Cour d'appel de Lyon, 8ème chambre, 17 mars 2021, n° 20/02585

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 8e ch., 17 mars 2021, n° 20/02585
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 20/02585
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Saint-Étienne, 21 avril 2020, N° 20/00037
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 20/02585 – N° Portalis DBVX-V-B7E-M6QT

Décision du

Président du TJ de SAINT ETIENNE

Référé

du 22 avril 2020

RG : 20/00037

ch n°

Z

C/

[…]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

8e chambre

ARRÊT DU 17 Mars 2021

APPELANT :

Maître C Z

[…]

[…]

Représenté par Me Joël TACHET de la SCP TACHET, AVOCAT, avocat au barreau de LYON, toque : 609

INTIMÉE :

Le Syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier sis lieudit ' LE PLAT HAUT agissant par son syndic la SAS cabinet CHEYLUS FRACHON MERLLIE dont le siège social est sis 3 rue de la République – 42000 SAINT-ETIENNE prise en la Personne de son Président, représentant légal en exercice y étant domicilié en cette qualité

[…] immeubles les écrins, les dolomites, le cervin, les aravis et le brevent

[…]

Représentée par Me Romain MAYMON, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 20 Janvier 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 20 Janvier 2021

Date de mise à disposition : 17 Mars 2021

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

— Christine SAUNIER-RUELLAN, président

— Véronique MASSON-BESSOU, conseiller

— Mireille QUENTIN DE GROMARD, conseiller

assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier

A l’audience, Mireille QUENTIN DE GROMARD

a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Christine SAUNIER-RUELLAN, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

ELEMENTS DU LITIGE

X, Y, A B, décédé le […], était copropriétaire au sein de la copropriété de l’ensemble immobilier 'le Plat Haut’ sis Les Dolomites à […], 478 et 311.

Le compte copropriétaire de feu X B étant débiteur, le syndicat des copropriétaires agissant par son syndic -la SAS cabinet Cheylus Frachon Merllie- a entendu engager une action en recouvrement de charges impayées contre les héritiers.

Par courrier du 23 octobre 2019, Maître Z a indiqué être le notaire en charge de la succession et a demandé au syndic si des sommes étaient dues par le défunt.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 12 décembre 2019, le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier 'le Plat Haut', par l’intermédiaire d’un huissier de justice, a demandé à Maître Z de lui communiquer l’attestation de notoriété ou à défaut les noms, prénoms et adresses des héritiers.

En l’absence de réponse, le syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic en exercice, a saisi le juge des référés du tribunal judiciaire de Saint-Etienne aux fins d’ordonner à Maître Z de lui transmettre l’attestation de notoriété ou à défaut, de révéler l’identité complète et l’adresse des héritiers du défunt.

Par ordonnance réputée contradictoire en date du 22 avril 2020 ce juge des référés, au visa de l’article 23 de la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat, modifié par l’article 35 de l’ordonnance du 18 septembre 2019, a :

— ordonné à Maître Z de communiquer au syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier situé […] à Villars, l’acte de notoriété ou l’identité complète et le domicile des héritiers de X B, décédé le […],

— débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande présentée en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné le syndicat des copropriétaires aux dépens,

— dit n’y avoir lieu au prononcé de l’exécution provisoire au seul vu de la minute.

Le 7 mai 2020 Maître Z a interjeté appel de cette décision.

Dans ses conclusions n°2 régulièrement transmises le 9 novembre 2020, auxquelles il convient de se reporter, Maître C Z, notaire associé, demande à la Cour, sur le fondement des articles 1436 du code de procédure civile et 23 de la loi du 25 ventôse an XI, de :

— infirmer la décision querellée,

— déclarer le juge des référés incompétent pour connaître de la demande de communication à un tiers d’un acte notarié sur le fondement de l’article 23 de la loi du 25 ventôse an XI,

— renvoyer le syndicat des copropriétaires à mieux se pourvoir,

— subsidiairement, dire n’y avoir lieu à référé,

— plus subsidiairement, débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande tendant à la communication de l’identité complète et du domicile des héritiers potentiels de X B, lesdites informations demeurant couvertes par le secret professionnel et l’article 23 de la loi du 25 ventôse an XI ne prévoyant pas d’exception pour autre chose que les actes effectivement reçus par le notaire, et le syndicat des copropriétaires ne démontrant pas d’intérêt légitime à se voir communiquer les informations confidentielles détenues par le notaire,

— condamner dans tous les cas le syndicat des copropriétaires aux entiers dépens de première instance et d’appel et dire que, conformément à l’article 699 du code de procédure civile, la SCP Tachet pourra recouvrer directement ceux dont elle a fait l’avance, sans en avoir reçu provision,

— condamner le syndicat des copropriétaires à payer à Maître C Z une indemnité de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que :

— la mise en oeuvre des dispositions de l’article 23 de la loi du 25 ventôse an XI est autonome et elle circonscrit les limites du secret professionnel du notaire tant par son objet (les actes) que par leurs bénéficiaires (les parties, les héritiers ou ayants droit) ; – que si l’article 1435 du code de procédure civile reprend les termes de cet article 23, il en fixe les modalités selon lesquelles il est éventuellement passé outre le silence ou le refus, à savoir : la compétence du président du tribunal judiciaire, une saisine sur requête et les observations sollicitées du dépositaire ;

— c’est à tort que le syndicat des copropriétaires, au lieu de suivre la procédure de l’article 1436 du

code de procédure civile, à charge pour le président du tribunal de solliciter les observations du notaire, a utilisé la voie du référé alors qu’aucune disposition ne donne pouvoir au juge des référés de se prononcer sur le secret professionnel ;

— aucun acte de notoriété n’ayant été reçu à ce jour par elle, la demande de communication d’une expédition d’un acte inexistant ne peut prospérer ;

— par ailleurs, le juge des référés ne pouvait étendre le champ de l’article 23 de la loi du 25 ventôse an XI au-delà des dispositions du texte qui, visant limitativement les actes reçus, exclut toute information détachée de ceux-ci et demeurant couverte par le secret professionnel et que dès lors le notaire ne peut être tenu de révéler l’identité des héritiers potentiels et leur domicile.

Dans ses conclusions régulièrement transmises le 26 juin 2020, auxquelles il convient de se reporter, le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier 'le Plat Haut’ agissant par son syndic la SAS cabinet Cheylus Frachon Merllie, demande à la Cour sur le fondement de l’article 23 de la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat, modifié par l’article 35 de l’ordonnance du 18 septembre 2019, de :

— confirmer l’ordonnance querellée,

— condamner Maître D Z à lui payer la somme 3 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner Maître D Z aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Romain Maymon, avocat sur son affirmation de droit.

Il réplique :

— avoir choisi de procéder selon la jurisprudence habituelle du tribunal judiciaire de Saint-Etienne en la matière qui rejette les requêtes en demandant d’assigner et que le choix de saisine du président du tribunal judiciaire par le biais de la procédure de référé permet le principe du respect du contradictoire et, pour le notaire, de présenter ses moyens de défense ;

— étant créancier de la succession de feu X B puisque le compte copropriétaire de ce dernier est débiteur, il est de l’intérêt de tous -créanciers de la succession et héritiers- de révéler l’identité des héritiers puisque cela leur permet de prendre position sur la succession et de connaître l’état du passif et de l’actif de cette dernière, tout comme il est de l’intérêt des héritiers de savoir qu’une action est intentée contre eux et d’être touchés par les actes ; qu’à défaut, il serait contraint de saisir le tribunal pour faire déclarer la succession vacante, désigner les domaines et mener une action dans l’ignorance des héritiers.

— Maître Z ne pouvait être délié du secret professionnel que par la voie judiciaire.

MOTIVATION DE LA DÉCISION

Attendu qu’aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé ;

Attendu que la demande de communication de l’acte de notoriété ou l’identité complète et le domicile des héritiers de feu X B formée par le syndicat des copropriétaires, en dehors de toute instance, relève des dispositions de l’article 145 précité ;

Que le motif visé par ledit article est légitime si la mesure sollicitée peut être utile dans le cadre d’une action future au fond ;

Qu’en l’espèce, le syndicat des copropriétaires justifie d’un litige potentiel puisqu’il cherche à recouvrer le paiement de charges de copropriété auprès des héritiers de la succession de feu X B décédé depuis deux ans et dont il est créancier ainsi que le démontre un jugement du tribunal d’instance de Saint-Etienne du 21 juin 2016 et une ordonnance d’injonction de payer du 1er juin 2017 ;

Attendu que l’article 1435 du même code dispose que les officiers publics ou ministériels sont tenus de délivrer, à charge de leurs droits, expédition ou copie des actes aux parties elles-mêmes, à leurs héritiers ou ayants droit ; que l’article 1436 précise qu’en cas de refus ou de silence du dépositaire, le président du tribunal de grande instance, saisi par requête, statue, le demandeur ou le dépositaire entendus ou appelés ;

Que l’article 23 de la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat dispose par ailleurs : 'Les notaires ne pourront également, sans l’ordonnance du président du tribunal de grande instance, délivrer expédition ni donner connaissance des actes à d’autres qu’aux personnes intéressées en nom direct, héritiers ou ayants droit, à peine de dommages intérêts, d’une amende de 15 euros, et d’être en cas de récidive, suspendus de leurs fonctions pendant trois mois, sauf néanmoins l’exécution des lois et règlements sur le droit d’enregistrement et de ceux relatifs aux actes soumis à une publication’ ;

Qu’il résulte de ces dispositions qu’une autorisation judiciaire peut valablement affranchir le notaire du secret professionnel au profit d’un tiers à la succession au regard des intérêts légitimes en cause, l’article 23 de la loi du 25 ventôse an XI ne distinguant pas entre ordonnance sur requête ou en référé ;

Qu’en l’espèce le syndicat des copropriétaires, tiers à la succession de feu X B et créancier de ce dernier au titre de charges de copropriété des biens immobiliers dont était propriétaire le défunt, dispose à l’évidence d’un intérêt légitime à avoir accès aux actes détenus par le notaire pour envisager le cas échéant une action en paiement à l’encontre des héritiers tenus des dettes et des charges de la succession ;

Que cependant, la déclaration de Maître Z, notaire en charge de la succession, selon laquelle elle n’a pu à ce jour dresser l’acte de notoriété compte tenu du fait que les héritiers potentiels de X B n’ont pas pris position sur l’acceptation de la succession, ne peut être mise en doute ; qu’en conséquence, elle ne peut être autorisée à transmettre au syndicat des copropriétaires un acte qui n’a pas encore été établi ; que l’ordonnance querellée doit donc être infirmée sur ce point ;

Attendu par ailleurs que le syndicat des copropriétaires sollicite, à défaut de transmission de l’acte de notoriété, la communication de l’identité complète des héritiers de feu X B et de leur adresse ;

Que cependant l’article 23 de la loi du 25 ventôse an XI, inséré dans la Section II 'Des actes, de leur forme, des minutes, grosses, expéditions et répertoires’ du Titre 1er 'Des notaires et des actes notariés’ de la loi du 25 ventôse an XI ne concerne que les actes dressés ou reçus par le notaire et non la révélation d’informations comme l’identité et l’adresse d’héritiers potentiels ; que dès lors Maître Z ne peut être autorisée à communiquer au syndicat des copropriétaires des informations sur les éventuels héritiers de X B et ce d’autant que ceux-ci n’ont pas encore été déterminés, aucun acte de notoriété n’ayant été dressé ;

Qu’il résulte des énonciations qui précèdent que l’ordonnance querellée doit être infirmée sur la demande de communication et que, statuant à nouveau, la demande du syndicat des copropriétaires de communication de l’acte de notoriété ou à défaut de l’identité complète et de l’adresse des héritiers

doit être rejetée ;

Que la demande du syndicat des copropriétaires de prononcé de l’exécution provisoire au seul vu de la minute est devenue sans objet ;

Attendu que le sort des dépens et de l’indemnité de procédure a été exactement réglé par le premier juge ;

Qu’à hauteur de Cour, au vu des circonstances de la cause, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Que le syndicat des copropriétaires, partie perdante, supportera la charge des dépens d’appel lesquels seront distraits au profit de la SCP Tachet en application de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme l’ordonnance querellée sauf en ce qu’elle a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et en ce qu’elle l’a condamné aux dépens de première instance,

Statuant à nouveau sur le chef infirmé :

Rejette la demande du syndicat des copropriétaires de communication de l’acte de notoriété et de l’identité complète et de l’adresse des héritiers,

Constate que la demande du syndicat des copropriétaires de prononcé de l’exécution provisoire au seul vu de la minute est devenue sans objet,

Y ajoutant :

Rejette la demande des parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne le syndicat des copropriétaires aux dépens d’appel lesquels seront distraits au profit de la SCP Tachet en application de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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