Cour d'appel de Dijon, Chambre sociale, 9 novembre 2023, n° 19/00618

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Dijon, ch. soc., 9 nov. 2023, n° 19/00618
Juridiction : Cour d'appel de Dijon
Numéro(s) : 19/00618
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Mâcon, 10 juillet 2019, N° 17/00101
Dispositif : Autre
Date de dernière mise à jour : 14 novembre 2023
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

S.A.S. [10]

C/

[C] [G] [K]

S.A.S.U. [8]

Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Saône-et-Loire (CPAM)

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE – AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 09 NOVEMBRE 2023

MINUTE N°

N° RG 19/00618 – N° Portalis DBVF-V-B7D-FKL5

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de MACON, décision attaquée en date du 11 Juillet 2019, enregistrée sous le n°17/00101

APPELANTE :

S.A.S. [10]

[Adresse 2]

[Localité 6]

représentée par Me Romain BOUVET de la SCP MICHEL LEDOUX ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS substitué par Maître Charlotte BLANC LAUSSEL, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :

[C] [G] [K]

[Adresse 3]

[Localité 11]

représenté par Maître Anicet LECATRE, avocat au barreau de MOULINS

S.A.S.U. [8]

[Adresse 4]

[Localité 7]

représentée par Me Joumana FRANGIÉ MOUKANAS de la SCP FLICHY GRANGÉ AVOCATS, avocat au barreau de PARIS substituée par Maître GAUCHER, avocat au barreau de PARIS

Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Saône-et-Loire (CPAM)

[Adresse 1]

[Localité 5]

non comparante, ni représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 Octobre 2023 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Olivier MANSION, Président de chambre chargé d’instruire l’affaire et qui a fait rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :

Olivier MANSION, Président de chambre,

Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller,

Katherine DIJOUX-GONTHIER, Conseiller,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Sandrine COLOMBO,

ARRÊT : réputé contradictoire

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Sandrine COLOMBO, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige :

Il convient, pour un plus ample exposé du litige, de se reporter à l’arrêt du 21 avril 2022 lequel a confirmé partiellement le jugement du 11 juillet 2019 qui reconnaît la faute inexcusable de la société [10] (l’employeur) à la suite de l’accident du travail de M. [G] [K] (le salarié) le 21 novembre 2015, sauf à condamner la société [8] (la société) à garantir l’employeur à hauteur de 80 % du capital représentatif de la majoration de la rente et des indemnités à allouer au salarié, et ordonne une expertise de celui-ci pour évaluer ses préjudices.

L’expert a procédé à sa mission et, aux termes d’un rapport déposé le 26 mai 2023, il conclut ainsi :

— blessures subies : plaie de la face dorsale du pouce droit ayant entraîné une section de l’appareil extenseur du doigt, responsable de douleur et de raideur résiduelle de l’articulation métacarpo-phalangienne,

— arrêt total d’activité : du 21 novembre 2015 au 14 mars 2016 et du 16 mars 2016 au 17 octobre 2016,

— aide par une tierce personne : du 22 novembre 2015 au 28 décembre 2015, à hauteur de 4 heures par semaine,

— ralentissement d’activité : non,

— date de consolidation des blessures : 3 avril 2023,

— séquelles : voir ci-dessus,

— déficit fonctionnel total : le 21 novembre 2015,

— déficit fonctionnel partiel : classe 2 du 22 novembre au 28 décembre 2015 pour un taux de 20 %,

classe 1 du 29 décembre 2015 au 16 octobre 2016 au taux de 10 %,

classe 1 du 17 octobre 2016 au 5 novembre 2019 au taux de 5 %,

classe 1 du 6 novembre 2019 au 2 avril 2023 au taux de 3 %,

— souffrances : 1,5/7

— préjudice esthétique temporaire de 1/7,

— préjudice esthétique permanent : 0,5/7,

— préjudice d’agrément : non indiqué.

Par conclusions, le salarié demande à titre de réparation, la condamnation de l’employeur à lui payer les sommes suivantes :

—  360 euros pour l’aide d’une tierce personne avant consolidation,

—  3 659,88 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,

—  5 310 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,

—  2 000 euros au titre de la souffrance endurée,

—  2 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,

—  1 000 euros au titre du préjudice esthétique définitif,

—  338,65 euros de frais de déplacement pour se rendre aux expertises,

—  1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

L’employeur demande la réduction à de plus justes proportions des sommes réclamées, de statuer ce que de droit sur le remboursement des frais de déplacement et rappelle que la société lui doit garantie à hauteur de 80 % de l’ensemble des conséquences financières résultant de la reconnaissance de la faute inexcusable.

La société conclut à une même réduction des demandes, au rejet de la demande portant sur le déficit fonctionnel permanent et propose la somme de 1 137,50 euros au titre de la réparation du déficit fonctionnel temporaire.

La caisse primaire d’assurance maladie de Saône et Loire (la caisse) qui a signé l’avis de réception de sa convocation, informe la cour par lettre qu’elle s’en remet en justice.

Il sera renvoyé pour un plus ample exposé du litige aux conclusions des parties reprises à l’audience du 3 octobre 2023.

MOTIFS :

Il sera rappelé, à titre liminaire, que depuis sa décision n°2010-8 QPC du 18 juin 2010, le Conseil constitutionnel considère qu’en présence d’une faute inexcusable de l’employeur, les dispositions de l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ne peuvent s’opposer à ce qu’une victime puisse réclamer réparation de l’ensemble des dommages non couverts par le livre IV de ce code.

Par ailleurs, il est jugé (Ass. plén., 20 janvier 2023, pourvoi n° 20-23.673) que la rente versée à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ne répare pas le déficit fonctionnel permanent et que, dès lors, la victime d’une faute inexcusable de l’employeur peut obtenir une réparation distincte du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées.

Au vu de l’ensemble des éléments produits aux débats, le préjudice subi par le salarié, âgé de 30 ans (né le 23 janvier 1993), exerçant la profession de refendeur lors des faits, sera réparé comme indiqué ci-après :

* aide d’une tierce personne avant consolidation :

l’expertise retient cette aide du 22 novembre 2015 au 28 décembre 2015, à hauteur de 4 heures par semaine.

La victime demande une indemnisation à hauteur de 18 euros par heure sur la durée précitée soit la somme de 360 euros.

Cette demande s’inscrit dans la fourchette habituellement retenue pour l’indemnisation de ce préjudice.

La somme de 360 euros sera donc accordée.

* déficit fonctionnel temporaire :

il a été fixé par l’expert selon les modalités suivantes : déficit fonctionnel total : le 21 novembre 2015,

classe 2 du 22 novembre au 28 décembre 2015 pour un taux de 20 %,

classe 1 du 29 décembre 2015 au 16 octobre 2016 au taux de 10 %,

classe 1 du 17 octobre 2016 au 5 novembre 2019 au taux de 5 %,

classe 1 du 6 novembre 2019 au 2 avril 2023 au taux de 3 %.

L’employeur et la société soutiennent que la date de consolidation du 2 avril 2023, fixée par l’expert, outrepasse ses prérogatives dès lors que la caisse a retenu une consolidation au 21 mars 2017, ce qui recouvre une durée de 487 jours et non de 2 688 jours comme demandé par la victime.

Il est jugé qu’il résulte de l’article L. 454-1 du code de la sécurité sociale que si la lésion dont est atteint l’assuré social est imputable à une personne autre que l’employeur ou ses préposés, la victime d’un accident du travail ou ses ayants droit conserve contre l’auteur de l’accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles de droit commun, dans la mesure où ce préjudice n’est pas réparé par application du livre IV du code de la sécurité sociale et qu’il s’en déduit que le juge saisi de cette action doit fixer, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation, la date à laquelle les blessures de la victime ont été consolidées, sans être tenu par la date retenue par l’organisme social pour la détermination des prestations dues à la victime au titre de la législation sociale, en ce sens 2e Civ., 14 octobre 2021, pourvoi n° 20-10.572, arrêt publié.

Ici, la lésion de la victime provient pour partie de la société qui n’est pas l’employeur ni le proposé de la société [10].

En conséquence, et peu important la date retenue par la caisse, il convient d’évaluer la réparation du préjudice subi au regard du déficit fonctionnel subi qui a perduré jusqu’au 2 avril 2023, même pour un taux faible.

Au regard d’une indemnisation journalière fixée à 28 euros, la victime est fondée à obtenir le paiement de la somme de 3 659,88 euros.

*déficit fonctionnel permanent :

Ce préjudice a pour composante les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, les douleurs qui persistent depuis la consolidation, la perte de la qualité de la vie et les troubles définitifs apportés à ces conditions d’existence. Il ne se limite donc pas à la seule réparation des souffrances physiques et morales supportées après la date de consolidation.

La victime étant âgée de 30 ans lors de la consolidation de son état, peut en demander réparation au regard de la décision précitée du 20 janvier 2023.

Au regard d’un taux de 3 % non contesté par les parties, la somme de 5 310 euros sera allouée.

* souffrances endurées :

Elles sont caractérisées par le traumatisme initial, les traitements subis, les souffrances morales.

Ce préjudice évalué à 1,5/7, sera réparé par l’allocation de la somme de 1 800 euros.

*préjudice esthétique temporaire/ permanent :

Ils sont évalués, respectivement, à 1/7 et 0,5/7 ce qui implique une indemnisation respective à hauteur de 1 200 euros et 600 euros.

Il convient de rappeler qu’en cette matière, l’imputation de la rente pour maladie professionnelle, s’effectue sur les pertes de gains et sur l’incidence professionnelle, puis, en cas de reliquat ou d’absence de perte de gains et d’incidence professionnelle, sur le déficit fonctionnel permanent.

En l’espèce, la rente capitalisée ne s’imputera sur aucun des postes de préjudice indemnisés dès lors qu’ils ne correspondent pas à ceux ci-avant visés.

La victime recevra, en conséquence, au titre de la réparation de son préjudice, la somme totale de 12 929,88 euros, soit, après déduction de la provision de 2 000 euros, un solde de 10 929,88 euros.

Sur les autres demandes :

1°) La caisse devra faire les avances des sommes accordées en application des dispositions des articles L. 461-1 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale.

2°) La victime demande le remboursement de frais de déplacement générés par la nécessité de se rendre aux deux rendez-vous de l’expert domicilié à [Localité 9] alors qu’elle réside à [Localité 11].

L’intéressé produit la carte d’immatriculation de son véhicule et le barème fiscal 2019 et 2023.

Sa demande porte sur deux déplacements en 2019 et 2023.

Le rapport d’expertise relate une réunion le 3 avril 2023 et un précédent rapport a été établi le 5 novembre 2019.

La somme de 338,50 euros est donc valablement réclamée sur ce point.

3°) Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne l’employeur à payer à M. [G] [K] la somme de 1 500 euros.

L’employeur supportera les dépens d’appel lesquels comprennent les frais d’expertise.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement par décision réputée contradictoire :

— Condamne la société [10] à payer à M. [G] [K] les sommes de :

*360 euros pour l’aide d’une tierce personne avant consolidation,

*3 659,88 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,

*5 310 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,

*1 800 euros au titre de la souffrance endurée,

*1 200 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,

*600 euros au titre du préjudice esthétique définitif,

*338,65 € de frais de déplacement pour se rendre à deux réunions d’expertise,

* 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Rappelle qu’une provision de 2 000 euros a été versée à M. [G] [K] et devra venir en déduction des sommes ci-avant accordées ;

— Rappelle que la caisse primaire d’assurance maladie de Saône et Loire devra faire les avances des sommes ci-avant chiffrées ;

— Rappelle que la société [8] doit garantie à la société [10] dans la proportion arrêtée par l’arrêt du 21 avril 2022 ;

— Condamne la société [10] aux dépens d’appel ;

Le greffier Le président

Sandrine COLOMBO Olivier MANSION

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