Cour d'appel de Lyon, 30 septembre 2016, n° 15/01178

  • Avertissement·
  • Travail·
  • Employeur·
  • Salariée·
  • Harcèlement moral·
  • Préavis·
  • Lettre·
  • Indemnités journalieres·
  • Licenciement·
  • Salaire

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 30 sept. 2016, n° 15/01178
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 15/01178
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lyon, 29 janvier 2015, N° F13/04403

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 15/01178

X

C/

SCM Y &
BARATE

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de
LYON

du 30 Janvier 2015

RG : F 13/04403

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 30 SEPTEMBRE 2016

APPELANTE :

Z X

née le XXX à XXX)

XXX

XXX

Comparante en personne, assistée de Me Floriane DI
SALVO, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

SCM Y &
BARATE

XXX

XXX

Représentée par les docteurs François
SAINT-PAUL et Philippe BARATE, comparants en personne, assistés de Me A B de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de
LYON,

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 09 Juin 2016

Présidée par Didier JOLY, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de
Gaétan

PILLIE, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

— Michel SORNAY, président

— Didier JOLY, conseiller

— Natacha LAVILLE, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 30 Septembre 2016 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel SORNAY, Président et par
Gaétan PILLIE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Z X a été engagée par la S.C.M. Y & Barate en qualité de secrétaire réceptionniste d’abord à temps complet du 1er juillet au 31 août 1997, puis à temps partiel à compter du 1er septembre 1997, moyennant un salaire mensuel brut de 3 867,15 F pour 20 heures hebdomadaires de travail.

En dernier lieu, Z X était présente à son poste :

du lundi au mercredi, de 8 heures à 12 heures et de 14 heures à 19 heures,

·

le jeudi, de 8 heures à 12 heures,

·

le jeudi, de 14 heures à 18 heures en cas de réunion de service.

·

Elle travaillait en alternance avec une seconde secrétaire médicale, Maryse Ruph de 1999 à 2004, puis Pascale Petit qui accomplissait 10 heures hebdomadaires de travail au cabinet médical depuis le 2 novembre 2004.

Le contrat de travail était soumis à la convention collective nationale du personnel des cabinets médicaux.

Une note de service, actualisée le 15 octobre 2012, a défini les obligations des salariées pour ce qui concernait l’accueil téléphonique, l’accueil des patients, la tenue de l’agenda, la gestion des dossiers « papiers », l’utilisation de l’informatique, la gestion du courrier et de la télécopie ainsi que celle du petit matériel.

Elle prévoyait la tenue de deux réunions de travail par an sur demande des gérants ou des salariées, suivant un ordre du jour motivé.

Une réunion de service s’est tenue sans ordre du jour le 20 janvier 2012. A cette occasion, Z
X a présenté une demande d’augmentation de salaire en lisant un texte préparé avant la réunion.

A l’issue, les co-gérants ont décidé que les réunions devraient désormais avoir un ordre du jour.
Ils ont classé les deux secrétaires au même échelon 205 et décidé de surseoir à toute décision sur la

demande d’augmentation de salaire.

En janvier 2012, Z X percevait un salaire mensuel brut de base de 1 356,65 pour 31 heures hebdomadaires de travail et une prime d’ancienneté de 217,06 . Son salaire de base n’a pas évolué jusqu’à la fin de la relation de travail.

Par lettre recommandée du 7 novembre 2012, la S.C.M. Y & Barate a notifié un avertissement à Z X en raison de plusieurs manquements graves aux règles dont le respect scrupuleux est indispensable au bon fonctionnement [du] cabinet :

propos déplacés à l’encontre du Docteur
SAINT PAUL ;

·

non-respect des règles relatives aux prises de rendez-vous ;

·

mauvaise gestion des dossiers « Papier ».

·

Il était reproché à Z X :

— de n’avoir pas averti le docteur Barate d’une visite à domicile demandée le 18 octobre 2012 par une patiente connue du cabinet, estimant que ce médecin ne réaliserait pas la visite,

— d’avoir pris l’initiative de proposer à cette patiente la visite du docteur Saint-Paul,

— de ne pas avoir mis à jour les coordonnées téléphoniques mentionnées dans le dossier, lors de l’appel de la patiente.

Z X a contesté cet avertissement par courrier du 23 novembre 2012 en rectifiant la date des faits qui était le 17 octobre 2012 et en commettant une erreur sur l’identité de la cliente concernée, dont le nom ne figurait pas dans la lettre d’avertissement. Ce n’est qu’allusivement que la salariée a évoqué la patiente concernée (Laetitia C).

« Consternée » par ce courrier, la S.C.M. Y & Barate a relevé dans une lettre du 10 décembre 2012 que les développements consacrés par Z X à la cliente Madame D étaient hors sujet. Elle a maintenu sa version des faits et l’avertissement que ceux-ci lui paraissaient justifier.

Par lettre recommandée du 11 décembre 2012, la
S.C.M. Y & Barate a notifié un avertissement à Z X en raison de la fréquence abusive d’une connexion internet personnelle sur un logiciel de messagerie installé par [la salariée] sur le compte 'Secrétariat
Médical’ et à l’importance du temps [qu’elle consacrait] à écrire et à suivre [ses] courriers électroniques au dépens de [son] temps de travail.

Z X a contesté cet avertissement par lettre recommandée du 17 janvier 2013, aux motifs que :

— l’utilisation de l’ordinateur mis à sa disposition à des fins personnelles était autorisée par la loi, la jurisprudence et par les lettres et notes de services de l’employeur, et était d’autre part restée raisonnable,

— la S.C.M. Y & Barate lui reprochait à tort d’avoir installé ce logiciel sans autorisation préalable,

— la S.C.M. Y & Barate qualifiait à tort les temps de connexion de temps d’utilisation,

— l’utilisation qu’elle avait pu faire de l’ordinateur mis à sa disposition n’avait eu aucun impact sur son

exercice professionnel.

A nouveau « consternée » par ce courrier, la société a répondu le 5 février 2013 que le travail de
Z X ne cessait de se dégrader et que celle-ci commettait des fautes dignes d’une débutante, ce que l’employeur mettait en relation avec l’usage personnel qu’elle faisait de la session 'Cabinet médical'.

Par lettre recommandée du même jour, 5 février 2013, la S.C.M. Y & Barate a notifié un avertissement à Z X pour avoir omis le 12 décembre 2012 :

— de rappeler le patient Yves Ferret, qui demandait une visite à domicile, pour l’informer du caractère conditionnel du passage du docteur Saint-Paul,

— d’enregistrer la visite sur l’agenda du docteur
Saint-Paul,

— de préparer le dossier du patient.

La salariée a contesté cet avertissement par lettre recommandée du 25 février 2013 en soutenant :

— qu’elle avait noté le rendez-vous dans l’agenda au crayon à papier,

— qu’elle avait rappelé le patient pour lui dire que le docteur Saint-Paul essaierait de passer,

— qu’elle avait comme à l’habitude posé le dossier sur l’agenda de son bureau.

Définitivement consternés par cette contestation, les docteurs Saint-Paul et Barate ont maintenu le 2 avril 2013 qu’aucune mention n’avait été portée sur l’agenda. Ils ont justifié les avertissements en ces termes :

A cause de votre attitude volontairement en opposition avec nous se manifestant par un relâchement croissant de votre investissement au travail, le fonctionnement de notre cabinet pouvait devenir dangereux en terme des responsabilité médicale et nous avons alors été contraints de vous notifier tous les faits fautifs pour restaurer la discipline nécessaire à son bon fonctionnement, en espérant le retour spontané à la normale de votre comportement en vous rendant compte que vous êtes allée trop loin.

Des avis d’arrêt de travail ont été délivrés à Z X à compter du 1er février 2013.

Lors de la visite de reprise du 11 juin 2013, le médecin du travail a émis l’avis suivant :

Inapte à la reprise de son poste.

Inaptitude décidée sur une seule visite, le maintien à son poste de travail pouvant entraîner un danger immédiat pour sa santé (article R 4624-31 du code du travail). Etude du poste de travail et des conditions de travail réalisée le 10/04/2013.

Je ne vois pas de possibilité d’aménagement de son poste ou de reclassement sur les postes existant à ma connaissance dans l’entreprise compatible avec son état de santé actuel.

Interrogée par la société, le médecin du travail a confirmé par lettre du 18 juin 2013 que l’état de santé actuel de Z X ne permettait pas la reprise à son poste, même avec des aménagements de tâches ou d’horaires.

La S.C.M. Y & Barate a notifié à la salariée les motifs s’opposant à son

reclassement par lettre recommandée du 26 juin 2013 et, par lettre recommandée du 27 juin, l’a convoquée le 8 juillet en vue d’un entretien préalable à son licenciement.

Par lettre recommandée du 11 juillet 2013, elle a notifié son licenciement à la salariée pour inaptitude et impossibilité de reclassement en précisant que les relations contractuelles prendraient fin au terme du préavis de deux mois que Z X ne pouvait exécuter et pendant lequel elle ne serait donc pas rémunérée.

Z X a saisi le Conseil de prud’hommes de Lyon le 20 septembre 2013.

*

* *

LA COUR,

Statuant sur l’appel interjeté le 9 février 2015 par Z X du jugement rendu le 30 janvier 2015 par le Conseil de prud’hommes de LYON (section activités diverses) qui a :

— dit et jugé que les comportements Y et BARATE ne constituent pas un harcèlement moral et débouté madame Z X de ses demandes sur ce chef,

— dit et jugé que le licenciement de madame Z X est justifié par une cause réelle et sérieuse et l’a déboutée de ses demandes s’y rapportant,

— condamné la SCM docteurs SAINT-PAUL et BARATE à payer à madame Z X la somme de 3.000 (trois mille curas) à titre de dommages et intérêts pour préjudice,

— condamné madame Z
X à rembourser à la SCM docteurs SAINT-PAUL et BARATE la somme de 1.785,05 (mille sept cent quatre cinq euros et cinq centimes) à titre de trop perçu sur le complément de salaire suite à un arrêt de travail pour maladie,

— ordonné la compensation judiciaire des sommes dues par Mme X Z et la SCM
DOCTEURS François SAINT PAUL et Philippe
BARATE,

— débouté Mme X
Z du surplus de ses demandes,

— débouté la SCM DOCTEURS François SAINT PAUL et Philippe BARATE de sa demande au titre de l’article 700 du Code de Procédure
Civile,

— condamné la SCM DOCTEURS François SAINT PAUL et
Philippe BARATE et Mme X
Z par moitié par chacune des parties aux dépens de la présente instance ;

Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 9 juin 2016 par Z X qui demande à la Cour de :

1) réformer le jugement rendu par le Conseil de
Prud’hommes de LYON le 30 janvier 2015 en ce qu’il a débouté Madame X des demandes suivantes :

— constater que :

les sanctions prises à l’encontre de Madame X sont injustifiées et par conséquent, dire et juger qu’elles doivent être annulées ;

·

les agissements Y et BARATE sont constitutifs de harcèlement

·

moral, qu’il existe un lien certain entre la dégradation de l’état de santé de Madame X et le harcèlement moral subi, et par conséquent, dire et juger que le licenciement est nul ;
la SCM a imposé à Madame X, illégalement, un préavis de deux mois, sans lui verser d’indemnité de préavis.

·

En conséquence :

— condamner la SCM des docteurs FRANÇOIS SAINT-PAUL et
PHILIPPE BARATE à verser à Madame X les sommes suivantes :

dommages et intérêts pour sanctions injustifiées et harcèlement moral : 15.000,00 nets

·

dommages et intérêts pour licenciement nul (24 mois de salaire) : 37.769,00 nets

·

indemnité compensatrice de préavis : 3.147,00 bruts

·

indemnité compensatrice de congés payés sur préavis : 314,70 bruts

·

— ordonner la délivrance des documents de fin de contrat conforme aux condamnations sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l’arrêt ;

2) confirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de LYON le 30 janvier 2015 en ce qu’il a condamné la SCM à indemniser Madame X pour préjudice distinct du fait du non respect des dispositions légales en matière de remise des attestation de salaire, attestation POLE
EMPLOI et certificat de travail,

— y ajoutant et statuant a nouveau, relever et fixer à la somme de 15 000 nets le montant total des dommages et intérêts pour préjudice distinct, dés lors que ce préjudice résulte non seulement des carences de l’employeur dans la remise des documents sus-énoncés, mais également de la consultation illicite et de la production des correspondances privées de Madame X,

3) réformer le jugement rendu par le Conseil de
Prud’hommes de LYON le 30 janvier 2015 en ce qu’il a condamné Madame X à rembourser à la SCM la somme de 1 785,05 à titre de trop perçu sur le complément de salaire suite à un arrêt de travail pour maladie, et ramener cette somme à hauteur de la somme de 401,49 nets,

— ordonner la compensation judiciaire de cette somme avec les sommes qui seront mises à la charge de la SCM par la Cour,

4) condamner la SCM des docteurs FRANÇOIS SAINT-PAUL et
PHILIPPE BARATE au versement d’une somme de 3000 au titre de l’article 700 du Code de
Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens ;

Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 9 juin 2016 par la S.C.M. Y & Barate qui demande à la Cour de :

— réformant le jugement entrepris, débouter Madame X de l’intégralité de ses demandes,

— la condamner aux entiers dépens, ainsi qu’au paiement de la somme de 3.500 au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

— confirmant le jugement entrepris, condamner Madame X au paiement de la somme de 1.785,05 ;

Sur la demande d’annulation des avertissements :

Attendu qu’aux termes des articles L 1333-1 et L 1333-2, qui demeurent XXX

licenciement a été ultérieurement prononcé, le juge du contrat de travail peut, au vu des éléments que doit fournir l’employeur et de ceux que peut fournir le salarié, annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise ;

* Sur l’avertissement du 7 novembre 2012 :

Attendu que selon l’article L 1332-1 du code du travail, aucune sanction ne peut être prise à l’encontre du salarié sans que celui-ci soit informé, dans le même temps et par écrit, des griefs retenus contre lui ;

Qu’en l’espèce, pour ce qui concerne les griefs se rapportant au traitement d’une demande de visite à domicile, non seulement la date des faits mentionnée dans la lettre de l’employeur est erronée, mais la patiente concernée n’est pas identifiable ; que Z X s’est d’ailleurs méprise sur le nom de celle-ci puisque dans son courrier du 23 novembre 2012, elle a répondu en évoquant longuement la demande de la cliente Madame D et en ne citant qu’allusivement Madame C ;
que les « propos déplacés et inacceptables » tenus au docteur
Saint-Paul n’ont pas été précisés dans la lettre d’avertissement ; que la lettre de l’employeur du 10 décembre 2012 est tout aussi vague, l’expression d’un ressenti de mépris de la part du docteur Saint-Paul ne caractérisant pas un propos déplacé et inacceptable ;

Que la lettre du 7 novembre 2012 étant insuffisamment précise pour permettre à la salariée de contester utilement l’avertissement avant toute procédure judiciaire, cette sanction disciplinaire sera annulée ;

* Sur l’avertissement du 11 décembre 2012 :

Attendu, d’abord, que la constatation des faits sanctionnés le 11 décembre 2012 n’implique aucune violation du secret des correspondances ; qu’en effet, après avoir constaté le 15 novembre 2012 que la boîte aux lettres personnelle de Z X s’affichait sur l’écran de l’ordinateur professionnel de celle-ci, le docteur Barate a découvert qu’un logiciel avait été installé sur le compte d’utilisateur commun « secrétariat médical » ; qu’il a examiné le journal des connexions pour déterminer le temps de connexion de Z X sur son compte hotmail ;

Attendu, sur le fond, que Z
X assimile à tort sa situation à celle d’un salarié qui a ponctuellement fait un usage personnel de sa messagerie professionnelle en émettant ou recevant sur celle-ci des courriels privés ; qu’en l’espèce, l’appelante a installé, non sur son compte "Z
X« , mais sur le compte commun, et sans justifier d’aucune autorisation, un logiciel »MSN messenger" programmé pour s’ouvrir automatiquement avec chaque session en proposant le login mémorisé natferier@hotmail.com correspondant à sa messagerie personnelle ; qu’ainsi, dès l’ouverture de la session, l’intégralité des messages étaient téléchargée et accessible sur son ordinateur ; que l’appelante fait observer qu’il faut distinguer le temps de connexion et le temps d’utilisation ; qu’il est certes évident que la salariée ne consacrait pas plusieurs heures par jour à lire des messages personnels reçus et à en émettre en réponse ; qu’il n’en demeure pas moins que les sessions professionnelles ouvertes sur « secrétariat médical » étaient festonnées par la messagerie de
Z X si bien qu’activité professionnelle et vie personnelle s’enchevétraient au point de cesser d’être distinctes ; qu’un poste de travail qui implique notamment de traiter 4 000 à 6 000 appels téléphoniques mensuels, ce que la salariée faisait parfois de façon expéditive, ne peut s’accomoder d’une disponibilité intermittente ;

Qu’en conséquence, l’avertissement est justifié et proportionné au manquement aux obligations du contrat de travail constaté ;

* Sur l’avertissement du 5 février 2013 :

Attendu que l’avertissement du 5 février 2013 sanctionne le non-respect des règles de gestion des rendez-vous fixées par note de service ; que, d’une part, l’examen de l’agenda du docteur Saint-Paul à la date du 17 décembre 2012 permet de constater que la mention « Ferret Yves Caluire », suivie d’un nom de rue illisible, est surchargée ; que le scripteur est repassé à l’encre bleue sur une mention antérieure compatible avec l’utilisation d’un crayon à papier, évoquée par la salariée ; que les parties sont en contradiction au sujet de la préparation du dossier du patient par Z X ; qu’aucun élément ne permettant de les départager, le doute profitera à l’appelante conformément aux dispositions de l’article L 1333-1 (alinéa 3) du code du travail ;

Qu’en conséquence, l’avertissement du 5 février 2013 sera annulé ;

Sur la demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral :

Attendu qu’aux termes des articles L 1152-1 à L 1152-3 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel';'

Attendu qu’aux termes de l’article L 1154-1 du code du travail, en cas de litige relatif à l’application des articles L 1152-1 à L 1152-3, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement'; que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles;

Qu’en l’espèce, l’exercice par l’employeur de son pouvoir disciplinaire ne permettrait de présumer l’existence d’un harcèlement que si, à la suite de la revendication salariale présentée par Z
X au cours de la réunion de service du 20 janvier 2012, la S.C.M. Y &
Barate avait multiplié les sanctions disciplinaires injustifiées à l’égard d’une salariée antérieurement irréprochable pour préparer son éviction du cabinet médical ; que telle est bien la thèse soutenue par l’appelante qui ne saurait cependant méconnaître le fait qu’avant l’automne 2012, elle avait déjà reçu deux avertissements, les 17 février 2006 et 12 avril 2012 ;
que l’annulation de l’avertissement du printemps 2012, non contesté à l’époque, n’a pas été sollicitée ; que la S.C.M. YYY & Barate a constaté dans sa lettre du 2 avril 2013 un relâchement croissant de l’investissement de Z X au travail, qui ne constituait, selon l’employeur, que la mise à exécution de la menace qu’elle avait proférée pour le cas où sa réclamation ne serait pas satisfaite ;
que les agissements des docteurs Barate et Saint-Paul ayant consisté à notifier à deux mois d’intervalle deux avertissements annulés par la Cour ne sont pas de nature à laisser présumer l’existence d’un harcèlement moral ;

Qu’en conséquence, Z
X sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts ;

Sur la demande d’annulation du licenciement :

Attendu qu’en l’absence de harcèlement moral, les dispositions de l’article L 1152-3 du code du travail ne peuvent trouver application ; que le licenciement de
Z X n’est donc pas nul ;

Sur la demande d’indemnité compensatrice de préavis :

Attendu qu’il résulte des dispositions de l’article L 1226-4 du code du travail, modifié par la loi n°2012-387 du 22 mars 2012, que le contrat de travail du salarié dont l’inaptitude est consécutive à une maladie non professionnelle est rompu à la date de notification du licenciement ; que l’inexécution du préavis ne donne pas lieu au versement d’une indemnité compensatrice ;

Que si, en l’espèce, la S.C.M. Y & Barate a méconnu ces dispositions légales en faisant produire effet au licenciement au terme d’un préavis qui ne serait ni exécuté ni rémunéré, il ne peut en résulter pour Z
X aucun droit à une indemnité compensatrice d’un préavis qu’elle était médicalement hors d’état d’exécuter ;

Que Z X sera donc déboutée de ce chef de demande ;

Sur la demande de dommages-intérêts pour préjudice distinct :

Attendu qu’en première instance, Z X a sollicité le somme nette de 15000 à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice consécutif au retard avec lequel la S.C.M. YYY & Barate lui avait délivré l’attestation destinée à Pôle Emploi et du refus de l’employeur de remplir les attestations de salaires nécessaires pour obtenir paiement des indemnités journalières de la Sécurité sociale ; qu’en cause d’appel, elle maintient la même demande chiffrée en ajoutant parmi les préjudices à indemniser la violation du secret des correspondances privées résultant de la consultation de ses courriels personnels ;
qu’aucun courriel provenant de la messagerie personnelle de la salariée n’est communiqué par la S.C.M. Y & Barate en cause d’appel ; qu’en première instance, celle-ci a produit spontanément de tels courriels, mais en petit nombre puisque, pendant son délibéré, le
Conseil de prud’hommes a enjoint la S.C.M. YYY & Barate de lui communiquer d’autres exemples de courriels rédigés par
Z X pendant son temps de travail ; que la communication de courriels personnels à la demande des premiers juges ne peut ouvrir droit à réparation en faveur de la salariée ; que s’agissant des courriels produits spontanément aux débats par l’employeur, leur nombre et leur contenu ne sont pas connus ; que l’appelante a attendu que la société retire les pièces litigieuses pour demander réparation du préjudice résultant de la violation prétendue du secret des correspondances ; que la
Cour ne disposant d’aucun élément pour apprécier la réalité et l’importance du préjudice allégué, cette demande ne peut prospérer ;

Attendu qu’en différant la prise d’effet du licenciement jusqu’au terme du préavis, en méconnaissance des dispositions de l’article L 1226-4 du code du travail, la
S.C.M. Y & Barate a privé Z X pendant deux mois de l’attestation que l’article R 1234-9 du code du travail fait obligation aux employeurs de délivrer aux salariés, au moment de la résiliation, de l’expiration ou de la rupture du contrat de travail, pour leur permettre d’exercer leurs droits aux prestations mentionnées à l’article L 5421-2 ; que Z X démontre que sa prise en charge par Pôle
Emploi s’en est trouvée différée ;

Attendu que selon l’article R 323-10 du code de la sécurité sociale, alors applicable, en vue de la détermination du montant de l’indemnité journalière, l’assuré doit présenter à la caisse une attestation établie par l’employeur ou les employeurs successifs, conforme au modèle fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, et se rapportant aux payes effectuées pendant les périodes de référence ;
que cette attestation, à l’appui de laquelle sont présentées, le cas échéant, les pièces prévues à l’article
L. 143-3 du code du travail, doit comporter notamment :

1°) les indications figurant sur les pièces prévues à l’article L. 143-3 du code du travail en précisant la période et le nombre de journées et d’heures de travail auxquelles s’appliquent la ou les payes, le montant et la date de celles-ci, ainsi que le montant de la retenue effectuée au titre des assurances sociales ;

2°) le numéro sous lequel l’employeur effectue le versement des cotisations de sécurité sociale dues pour les travailleurs qu’il emploie ;

3°) le nom et l’adresse de l’organisme auquel l’employeur verse ces cotisations ;

Qu’en l’espèce, il résulte de l’échange de courriels qui constitue la pièce 41 de l’intimée que la
S.C.M.

Y & Barate a refusé de délivrer à Z X l’attestation de salaires prescrite par l’article R 323-10 susvisé au motif que les arrêts de travail du 12 juin au 11 juillet et du 16 juillet au 24 août 2013 ne pouvaient être générateurs d’indemnités journalières car ils étaient couverts par la période d’inaptitude ;

Mais attendu qu’il n’appartient pas à l’employeur requis par le salarié de délivrer l’attestation de salaire prévue par l’article R 323-10 du code de la sécurité sociale de substituer son appréciation du droit de l’intéressé aux indemnités journalières à celle de la caisse primaire d’assurance maladie ;

Et attendu que sur une même période correspondant au préavis visé à tort dans la lettre de licenciement, la S.C.M. Y &
Barate s’est abstenue de délivrer l’attestation destinée à Pôle Emploi au motif que la rupture n’avait pas pris effet et a refusé de délivrer l’attestation de salaire au motif que les arrêts de travail n’ouvraient pas droit aux indemnités journalières ; que cette attitude fautive de l’employeur a eu pour conséquence de priver l’appelante de toute ressource pendant plusieurs mois ;

Qu’en conséquence, la S.C.M. Y & Barate sera condamnée à payer à Z
X la somme de 7 000 à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice ;

Sur la demande reconventionnelle de la S.C.M. Y & Barate :

Attendu qu’il résulte des pièces communiquées qu’à compter de mars 2013, la S.C.M. YYY & Barate a fait l’avance à
Z X des sommes à verser par l’institution de prévoyance Prémalliance et destinées à compléter les indemnités journalières de l’assurance maladie ; que selon l’employeur, il subsiste en sa faveur un solde de 1785,05, correspondant à la différence entre le total de ses avances (2 386,61 ) et les prestations versées par Prémalliance (601,56 ) ; que
Z X fait observer à juste titre qu’une somme de 152,13 incluse dans celle de 2 386,61 a déjà été retenue sur le bulletin de paie d’avril 2013 ; que, d’autre part, la somme de 601,56 virée par Prémalliance à la société le 11 juin 2013 correspond aux droits de la salariée arrêtés au 7 mars 2013 ; que les avances de la société à cette dernière se sont poursuivies jusqu’au 5 juin 2013 ; que
Z X présente un décompte de ses droits au maintien de sa rémunération pendant ses arrêts de travail, auquel l’employeur ne trouve rien à opposer, et dont il résulte qu’après déduction des indemnités journalières, la rémunération nette à maintenir du 28 janvier au 10 juin 2013 s’élevait à 1 832,84 ; qu’une somme totale de 2 234,33 nets ayant été avancée par l’employeur, il existe un trop-perçu de 401,49 nets que Z
X sera condamnée à restituer à la S.C.M. YYY & Barate ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Confirme le jugement rendu le 30 janvier 2015 par le Conseil de prud’hommes de Lyon en ce qu’il a:

— débouté Z
X de sa demande d’annulation de l’avertissement du 11 décembre 2012,

— débouté Z
X de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral,

— débouté Z
X de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement nul,

— débouté Z
X de ses demandes d’indemnité compensatrice de préavis et d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;

Infirme le jugement entrepris dans ses autres dispositions,

Statuant à nouveau :

Annule les avertissements notifiés à Z X les 7 novembre 2012 et 5 février 2013,

Condamne la S.C.M. Y &
Barate à payer à Z
X la somme de sept mille euros (7 000 ) à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice consécutif à la méconnaissance des dispositions de l’article L 1226-4 du code du travail, du retard apporté à la délivrance de l’attestation destinée à Pôle
Emploi et du refus de délivrer à Z X une attestation de salaires en vue de la détermination du montant de l’indemnité journalière à laquelle les arrêts de travail du 12 juin au 11 juillet et du 16 juillet au 24 août 2013 ouvraient éventuellement droit,

Condamne Z X à restituer à la S.C.M. Y & Barate la somme nette de quatre cent un euros et quarante-neuf centimes (401,49 ) correspondant à un trop-perçu sur les avances faites par l’employeur sur les prestations de l’institution de prévoyance Prémalliance,

Déboute Z X du surplus de ses demandes,

Ordonne la compensation des créances réciproques des parties,

Y ajoutant :

Condamne la S.C.M. Y &
Barate aux dépens de première instance et d’appel,

Condamne la S.C.M. Y &
Barate à payer à Z
X la somme de deux mille euros (2 000 ) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

Gaétan PILLIE Michel SORNAY

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Extraits similaires à la sélection
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Lyon, 30 septembre 2016, n° 15/01178