Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 20 décembre 2019, n° 19/00264

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 1re ch. civ., 20 déc. 2019, n° 19/00264
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 19/00264
Décision précédente : Tribunal de commerce de Bordeaux, 19 novembre 2018, N° 2017R01960
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE


ARRÊT DU : 20 DECEMBRE 2019

(Rédacteur : Jean-Pierre FRANCO, conseiller,)

N° RG 19/00264 – N° Portalis DBVJ-V-B7D-K2CM

F A

G C

Société HELVESTA AG

c/

SAS HYPREVENTION

SELARL P-X J K

Nature de la décision : AU FOND

APPEL D’UNE ORDONNANCE DE REFERE

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : ordonnance rendue le 20 novembre 2018 par le Juge des Référés du Tribunal de Commerce de BORDEAUX (RG : 2017R01960) suivant déclaration d’appel du 14 janvier 2019

APPELANTS :

F A

né le […] à […]

demeurant […]

G C

né le […] à […]

demeurant […]

Société HELVESTA AG, société de droit étranger, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège sis […]

représentés par Maître Pierre FONROUGE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistés de Maître Ulrich ZSCHUNKE, avocat plaidant au barreau de PARIS

INTIMÉE :

SAS HYPREVENTION agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social […]

INTERVENANTE :

SELARL P-X J K prise en la personne de Maître Frédérique P-X, agissant en qualité de mandataire judiciaire de la société HYPREVENTION, selon jugement du tribunal de commerce de Bordeaux en date du 20 mars 2019, domiciliée en cette qualité […]

représentées par Maître BORDAS substituant Maître Franck AUCKENTHALER, avocats postulants au barreau de BORDEAUX, et assistées de Maître Sylvain Tobias ROSTAGNI, avocat plaidant au barreau de NICE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 912 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 novembre 2019 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Jean-Pierre FRANCO, conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Marie-Hélène HEYTE, président,

Jean-Pierre FRANCO, conseiller,

Catherine BRISSET, conseiller,

Greffier lors des débats : Frédéric JANELA, adjoint administratif faisant fonction de greffier,

Greffier lors du prononcé : Véronique SAIGE

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

Selon protococole en date du 10 avril 2013, la société de droit suisse Helvesta AG, ayant pour associés MM. E Z, F A, G C et L M B, s’est engagée à acheter 3003 bons de souscription d’actions (BSA) pour un montant total de 3 000 333 euros dans le capital de la société Hyprevention SAS, ayant pour spécialité le développement, la fabrication et la commercialisation de dispositifs médicaux

implantables.

Un avenant a été conclu entre les parties le 19 janvier 2015, prolongeant jusqu’au 30 septembre 2015 le calendrier de réalisation du solde de l’investissement.

La société Helvesta n’a en réalité investi que la somme de 750 913 euros, en achetant 995 bons de souscription d’actions, pour un montant de 750 000 euros et n’a pas exercé son option sur le reste des bons de souscription d’actions.

Par acte d’huissier en date du 22 juin 2015, la société Hyprevention a fait assigner la société Helvesta en référé devant le tribunal de commerce de Bordeaux pour la voir :

A titre principal,

— condamner à exécuter ses obligations contractuelles, à savoir à exercer 2008 BSA-2013, pour un montant de 2 250 000 euros et à signer les bulletins de souscription correspondant,

A titre subsidiaire,

— condamner à exécuter ses obligations contractuelles, à savoir à exercer 515 BSA-2013, pour un montant de 500 002 euros et à signer les bulletins de souscription correspondant,

— condamner à verser le solde correspondant correspondant à l’exercice de 2008 BSA-2013, soit la somme de 1 749 933 euros, à titre conservatoire, sur un compte séquestre,

— condamner en toutes hypothèses à lui payer la somme de 6 000 000 euros à titre de provision à valoir sur la réparations des préjudices subis, et celle de 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle sollicitait en outre la désignation d’un expert financier, avec pour mission d’évaluer la société Hyprevention, de préciser dans un rapport la nature et la gravité des préjudices subis par cette dernière et de fournir toutes les informations comptables et financières sur le pronostic de son évolution.

Dans ses dernières conclusions devant le juge des référés, elle a sollicité la condamnation de la société Helvesta à lui payer la somme de 1500 000 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnité définitive au titre des préjudices subis, et la désignation d’un expert financier chargé de l’évaluer, de préciser la nature et la gravité des préjudices qu’elle a subis, et de fournir toutes informations comptables et financières sur le pronostic de son évolution.

Par jugement en date du 9 septembre 2015, la société Helvesta AG a fait l’objet d’une procédure de faillite en Suisse, à l’initiative de l’autorité fédérale de surveillance des marchés financiers suisses.

Cette décision n’a pas donné lieu à jugement d’exequatur en France.

Par ordonnance en date du 12 juillet 2016, le juge des référés du tribunal de commerce de Bordeaux a désigné en qualité d’expert M. H Y, avec pour mission d’évaluer les parts de la société Hyprevention, et de donner au tribunal tous éléments lui permettant de déterminer les responsabilités éventuellement encourues, et d’évaluer le préjudice éventuellement subi par l’une ou l’autre des parties.

Il a en revanche rejeté les autres demandes de la société Hyprevention, en raison de contestations sérieuses.

Le 2 octobre 2017, M. Y a déposé un pré-rapport.

Par acte en date du 15 septembre 2017, la société Hyprevention a fait assigner MM. E Z, F A, G C et L M B (procédure RG 2017 /R 01960), en qualité d’anciens dirigeants de la société Helvesta en demandant au juge des référés du tribunal de commerce de déclarer l’ordonnance de référé du 12 juillet 2016 commune aux défendeurs, en leur étendant les opérations d’expertise de M. Y, de proroger en tant que de besoin la mission dévolue à ce dernier.

Elle sollicitait également la condamnation des défendeurs au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le 16 novembre 2017, le juge chargé de la surveillance et du contrôle des opérations d’expertise au tribunal de commerce de Bordeaux a rejeté la demande de la société Hyprevention visant à différer le dépôt du rapport définitif.

L’expert H Y a donc déposé son rapport définitif le 16 novembre 2017, en concluant, notamment, que l’estimation de la société était comprise à fin mai 2017 dans une fourchette comprise entre 4 600 000 euros (valeur plancher) et 7 300 000 euros (valeur plafond).

Sur les responsabilités et les préjudices, il a indiqué qu’il ne pouvait formuler aucune position sur les responsabilités éventuellement encourues, mais qu’il était cependant probable que le défaut de trésoreries subi par la société Hyprevention au cours des années 2014 et 2015 soit à l’origine d’une réelle perte de chance en limitant les opportunités et le plan de marche prévisionnnel élaboré par la société, et la source d’un certain nombre de difficultés financières.

Par conclusions modificatives, la société a alors demandé au juge des référés, dans le cadre de cette instance concernant les anciens associés (RG 2017/R01960) la désignation d’un expert chargé de déterminer le préjudice dont elle a éventuellement souffert, notamment sur les points suivants :

— le décalage de trésorerie,

— les coûts fixes liés à l’aspect réglementaire supporté pendant au moins deux années,

— l’impossibilité de faire face aux coûts liés à la production, portant atteinte à sa crédibilité fournisseur, ceux liés à la commercialisation de ses produits, la réduction forcée de la masse salariale, les coûts humains et financiers du recours alternatif à des financemants alternatifs et insuffisants,

— la perte de chance liée notamment aux éventualités favorables suivantes: impossibilité de procéder à d’autres levées de fonds depuis 2016, non réalisation du plan d’affaire de la société.

Elle demandait en outre que l’expert soit chargé de déterminer les responsabilités éventuellement encourues, et notamment celle de la société Helvesta Ag, de MM. Z, A, B et C en qualité de dirigeants de la société Helvesta Ag.

Par acte en date du 2 mai 2018 (procédure RG 2018 /R00903), la société Hyprevention a fait assigner en référé la société Helvesta Ag (alors en liquidation) devant le président du tribunal de commerce de Bordeaux, en lui dénonçant la mise en cause des associés, et pour voir :

— ordonner la jonction des instances,

— ordonner la désignation d’un expert financier chargé de déterminer le préjudice dont elle a éventuellement souffert, et notamment :

— le décalage de trésorerie qu’elle a subi,

— les coûts fixes liés à l’aspect réglementaire supportés pendant au moins deux années,

— l’impossibilité de faire face aux coûts liés à la production, portant atteinte à sa crédibilité fournisseur,

— l’impossibilité de prendre en charge les coûts liés à la commercialisation de ses produits,

— la réduction forcée de la masse salariale,

— les coûts humains et financiers du recours alternatif à des financemants alternatifs et insuffisants,

— la perte de chance liée notamment aux éventualités favorables suivantes: impossibilité de procéder à d’autres recherches de fonds et donc de procéder à d’autres levées de fonds: baisse certaine des opportunités de lever des fonds depuis 2016, non-rélisation du plan d’affaire de la société,

— de déterminer les responsabilités éventuellement encourues, et notamment celle de la société Helvesta Ag, de MM. Z, A, B et C en qualité de dirigeants de la société Helversta Ag,

— sous réserve des conclusions du rapport d’expertise définitif de l’expert ainsi désigné, de condamner la société Helvesta Ag, MM. Z, A, B et C à lui payer la somme provisionnelle de 50 000 euros à valoir sur l’indemnisation de son préjudice,

— en tout état de cause, de condamner solidairement la société Helvesta AG, MM. Z, A, B et C aux dépens et au paiement de la somme de 15 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Helvesta Ag en liquidation représentée par la société Vischer a conclu à l’irrecevabilité des dernières demandes de la société Hyprevention, sur le fondement de l’article 70 du code de procédure civile, à l’irrecevabilité et subsidiairement au rejet des demandes formées à son encontre.

MM. C et A ont conclu également à l’irrecevabilité des demandes nouvelles de la société Hyprevention en application de l’article 70 du code de procédure civile, et subsidiairement à leur rejet, au motif que le juge des référés ne pouvait apprécier le premier rapport d’expertise.

Plus subsidiairement encore, ils demandaient au juge des référés de rejeter les demandes formées à leur encontre en qualité d’intervenants forcés.

MM. E Z et L M B n’ont pas comparu devant le juge des référés.

Le 2 mai 2018, la société Hyprevention a également fait assigner au fond la société Helvesta devant le Tribunal de commerce.

Après jonction des instances n° 2017R01960 et 2018R00903, la présidente du Tribunal de

commerce de Bordeaux statuant en référé a, par ordonnance en date du 20 novembre 2018 :

— déclaré recevables les demandes de la société Hyprevention, tant à l’encontre de la société Helvesta Ag en liquidation représentée par Vischer A que de MM. E Z, F A, G C et L M B,

— désigné en qualité d’expert Mme I D, avec la mission réclamée par la société Hyprevention,

— rejeté la demande de condamnation provisionnelle et dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

— réservé les dépens.

Par déclaration en date du 14 janvier 2019, la société Helvesta Ag, M. A et M. C ont relevé appel de cette ordonnance.

Par jugement en date du 20 mars 2019, le Tribunal de commerce de Bordeaux a ouvert une procédure de sauvegarde à l’égard de la société Hyprevention, en désignant la Selarl P-X-J-K en qualité de mandataire.

L’affaire a été fixée à bref délai par ordonnance en date du 22 mars 2019.

La société Helvesta Ag, M. A et M. C ont conclu devant la cour les 26 mars 2019, 28 juin 2019 et 15 novembre 2019.

L a s o c i é t é H y p r e v e n t i o n e t M a î t r e M a l m e z a t – P r a t , d e l a S E L A R L P-X-J-K, intervenant volontaire es-qualité de mandataire ont remis au greffe et notifié le 29 mai 2019 des conclusions tendant à la confirmation de l’ordonnance, en ce qui concerne la désignation de Mme D en qualité d’expert, et, par voie d’infirmation partielle de la décision, à la condamnation solidaire de la société Helvesta, de MM. C, A, Z et B à payer la somme de 1 500 000 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnité définitive et à supporter les frais de l’expertise de Mme D.

Elle réclamait en outre paiement de la somme de 15 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme D a déposé son rapport définitif en l’état, le 12 septembre 2019.

Par ordonnance en date du 13 novembre 2019, le magistrat désigné par le premier président a :

— déclaré tardives et irrecevables les conclusions déposées et notifiées le 29 mai 2019 par Hyprevention,

— dit que la cour est seule compétente pour statuer sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir de Maître P-X de la SELARL P-X-J-K, intervenant volontaire, es-qualité de mandataire judiciaire, en vertu du jugement du tribunal de commerce en date du 20 mars 2019,

— rejeté la demande formée par la société Helvesta AG, M. F A, G C sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions déposées et notifiées le 15 novembre 2019, MM. A et C

ainsi que la société Helvesta AG demandent à la cour :

— de constater l’absence d’intérêt à agir de la Selarl P-X-J-K, intervenant volontaire, es-qualité de mandataire judiciaire de la société Hyprevention,

— d’infirmer l’ordonnance en ce qu’elle a déclaré recevables les demandes de la société Hyprevention, désigné Mme D en qualité d’expert,

— de confirmer l’ordonnance en ce qu’elle a rejeté la demande de provision,

statuant à nouveau,

— de constater que la société Hyprevention a abandonné en cours de la présente instance ses demandes visant à une extension de la mesure d’expertise dans la procédure 2017/R01960,

— de constater que ses demandes ont été modifiées dans le cadre de cette instance par voie de conclusions en date du 2 mars 2018,

— de dire que ces demandes sont irrecevables car ne se rattachant pas de manière suffisante avec les prétentions originaires, comme l’exige l’article 70 du code de procédure civile,

— en conséquence, de déclarer les demandes irrecevables,

Subsidiairement, si la cour venait à déclarer les demandes recevables,

Concernant la société Helvesta, de constater que la demande d’expertise se heurte à l’autorité de la chose jugée,

— de rejeter la demande d’expertise en ce qu’elle concerne la société Helvesta Ag,

Plus subsidiairement, si la demande était déclarée recevable au regard de l’autorité de chose jugée, de constater l’absence de motif légitime relativement à une expertise visant la société Helvesta,

— de rejeter la demande d’expertise en ce qu’elle concerne la société Helvesta Ag,

Concernant MM. A et C,

-de constater l’absence de motif légitime concernant MM. A et C,

— de rejeter en conséquence la demande d’expertise en ce qu’elle concerne MM. A et C,

En tout état de cause,

— de constater que les conclusions de la société Hyprevention irrecevables, telles que reconnu par l’ordonnance du 13 novembre 2019, et de la débouter en conséquence de toute demande formulée dans celles-ci,

— de constater que la Selarl P-X-J-K ne formule aucune demande, à quelque titre que ce soit, et en tout état de cause, de rejeter toute éventuelle prétention de celle-ci,

— d e c o n d a m n e r l a s o c i é t é H y p r e v e n t i o n s o l i d a i r e m e n t a v e c l a S e l a r l

P-X-J-K au paiement de 20 000 euros au bénéfice de chacun des appelants, en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des faits de l’espèce, des prétentions et moyens des parties.

Lors de l’audience du 18 novembre 2019, le conseil de la société Hyprevention et de la Selarl P-X-J-K es-qualité de mandataire judiciaire a formé une demande de renvoi, qui a été rejetée.

MOTIFS DE LA DECISION:

Il sera constaté, en premier lieu, que la cour n’a pas été saisie par la Selarl P-X-J-K, es-qualité de mandataire judiciaire, de conclusions de procédure tendant à voir écarter des débats, comme tardives, les dernières conclusions déposées et notifiées le 15 novembre 2019 à 14 h 03 par MM. C, A et la société Helvesta.

En toutes hypothèses, il sera observé que ces conclusions ont seulement repris celles déposées le 28 juin 2019, à l’occasion de l’incident de procédure devant le conseiller désigné par le premier président, en ce qui concerne le défaut d’intérêt à agir de ce mandataire, de sorte que celui-ci disposait d’un délai suffisant pour répondre utilement à ce moyen avant l’audience du 18 novembre 2019.

1 – S u r l ' i n t é r ê t à a g i r d e M a î t r e M a l m e z a t – P r a t , d e l a S E L A R L P-X-J-K:

Selon les dispositions de l’article L.622-20 du code de commerce, le mandataire judiciaire désigné par le tribunal a seul qualité pour agir au nom et dans l’intérêt collectif des créanciers.

Par jugement en date du 20 mars 2019, le Tribunal de commerce de Bordeaux a prononcé l’ouverture d’une procédure de sauvegarde à l’égard de la société Hyprevention, en désignant la SELARL P-X – J-K en qualité de mandataire judiciaire.

En application de l’article L.622-20 du code de commerce, celle-ci avait donc à la fois qualité et intérêt à intervenir volontairement dans le cadre de la procédure pendante devant la cour.

Toutefois, il sera constaté que dans les conclusions communes en date du 29 mai 2019, elle n’a pas formé de prétentions es-qualité, ni déposé de moyens propres dans l’intérêt collectif des créanciers.

2- Sur la recevabilité des demandes à l’encontre de MM. F A et G C:

Dès lors que MM. F A et G C ont été régulièrement assignés le 15 septembre 2017 (numéro 2017 R 1960), et qu’ils étaient représentés par avocat, la société Hyprevention a pu valablement, en cours d’instance, renoncer à sa prétention initiale, tendant à voir étendre à ces associés la mesure d’expertise confiée à M. Y (qui avait déposé son rapport), et demander en définitive au juge des référés, par conclusions du 15 mars 2018 soutenues oralement lors de l’audience du 25 septembre 2018, de désigner à nouveau un expert, avec une mission détaillée.

Cette demande nouvelle est recevable au regard des dispositions de l’article 70 du code de

procédure civile dès lors qu’elle se rattachait par un lien suffisant à la demande initiale, s’agissant dans les deux cas de voir constater par expert judiciaire, au contradictoire de MM. A et C, les éventuelles conséquences dommageables du non-respect allégué du protocole du 10 avril 2013, en vue d’une éventuelle action en responsabilité à l’encontre des associés de la société Helvesta Ag.

Il convient de confirmer l’ordonnance en ce qu’elle a rejeté cette fin de non-recevoir, en ce qui concerne MM. F A et G C.

3- sur la recevabilité des demandes à l’encontre de la société Helvesta:

Selon les dispositions de l’article 488 du code de procédure civile, ''l’ordonnance de référé n’a pas, au principal, l’autorité de la chose jugée.

Elle ne peut être modifiée ou rapportée en référé qu’en cas de circonstances nouvelles.''

En l’espèce, la société Helvesta souligne à bon droit que les demandes formées à son encontre par la société Hyprevention dans le cadre de la présente instance, consécutive à l’assignation du 2 mai 2018, avaient le même objet et la même cause que celles formées dans le cadre de l’assignation du 22 juin 2015 puisqu’il s’agissait dans les deux cas de voir désigner un expert chargé, notamment, de préciser la nature et la gravité des préjudices subis par la société Hyprevention, en raison du manquement allégué de la société Helvesta à ses obligations contractées dans la convention du 10 avril 2013, et d’obtenir la condamnation de cette dernière à lui payer une provision à valoir sur la réparation de son préjudice.

Or, lors de l’audience du 25 septembre 2018, la société Hyprevention n’a pas démontré l’existence de circonstances nouvelles survenues depuis l’ordonnance du juge des référés du 12 juillet 2016, justifiant qu’une nouvelle expertise soit ordonnée au contradictoire de la société Helvesta, ou qu’une condamnation à provision soit désormais prononcée.

La cour ne peut en effet considérer comme circonstance nouvelle le fait que M. Y ait déposé son rapport définitif le 16 novembre 2017, avant qu’une nouvelle ordonnance de référé puisse rendre ses opérations d’expertise communes et opposables aux anciens dirigeants de la société Helvesta.

En outre, ainsi que le soutient l’appelante, il appartenait à la société Hyprevention de contester les éventuelles carences ou insuffisances du premier rapport d’expertise judiciaire dans le cadre d’une procédure au fond, en sollicitant alors une nouvelle mesure d’instruction, ou un complément d’expertise, mais non en engageant une seconde procédure de référé-expertise, qui ne répondait pas aux conditions prévues par l’article 145 du code de procédure civile, à défaut d’intérêt légitime.

Il convient en conséquence d’infirmer l’ordonnance et de déclarer irrecevables les demandes de la société Hyprevention à l’encontre de la société Helvesta.

4- Sur le bien-fondé des demandes de la société Hyprevention, à l’encontre de MM. F A et G C:

La société Hyprevention a fait assigner MM. F A et G C par acte du 15 septembre 2017 en leur qualité d’anciens dirigeants de la société Helvesta, en sollicitant ensuite, par dernières conclusions soutenues oralement lors de l’audience du 25 septembre 2018, qu’une expertise soit ordonnée à leur contradictoire, et qu’une condamnation soit prononcée à leur encontre, solidairement avec MM. Z et B et la société Helvesta (à hauteur de 50 000 euros) à valoir sur l’indemnisation de son préjudice.

En application des articles 145 et 873 alinéa 2 du code de procédure civile, elle devait donc justifier d’un intérêt légitime à voir ordonner une mesure d’instruction à leur contradictoire, et de l’existence d’une obligation non sérieusement contestable.

Il ressort de la pièce 2 produite par les appelants (conclusions responsives numéro 1 de la société Hyprevention) que celle-ci a invoqué devant le juge des référés du tribunal de commerce que la société Helvesta avait fait l’objet de nombreux soupçons de fraude financière, et en tous cas d’exercice d’activités financières non-autorisées, ce qui avait justifié son placement en liquidation judiciaire à la suite d’une circulaire de la FINMA (autorité fédérale de surveillance des marchés financiers suisses).

Toutefois, il ressort de l’extrait de la circulaire établie par la FINMA le 4 juillet 2017 (intégré dans les conclusions précitées) que les noms de MM. A et C n’étaient cités, en qualité d’anciens directeurs, que pour la perception de sommes dépassant le salaire convenu entre janvier et mars 2015 pour un montant respectif de 7000 Francs suisses et 10 000 Francs suisses. La note ne conclut par pour autant à une faute avérée puisqu’il est précisé ''pour juger s’il existe ou non à ce sujet un acte juridique révocable, et quel était le fondement juridique des sommes versées en cause, la liquidatrice de la faillite procédera à d’autres éclaircissements en temps voulu.''

Au vu de cette circulaire, les soupçons d’actes frauduleux concernaient essentiellement M. E Z, qui aurait profité de virements non justifiés directement ou indirectement (par l’intermédiaire de la société Captis Invest Ag).

Par ailleurs, MM. C et A indiquent que la procédure de la FINMA a été invalidée par la cour fédérale suisse, ce qui a eu pour conséquence de mettre fin à la procédure de liquidation de la société Helvesta.

Il apparaît en définitive que la société Hyprevention n’a pas justifié devant le premier juge de circonstances ou de faits susceptibles de constituer des fautes personnelles détachables, en lien de causalité avec le préjudice invoqué.

Il n’existait donc pas de motif légitime permettant d’ordonner une mesure d’expertise au contradictoire de MM. C et A, de sorte qu’il convient d’infirmer l’ordonnance sur ce point et de rejeter la demande de la société Hyprevention.

En revanche, il existait une contestation sérieuse sur le principe de l’obligation de MM. C et A, et il convient de confirmer l’ordonnance, en ce qu’elle a rejeté la demande de condamnation provisionnelle.

Sur les demandes accessoires:

Il est équitable d’allouer, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, une indemnité de 2000 euros à M. A, M. C et à la société Helvesta, chacun, au titre des frais irrépétibles d’appel.

La société Hyprevention et la SELARL P-X-J-K es-qualité de mandataire judiciaire seront condamnés in solidum aux dépens, sauf ceux de première instance qui seront supportés uniquement par la société Hyprevention.

PAR CES MOTIFS:

LA COUR,

Déclare recevables les conclusions de la société Helvesta AG, de M. A et de M. C, en date du 15 novembre 2019,

Constate que les conclusions en date du 29 mai 2019 de la société Hyprevention ont été déclarées irrecevables par ordonnance du conseiller désigné par le premier président en date du 13 novembre 2019, qui n’a pas été l’objet d’un déféré,

Confirme l’ordonnance, en ce qu’elle a :

— déclaré recevables les demandes formées par la société Hyprevention à l’encontre de M. G C et de M. F A,

— rejeté la demande de la société Hyprevention tendant à voir condamner solidairement M. G C et M. F A au paiement d’une indemnité provisionnelle,

Infirme l’ordonnance pour le surplus,

Statuant à nouveau, et y ajoutant,

D é c l a r e r e c e v a b l e l ' i n t e r v e n t i o n v o l o n t a i r e à l ' i n s t a n c e d e l a S E L A R L P-X-J-K en sa qualité de mandataire judiciaire, dans le cadre de la procédure de sauvegarde de la société Hyprevention,

Constate que la SELARL P-X-J-K en sa qualité de mandataire judiciaire n’a saisi la cour d’aucune demande propre, dans l’intérêt collectif des créanciers,

Déclare irrecevables les demandes de la société Hyprevention à l’encontre de la société Helvesta,

Rejette la demande d’expertise formée par la société Hyprevention, au contradictoire de MM. F A et G C, pour défaut d’intérêt légitime,

Condamne la société Hyprevention à payer à M. G C, M. F A et la société Helvesta, chacun, une indemnité de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette les autres demandes,

Condamne in solidum la société Hyprevention et la SELARL P-X-J-K aux dépens, sauf ceux de première instance qui resteront à la charge de la société Hyprevention.

Le présent arrêt a été signé par Madame Marie-Hélène HEYTE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

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Textes cités dans la décision

  1. Code de commerce
  2. Code de procédure civile
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Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 20 décembre 2019, n° 19/00264