Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 27 décembre 2016, n° 15/02021

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Besançon, ch. soc., 27 déc. 2016, n° 15/02021
Juridiction : Cour d'appel de Besançon
Numéro(s) : 15/02021
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Besançon, 6 septembre 2015
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

ARRET N° 16/

PB/KM

COUR D’APPEL DE BESANCON

—  172 501 116 00013 -

ARRET DU 27 DECEMBRE 2016

CHAMBRE SOCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 22 novembre 2016

N° de rôle : 15/02021

S/appel d’une décision

du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de
BESANCON

en date du 07 septembre 2015

Code affaire :

89B

Demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur ou d’une personne substituée dans la direction, ou en réparation complémentaire pour faute inexcusable

A.D.A.P.E.I.

C/

X Y

CPAM DU DOUBS SITE DE BESANCON

PARTIES EN CAUSE :

A.D.A.P.E.I., 81 rue de Dole – 25000
BESANCON

APPELANTE

représentée par Me Christine MAYER BLONDEAU, avocat au barreau de BESANCON

ET :

Madame X Y, demeurant XXX BESANCON

représentée par Me Patricia SAGET, avocat au barreau de BESANCON

INTIMEE

CPAM DU DOUBS SITE DE BESANCON, 02, rue Denis Papin – 25036 BESANCON CEDEX

représentée par Madame Z A, Responsable adjointe du service contentieux, en vertu d’un pouvoir permanent daté du 4 janvier 2016 et signé par Madame BB
B, Directeur par intérim.

PARTIE INTERVENANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

lors des débats du 22 Novembre 2016 :

Madame C D, Présidente de chambre et Monsieur Patrice BOURQUIN, conformément aux dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, en l’absence d’opposition des parties

Mme Karine MAUCHAIN, Greffier

lors du délibéré :

Madame C D, Présidente de chambre et Monsieur Patrice BOURQUIN,
Conseiller, a rendu compte conformément à l’article 945-1 du code de procédure civile à M. Jérôme COTTERET, Conseiller.

Les parties ont été avisées de ce que l’arrêt sera rendu le 27 Décembre 2016 par mise à disposition au greffe.

**************

FAITS ET PROCÉDURE

Mme X E F, monitrice éducatrice de l’Association Adapei du Doubs (l’Association) a été victime, le 18 août 2010, d’une agression physique de la part d’un résident handicapé mental accueilli au foyer de vie de Gilley(25), au sein duquel elle exerce ses fonctions.

Une déclaration d’accident du travail a été établie par l’employeur le 2 septembre 2010.

Le certificat médical initial fait état d’une 'contusion du bras et du coude droits et d’une mobilisation articulaire poignet, coude douloureuse '.

Elle a ensuite fait l’objet de plusieurs arrêts de travail pour des séquelles psychologiques liées à son agression puis a été déclarée inapte à son poste de monitrice éducatrice par le médecin du travail et a fait l’objet d’un licenciement pour inaptitude le 15 mars 2011.

Mme X E F a saisi le conseil de prud’hommes en contestation de son licenciement et elle a été déboutée de l’intégralité de ses demandes, ce jugement ayant été confirmé par un arrêt de la cour d’appel en date du 23 juillet 2013.

Elle a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Besançon aux fins de faire reconnaître l’existence d’une faute inexcusable de l’employeur.

Par jugement du 18 avril 2014 le tribunal a prononcé un sursis à statuer et a ordonné une enquête sur les circonstances exactes de l’agression physique subie par la salariée.

Cette enquête a été réalisée par la caisse primaire d’assurance-maladie du Doubs qui a déposé un rapport le 22 juillet 2014.

Par jugement du 7 septembre 2015, le tribunal a :

— dit que l’accident est dû à la faute inexcusable de l’employeur,

— ordonné la majoration de la rente dans les limites du montant qui lui a été attribué en capital,

— fixé à la somme de 1500 les dommages et intérêts dus à Mme X
E F toutes causes de préjudice confondues,

— dit que la caisse primaire d’assurance-maladie du Doubs devra verser directement à Mme GGG F les sommes dues au titre de la majoration de la rente et de l’indemnisation complémentaire,

— dit que l’Association remboursera l’ensemble des sommes ainsi versées à la caisse primaire,

— condamné l’Association à payer à Mme X E
F la somme de 700 au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration enregistrée au greffe de la Cour le 13 octobre 2016, l’Association a interjeté appel de la décision.

Selon conclusions visées le 30 juin 2016, elle sollicite l’infirmation du jugement entrepris, le débouté de l’intégralité des demandes de Mme X E F et sa condamnation à lui payer la somme de 2000 au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Selon conclusions visées le 2016, Mme X E F conclut à la confirmation du jugement entrepris sauf à augmenter le montant des dommages et intérêts alloués à la somme de 5000 et elle sollicite par ailleurs la condamnation de l’Association à lui payer la somme de 1500 au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Selon conclusions visées le juillet 2016, la caisse primaire d’assurance-maladie du Doubs demande de :

— lui donner acte de ce qu’elle s’en remet à justice sur le point de savoir si l’accident est imputable ou non à une faute inexcusable de l’employeur,

— dans l’affirmative, condamner l’Association au remboursement du doublement de l’indemnité en capital d’un montant de 2825,58 et de la provision de 1500 d’ores et déjà versées,

— dans la négative de condamner Madame Y au remboursement des indemnités en capital de 2825,58 et de la somme de 1500 .

En application de l’ article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour l’exposé des moyens des parties, à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l’audience de plaidoirie du 27 décembre 2016.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers ce dernier d’une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail.

Le manquement à cette obligation de sécurité de résultat a la caractère d’une faute inexcusable au sens de l’article L 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

Mme X E F a été victime le dimanche 8 août 2010 d’un accident du travail sous forme d’une agression qu’elle a relaté comme suit dans le cahier de liaison de la structure :

« J’ai surpris Anthony en train d’épier Denise 'lorsque je lui ai demandé ce qu’il faisait là et que c’était interdit, il m’a répondu qu’il venait lui demander un chewing-gum et qu’elle n’avait pas à laisser sa porte ouverte. Il m’a également demandé ce que j’allais lui faire et qu’il n’avait pas peur de moi. Il s’est montré menaçant et a fait mine de vouloir me frapper. Je lui ai demandé d’aller comme convenu dans sa chambre et d’aller se doucher. Il m’a suivie dans le bureau et m’a frappé les avant-bras. Je lui ai demandé à plusieurs reprises de s’éloigner ne cherchant pas à m’interposer physiquement. Il est finalement parti en hurlant qu’il était prêt à faire n’importe quoi pour retourner dans sa famille d’accueil. Il a renversé du mobilier sur son passage et a donné des coups dans les murs’ » ;

Un certificat médical en date du 11 août 2010 fait état d’une douleur en rapport avec une contusion du bras et une mobilisation difficile du poignet droit en rapport avec une entorse, et prescrivant une
ITT de sept jours ;

Le résident entendu par les enquêteurs a reconnu les faits, et au regard de sa déficience mentale, les enquêteurs mentionnant que l’intéressé était placé sous tutelle et déficient à 80 %, la procédure a été classée sans suite par le parquet

S’agissant de la conscience du risque par l’employeur, il résulte de pièces produites et notamment de l’enquête réalisée par la CPAM à la suite d’un jugement avant-dire droit du 18 avril 2014, que le résident en avait agressé physiquement un autre le 20 mai 2010, et qu’un avertissement lui avait été notifié le 4 juin 2010.

Par ailleurs le cahier de liaison fait état de ce que le 24 juin il a été nécessaire de le contenir physiquement, une mention du 3 juillet précisant qu’il faut être 'vigilant pour l’injection’ et ce 'pour éviter les pétages de plomb'.

C’est donc à juste titre que le premier juge a retenu que l’employeur ne pouvait légitimement ignorer le risque d’agression que pouvaient encourir les salariés.

En ce qui concerne les mesures propres à préserver le salarié du danger encouru, le premier juge a retenu l’absence de système d’alarme ou de dispositif d’urgence utilisable en cas d’agression, la seule consigne purement orale étant d’appeler le collègue et dès que possible de prévenir le cadre d’astreinte.

ll a également retenu que cette procédure est inadaptée et insuffisante puisque Mme X E
F indique avoir crié lors de son agression, alors que sa collègue qui encadrait également les résidents ne l’a pas entendue.

L’employeur fait état de l’existence de plusieurs téléphones mobiles permettant de joindre le second collègue présent, Mme X
E F indiquant quant à elle que le téléphone mobile disponible était porté par l’autre salarié.

Sur ce point, il est exact qu’entendue lors de la mesure d’instruction, la responsable de l’établissement, Mme H fait état de l’existence d’au moins huit téléphones sans fil, ce qui n’a toutefois pas été vérifié au cours de l’enquête, les déclarations sur ce point demeurant
XXX

contradictoires.

Par ailleurs, il n’est fait état d’aucune consigne précise quant à l’obligation pour les deux salariés présents d’être porteurs d’un des téléphones mobiles, à supposer qu’ils aient effectivement existé, durant le service alors que les deux membres du personnel présents sont répartis sur deux étages.

Il en résulte que l’existence de la prise des mesures nécessaires à préserver les salariés du risque encouru n’est effectivement pas rapportée et le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a retenu l’existence d’une faute inexcusable de l’employeur.

Le jugement a par ailleurs justement évalué le préjudice subi par la salariée à la somme de 1500 et il sera également confirmé sur ce point.

Il sera par ailleurs fait droit à la demande de la
Caisse visant à la condamnation de l’Association au remboursement des sommes versées eu égard à l’exécution provisoire ordonnée par le premier juge.

Il sera par ailleurs alloué à Mme X E F et à la Caisse la somme de 1200 chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entreprise,

Y ajoutant,

CONDAMNE l’ADAPEI à payer à la Caisse primaire d’assurance maladie du Doubs les sommes de 2.825,58 au titre de l’indemnité en capital et celle de 1500 au titre de l’indemnisation du préjudice subi, d’ores et déjà versées par la
Caisse,

CONDAMNE l’ADAPEI à verser à Mme X E F la somme de 1200 au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE l’ADAPEI à verser à la Caisse primaire d’assurance maladie du Doubs la somme de 1200 au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le vingt sept décembre deux mille seize et signé par Madame C D, Présidente de chambre, et Madame I
I,
Greffière.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT DE CHAMBRE,

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Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 27 décembre 2016, n° 15/02021