Cour d'appel d'Angers, 30 décembre 2014, 13/02137

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Angers, ch. soc., 30 déc. 2014, n° 13/02137
Juridiction : Cour d'appel d'Angers
Numéro(s) : 13/021371
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale d'Angers, 27 novembre 2012, N° 10227
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000030036877
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

d’ANGERS

Chambre Sociale

ARRÊT N

clm/ jc

Numéro d’inscription au répertoire général : 13/ 02137.

Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d’ANGERS, décision attaquée en date du 28 Novembre 2012, enregistrée sous le no 10227

ARRÊT DU 30 Décembre 2014

APPELANTE :

La Société FONTENEAU RENOVATION

2, rue Guillaume Lekeu

BP 70626

49106 ANGERS CÉDEX 02

non comparante-représentée par Maître Renaud GUIDEC, avocat au barreau de NANTES

INTIMEE :

L’URSSAF DES PAYS DE LA LOIRE

venant aux droits de L’URSSAF de la Sarthe

3 rue Gaëtan Rondeau

44933 NANTES CEDEX 9

représentée par Monsieur X…, muni d’un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Novembre 2014 à 14H00, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, conseiller chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anne JOUANARD, président

Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller

Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller

Greffier : Madame BODIN, greffier.

ARRÊT : prononcé le 30 Décembre 2014, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCÉDURE :

Par décisions du 12 mars 2009, la commission de recours amiable de la caisse primaire d’assurance maladie d’Angers a déclaré inopposables à la société Fonteneau Rénovation les décisions de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, des maladies déclarés par ses salariés, M. Larbi Y…, M. Gontran Z… et M. Philippe A…, respectivement les 4 mai 2000, 19 décembre 2000 et 11 juin 2002.

Suite à ces décisions, par courrier du 4 juin 2009, la caisse régionale d’assurance maladie des Pays de la Loire (ci-après : la CRAM des Pays de la Loire) a notifié à la société Fonteneau Rénovation sa décision fixant ses nouveaux taux, minorés, de cotisations accident du travail/ maladie professionnelle (taux AT/ MP) pour les années 2004 à 2009.

Par courrier électronique du 15 juillet 2009 et par courrier de son conseil du 1er septembre suivant, la société Fonteneau Rénovation a demandé à l’URSSAF de Maine et Loire, aux droits de laquelle se trouve aujourd’hui l’URSSAF des Pays de Loire, de lui rembourser les cotisations AT/ MP indûment réglées.

Par courrier du 30 octobre 2009, l’URSSAF de Maine et Loire a accédé partiellement à cette demande en opposant la prescription s’agissant du remboursement des cotisations AT/ MP acquittées au titre de la période écoulée du 1er janvier 2004 au 27 février 2006 et ce, au motif que la commission de recours amiable de la CPAM de Maine et Loire avait été saisie de la demande en inopposabilité le 27 février 2009 et que cette date d’introduction de la contestation marquait le point de départ du délai de prescription institué par l’article L. 243-6 du code de la sécurité sociale.

Saisie le 7 décembre 2009 d’un recours par la société Fonteneau Rénovation, par décision du 19 mars 2010 notifiée le 13 avril suivant, la commission de recours amiable a confirmé la décision de l’URSSAF.

Par jugement du 28 novembre 2012 auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Maine et Loire a débouté la société Fonteneau Rénovation de son recours et de ses demandes et confirmé la décision de l’URSSAF.

La société Fonteneau Rénovation a régulièrement relevé appel général de cette décision.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Vu les conclusions et observations orales des parties à l’audience des débats du 18 novembre 2014 auxquelles il est renvoyé pour l’exposé détaillé des prétentions et moyens présentés ;

Vu les conclusions enregistrées au greffe le 23 octobre 2014, régulièrement communiquées et reprises oralement à l’audience aux termes desquelles la société Fonteneau Rénovation demande à la cour de réformer le jugement entrepris et de condamner l’URSSAF des Pays de Loire à lui payer la somme de 14 341 € représentant le montant des cotisations indues du chef de la période écoulée du 1er janvier 2004 au 27 février 2006 et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la date de paiement des cotisations en application des dispositions de l’article 1378 du code civil, et capitalisation des intérêts de retard.

L’appelante fait valoir essentiellement que :

— l’URSSAF a successivement considéré, notamment au vu des décisions rendues par la Cour de cassation, que le délai de prescription triennale institué par l’article L. 243-6 du code de la sécurité sociale était suspendu

1) par le recours engagé par l’employeur et qu’elle devait rembourser seulement les cotisations afférentes aux trois dernières années précédant la date de contestation ;

2) uniquement par la demande de remboursement, le délai de prescription commençant à courir à compter du paiement des cotisations ;

3) uniquement par les recours formés auprès des CARSAT ;

— or, il est de jurisprudence assurée qu’un revirement de jurisprudence en matière de prescription ne peut pas s’appliquer aux instances en cours en ce que cela reviendrait à priver la victime d’un procès équitable au sens de l’article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— ces positions ne sont pas fondées en ce qu’il est de principe constant que la prescription ne court qu’à compter du jour où celui contre lequel on l’invoque a pu valablement agir ;

— s’agissant des employeurs, ils ne peuvent valablement agir qu’à compter du jour où ils ont reçu notification du taux annuel de cotisations fixé par la CARSAT avec mention des modalités et voies de recours ;

— en l’espèce, elle n’a pas reçu notification des taux annuels initiaux de cotisation relatifs aux années 2004 à 2006, ni des voies de recours ouvertes pour les contester, et l’URSSAF est défaillante à rapporter la preuve d’une telle notification et de sa réception ;

— le délai de prescription n’a donc pas couru contre elle puisqu’elle n’a pas pu valablement agir ;

— en tout cas, dès lors qu’au moment de la notification de son taux annuel, l’employeur ne peut pas mesurer les effets d’un recours en inopposabilité, c’est seulement au moment de la notification d’un nouveau taux minoré que naît son droit à remboursement et qu’il est mis en mesure d’agir valablement en remboursement de l’indu de cotisations ; en l’espèce, le délai de prescription triennale n’a donc pas pu commencer à courir contre elle avant le 4 juin 2009, date de notification de la décision de fixation de ses nouveaux taux minorés, laquelle a fait naître son droit à remboursement, de sorte que, sa demande de remboursement ayant été formée le 15 juillet 2009, la prescription n’est pas acquise ;

— à suivre le raisonnement de l’URSSAF, il faudrait considérer que l’employeur devrait former auprès d’elle une demande de remboursement de cotisations dès qu’il engage un recours en inopposabilité contre la caisse, sans même savoir quel sort aura ce recours et avant que naisse son droit à remboursement et qu’il connaisse le montant des cotisations indûment réglées, ce qui caractérise une situation absurde.

Vu les conclusions enregistrées au greffe le 17 novembre 2014, régulièrement communiquées et reprises oralement à l’audience aux termes desquelles l’URSSAF des Pays de Loire demande à la cour de débouter la société Fonteneau Rénovation de son appel et de l’ensemble de ses prétentions, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

A l’appui de sa position, elle fait valoir en substance que :

— en application de l’article L. 243-6 du code de la sécurité sociale, la demande de remboursement de cotisations sociales indûment payées se prescrit par trois ans à compter de la date de paiement des dites cotisations ;

— rien ne permet de fixer le point de départ de ce délai à une date différente dès lors qu’aucun obstacle, notamment aucune contestation, n’interdisait à la société de contester, avant l’expiration de ce délai, la classification sur laquelle avaient été calculées ses cotisations et de réclamer le remboursement des cotisations indûment acquittées ;

— en cas de contestation par l’employeur, soit du caractère professionnel de l’accident ou de la maladie, soit du taux majoré consécutivement notifié par la CARSAT,

le délai de prescription est interrompu à compter de la date à laquelle le litige est introduit, soit devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, soit devant le contentieux technique de la sécurité sociale ;

— c’est à tort que la société Fonteneau Rénovation soutient que l’employeur ne peut pas avoir une réelle connaissance de son « compte employeur AT/ MP » et qu’une demande en inopposabilité n’entraîne pas nécessairement une baisse du taux AT/ MP, alors qu’une décision d’inopposabilité entraîne de facto une diminution de ce taux ;

— aucun texte n’impose à la CARSAT de notifier les taux annuels AT/ MP par lettre recommandée avec accusé de réception ; dès lors qu’aucune anomalie n’avait été constatée quant à l’application des taux AT/ MP pour les années en cause, que la société Fonteneau Rénovation a déclaré et payé ses cotisations sur la base des taux notifiés, il s’en déduit qu’elle avait eu régulièrement notification des taux applicables et qu’elle ne les avait pas contestés alors qu’elle était parfaitement en droit et en mesure de le faire ;

— quoique la société Fonteneau Rénovation ait contesté avec succès le caractère professionnel des maladies déclarées par ses salariés, MM. Larbi Y…, Gontran Z… et Philippe A…, elle ne peut pas prétendre obtenir le remboursement des cotisations payées plus de trois ans avant le 27 février 2009, date de saisine de la commission de recours amiable qui a interrompu la prescription et c’est à juste titre que la prescription lui a été opposée pour refuser le remboursement des cotisations réglées du chef de la période antérieure à cette date ;

— il faut toutefois désormais tenir compte d’une nouvelle décision de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation (p no 11-22 585 du 24 janvier 2013) qui a opéré un revirement de jurisprudence en retenant qu’aucun élément ne permet de fixer le point de départ du délai de prescription à une autre date que celle prévue par l’article L. 243-6 du code de la sécurité sociale dès lors que l’employeur ne démontre pas avoir été dans l’impossibilité d’agir et que la prescription instituée par ce texte n’est pas interrompue par la saisine de la CPAM dans le cadre d’un contentieux visant à minorer rétroactivement le taux AT/ MP fixé à l’employeur ;

— en l’absence de preuve d’une attitude de sa part susceptible de caractériser sa mauvaise foi, au sens de l’article 1378 du code civil, dans le recouvrement des cotisations litigieuses, elle n’est pas redevable du paiement des intérêts de retard et la demande de capitalisation ne peut, dès lors, qu’être rejetée.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Aux termes de l’article L. 243-6 du code de la sécurité sociale, seul texte applicable à une demande de remboursement de cotisations de sécurité sociale indûment versées, la demande de remboursement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales indûment versées se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle lesdites cotisations ont été acquittées.

Toutefois, la prescription ne court qu’à compter du jour où celui contre lequel on l’invoque a pu valablement agir.

Au cas d’espèce, il incombe à l’URSSAF des Pays de Loire qui invoque la prescription contre la société Fonteneau Rénovation de rapporter la preuve de ce que les taux majorés de cotisations lui ont bien, conformément aux dispositions de l’article R. 143-21 du code de la sécurité sociale, été notifiés annuellement par la CRAM du chef des années 2004 à 2009 avec la mention des voie et délai de recours pour les contester, et qu’aucun obstacle ne l’a empêchée d’engager en temps utile l’action en remboursement dans les limites de la prescription.

Contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, la circonstance que la société Fonteneau Rénovation ait, pendant les années litigieuses, réglé ses cotisations sur la base des taux appliqués par la CRAM ne suffit pas, à elle seule, à démontrer qu’elle a bien reçu notification de ces taux avec mention des voie et délai de recours pour les contester.

Or, au cas particulier, l’URSSAF des Pays de Loire est totalement défaillante à produire la moindre preuve de la notification annuelle, à la société Fonteneau Rénovation, des taux majorés de cotisations fixés au titre des années 2004 à 2006 en considération des maladies professionnelles déclarées par MM. Larbi Y…, Gontran Z… et Philippe A… avec mention des voie et délai de recours pour les contester.

En l’absence de preuve de ces notifications, la société Fonteneau Rénovation établit suffisamment qu’elle n’a pas pu valablement agir, c’est à dire, poursuivre, à compter de leur paiement et dans le respect du délai de prescription prévu par l’article L. 243-6 du code de la sécurité sociale, le remboursement des cotisations dont elle s’est indûment acquittée du 1er janvier 2004 au 26 février 2006.

La prescription n’ayant pas couru à l’encontre de la société Fonteneau Rénovation, sa demande en remboursement des cotisations litigieuses est recevable.

Le montant des cotisations indues est justifié et n’est pas contesté.

Par voie d’infirmation du jugement entrepris, il convient de dire que la demande de la société Fonteneau Rénovation en remboursement des cotisations indûment payées du chef de la période écoulée du 1er janvier 2004 au 26 février 2006 est recevable et de condamner l’URSSAF des Pays de Loire à lui payer à ce titre la somme de 14 341 €.

S’agissant des intérêts, l’article 1378 du code civil dispose que « s’il y a eu mauvaise foi de la part de celui qui a reçu, il est tenu de restituer, tant le capital que les intérêts ou les fruits, du jour du payement ».

En l’espèce, l’URSAFF de Maine et Loire, aux droits de laquelle se trouve l’URSSAF des Pays de Loire, a recouvré les cotisations majorées litigieuses avant que la CRAM des Pays de la Loire soit informée des contestations de la société Fonteneau Rénovation, et avant, également, d’être informée elle-même de la baisse des nouveaux taux AT/ MP appliqués sur les années 2004 à 2009, telle qu’elle a été notifiée par la CARSAT à l’employeur par courrier du 4 juin 2009.

La mauvaise foi de l’URSSAF des Pays de Loire n’étant pas établie, la société Fonteneau Rénovation sera déboutée de sa demande tendant à ce que la somme de 14341 € soit assortie des intérêts légaux à compter du paiement des cotisations indues. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter de la demande de remboursement valant mise en demeure, soit à compter du 1er septembre 2009.

Il convient de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, en matière sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la demande de remboursement des cotisations indûment payées par la société Fonteneau Rénovation au titre de la période écoulée du 1er janvier 2004 au 26 février 2006 n’est pas prescrite et la déclare recevable ;

Condamne l’URSSAF des Pays de Loire à payer de ce chef à la société Fonteneau Rénovation la somme de 14 341 € et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 1er septembre 2009 ;

Ordonne la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil ;

Rappelle que la procédure est gratuite et sans frais.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

V. BODINAnne JOUANARD

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