Cour d'appel de Douai, Sociale c salle 2, 17 décembre 2010, n° 10/00710

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, soc. c salle 2, 17 déc. 2010, n° 10/00710
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 10/00710
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lens, 10 février 2010, N° 08/512
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

ARRET DU

17 Décembre 2010

N° 2144/10

RG 10/00710

PN-SB

Jugement du

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LENS

en date du

11 Février 2010

(RG 08/512 -section 3)

— Prud’Hommes -

APPELANT :

M. E F

XXX

XXX

Présent et assisté de Me Dominique SPRIMONT (avocat au barreau de DOUAI)

INTIME :

SAS AJILON SALES ET X

XXX

XXX

Représentée par Me TAMU substituant Me François VACCARO (avocat au barreau de TOURS)

DEBATS : à l’audience publique du 03 Novembre 2010

Tenue par G H

magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Serge LAWECKI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE

A B

: PRESIDENT DE CHAMBRE

G H

: CONSEILLER

Y Z

: CONSEILLER

ARRET : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 17 Décembre 2010,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par A B, Président et par Stéphanie LOTTEGIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige et prétentions respectives des parties

M. E F a été engagé par la Société AJILON SALES & X suivant contrat à durée déterminée du 14 avril 2006 avec effet au 15 en qualité de délégué commercial.

Le 5 juin 2008,un avertissement lui a été notifié essentiellement en raison de la faiblesse de ses résultats.

Par courrier du 24 juin 2008, le salarié a été convoqué à un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement.

Par courrier du 11 juillet 2008, M. E F a été licencié pour faute grave, en raison de ses performances commerciales insuffisantes, de l’absence de reporting, d’incohérences relevées entre l’activité déclarée et les notes de frais fournies, ainsi qu’un abandon de poste à compter du 19 juin 2008.

Le 29 octobre 2001, M. E F a saisi le conseil de la Lens afin de contester son licenciement.

Par jugement du 11 février 2010, le conseil de prud’hommes a:

— dit que licenciement de M. E F est fondé sur une cause réelle sérieuse et non sur une faute grave,

— condamné la Société AJILON SALES & X à payer à M. E F :

— la somme de 5272 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 527 euros au titre des congés payés y afférents,

— celle de 1044 euros à titre d’indemnité de licenciement.

Le 19 mars 2010, M. E F a interjeté appel de la décision, qui lui avait été notifiée le 23 février 2010.

Vu l’article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de M. E F en date du 1er juin 2010 et celles de la Société AJILON SALES & X , en date du 27 septembre 2010,

Les parties, reprenant leurs conclusions écrites ayant été entendues en leurs plaidoiries,

M. E F demande:

— d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a considéré que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,

— de dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

— de condamner la Société AJILON SALES & X à lui payer :

— la somme de 15 654 euros à titre de dommages-intérêts,

— celle de 5272 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 527 euros au titre des congés payés K L,

— celle de 1044 euros à titre d’indemnité de licenciement,

— celle de 1500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

La Société AJILON SALES & X demande:

— d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que le licenciement de M. E F est fondé non pas sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse,

— d’infirmer la décision de reprise en ce qu’elle a alloué à M. E F une indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents ainsi qu’une indemnité de licenciement,

— de débouter M. E F de l’ensemble de ses demandes,

— de condamner M. E F allait payer la somme de 2000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur le bien fondé du licenciement;

Attendu que la faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail, d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée limitée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l’employeur ;

Attendu qu’aux termes des dispositions de l’article L.122-14-2 du code du travail (devenu 1232-6) l’employeur est tenu d’énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre prévue à l’article L.122-14-1 (devenu 1232-6) du même code ;

Que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge qui ne peut examiner d’autres griefs que ceux énoncés dans celle-ci, peu important les motifs allégués antérieurement ou en cours de procédure ;

Attendu qu’en l’espèce, la lettre de licenciement est ainsi motivée :

«  Suite à notre entretien du 4 juillet 2008 pour lequel vous étiez assisté de Mlle Claire DESOMBES, représentante du personnel, nous sommes contraints de nous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave.

Nous tenons à vous indiquer que cette décision est motivée par les raisons suivantes :

Vous avez été engagé en contrat à durée indéterminée par la Société AJILON SALES & X le 15 avril 2006 (reprise d’ancienneté au 26 février 2006) en qualité de délégué commercial. Dans le cadre de l’exercice de cette activité, vous êtes, notamment, amené à prospecter auprès de commerçants afin de leur vendre des solutions commerciales de paiement et ceci pour le compte de l’un de nos clients et effectuer un reporting de votre activité à votre responsable hiérarchique.

Or, lors d’un bilan détaillé de votre activité, nous avons constaté des dysfonctionnements majeurs récurrents et non conformes à nos attentes ainsi qu’à vos engagements contractuels et ce, malgré un avertissement en date du 5 juin 2008,un recadrage téléphonique avec vos managers le 13 juin 2008 et enfin un courrier de rappel daté du 17 juin 2008.

1- tout d’abord, nous déplorons de nouveau, que vos performances commerciales ne soient pas toujours à la hauteur de nos engagements contractuels et de nos attentes.

En effet, au cours du mois de juin 2008, entre le 2 juin et le 27 juin, vous deviez réaliser 35 visites argumentées par semaine, soit 140 visites argumentées sur l’ensemble de la période considérée. Or, à titre d’exemple, au cours de la semaine 23, vous n’avez réalisé que 22 visites argumentées, 24 la semaine 24,22 la semaine 25 et aucune lors de la semaine 26. Vos écarts de performances sont d’environ 51,25 % en dessous de votre objectif. De plus, vous n’êtes pas sans ignorer que vous devez réaliser, au minimum deux contrats par jour. Or, nous n’avons eu que trois contrats de votre part sur le mois de juin 2008 que les autres membres de l’équipe réalisent en moyenne 3,4 contrats par jour.

Votre défaut de performances a des conséquences préjudiciables pour l’entreprise notamment en termes de facturation clients et d’engagements clients non respectés.

2- Par ailleurs, nous déplorons un manque total de visibilité sur votre activité depuis plusieurs semaines.

Nous n’avons plus aucune nouvelle de vous depuis le 19 juin dernier. Vous n’avez pas pris attache auprès de votre manager, C D, chef des ventes, ou même votre N+2 I J, depuis cette date alors que vous aviez des contacts quasi quotidiens avec ces derniers comme bon nombre des autres membres de l’équipe.

Notre courrier en date du 17 juin dernier est aussi resté sans réponse de votre part sur ce thème.

Fait concordant, vous ne nous avez adressé aucun reporting de votre activité et de vos notes de frais.

En effet, vous avez déjeuné à Lille les 4,11,13, 18 et 25 juin dernier alors que vous déclarez une activité pour séjour sur Saint-Omer, Saint-Martin au Laert, Clairmarais, Béthune et Bruay de la Bussière. Il paraît plus qu’incongru de déjeuner à cette distance alors que votre activité se serait exécutée à plusieurs dizaines de kilomètres de Lille.

En outre, vous ne nous avez déclaré aucune activité sur votre reporting pour la journée du 25 juin 2008 alors que vous nous produisez des justificatifs de frais pour cette même date; fait fort troublant.

Votre comportement constitue à l’évidence des manquements réitérés à vos obligations contractuelles, notamment à votre obligation de D foi et de loyauté.

Il ne reflète en aucun cas, la qualité et la rigueur du travail que nous attendons de nos collaborateurs en charge d’une mission commerciale. En outre, les engagements vis-à-vis de notre client, ne sont pas respectés sur votre secteur, avec un risque non négligeable de litige commercial pour notre société auxquels nous devons répondre.

Votre absence prolongée et injustifiée d’activité laisse à entendre que vous avez abandonné votre poste depuis plusieurs semaines.

Vous avez de surcroît, délibérément ignoré nos différents rappels à l’ordre aussi bien écrit que verbaux.

Une telle attitude est préjudiciable au bon fonctionnement de notre entreprise et contrevient de façon évidente à vos obligations contractuelles. Vous comprendrez que l’ensemble de ces dysfonctionnements et manquements ne nous permettent plus d’envisager la poursuite de votre contrat de travail et légitime une rupture immédiate de nos relations contractuelles.

Vos explications fournies lors de l’entretien du 4 juillet dernier ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits.

En conséquence, nous vous notifions votre licenciement pour faute grave, lequel prend effet à compter de la première présentation de cette lettre. Votre solde de tout compte sera arrêté à cette date, sans indemnité de préavis ni de licenciement.(…)

Nous vous informons par ailleurs que nous avons décidé de vous libérer de votre obligation contractuelle de non-concurrence de sorte que nous ne serons pas redevables à ce titre d’une quelconque contrepartie financière.(…)";

Attendu que par courrier du 5 juin 2008 reçu par M. E F le 6 juin, le salarié a fait l’objet d’un avertissement;

Que par l’effet de ce courrier, l’employeur a à cette date épuisé son pouvoir disciplinaire, de sorte que toute sanction postérieure ne peut reposer que sur des griefs nouveaux;

Qu’il résulte de l’avertissement du 5 juin 2008 que l’employeur a reproché à M. E F:

— ses performances commerciales, en raison de la faiblesse de contrats signés pour la semaine 16,17,18 et 19;

— le volume des visites déclarées pour la période du 1er mai aux 23 mai 2008, celui-ci n’étant pas conforme aux objectifs fixés,

— le non-respect des procédures internes en matière de reporting, certains clients rencontrés ne figurant pas dans le document,

— le fait que 27 % des visites déclarées sont non argumentées, et que 11 % des sites déclarés concernent des clients fidélisés, de sorte que 40 % des visites déclarées dans le reporting du mois de mai 2008 ne sont pas en conformité avec les process internes,

— la mauvaise gestion du secteur du salarié, ayant conduit l’employeur à renforcer la présence d’agents pendant cinq jours afin de pallier les carences de M. E F dans ses interventions,

Que comme l’ont fait exactement observer les premiers juges, l’employeur avait contractuellement la possibilité aux termes de l’article 6 du contrat de travail de modifier le secteur d’intervention du salarié ;

Que néanmoins, il convient de constater qu’à compter de mars 2008, suite à la baisse de l’activité auprès d’un client, le secteur géographique de M. E F s’était notablement réduit ;

Que l’employeur a redéployé 5 salariés sur ledit secteur ;

Que les pièces produites au débat ne permettent pas d’apprécier l’incidence de ces changements sur l’activité de l’appelant ;

Que par conséquent, les griefs allégués par l’employeur à ce titre dans le courrier de licenciement ne peuvent valablement être appréciés que sur une période réduite soit entre le 5 juin 2008 et le 11 juillet 2008 ;

Attendu qu’en revanche, il apparaît qu’en réponse au courrier d’avertissement du 5 juin 2008, M. E F afin de fournir un certain nombre d’observations, faisait observer: « quant au reporting de mes visites, j’hésite à ce jour avant de communiquer pour une raison fort évidente : je ne veux en aucun cas que le commercial que vous avez mis en place sur mon secteur récupère pour encore diminuer mon potentiel au contrats (…) C’est la raison pour laquelle je vous fait intervenir mon rapport hebdomadaire par l’intermédiaire d’Élodie SGUERZI »;

Que la réticence observée par le salarié face aux instructions de la Société AJILON SALES & X a persisté, puisque les carences constatées ont été très nettement renouvelées postérieurement au premier d’avertissement, puisque l’employeur a fait observer que depuis le 23 juin 2008 aucun reporting n’avait été transmis;

Que c’est donc à juste titre que l’employeur a déploré« un manque total de visibilité » sur l’activité de M. E F depuis plusieurs semaines;

Qu’en outre, la Société AJILON SALES & X a déploré, sans être contesté, n’avoir plus aucune nouvelle de l’appelant depuis le 19 juin dernier;

Qu’aucune visite n’a été effectuée au-delà du 18 juin;

Qu’enfin, l’intimé a pu constater un certain nombre de discordances entre le reporting des activités de M. E F et ses notes de frais;

Qu’ainsi si le salarié fait état d’une activité sur Saint-Omer, ou Bruay la Bussière, il apparaît que pour la même journée celui-ci a dîné sur Lille, ville située en dehors de son secteur d’activité, oberrant ainsi de façon très marquée le temps de travail effectif qu’il a pu passer dans son secteur;

Que le fait que l’employeur ait accepté de payer ces notes de frais ne l’empêchait pas de constater les dysfonctionnements manifestes dans l’activité de M. E F, d’autant que celle-ci s’était très nettement amoindrie en quelques semaines;

Attendu que la gravité des manquements constatés rendait impossible le maintien la relation contractuelle;

Que néanmoins, il n’est pas démontré que la baisse des visites effectuées par le salarié soit due exclusivement à sa carence, plutôt qu’à la situation engendrée par la présence d’autres salariés sur le secteur et à la baisse d’activité consécutive à la remise en cause partielle de la relation contractuelle de l’employeur avec l’opérateur AMERICAN EXPRESS ;

Que le licenciement don s’agit est intervenu peu de temps après le courrier d’avertissement ;

Que l’attitude du salarié en termes de défaut de reporting peut aussi s’excuser en partie par le ressentiment qu’il a dû éprouver en constatant que son activité s’est vue nettement amoindrie par la présence soudaine de salariés supplémentaires sur son secteur ;

Que dans ces conditions, le licenciement de M. E F reporse non pas sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse ;

Qu’il convient donc de débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts ;

Qu’en revanche, ses autres demandes, don les quantums ne sont pas contestés, en lien avec la rupture de son contrat de travail doivent être accueillies ;

Que le jugement entrepris sera donc confirmé sur l’ensemble de ces points ;

Sur les demandes formées par les parties en application de l’article 700 de procédure civile

Attendu qu’il apparaît équitable de débouter les parties de ce chef de demande ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. E F aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

S. LOTTEGIER C. B

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Textes cités dans la décision

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  2. Code du travail
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