusqu’au 1er juillet 2015 mentionnant «'persistance de douleur de l’épaule gauche avec impotence fonctionnelle. Suspicion de lésion de la coiffe des rotateurs à l’échographie, résultats IRM en attente'»,

— certificat de prolongation du 28 juillet 2015 avec arrêt de travail jusqu’au 11 août 2015 mentionnant «'douleur et impotence de l’épaule gauche avec suspicion clinique d’atteinte de la coiffe des rotateurs. Rééducation en cours'» «'examens complémentaires et rééducation'»,

— certificat de prolongation du 11 août 2015 avec arrêt de travail jusqu’au 11 septembre 2015 mentionnant «'tendinopathie de la coiffe des rotateurs à gauche'»'»kiné'»,

— certificat de prolongation du 17 septembre 2015 avec arrêts de travail jusqu’au 17 octobre 2015 mentionnant «' persistance douleur et impotence fonctionnelle de l’épaule gauche sur tendinopathie de la coiffe des rotateurs. Poursuite kinésithérapie'».

La CPAM produit au surplus deux avis de son médecin conseil des 10 juillet 2015 et 4 septembre

2015 justifiant les arrêts de travail à tout le moins à ces dates.

Compte tenu de la continuité de soins et symptômes ainsi établie, la présomption d’imputabilité des lésions à l’accident du travail s’applique nonobstant l’interruption des arrêts de travail au mois de juillet 2015.

Aucune cause étrangère ou état antérieur de nature à renverser cette présomption n’est évoqué dans le dossier.

En conséquence, les arrêts de travail et soins prescrits à M. Z X au titre de son accident du travail du 9 mars 2015 sont opposables à son employeur.

Le jugement entrepris est infirmé.

Partie succombante, la société SGV (TEMPORIS LILLE) est condamnée aux dépens postérieurs au 31 décembre 2018.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,

Déclare recevable en son appel la CPAM de LILLE DOUAI,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 1er février 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lille,

Statuant à nouveau,

Déclare opposables à la société SGV (TEMPORIS LILLE) les arrêts de travail et soins prescrits à M. Z X au titre de son accident du travail du 9 mars 2015,

Condamne la société SGV (TEMPORIS LILLE) aux dépens de l’instance nés postérieurement au 31 décembre 2018.

Le Greffier, Le Président,

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Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 9 novembre 2021, n° 21/00052