Cour d'appel de Chambéry, 2 juillet 2013, n° 12/02507

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Chambéry, 2 juill. 2013, n° 12/02507
Juridiction : Cour d'appel de Chambéry
Numéro(s) : 12/02507
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Haute-Savoie, 17 octobre 2012, N° 20100435

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE

Sécurité Sociale

ARRÊT DU 02 JUILLET 2013

RG : 12/XXX

A C X

C/ SAS MITIEUX T.P – CPAM de Haute-Savoie

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de HAUTE SAVOIE en date du 18 Octobre 2012, Recours N° 20100435

APPELANT :

Monsieur A C X

né le XXX à XXX

XXX

XXX

Représenté à l’audience par Me Béatrice BONNET CHANEL, avocate au barreau d’ANNECY

INTIMEES :

SAS MITIEUX T.P.

XXX

XXX

Représentée à l’audience par Me ERLICH ( SELAFA FIDAL, avocats au barreau d’ANNECY)

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE HAUTE-SAVOIE

XXX

XXX

Représentée à l’audience par Mme Z, agent dûment munie d’un pouvoir spécial

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 14 Mai 2013 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur LACROIX, Président, qui s’est chargé du rapport,

Madame MERTZ, Conseiller

Monsieur ALLAIS, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme ALESSANDRINI,

Faits, procédure et prétentions des parties

A C X , qui était employé par la SAS MITHIEUX TP, substituée à la SA Entreprise Fernand MITHIEUX, en qualité de maçon, classé au coefficient 125 de

la convention collective nationale des travaux publics-ouvriers-du 15 décembre 1954, a été victime d’un accident du travail survenu le 30 octobre 2006 sur un chantier au CHINAILLON- LE GRAND BORNAND-(Haute-Savoie), sur lequel ce salarié travaillait à poser des canalisations d’eaux pluviales, en relation avec un locateur d’ouvrage conduisant une pelleteuse louée par l’entreprise pour creuser les tranchées : aux termes de la déclaration d’accident du travail établie par le représentant de l’employeur le 31 octobre 2006,A C X a été accidenté et grièvement blessé au pied droit par l’effet du basculement d’un tuyau en cours de positionnement dans une tranchée, qui lui avait écrasé le pied, faute d’avoir été suffisamment bien calé.

Après avoir subi plusieurs interventions chirurgicales au cours des mois d’octobre et de novembre 2006, avoir été hospitalisé jusqu’au 20 décembre 2006, et avoir effectué un séjour en centre de convalescence jusqu’au 20 février 2007, A C X s’est vu prescrire des arrêts de travail sans solution de continuité, jusqu’à ce qu’il soit déclaré consolidé le 31 août 2008 par la CPAM de Haute-Savoie, qui lui a notifié, le 19 septembre 2008, l’attribution, à compter du 1er septembre 2008, d’une rente annuelle de 6 052,23 €, payable trimestriellement à raison de 1 513,05 €, pour un taux d’incapacité permanente fixé à 45 %.

À la suite de deux visites pratiquées les 1er et 15 septembre 2008, le médecin du travail a déclaré A C X inapte au poste de maçon qu’il occupait précédemment mais apte à un poste très allégé, ne comportant pas le port de chaussures de sécurité, ni d’effort de manutention ou de port de charge, ni de station debout prolongée ni de marche prolongée ni de marche sur sols et surfaces irrégulières.

Après avoir recueilli, le 3 octobre 2008, l’avis des délégués du personnel de l’entreprise, lesquels ont constaté l’impossibilité de proposer un poste à titre de reclassement à A C X et après avoir convoqué celui-ci à un entretien préalable à son éventuel licenciement, la SAS MITHIEUX TP lui a notifié sa décision de le licencier, en considération de son inaptitude et en raison de l’impossibilité de lui proposer une solution de reclassement, compte tenu du caractère restrictif des avis exprimés par le médecin du travail et de l’absence de poste disponible dans l’entreprise correspondant à ces préconisations.

Le 7 mai 2010, A C X a saisi la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Haute-Savoie, en vue d’engager la procédure tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur à l’origine de l’accident dont il a été victime le 30 octobre 2006, conformément aux dispositions des articles L 452-1 du code du travail.

Le 5 juillet 2010, la CPAM de Haute-Savoie a constaté l’échec de la procédure préalable de conciliation, en l’absence de réponse de la part de la SAS MITHIEUX TP aux convocations qui lui avaient été adressées en vue de l’organisation d’une réunion contradictoire entre les parties.

Saisi par A C X, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception expédiée le 9 juillet 2010, de demandes tendant à la poursuite de la procédure, en vue d’obtenir la reconnaissance d’une faute inexcusable commise par son employeur, la SAS MITHIEUX TP, la majoration de la rente d’accident du travail qui lui était servie au taux maximum, l’organisation d’une expertise judiciaire et le paiement d’une provision à valoir sur l’indemnisation de son préjudice définitif, et statuant par jugement rendu le 18 octobre 2012, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Savoie

— a jugé que les conditions de la faute inexcusable n’étaient pas réunies,

— a débouté A C X de l’ensemble de ses demandes,

— a déclaré ce jugement commun à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Haute-Savoie,

— a exclu l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la SAS MITHIEUX TP .

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception expédiée le 22 novembre 2012, A C X a formé un appel, portant sur tous les chefs de cette décision, contre le jugement rendu le 18 octobre 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Savoie, qui lui a été notifié le 15 novembre 2012.

Par voie de conclusions déposées au greffe le 15 mars 2013, développées ensuite oralement par son avocat au cours des débats à l’audience du 14 mai 2013 et auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé des moyens et arguments de l’appelant, A C X a demandé à la Cour :

— d’infirmer le jugement entrepris,

— de juger que l’accident dont il avait été victime le 30 octobre 2006 était dû à la faute inexcusable de son employeur, la SAS MITHIEUX TP,

— de juger que la rente accident du travail qui lui était servie devait être majoré à son taux maximum et suivre l’évolution de ce taux,

— d’ordonner une mesure d’expertise judiciaire, avant de statuer sur l’indemnisation de son préjudice, lequel devait comprendre également l’indemnisation de son préjudice personnel, en confiant à l’expert désigné une mission définie sur le double fondement de l’article L 452-3 du code de la sécurité sociale et de la nomenclature DINTILHAC,

— subsidiairement, dans l’hypothèse où la mission d’expertise exclurait la nomenclature DINTILHAC, de lui donner acte qu’il solliciterait, en tout état de cause, l’indemnisation de son préjudice intégral, notamment des postes non visés à l’article L 452-3 du code de la sécurité sociale, et d’ordonner à l’expert de se prononcer sur les postes correspondant,

— de condamner la SAS MITHIEUX TP à lui payer une provision de 15'000 €, à valoir sur l’indemnisation de son préjudice définitif, compte tenu des éléments relatifs à son préjudice personnel déjà objectivés par son médecin conseil, indépendamment de la lourdeur de son préjudice en général, en considération d’un taux d’IPP de 45 %,

— de déclarer l’arrêt à venir opposable à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Haute-Savoie, laquelle devrait faire l’avance de la provision ainsi allouée,

— de condamner la SAS MITHIEUX TP à lui payer un défraiement de 2 000 €, en vertu de l’article 700 du code de procédure civile, au titre de la procédure suivie devant le tribunal des affaires de sécurité sociale , et un autre défraiement de 2 000 €, en cause d’appel, sur le même fondement, soit 4 000 € au total.

L’appelant s’est référé aux dispositions des articles L 230-2, R 233-1, anciens applicables à la date de son accident du travail, devenus les articles L 4121-1 et R 4321-1 nouveaux du code du travail, imposant à l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, ainsi qu’aux articles L 4121-4, L 4121-5, R 4323-34, R 4323-36 et R 4323-35 du même code, régissant plus

particulièrement les tâches inhérentes au soulèvement, au transport et au dépôt de charges lourdes, sur un chantier et en présence de personnes impliquées dans les travaux, pour stigmatiser les manquements reprochables à la SAS MITHIEUX TP, quant à l’obligation de sécurité de résultat qu’elle devait se préoccuper de respecter, dans le cadre du chantier réalisé au Grand Bornand, auquel il avait été affecté le 30 octobre 2006 et au cours duquel il a été victime d’un accident survenu le premier jour.

Il a plus particulièrement mis l’accent sur les éléments suivants :

— au démarrage de ce chantier, il n’était entouré d’aucun autre salarié de la SAS MITHIEUX TP et se trouvait exclusivement en binôme avec un sous-traitant de l’entreprise, sans qu’aucun chef de chantier n’ait été présent,

— il se trouvait au fond d’une tranchée, lorsque ce conducteur d’une pelleteuse, à défaut de tout appareil de levage pour lui transmettre une charge aussi lourde, a balancé dans ladite tranchée une buse en béton très lourde, qui lui avait ainsi écrasé le pied droit,

— aucun mode opératoire précis et contradictoire n’avait été mis en place, aucune consigne donnée et aucune vérification n’avait été faite par l’employeur du respect des règles de sécurité, spécialement quant au port de chaussures de sécurité,

— les rapports des pompiers du centre de secours du Grand Bornand et de Thones, intervenus pour lui porter secours, faisaient état d’une personne ensevelie, le pied coincé par une buse en béton et très grièvement endommagé.

A C X a dénié à son ancien employeur le droit de soutenir qu’il n’aurait pas eu conscience du danger dans une situation très habituelle dans le secteur d’activité des entreprises du bâtiment, très concerné par les accidents du travail, alors qu’il appartenait à la SAS MITHIEUX TP de veiller à la sécurité de ses salariés, sans pouvoir s’en décharger sur son sous-traitant ; il a dénié toute valeur probante à l’attestation établie par ce sous-traitant et non conforme à l’article 202 du code de procédure civile, dans la mesure où celui-ci était économiquement dépendant de la SAS MITHIEUX TP et s’exprimait de manière totalement partiale, en des termes qui lui étaient inspirés par son donneur d’ouvrage ; il a exclu que puisse être retenue l’hypothèse d’une faute commise par lui, alors que l’employeur ne pourrait s’exonérer qu’en rapportant la preuve d’une faute inexcusable qu’il aurait lui-même commise, mais qu’étant simple maçon, catégorie ouvriers, il était bien en peine de prendre quelque initiative que ce soit.

Il a contesté la version soutenue par son ancien employeur, avec l’appui du sous-traitant de celui-ci, en leur objectant qu’il était inconcevable qu’un tuyau, déjà posé au fond de la tranchée, pût lui écraser le pied en lui occasionnant de tels dommages (taux d’IPP de 45 %), par le simple effet d’un déplacement inopiné de cette canalisation, au prétexte qu’elle aurait été mal calée, que beaucoup plus vraisemblablement, le poids de ce tuyau avait été amplifié par sa chute à l’intérieur de la tranchée sous l’action de la pelleteuse conduite par le sous-traitant, qu’il ne pouvait être exclu qu’il ait lui-même été dans l’obligation de descendre à l’intérieur de la tranchée, pour vérifier la pente du tuyau, qu’il était nécessaire qu’il se soit trouvé à l’arrivée du tuyau pour le réceptionner, le positionner et vérifier son niveau, et que les deux personnes concourant à cette installation avaient été contraintes d’improviser à la va-vite, sans prendre aucune précaution ni respecter aucune procédure d’alerte, dxes travaux pour lesquels ils ne disposaient pas des moyens en adéquation avec les manoeuvres effectuées.

Aux termes d’écritures déposées au greffe le 10 mai 2013, également reprises ensuite oralement par son avocat au cours des débats à l’audience du 14 mai 2013 et auxquelles il est expressément renvoyé pour prendre une connaissance plus précise du détail de l’argumentation de l’intimée, la SAS MITHIEUX TP a conclu :

— à la confirmation du jugement rendu le 18 octobre 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Savoie,

— au débouté des demandes formées par A C X, tendant à la reconnaissance d’une faute inexcusable commise par son employeur, au paiement d’une provision et à l’organisation d’une expertise judiciaire,

— à titre subsidiaire, à l’exclusion de la mission d’expertise de toute orientation vers la recherche d’éléments permettant une évaluation de la perte de gains professionnels futurs, de la perte de gains professionnels actuels et de l’incidence professionnelle, sauf à compléter cette mission par une analyse des doléances de la victime au regard de sa situation vis-à-vis des régimes de retraite, d’une part, et en considération des gestes professionnels rendus plus difficiles ou impossibles compte tenu des séquelles retenues, d’autre part,

— à ce que l’arrêt à intervenir soit déclaré commun et opposable à la CPAM de Haute-Savoie,

— à la condamnation de A C X à lui payer un défraiement de 1 500 €, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile .

L’intimée a d’abord précisé qu’elle avait mis en place de longue date un document unique de prévention des risques dans l’entreprise, communiqué dans sa version contemporaine de l’accident, mise à jour en 2006, puis que le chantier sur lequel A C X maçon expérimenté, âgé de 57 ans au moment de l’accident, travaillait était un chantier simple, sans difficulté particulière, sans opération d’une quelconque complexité spécifique, que le salarié était déjà intervenu à de multiples reprises sur des chantiers de même nature, dont il avait parfaitement l’habitude, la formation et l’expérience, qu’il bénéficiait d’une expérience de 11 années acquise au service de la SAS MITHIEUX TP, qu’il était particulièrement bien formé pour ce type d’opérations et que ses capacités étaient tout à fait adaptées à la mise en oeuvre des précautions nécessaires pour sa santé et sa sécurité.

La SAS MITHIEUX TP s’est défendue d’avoir commis aucune faute inexcusable à l’origine de l’accident dont A C X avait été victime, en opposant à la version des faits présentée par l’appelant :

— que les déclarations de ce salarié n’étaient corroborées par aucun élément matériel et ne pouvaient valoir comme éléments de preuve, que ses affirmations n’étaient corroborées par aucune constatation effectuée par les pompiers et, par les gendarmes, qui étaient présents sur place,

— qu’il s’agissait bien du premier jour du chantier mais que A C X avait commencé à travailler depuis 7h30 du matin, soit depuis 2 heures, lorsque l’accident est survenu,

— qu’un conducteur de travaux était présent au commencement du chantier, pour vérifier les conditions d’intervention sur ledit chantier,

— que le collecteur d’eaux pluviales, élément de la canalisation que l’équipe formée par A C X et le conducteur d’une pelleteuse devaient réaliser, était déjà posé dans la tranchée, avant l’accident, lorsque le premier y était descendu pour des motifs contrevenant aux consignes de sécurité applicables, mais qu’il n’était nullement en train d’attendre à l’intérieur de la tranchée la réception du collecteur litigieux, suivant les déclarations effectuées par le second et confirmées en tous points par la déclaration d’accident du travail, laquelle n’avait jamais été contestée par la victime,

— que les dispositions des articles R 4323-34, R 4323-35 et R 4323-36 du code du travail s’avéraient donc inapplicables au cas d’espèce, aucune charge n’ayant été transportée au-dessus de la tête du salarié,

— que A C X n’avait pas reçu brutalement sur le pied un tuyau qui se trouvait au sol, mal calé, et qui avait roulé, mais qui n’avait aucunement été « balancé » au-dessus de lui,

— que seul le pied de la victime était coincé par une buse en béton, suivant le rapport du service départemental d’intervention et de secours, sur lequel la mention « personnes ensevelie » n’avait été cochée que par défaut, de manière à renseigner un code d’intervention sur l’imprimé,

— que A C X n’était pas seul sur le chantier, mais qu’il avait été dégagé par des collègues de travail, suivant le rapport d’intervention.

L’intimée a rejeté la responsabilité de l’accident du travail dont A C X avait été victime sur ce salarié, lequel avait contrevenu lui-même à son obligation de sécurité, telle que légalement prévue par l’article L 4122-1 du code du travail, pour être descendu dans la tranchée à côté du tuyau, au lieu de rester constamment au-dessus de ce tuyau pour en vérifier la pente, avant de le caler et de le remblayer, suivant une méthode de travail habituelle, et pour avoir ainsi méconnu une obligation élémentaire de sécurité, qui avait été la cause déterminante de l’accident, d’une part, et pour avoir omis de porter des chaussures de sécurité mises à sa disposition, conformément au document unique de prévention des risques d’entreprise, dans sa version de 2006 contemporaine de l’accident, d’autre part.

La SAS MITHIEUX TP a souligné qu’elle ne pouvait donc anticiper sur le fait que ce salarié contreviendrait cumulativement à deux règles de sécurité mais qu’elle ne pouvait pas, en toute hypothèse, avoir conscience d’un danger auquel elle exposait son salarié sur un chantier à l’occasion duquel toutes les mesures destinées à en prévenir les dangers potentiels étaient en place.

La Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Haute-Savoie s’en est rapportée à l’appréciation de la cour sur la demande tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable commise par la SAS MITHIEUX TP et sur les demandes en paiement d’une provision et aux fins d’expertise.

Discussion

Sur la caractérisation d’une faute inexcusable commise par l’employeur

Il incombe au salarié victime d’un accident du travail déjà pris en charge comme tel par la Caisse Primaire d’assurance maladie, qui engage une action tendant à obtenir une indemnisation complémentaire dans les conditions définies par les articles L 452-1 et suivants du code de la sécurité sociale, de rapporter la preuve de ce que cet accident était dû à la faute inexcusable de son employeur ou de ceux qu’il s’était substitués dans la direction, d’établir plus particulièrement qu’à défaut de respecter des règles générales ou spécifiques de sécurité applicables à un processus de production ou à la réalisation de prestations ou encore faute de mettre à la disposition du personnel de l’entreprise un matériel conforme aux normes et/ou exempt de vice apparent ou en s’abstenant de rester attentif à une organisation et un management propres à limiter les tensions et conflits dans les relations de travail, cet employeur ne pouvait pas ne pas avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, en de telles circonstances, d’une part, mais aussi de démontrer qu’il a négligé ainsi de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et/ou mentale des salariés de l’entreprise contre les risques identifiables comme accidentogènes dans les situations existantes, en considération de l’activité développée par cette entreprise, conformément au principe énoncé à l’article L 4121-1 du code du travail .

Cependant, il suffit que la faute reprochable à l’employeur soit une cause nécessaire de survenance de l’accident du travail et il importe peu qu’elle n’en ait pas été la seule cause ni la cause déterminante et même que le salarié victime d’un accident ait commis une ou plusieurs fautes qui auraient concouru à la réalisation de son propre dommage, réserve faite de la caractérisation d’une faute inexcusable ou intentionnelle de la victime susceptible de réduire le champ de l’indemnisation de celle-ci, en application des dispositions de l’article L 453-1 du code de la sécurité sociale.

En l’espèce, l’accident du travail dont A C X a été victime le 30 octobre 2006, à 9h45, sur un chantier ouvert au Chinaillon, commune du Grand Bornand (Haute-Savoie), dans le cadre duquel la SAS MITHIEUX TP réalisait un marché de pose de canalisations d’eaux pluviales, a fait l’objet d’une déclaration établie le 31 octobre 2006, par une secrétaire de l’entreprise, au siège social de celle-ci, à Seynod, en fonction des éléments recueillis de la part d’autres préposés mais sans description du même accident par la victime elle-même, laquelle a été hospitalisée pour subir plusieurs interventions chirurgicales et rester en observation, au centre hospitalier d’Annecy puis au centre hospitalier universitaire de Grenoble et de nouveau au centre hospitalier d’Annecy jusqu’au 20 décembre 2006, avant d’effectuer un séjour de convalescence au centre de Villaz jusqu’au 20 février 2007 (pièce n°4 du dossier de l’appelant).

Les circonstances de l’accident ont été ainsi relatées par la secrétaire de l’entreprise, en identifiant un témoin dénommé D E, sans mentionner alors ses fonctions ni sa qualité sur le chantier, dans le cadre de la déclaration d’accident du travail ni l’intervention d’une pelleteuse conduite par celui-ci, et ce, dans les termes suivants :

Alors qu’il (A C X) positionnait un tuyau dans une tranchée, celui-ci, mal calé, a roulé, lui écrasant le pied.

Il n’est pas justifié, ni même allégué que le salarié victime, hospitalisé pendant quatre mois et astreint à des soins de rééducation fonctionnelle en raison de la gravité de sa blessure, jusqu’à sa consolidation intervenue le 31 août 2008, avant d’être licencié pour inaptitude le 17 octobre 2008, ait eu connaissance de cette déclaration d’accident du travail, par son employeur ou par l’intermédiaire de la CPAM de Haute-Savoie, avant de se résoudre à engager une procédure tendant à faire reconnaître la faute inexcusable de la SAS MITHIEUX TP, le 7 mai 2010, de telle sorte qu’il ne peut être tiré argument de l’absence de toute contestation de la part de l’appelant sur la relation initiale du déroulement de l’accident, présentée de manière non contradictoire.

C’est après avoir été avertie par la CPAM de Haute-Savoie de l’engagement de la procédure de conciliation préalable à la poursuite d’une instance en vue de voir reconnaître une faute inexcusable de l’employeur le 20 mai 2010 (pièce n° 6 du dossier de l’appelant), que la SAS MITHIEUX TP s’est préoccupée de recueillir d’autres éléments de la part de D E, signataire, le 10 juin 2010 seulement, d’une lettre dactylographiée, à laquelle était jointe une photocopie de son passeport (pièces n° 3 et 3 bis du dossier de l’intimée) mais qui ne pouvait satisfaire, dans cette présentation et en l’absence des mentions prescrites par ce texte, aux exigences de l’article 202 du code de procédure civile, et qui était adressée au dirigeant de la société, pour faire «suite à votre demande de renseignements concernant l’accident dont a été victime M. X le 30 octobre 2006 » .

Après avoir indiqué qu’il était en location pour le compte et sous la responsabilité de l’entreprise sur le chantier du Chinaillon au moment des faits et conduisait la pelleteuse qui effectuait la tranchée, en précisant que ladite tranchée, peu profonde, était d’environ un mètre, et qu’ils étaient (A C X et lui) en train de réaliser un collecteur d’eaux pluviales en diamètre 300 mm béton, dont une bonne longueur avait déjà été posée, D E a fait le récit suivant :

«Après la pose d’un tuyau, M. X est descendu à côté du tuyau pour en vérifier la pente. C’est à ce moment que le tuyau, non calé, a bougé et lui a écrasé le pied.

Je ne comprends pas pourquoi il est descendu à ce moment-là à côté du tuyau, car habituellement il vérifiait la pente du tuyau en restant au-dessus de celui-ci, comme cela se fait habituellement. Ensuite une fois la pente vérifiée, le tuyau est calé et remblayé.

Tout cela s’est passé très vite et je n’ai rien pu faire.

J’ai tout de suite appelé les secours et M. X a été évacué.»

Cependant, alors que la déclaration d’accident du travail en date du 31 octobre 2006 mentionnait que cet accident s’était produit vers 9h45, le 30 octobre 2006, il résulte d’un rapport de sortie de secours établi ce jour-là par un sapeur-pompier du centre de secours du Grand Bornand et communiqué à l’avocate de l’appelant le 13 octobre 2010, qu’étant arrivés sur les lieux du sinistre à 10h22, après avoir reçu un premier appel à 9h57, les trois pompiers et le personnel infirmier mobilisés par cette intervention et répartis en deux véhicules ont constaté la présence sur le chantier situé au lieu-dit Les Outalays, sur le territoire de la commune du Grand Bornand, la présence d’un «homme de 57 ans ayant reçu un tuyau en béton sur le pied droit présentant une plaie importante», tout en mentionnant en exergue qu’il s’agissait d’une « personne ensevelie » et en précisant que la gendarmerie était sur les lieux et que cette intervention s’est achevée à 13h02, avec le transport de cette personne dans l’un des véhicules de secours, l’autre véhicule infirmier ayant quitté les lieux à 11h48.

Par ailleurs, aux termes d’un autre rapport de sortie de secours établi par un pompier du centre de secours de Thônes, qui s’est déplacé seul avec un troisième véhicule, arrivé sur place à 10h33 et reparti à 11h42, l’indication selon laquelle l’accident concernait une «personne ensevelie» est également reprise en tête et le compte rendu sommaire de cette intervention se présente comme suit : «Homme blessé au pied dans une tranchée. Pied coincé par une buse en béton. Dégagé avant l’arrivée des secours par ses collègues de travail. Personne blessée grave médicalisée par le SMUR et transport sur CH Annecy par VSAB Grand Bornand .» Suivant l’annexe de ce deuxième rapport de sortie, concernant la victime, A C X a été médicalisé sur place par un médecin du service médical d’urgence, avant d’être transporté au centre hospitalier d’Annecy.

Un certificat médical de constatation de lésions, intégralement reproduit dans le rapport médical d’expertise établi le 20 décembre 2008 par un médecin expert figurant sur la liste de la cour d’appel de Chambéry, consulté par la victime, sous l’égide de la fédération nationale des accidentés du travail et handicapés (pièce n° 4 du dossier de l’appelant), a été rédigé le 30 octobre 2006 par un chirurgien du centre hospitalier d’Annecy, lequel a indiqué avoir constaté, après avoir examiné A C X :

— Ecrasement du pied droit avec double plaie interne et plantaire.

— Fracture ouverte du cuboïde.

— Corps étranger.

Le même rapport a également intégré plusieurs comptes-rendus opératoires d’interventions réalisées au centre hospitalier d’Annecy, pour nettoyer et suturer des plaies profondes sur la face dorsale et la face plantaire du pied droit de la victime (> 10 cm), compte tenu d’un

risque de nécrose très important, puis pour pratiquer plusieurs pansements sous anesthésie générale, les premiers avec évacuation d’abcès et curetage, d’une part, puis au centre hospitalier universitaire de Grenoble, où un chirurgien a pratiqué une plastie plantaire et une greffe dermo-épidermique, pour remédier à une perte de substance tégumentaire de la plante du pied et de la face interne (P.6 du rapport), d’autre part. Le rapport médical évaluation du taux d’IPP rédigé le 4 septembre 2008 par le praticien conseil de la CPAM de Haute-Savoie a été reproduit de même par l’expert consulté par A C X et faisait état des mêmes constatations relatives aux séquelles du traumatisme occasionné par l’accident du travail dont celui-ci a été victime le 30 octobre 2006 :

Ecrasement du pied droit avec fracture ouverte du cuboïde et dégâts cutanés importants…

Après que les sapeurs-pompiers intervenus sur les lieux de l’accident très peu de temps après la survenance du sinistre eurent eux-mêmes rapporté que A C X avait reçu un tuyau en béton sur le pied droit, formulation bien davantage évocatrice d’une percussion entraînée par une action de déversement, sinon de chute, depuis un point situé en amont, auparavant provoquée sur cette buse relativement pesante, plutôt qu’un simple effet limité de rotation sur elle-même de ladite canalisation, qui aurait déjà été posée au fond de la tranchée, les descriptions très précises des graves blessures occasionnées par ce choc, plus particulièrement la constatation de l’incrustation d’un corps étranger à l’intérieur de ces blessures et la perte de substance tégumentaire, objectivent également un phénomène d’une violence sans commune mesure avec le résultat d’un glissement, limité sur une relativement faible distance, d’une pièce mal calée à l’intérieur de son réceptacle: il se déduit de l’ensemble de ces éléments, graves, précis et concordants, que le poids du tuyau litigieux destiné à être assemblé à un collecteur d’eaux pluviales, dont la section était limitée à 30 cm, a nécessairement été aggravé par l’effet d’une plus grande vitesse de déplacement depuis un point situé beaucoup plus en hauteur que le fond de la tranchée et que la version avancée par l’employeur, avec le soutien d’un locateur d’ouvrage déclarant travailler «pour le compte et sous la responsabilité de l’entreprise MITHIEUX», soit un sous-traitant, ne peut être considérée comme crédible.

Au demeurant, le document unique de prévention des risques dans l’entreprise, mis à jour par la SAS MITHIEUX TP en 2006 (pièce n° 7 du dossier de l’intimée) avait bien identifié comme risques inhérents à une situation dangereuse en cas de manutention lourde, avec utilisation d’appareil de levage, notamment en raison du poids excessif des éléments concernés, d’un mauvais accrochage, des risques de basculement, de renversement, d’écrasement, dont la fréquence d’exposition était considérée comme hebdomadaire et encore évaluée à un coefficient élevé de 90, en 2006, en prévoyant que pour l’avenir, les postes de travail devaient être organisés par un chef de chantier, que les caractéristiques des pièces à soulever devaient être définies en bureau d’études, sous l’égide d’un conducteur de travaux et que différents matériels, chaînes, élingues et crochets artéton devaient être acquis (p. 18 du document unique de prévention).

Or, il se vérifie que D E, qui travaillait en binôme avec A C X le jour de l’accident, conduisait exclusivement une pelleteuse pour creuser la tranchée destinée à recevoir le collecteur d’eaux pluviales mais qu’il n’a aucunement été fait état, dans aucun des documents versés au dossier, d’un autre véritable appareil de levage utilisé par ces deux personnes, ni même par un autre préposé de l’entreprise, pour soulever les éléments de canalisation et les déposer à la suite des autres dans la tranchée, sans risque de basculement, de renversement, de décrochage ou de chute, conformément aux préconisations du document unique de prévention des risques de l’entreprise : selon la plus haute vraisemblance, c’est donc avec la pelleteuse que ces manoeuvres relativement délicates devaient être effectuées, dans des conditions qui permettaient difficilement de satisfaire aux prescriptions des articles R 4323-29 et suivants du code du travail, relativement à la stabilité des charges et aux impératifs de sécurité qui devaient être respectés pour leur déplacement.

Au surplus, ainsi que la SAS MITHIEUX TP l’a précisé elle-même, un conducteur de travaux était présent au commencement du chantier, pour vérifier les conditions d’intervention de ce chantier (p.5 de ses conclusions devant la cour), mais l’employeur s’est abstenu de faire état d’un autre personnel d’encadrement disponible à proximité, pour contrôler ensuite le bon déroulement d’opérations dont les risques étaient pourtant clairement envisagés dans le cadre du document unique de prévention de 2006 : la confiance manifestée par cet employeur dans l’expérience acquise par A C X, associée avec le conducteur d’une pelleteuse dont la qualification professionnelle et les conditions de formation aux normes de sécurité applicable demeurent inconnues, ne saurait être considérée comme une garantie satisfaisante, d’autant moins que ce salarié, embauché en qualité de maçon, classé au coefficient 125 de la convention collective nationale des travaux publics, catégorie ouvriers, du 15 décembre 1954, n’a jamais pu évoluer professionnellement, conservant la même qualification et le même classement en octobre 2006, au vu de ses bulletins de paye (pièces n° 11 et 11 bis du dossier de l’appelant) et que l’intimée n’a pas même allégué que l’intéressé ait pu bénéficier lui-même d’une formation adaptée aux règles de sécurité.

Enfin, les deux parties se sont accordées pour indiquer que A C X n’avait pas de chaussures de sécurité le jour de l’accident et l’intimée a stigmatisé dans cet oubli manifeste un manquement de ce salarié à l’obligation légale de veiller à sa propre sécurité (p.8 de ses conclusions devant la cour). Cependant, admettrait-on que la victime puisse se voir reprocher une faute d’imprudence ayant concouru, dans une certaine mesure, à l’aggravation de son préjudice, en négligeant de porter ses chaussures de sécurité, il ne s’avère pas démontré, ni même allégué, qu’il pourrait s’agir là d’une faute inexcusable, de la même manière que l’éventuelle inconscience dont elle aurait pu faire montre, en descendant prématurément dans la tranchée, sans prendre garde aux conditions dans lesquelles la canalisation était susceptible d’y prendre place en toute sécurité, ne saurait exonérer l’employeur de ses propres manquements. Il reste en effet que l’employeur ou son représentant sur place restait impérativement tenu de veiller au respect effectif des règles de sécurité par un maçon exposé à des risques incontestables : à tout le moins, il incombait au conducteur de travaux présent au début du chantier d’imposer à A C X de porter ses chaussures de sécurité et à défaut, de prendre d’autres dispositions, au besoin autoritairement, pour le préserver une situation potentiellement dangereuse.

En conséquence et aux termes de cette analyse privilégiant des éléments objectifs sur le point de vue indéniablement partial de l’employeur et/ou de son sous-traitant, lequel avait indiscutablement intérêt à limiter lui-même sa propre responsabilité, la Cour en vient à la conclusion que la SAS MITHIEUX TP, qui avait une parfaite conscience du danger auquel se trouvait exposé A C X dans le cadre d’une activité de pose de canalisations d’eaux pluviales dans une tranchée, a négligé de prendre plusieurs mesures indispensables à la sauvegarde de la sécurité et à la protection de la santé physique de ce salarié et que cet employeur doit être déclaré pleinement responsable de la faute inexcusable commise par lui au préjudice de son ancien salarié; corollairement, le jugement rendu le 18 octobre 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Haute-Savoie doit être réformé, en toutes ses dispositions, de telle sorte qu’en premier lieu, la rente accident du travail servie à A C X doit être majorée à son taux maximum et que l’indemnisation de cette victime est envisageable non seulement dans les conditions définies par l’article L 452-3 du code du travail mais encore par référence à la décision rendue le 18 juin 2010 par le conseil constitutionnel .

Le présent arrêt doit être déclaré opposable à la Caisse Primaire d’Assurance-Maladie de Haute-Savoie.

Sur les demandes tendant à l’organisation d’une expertise médicale et au paiement d’une provision

Une expertise médicale s’avère indispensable, pour recueillir tous éléments appréciation utiles en vue de l’indemnisation des préjudices occasionnés à A C X par un accident du travail dû à la faute inexcusable de son ancien employeur, non seulement au regard des dispositions de l’article L 452-3 du code de la sécurité sociale, mais aussi en considération de l’ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale : la mission confiée à l’expert désigné par la cour est définie au dispositif du présent arrêt mais il n’en demeure pas moins qu’il restera loisible à la victime de présenter toute demande lui paraissant s’inscrire dans la perspective d’une indemnisation complémentaire, en considération des principes mis en lumière par la décision du conseil constitutionnel rendue le 18 juin 2010, sans que la cour ne puisse voir réfréner son pouvoir d’appréciation quant à la liquidation du préjudice de la victime en raison des constatations ou des conclusions de l’expert qu’elle a désigné, suivant l’article 246 du code de procédure civile. Dans le même esprit, l’ajout à la mission d’expertise suggéré par l’intimée s’avère sans portée.

Par ailleurs, à s’en tenir aux seuls éléments objectifs actuellement appréciables déjà évoqués par le médecin conseil de la CPAM de Haute-Savoie quant aux douleurs ressenties par A C X le jour de l’accident, à l’occasion de multiples interventions chirurgicales, d’un traitement de rééducation fonctionnelle, des soins de podologie et en raison de l’extrême sensibilité de la plante des pieds sujette à exacerbation inopinée de douleurs permanentes, d’une part, quant à l’aspect particulièrement disgracieux du pied droit de l’intéressé, qui se présente en équinisme, soit avec la difformité qui caractérise le pied-bot équin, et dont la face interne est revêtue d’un tissu de graisse hyper pigmenté brun, se prolongeant partiellement au niveau de la voûte plantaire, avec des caractères accentués d’épaississement de type kératose sénile et sclérose, outre un oedème de la cheville du pied, d’autre part, et enfin quant à l’extrême difficulté d’une marche normale, notamment sur les talon et demi-pointes (rapport médical d’évaluation du taux d’incapacité permanente un accident du travail reproduit p.8 du rapport de l’expert consulté par l’appelant). En conséquence, au vu de ces différents éléments, la Cour fixe la somme de 9 000 € la provision allouée à A C X, à valoir sur l’indemnisation de son préjudice définitif.

Sur les frais supplémentaires non taxables

La SAS MITHIEUX TP, qui succombe, doit verser à A C X un défraiement globalement évalué à la somme de 3 000 €, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, en considération des diligences accomplies tant en première instance qu’en cause d’appel, alors que la CPAM de Haute-Savoie fait l’avance des dépens.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant contradictoirement et pour en avoir délibéré,

Infirme le jugement rendu le 18 octobre 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Savoie, en toutes ses dispositions ;

Statuant de nouveau et ajoutant,

Dit que l’accident dont A C X a été victime, le 30 octobre 2006, est dû à la faute inexcusable de son employeur, la SAS MITHIEUX TP ;

Déclare le présent arrêt opposable à la Caisse Primaire d’Assurance-Maladie de Haute-Savoie ;

Dit que la rente accident du travail dont A C X bénéficie de la part de la CPAM de Haute-Savoie depuis le 1er septembre 2008, à raison d’un taux d’IPP fixée à 45 %, doit être majorée à son taux maximum, et que le service de cette rente doit suivre l’évolution de son nouveau taux ;

Dit que la Caisse Primaire d’Assurance-Maladie de Haute-Savoie doit verser directement à A C X une provision de 9 000 €, à valoir sur l’indemnisation de son préjudice définitif, sauf à en récupérer le montant auprès de la SAS MITHIEUX TP ;

Avant de statuer sur l’indemnisation du préjudice définitif de A C X,

Ordonne une expertise médicale et commet pour y procéder :

le docteur F G, XXX, XXX, XXX, ou, à défaut, le Dr M N O, XXX, 69'800 Saint-Priest, avec mission :

— de procéder à l’examen médical de A C X, blessé à l’occasion d’un accident du travail survenu le 30 octobre 2006, après s’être fait communiquer par celui-ci tous documents médicaux relatifs à cet accident (certificat médical initial, certificats de prolongation et de consolidation, certificats ultérieurement délivrés, radiographies et imageries ainsi que leurs comptes-rendus, comptes rendus des opérations chirurgicales pratiquées au Centre Hospitalier d’Annecy et au centre hospitalier universitaire de Grenoble) ainsi que l’ensemble de son dossier médical,

— de réunir tous éléments d’appréciation sur la situation de la victime, ses conditions d’activité professionnelle actuelles, son statut et/ou sa formation,

— à partir des déclarations et des doléances de la victime, d’une part, des documents médicaux fournis par elle, d’autre part, outre un ou plusieurs examens cliniques circonstanciés pratiqués sur cette victime, et après avoir déterminé les éléments en lien avec l’accident du travail,

* de décrire en détail les lésions initiales, les modalités des traitements et leur évolution,

* de dire si chacune des lésions constatées est la conséquence de l’accident et/ou d’un état antérieur au postérieur,

* dans l’hypothèse d’un état antérieur, de le décrire en détail (anomalies, maladies, séquelles d’accident antérieur), et de préciser si cet état :

— de décrire le déficit fonctionnel temporaire de la victime, correspondant au délai normal d’arrêt d’activités ou de ralentissement d’activités, et, dans le cas d’un déficit partiel, d’en préciser le taux,

— dans le cas d’une perte d’autonomie ayant nécessité une aide temporaire, de la décrire et d’émettre un avis motivé sur la nécessité et ses modalités, ainsi que sur les conditions de

la reprise d’autonomie,

— de décrire les souffrances endurées par la victime avant la consolidation, tant physiques que morales, en indiquant les conditions de leur apparition et leur importance, de les évaluer sur l’échelle de 7 degrés,

— de donner un avis sur l’existence, la nature et l’importance d’un éventuel préjudice esthétique temporaire,

— de dire si l’état de la victime est susceptible de modifications en aggravation ou en amélioration et dans l’affirmative, de fournir à la Cour toute précisions utiles sur cette évolution, son degré de probabilité, en indiquant le délai dans lequel devrait être pratiqué un nouvel examen, s’il apparaissait nécessaire,

— si la victime allègue une répercussion dans l’exercice de ses activités professionnelles donnant lieu à une incidence professionnelle, à tout le moins au cours de la période comprise entre la date de consolidation intervenue le 31 août 2008 et le 1er septembre 2009, date d’admission de l’intéressé au bénéfice d’une pension de retraite, de recueillir les doléances de la victime, de les analyser, de les confronter avec les séquelles retenues, en précisant les gestes professionnels rendus plus difficiles ou impossibles, de dire si un changement de poste ou d’emploi s’avérait lié aux séquelles,

— de donner son avis sur les frais d’adaptation de véhicule et de logement,

— si la victime allègue l’impossibilité de se livrer à des activités spécifiques de sport ou de loisirs correspondant au préjudice d’agrément, de donner un avis médical sur cette impossibilité ou cette limitation et d’en préciser le caractère temporaire ou définitif,

— de donner un avis sur l’existence, la nature et l’importance du préjudice esthétique permanent, de l’évaluer sur l’échelle de 7 degrés,

— de dire s’il existe un préjudice sexuel, de le décrire en précisant s’il recouvre l’un ou plusieurs des trois aspects pouvant être altérés séparément cumulativement, partiellement ou totalement, soit la libido, l’acte sexuel proprement dit et la fertilité,

— de donner un avis médical sur l’existence d’un préjudice d’établissement après consolidation, c’est-à-dire sur la perte de chances de réaliser un projet de vie familiale, en raison des séquelles des blessures, en indiquant des données circonstanciées,

— de prendre en considération les observations des parties ou de leur conseil, après leur avoir adressé un pré rapport, de répondre à leurs observations et à leur dires formulés dans le délai d’un mois à compter de la transmission de ce pré rapport,

— de déposer son rapport définitif avant le 2 décembre 2013 au greffe de la chambre sociale, à la cour d’appel de Y ;

Dit que la CPAM de Haute-Savoie doit faire l’avance des frais d’expertise, sauf à en récupérer le montant auprès de la SAS MITHIEUX TP ;

Condamne la SAS MITHIEUX TP à verser à A C X un défraiement globalement évalué à 3 000 €, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, tant pour la procédure engagée en première instance que pour la procédure poursuivie en cause d’appel.

Ainsi prononcé publiquement le 02 Juillet 2013 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur LACROIX, Président, et Madame ALESSANDRINI, Greffier.

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Cour d'appel de Chambéry, 2 juillet 2013, n° 12/02507