Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 22 mars 2021, n° 18/01529

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Basse-Terre, ch. soc., 22 mars 2021, n° 18/01529
Juridiction : Cour d'appel de Basse-Terre
Numéro(s) : 18/01529
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre, 23 mars 2015
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

GB/LP

COUR D’APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT N° 144 DU VINGT DEUX MARS DEUX MILLE VINGT ET UN

AFFAIRE N° : N° RG 18/01529 – N° Portalis DBV7-V-B7C-DBBV

Décision déférée à la Cour : J

ugement du Conseil de Prud’hommes de Pointe-à-Pitre – section

encadrement – du 24 Mars 2015

APPELANT

Monsieur Y X

[…]

[…]

Représenté par Maître Jamaldin BENMEBAREK, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

INTIMÉE

S.A. ELECTRICITE DE FRANCE (EDF)

[…]

[…]

Représentée par Maître Isabelle WERTER-FILLOIS), avocat postulant inscrit au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTH et par Maître Me Romain ZANNOU, avocat plaidant inscrit au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 1er février 2021, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Rozenn Le Goff, conseillère, présidente,

Mme Gaëlle Buseine, conseillère,

Mme Annabelle Clédat, conseillère,

Les parties ont été avisées à l’issue des débats de ce que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 22 mars 2021

GREFFIER Lors des débats : Mme Lucile Pommier, greffier principal,

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les

parties en ayant été préalablement avisées conformément à l’article 450 al 2 du CPC. Signé par Mme Rozenn Le Goff, conseillère, présidente, et par Mme Lucile Pommier, greffier principal, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :

M. X a été embauché par la société EDF par contrat de travail à durée indéterminée au mois de juin 1985 en qualité de releveur de compteur.

La carrière du salarié s’étant déroulée sur plusieurs sites en métropole, il a ensuite été promu en juillet 2006 en tant que cadre chargé de préparation et/ou affaires, puis muté le 1er juillet 2009 sur le site de Saint-Martin en qualité de chef de centrale.

A compter du 1er novembre 2010, il a été nommé Ingénieur chargé de mission en Guadeloupe.

M. X saisissait le 22 avril 2013 le conseil de prud’hommes de Pointe-à-Pitre de demandes relatives au prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur et au versement de sommes liées à l’exécution et la rupture de son contrat de travail.

Par jugement rendu contradictoirement le 24 mars 2015, le conseil de prud’hommes de Pointe-à-Pitre a :

— dit que la résiliation du contrat de travail de M. X Y n’était pas justifiée,

— dit que la modification unilatérale du contrat de travail de M. X Y n’est pas caractérisée,

— dit que le harcèlement moral, discriminatoire et l’inégalité de traitement évoqués par M. X Y n’étaient pas établis,

— débouté M. X Y de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

— condamné M. X Y à payer à la société EDF la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné M. X Y aux entiers dépens.

Selon déclaration reçue au greffe de la cour le 28 avril 2015, M. X formait appel dudit jugement, qui lui était notifié le 1er avril 2015.

Après radiation, l’affaire a été réinscrite au rôle le 20 juillet 2018.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par conclusions notifiées le 3 octobre 2016 à la société EDF, auxquelles il a été fait référence lors de l’audience des débats, M. X demande à la cour de :

— le déclarer recevable et bien fondé en son appel,

— infirmer le jugement déféré,

— rejeter toutes les demandes de la partie adverse,

— constater les manquements et les fautes contractuelles de l’employeur à son égard,

— constater que l’employeur l’a mis au placard de manière injustifiée et abusive depuis mai 2010,

— constater que l’employeur l’a muté d’office en octobre 2010 pour le faire passer au niveau de responsabilité du poste de chef de central ayant autorité sur 50 salariés au poste de simple ingénieur chargé de mission n’ayant aucune autorité sur des salariés,

— constater que l’employeur a modifié unilatéralement son contrat de travail,

— constater que son niveau de rémunération a été gelé depuis 2010,

— en conséquence, prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail à durée indéterminée,

— ordonner à la société EDF de le placer au grade de GF 13 NR 200,

— condamner la société EDF à lui verser les sommes suivantes :

* 20000 euros à titre de dommages et intérêts pour avoir gelé son niveau de salaire depuis janvier 2010,

* 150000 euros à titre de dommages et intérêts pour la mise au placard abusive et injustifiée subie depuis 2010, pour le gel de sa carrière et de son salaire, actes répétés constitutifs de faits de harcèlement moral au travail,

* 150000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 30000 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

* 4491,98 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés,

* 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— aux entiers dépens de l’instance, en ce compris la contribution pour l’aide juridique prévue par le décret n°2011-1202 en date du 28 septembre 2011, et ce, en application de l’article 696 du code de procédure civile,

— ordonner à l’employeur de lui remettre :

* une attestation d’employeur conforme,

* un certificat de travail conforme,

* un solde de tout compte conforme,

* des fiches de paye conformes et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,

— apposer la formule exécutoire sur la décision à intervenir.

M. X soutient que :

— les reproches liés à l’utilisation de son droit de retrait, sa mise à l’écart par sa hiérarchie, ses arrêts de travail, les humiliations et brimades qu’il a endurées, la privation de ses responsabilités, sa mutation d’office à un autre poste, l’absence d’évolution de sa carrière sont établis par les pièces du dossier,

— il est fondé à solliciter en conséquence le versement d’une somme de 50000 au titre de la perte de chance de voir terminer sa carrière à un poste à haute responsabilité tel que celui de directeur d’une centrale EDF,

— il a bénéficié d’une promotion l’obligeant à être de métropole à Saint-Martin, sans versement d’une indemnité en application de la PERS 684,

— ces incidents caractérisent les faits de harcèlement moral dont il a été victime,

— la diminution de ses responsabilités caractérisent une modification unilatérale de son contrat de travail,

— il est fondé à solliciter la résiliation de son contrat de travail aux torts de l’employeur.

Par conclusions notifiées à M. X le 19 mars 2019, auxquelles il a été fait référence lors de l’audience des débats, la société EDF demande à la cour de :

— confirmer le jugement déféré,

— condamner M. X à lui payer la somme de 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de la présente instance.

La société EDF expose que :

— le salarié n’est pas victime d’actes de harcèlement moral, discriminatoires ou d’inégalité de traitement, dès lors que ses allégations ne reposent sur aucun élément probant,

— le salarié opère une confusion entre le niveau de rémunération et l’échelon,

— aucun texte ne prévoit l’attribution d’un avancement ou une promotion de façon systématique,

— la demande de résiliation judiciaire aux torts de l’employeur n’est pas justifiée,

— le salarié ne pourra qu’être débouté de ses demandes indemnitaires.

MOTIFS :

Sur les dommages et intérêts pour gel des salaires :

M. X allègue un gel de son salaire depuis le mois d’octobre 2010, date de sa mutation au poste d’ingénieur chargé de mission. Il précise que son échelon niveau de rémunération (NR) est demeuré inchangé depuis le mois de janvier 2010, alors qu’il aurait dû atteindre depuis janvier 2011 le grade fonctionnel GF13 NR200.

Il ressort des pièces du dossier, en particulier des fiches d’évaluation du salarié, que celui-ci est classé depuis le mois de janvier 2009 au grade fonctionnel agent 12 et au niveau de rémunération 175.

Le relevé de carrière de M. X met en évidence son avancement au choix depuis le 1er janvier 2009, ainsi que les postes qu’il a successivement occupés à compter de cette date, soit celui de chargé préparation et/ou affaires dans le Rhin, de chef de centrale à Saint-Martin à compter du mois de juillet 2009 et enfin d’ingénieur chargé de mission en Guadeloupe depuis le mois de juillet 2010.

La cour rappelle qu’il appartient à M. X de fournir des éléments d’appréciation permettant de

justifier la classification qu’il sollicite.

Or, il appert que M. X se borne à faire valoir l’existence d’une pratique consistant à accorder chaque année aux agent un NR supplémentaire, sans l’établir, celle-ci étant au demeurant contestée par l’employeur.

Les pièces versées aux débats, en particulier la grille des salaires mensuels et les rémunérations mensuelles brutes au 1er janvier 2013, ne permettent pas d’établir que les fonctions qu’il exerçait effectivement correspondaient à un emploi du groupe fonctionnel 13, niveau de rémunération 200 qu’il sollicite.

Au surplus, l’employeur précise que le salarié confond les notions d’échelon et celles NR ainsi que GF, dont l’avancement au choix au sein de ces grilles s’effectue, en application de la circulaire PERS 977 du 28 mars 1998, en fonction de son professionnalisme.

A défaut de justifier qu’il remplirait les critères lui ouvrant droit à la classification demandée,

M. X n’est pas fondé à se prévaloir d’un gel de sa rémunération et devra être débouté de sa demande de dommages et intérêts formulée à ce titre.

Sur les dommages et intérêts pour perte de chance de carrière :

M. X sollicite le versement de la somme de 50000 euros pour perte de chance de terminer sa carrière à un poste à haute responsabilité tel que celui de directeur de centrale.

Toutefois, M. X ne pourra qu’être débouté de sa demande, en l’absence de précision ou de pièces permettant d’en apprécier le bien-fondé.

Sur les dommages et intérêts pour harcèlement moral, le gel de la carrière et du salaire :

Aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En outre, aux termes de l’article susvisé et de l’article L 1154-1 du code du travail lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il convient d’examiner les éléments allégués par M. X à l’appui du harcèlement moral dont il s’estime victime.

En ce qui concerne les reproches relatifs à l’exercice du droit de retrait :

M. X fait valoir que sa hiérarchie l’a menacé de lui retirer son poste de chef de centrale de Saint-Martin s’il acceptait de ne plus utiliser son droit de retrait à compter du 30 juillet 2009. Il précise que son supérieur hiérarchique souhaitait régler de manière non officielle les problèmes qu’il rencontrait lorsqu’il tentait de faire cesser des indélicatesses dans l’entreprise (prise de marché de certaines entreprises privées sans mise en concurrence, vol de gasoil, réparation des quatorze lampadaires implantés autour des cuves de gasoil sabotées et respect du port des équipements de protections individuelles EPI pour chaque personne traversant la centrale).

Il ressort des pièces versées aux débats que, par lettre du 25 juillet 2009, M. X a informé son employeur de l’exercice de son droit de retrait, à la suite de menaces reçues lors d’une réunion qui s’est déroulée le même jour, de la part du responsable de maintenance.

Par lettre du 28 juillet 2009, l’employeur, après avoir exposé l’analyse de la situation de tensions au sein de l’équipe, qualifié l’attitude du collaborateur en cause comme étant inadmissible et devant être recadrée, a fait part à M. X des actions à mettre en oeuvre en vue de lui permettre d’exercer légitimement son management à Saint-Martin. Parmi ces actions, l’employeur a proposé une rencontre avec l’auteur des menaces visant à lui remettre les excuses écrites de l’intéressé et son engagement à ne pas réitérer son comportement, une réunion d’équipe avec le soutien de son responsable hiérarchique en vue d’en réorganiser le fonctionnement et la remise d’une lettre de mission qui lui permettra d’être guidé dans son action. L’employeur lui a précisé également qu’il ne pouvait pas accéder à ses demandes de protection rapprochée et de logement sécurisée, dès lors qu’elles ne lui apparaissaient pas appropriées. Enfin, l’employeur lui a indiqué que, dans l’hypothèse où les mesures précitées ne lui conviendraient pas et qu’il n’aurait pas rejoint Saint-Martin le 30 juillet 2009, il se verrait contraint de lui retirer son poste de chef de centrale de Saint-Martin.

Il appert que l’incident dont M. X a été victime résulte d’une difficulté de management avec les équipes, cette analyse résultant des différents entretiens menés avec les collaborateurs à l’issue de celui-ci, dès le 24 juillet 2009. Il est également établi que l’employeur, ayant désapprouvé l’attitude du salarié en cause, a fait part à M. X de différentes mesures et de l’accompagnement envisagé en vue de restaurer la légitimité de son management. Il convient également de souligner que, préalablement à sa prise de fonctions au 1er juillet 2009, M. X avait bénéficié d’une immersion d’un mois au sein de la centrale de Bellefontaine du centre EDF de Martinique.

La cour observe qu’il est établi que l’employeur a pris immédiatement les mesures visant à rétablir l’exercice normal des fonctions de M. X. Dans ces conditions, l’éventualité de les lui retirer dans l’hypothèse où il ne rejoindrait pas son poste, alors que les conditions d’exercice étaient en voie de rétablissement, ne peut s’analyser en une menace de retrait du fait de l’absence de renonciation de la part du salarié à son droit de retrait.

Si M. X se prévaut également du souhait de sa hiérarchie de régler de manière non officielle les indélicatesses dans l’entreprises, qu’il a exposées dans un rapport d’étonnement daté du 15 septembre 2009, il ne justifie ni de ce choix de sa hiérarchie, ni de l’incidence sur l’exercice de son droit de retrait.

Le grief relatif aux menaces liées à l’exercice du droit de retrait de M. X n’est pas établi.

En ce qui concerne la mise au placard :

Il résulte des pièces du dossier que M. X a fait l’objet d’entretiens d’évaluation les 22 et 23 avril 2010, au cours desquels sa hiérarchie a dressé un constat d’échec et un nécessaire repositionnement de M. X sur d’autres fonctions.

Nonobstant des félicitations adressées par l’employeur le 4 septembre 2009 au salarié et à son équipe, pour la remise en marche de deux moteurs, il résulte des fiches d’évaluations précitées que l’exercice de ses fonctions en qualité de chef de centrale n’a pas été satisfaisante.

Il résulte également du compte rendu d’entretien avec sa hiérarchie du 28 septembre 2010, que M. X avait reçu dès le 12 mai 2010 une lettre de mission pour laquelle il n’avait pas fait de compte rendu sur son état d’avancement.

Dès lors qu’il avait de nouvelles missions, M. X ne peut se prévaloir d’une attestation d’un collègue précisant qu’à compter du mois de mai 2010, il réalisait l’inventaire et le contrôle des

réseaux électriques sur l’île de Saint-Martin et qu’ils partageaient le même bureau, pour justifier d’une mise à l’écart.

De même, l’attestation d’un collègue relative à la raison qui aurait présidé à la décision de la direction d’affecter M. X en Guadeloupe, c’est-à-dire son refus de rassembler les éléments nécessaire à l’audit de certification environnementale, n’est étayée par aucune pièce du dossier et n’est pas de nature, en tout état de cause à démontrer la réalité de la mise à l’écart alléguée par le salariée dès le mois de mai 2010.

Il résulte des éléments analysés ci-dessus que la mise au placard invoquée par le salariée n’est pas établie.

En ce qui concerne la privation unilatérale des responsabilités :

M. X allègue une décision unilatérale de l’employeur dès le 12 mai 2010, visant à le priver de ses responsabilités.

Ainsi qu’il vient d’être souligné, il résulte des pièces du dossier que M. X a reçu une lettre de mission à cette date, à la suite du constat d’échec dans l’exercice de ses fonction de chef de centrale.

Le compte rendu d’entretien avec sa hiérarchie, qui s’est tenu en présence d’un représentant syndical, met en évidence l’accord du salarié relatif à cette lettre de mission, ce qui est corroboré par les mentions portées par le salarié sur la lettre du 12 mai 2010 exposant ses nouvelles fonctions. Celles-ci correspondent à l’élaboration d’un plan d’actions suite à l’audit assurance de mars 2010, à la remise à niveau et à jour de la gestion documentaire des plans et schéma du GR de Saint-Martin et au contrôle interne des plans de présentation des entreprises de Saint-Martin.

La cour constate que l’employeur précise que le classement du salarié demeure inchangé et que celui-ci se borne à alléguer l’absence d’autorité sur du personnel, sans justifier d’une perte de responsabilités au regard de ses nouvelles fonctions.

Dès lors, M. X ne saurait se prévaloir d’une décision unilatérale de retrait de ses responsabilités.

En ce qui concerne les humiliations, les pressions et les brimades :

En premier lieu, si M. X précise dans ses écritures qu’il était utilisé par sa hiérarchie comme un fusible dans l’entreprise avec le seul objectif de rétablir la situation catastrophique rencontrée par la centrale EDF de Saint-Martin, il n’en justifie pas.

En deuxième lieu, M. X expose que l’employeur lui a reproché ses arrêts maladie et les permissions de sortie dont il a bénéficié. Toutefois, la lettre du 13 septembre 2010 de son employeur et celle qu’il lui a adressée le 23 septembre 2010, auxquelles il se réfère, ne permettent pas d’établir la réalité de ce grief. Il appert que l’employeur lui a seulement rappelé, par lettre du 7 décembre 2010, les règles applicables en matière de prescriptions médicales et d’absences y afférentes, ainsi que les textes en vigueur.

En troisième lieu, M. X allègue l’existence d’humiliations liées aux séances de coaching que l’employeur a décidé de lui attribuer. Il appert que l’employeur a mis en place, compte tenu des difficultés rencontrées par le salarié dans la gestion de ses équipes, un accompagnement constitué de séances de coaching. Dès lors que la mesure est justifiée par la nature des tâches qui étaient dévolues au salarié et les incidents auxquelles il a dû faire face, celui-ci n’est pas fondé à se prévaloir d’une mesure distincte des autres salariés et d’une volonté de l’employeur de jeter le discrédit sur sa personne.

En quatrième lieu, M. X indique que son accord à la lettre de mission du 2 août 2013, relative à ses fonctions de formateur, a été obtenu contre sa volonté. Toutefois, la cour observe que la pression alléguée par le salarié n’est pas établie, observation étant faite que, dans sa lettre en réponse, il n’en fait nullement mention.

En cinquième lieu, M. X se prévaut d’un incident survenu le 14 octobre 2013 au cours duquel sa hiérarchie lui aurait demandé sur le parking de la société de justifier de l’utilisation du véhicule EDF. Il appert que l’employeur a répondu à la lettre du salarié du 20 octobre 2013 à ce sujet, par courrier du 28 octobre 2013, en précisant qu’il existait une divergence d’interprétation relative à l’échange survenu entre eux le 14 octobre 2013. L’employeur rappelle dans son courrier qu’il entre dans son rôle de l’interroger sur le contenu de ses activités et les conditions d’utilisation du matériel mis à sa disposition et l’assure de l’absence de manque de respect à son égard, quant à la forme de son questionnement. Les éléments précités ne permettent pas de retenir le grief invoqué par le salarié comme étant établi.

En dernier lieu, et de manière surabondante, l’employeur justifie de l’absence de perte des droits à la retraite invoquée par le salarié dans l’un de ses courriers, sans que ce moyen soit toutefois repris dans ses écritures.

Il résulte des éléments analysés ci-dessus que la réalité des brimades, pressions et humiliations alléguées par le salarié n’est pas démontrée et que ce grief ne peut davantage être retenu.

En ce qui concerne le refus de versement d’une indemnité et de l’aide individuelle au logement:

M. X fait valoir que l’aide individuelle au logement lui a été abusivement refusée par l’employeur.

Il résulte de l’examen des pièces versées aux débats que M. X a bénéficié, conformément aux termes des différentes conventions établies et des textes applicables, de l’aide individuelle au logement à compter du 1er janvier 2011. Il est également établi que cette aide a été attribuée par convention signée le 6 octobre 2011 et que les conditions de son maintien ont été précisées pour les années suivantes, par convention du 28 août 2013.

La circonstance, à la supposer établie que M. X ait subi un retard de paiement de cette aide d’une durée de 10 mois, comme il le prétend, aussi regrettable soit-elle, n’est toutefois pas de nature à justifier le refus de versement dont il se prévaut, dès lors que sa situation a été régularisée et qu’elle résulte de l’application de ladite convention.

Si M. X précise également qu’il aurait dû bénéficier à son arrivée à Saint-Martin d’une indemnité de 6000 euros, liée au versement de l’aide en logement, il ne justifie ni de sa nature, ni des conditions qu’il remplirait pour en justifier l’allocation.

Le grief n’est pas établi.

En ce qui concerne la décision unilatérale de mutation :

Il résulte du courrier de l’employeur du 12 mai 2010, confirmant la nouvelle affectation de M. X à compter du 1er juillet 2010 en qualité d’ingénieur chargé de mission en Guadeloupe et du compte rendu d’entretien du 28 septembre 2010 qui s’est tenu entre M. X et sa hiérarchie, que cette décision a été prise avec l’accord du salarié. La cour observe que le courrier précité du 12 mai 2010 porte la mention 'bon pour accord’ et la signature du salarié.

Dès lors, et nonobstant une mise en oeuvre desdites missions dès le 12 mai 2010 avec l’accord du salarié, M. X ne peut se prévaloir d’une décision unilatérale de l’employeur relative à sa

mutation prévue le 1er juillet 2010.

En ce qui concerne l’absence d’évolution de carrière :

D’une part, il ressort des pièces du dossier que M. X a bénéficié d’entretiens et d’évaluations annuels réguliers, observation étant faite qu’il a manifesté son désaccord relatif aux appréciations portées sur son évaluation menée en avril 2010.

D’autre part, et ainsi qu’il a été analysé ci-dessus, il n’est pas établi qu’il ait été privé d’une progression de carrière dès lors qu’il se borne à alléguer une évolution automatique sans la justifier et qu’il ne démontre pas remplir les conditions relatives à la classification dont il se prévaut.

Par suite, le grief n’est pas établi.

Il résulte des éléments analysés ci-dessus que les griefs allégués par le salarié, pris dans leur ensemble et à défaut d’être établis, ne permettent pas de retenir l’existence de faits permettant de présumer l’existence d’un harcèlement moral. Les différentes pièces médicales versées aux débats, relatives notamment à un état de stress, ne permettent pas davantage d’établir la réalité de faits faisant présumer un tel harcèlement, dès lors qu’elles ne mettent pas en évidence le lien avec les conditions de travail.

Par suite, c’est à juste titre que les premiers juges n’ont pas retenu l’existence de faits de harcèlement moral et, à supposer les moyens soulevés par le salarié, de faits de discrimination ou d’inégalité de traitement, fondés sur les mêmes motifs, dont la réalité n’est pas davantage démontrée.

Il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté M. X de sa demande de dommages et intérêts présentée à ce titre.

Sur la demande de résiliation judiciaire :

Le salarié peut demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail en démontrant que l’employeur est à l’origine de manquements suffisamment graves dans l’exécution de ses obligations contractuelles de telle sorte que ces manquements ne permettent pas la poursuite du contrat de travail.

Si la résiliation est prononcée, elle produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

M. X devra être débouté de sa demande de résiliation judiciaire fondée sur le comportement fautif de l’employeur, dès lors qu’il invoque les mêmes faits que ceux repris à l’appui du harcèlement moral, du gel de sa carrière, de son salaire et de la perte de chance d’évolution, qui ne sont pas établis.

Le jugement est confirmé sur ce point et en ce qu’il a rejeté les demandes de versement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d’indemnité de licenciement.

Sur l’indemnité compensatrice de congés payés :

M. X, qui se borne à solliciter le versement d’une somme de 4491,98 euros à ce titre, sans préciser sa teneur, ne pourra qu’en être débouté.

Sur les autres demandes :

En l’absence de résiliation judiciaire, M. X n’est pas fondé à solliciter la remise d’une attestation d’employeur, d’un certificat de travail, d’un reçu pour solde de tout compte et de fiches de paye sous

astreinte de 150 euros par jour de retard.

Il n’y a pas lieu d’assortir la présente décision de l’exécution provisoire.

Comme il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la SA Electricité de France les frais irrépétibles qu’elle a exposés, il lui sera alloué en cause d’appel la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles prévus par l’article 700 du code de procédure civile, en sus de celle de 500 euros accordée par les premiers juges à ce titre.

Les dépens sont mis à la charge de M. X Y.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 24 mars 2015 par le conseil de prud’hommes de Pointe-à-Pitre entre M. X Y et la SA Electricité de France,

Y ajoutant,

Déboute M. X de sa demande de remise de documents de fin de contrat et de fiches de paye,

Condamne M. X Y à verser à la SA Electricité de France une somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles prévus par l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

Dit que les dépens sont à la charge de M. X Y,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

Le greffier, La présidente,

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