Cour d'appel de Lyon, 8ème chambre, 2 mars 2022, n° 21/04527

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 8e ch., 2 mars 2022, n° 21/04527
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 21/04527
Décision précédente : Tribunal de commerce de Lyon, 6 avril 2021, N° 2021r32
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 21/04527


N° Portalis DBVX-V-B7F-NUTK


Décision du


Tribunal de Commerce de LYON


Référé

du 07 avril 2021


RG : 2021r32


S.A.S. X


C/


S.A.S.U COLAS RAIL


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

8ème chambre

ARRÊT DU 02 MARS 2022

APPELANTE :

S.A.S. X

[…]

[…]


Représentée par Me Christiane DEBONO-CHAZAL, avocat au barreau de LYON, toque : 1048

INTIMÉE :

S.A.S.U COLAS RAIL

[…]

[…]


Représentée par Me Pierre BUISSON, avocat au barreau de LYON, toque : 140


Assistée de Me François FORTÉ, de la SELARL DF ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

* * * * * *
Date de clôture de l’instruction : 25 Janvier 2022


Date des plaidoiries tenues en audience publique : 25 Janvier 2022


Date de mise à disposition : 02 Mars 2022


Audience présidée par Karen STELLA, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de William BOUKADIA, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :


- Christine SAUNIER-RUELLAN, président


- Karen STELLA, conseiller


- Véronique MASSON-BESSOU, conseiller


Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,


Signé par Christine SAUNIER-RUELLAN, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *


Selon la société COLAS RAIL, la SAS ENTREPRISE LYONNAISE DE TRAVAUX SPECIAUX (X) lui a commandé le 2 septembre 2016 une machine imposante, soit un marteau fond de trou 18. La facture du 30 septembre 2016 s’est montée à 78 000 euros mais n’a pas été payée malgré une sommation de payer du 16 juin 2020 et un engagement de régler sa dette du 21 février 2020.


La société COLAS RAIL SASU a donné assignation du 13 janvier 2021 à la SAS X devant le président du tribunal de commerce de LYON en référé provision.


La défenderesse a opposé la prescription de l’action et le fait que l’urgence n’était pas prouvée. Subsidiairement, elle a sollicité des délais de paiement.


Par ordonnance du 7 avril 2021, le président du tribunal de commerce de LYON a :

• condamné à titre provisionnel la société ENTREPRISE LYONNAISE DE TRAVAUX SPECIAUX à payer à la société COLAS RAIL la somme de 78 000 euros TTC correspondant au montant de la facture impayée augmentée des intérêts de droit au taux BCE à son obligation de refinancement la plus récente majorée de 10 points conformément à l’article L441-10 du code de commerce à compter du 15 décembre 2019 et jusqu’à parfait paiement,

• débouté la société ENTREPRISE LYONNAISE DE TRAVAUX SPECIAUX de sa demande tendant à obtenir des délais de paiement comme non justifiée,

• condamné à titre provisionnel la société ENTREPRISE LYONNAISE DE TRAVAUX SPECIAUX à verser à la société COLAS RAIL la somme de 40 euros au titre de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au titre de la facture impayée, • condamné à titre provisionnel la société ENTREPRISE LYONNAISE DE TRAVAUX SPECIAUX à payer à la société COLAS RAIL la somme de 397,08 euros TTC au titre de la signification de la sommation de payer du 16 juin 2020,

• condamné la société ENTREPRISE LYONNAISE DE TRAVAUX SPECIAUX à payer 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile à la société COLAS RAIL outre les entiers dépens.


Le juge a retenu en substance que le contrat s’était formé au 30 septembre 2016 date à laquelle la prescription de cinq ans a commencé à courir. Au 13 janvier 2021, l’action en paiement n’est pas prescrite.


En application de l’article 873 du code de procédure civile, la condition de l’urgence n’est pas à remplir dès lors que l’obligation fondant la demande de provision n’est pas sérieusement contestable. Or l’ENTREPRISE LYONNAISE DE TRAVAUX SPECIAUX a reconnu par mail du 6 novembre 2015 avoir été livrée d’un matériel complet et opérationnel. Le montant de la facture n’est pas contesté. La société FIDEM, en sa qualité de présidente de la défenderesse, a confirmé le 21 février 2020 que la société COLAS RAIL serait payée sous huitaine. Or, il est constaté qu’un an après la facture était toujours impayée. La mauvaise foi de l’ENTREPRISE LYONNAISE DE TRAVAUX SPECIAUX est caractérisée. Ses contestations ne sont pas sérieuses. Elle ne produit au surplus aucun document probant de ses difficultés. Sa demande de délai de paiement est infondée.


Appel a été interjeté par déclaration électronique du 20 mai 2021 par le conseil de la société X sur les condamnations prononcées à son encontre et sur le rejet de sa demande de délai de paiement.


L’affaire a été orientée à bref délai selon les dispositions des articles 905 à 905-2 du code de procédure civile et les plaidoiries fixées au 25 janvier 2022 à 9 heures.


Suivant les dernières conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 18 janvier 2022, la SAS X demande à la Cour de :


Vu l’article L110-4 du code de commerce,

dire l’appel recevable et bien fondé,• infirmer l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions,• dire que l’action de la société COLAS est irrecevable comme prescrite,•

• prendre acte de son engagement à rendre la machine marteau à trou dans le mois suivant l’ordonnance, débouter les société COLAS de ses entières demandes.•


Subsidiairement,

dire que X pourra s’acquitter des sommes dues en 6 mensualités de 13 000 euros,•

• condamner la société COLAS à lui payer 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l’instance.


X soutient notamment qu’elle n’avait jamais utilisé ce type de machine marteau fond de trou. Il s’agissait d’un chantier spécial et d’un contexte « d’essai ». Elle a été livrée en octobre 2015 pour un essai. Aucune facture n’a été émise. Par mail du 16 octobre 2015, X a demandé la reprise du marteau qu’elle n’a pas pu utiliser, aucune personne de l’entreprise ne pouvant la faire fonctionner sauf difficilement d’autant que des pièces manquaient avant qu’on les ait retrouvées. La notice et les caractéristiques du matériel n’ont pas été données avec la machine. En 2020, les documents ont été réclamés lorsque la société COLAS a demandé son règlement des années après alors que la machine était effectivement restée dans les locaux d’X. COLAS a assigné en référé et pratiqué une saisie conservatoire sur ses comptes pour une somme de 826 203 euros. La somme de 4 349,84 euros a été saisie. Il est opposé la prescription de l’action en proposant la restitution du matériel. Il avait également été sollicité des délais de paiement à raison de 6 mensualités de 13 000 euros.


La prescription quinquennale de l’article L 110-4 du code de commerce ne dépend pas de la date de la facturation. L’action est prescrite depuis octobre 2020, soit cinq ans à compter de l’exécution de la prestation et de la réception de l’ouvrage par le maître de l’ouvrage. En outre, la facturation devait intervenir légalement 15 jours après la livraison selon l’article289 3-I du CGI. L’obligation au paiement prend naissance au moment où la prestation commandée a été exécutée à savoir la date à laquelle la facturation aurait due être délivrée par le prestataire. A défaut, la prescription court à compter du jour de l’achèvement de la prestation donc de la livraison. Peu important les bons de commande et mails contenant promesses de règlement. Il n’y a pas eu interruption du délai de prescription. Le juge des référés n’a pas répondu sur cette demande. Il ne s’agissait pas d’un prêt comme le soutient la société COLAS RAIL. X a adressé un bon de commande confirmant la vente. Il n’a jamais été fait référence à un prêt dans les échanges des parties.


Selon l’article 872 du code de procédure civile, l’urgence doit être démontrée. La facturation a été émise en 2019. Il doit également être prouvé l’absence de contestation sérieuse ou l’existence d’un différend. Or, la prescription est une contestation sérieuse.


Les délais de paiement sont fonction des problèmes de trésorerie liés au climat sanitaire.


Suivant ses dernières conclusions d’intimée notifiées par voie électronique le 22 juillet 2021, la SAS COLAS RAIL demande à la Cour de :


Vu les articles 873 alinéa 2 du code de procédure civile et L441-10 du code de commerce

déclarer mal fondé la société X en son appel.•


En conséquence,

la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions,• confirmer l’ordonnance en toutes ses dispositions,•

• condamner la société X à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l’article au titre de l’article 700 du code de procédure civile du code de procédure civile en cause d’appel,

• la condamner aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par Maître Pierre BUISSON, avocat sur son offre de droit, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.


La société COLAS RAIL expose notamment que :

• l’ordonnance n’a toujours pas été exécutée et le Premier Président n’a pas été saisi aux fins d’arrêt de l’exécution provisoire, la présentation des faits par l’adversaire est succincte et erronée,•

COLAS RAIL est spécialisée dans la conception, la construction et la maintenance d’infrastructures dans le secteur ferroviaire. Elle peut acquérir des outils spécifiques pour réaliser des prestations de services. En 2014, elle a acquis la machine litigieuse qu’elle n’a pas eu l’occasion d’utiliser dans ses activités. Elle a voulu la revendre. X exerce une activité de travaux en fondations spéciales (de pieux forés ou métalliques). COLAS a accepté de lui prêter la machine pour une phase d’essai à titre gratuit avant l’éventuelle vente. Par mail du 16 octobre 2015, X a demandé la livraison du marteau et l’a reçu le 19 octobre 2015. Après la phase de test et des adaptations de mise en route, l’engin a été utilisé. La phase d’essai étant expirée, COLAS RAIL a demandé confirmation à X pour la conclusion de la vente. X a indiqué que l’engin avait été perdu pour indiquer en mars 2020 l’avoir retrouvé alors qu’il s’agit d’un engin de taille imposante. Les parties ont finalement été d’accord sur l’achat par X de la machine pour 78 000 euros TTC suivant bon de commande du 2 septembre 2016 et facture du 30 septembre 2016. La facture est restée impayée. Sur demande de X qui promettait un règlement immédiat, elle lui a renvoyé la facture le 1er novembre 2019 à échéance du 15 décembre 2019. Elle lui a établi un avoir de la facture le 30 septembre 2016. Par mail du 21 février 2020, alors que l’impayé subsistait, il a été expliqué que le prix d’achat serait réglé à la fin du mois de février 2020 à la suite d’un accord de financement de sa banque. Le 8 mars 2020, X a uniquement avisé COLAS du fait qu’elle avait retrouvé la machine qu’elle souhaitait lui rendre. Or, la vente a été conclue en septembre 2016. COLAS a dû la mettre en demeure de payer outre intérêts de retard par lettre recommandée avec accusé de réception du 31 mars 2020. Les 23 avril 2020 et 6 mai 2020, X s’est contentée de solliciter des documents complémentaires (caractéristiques techniques, numéro de série, fiches techniques). COLAS a dû faire délivrer sommation de payer pour 106 614,08 euros en principal et intérêt, signifiée par huissier de justice le 16 juin 2020. X l’a de nouveau ignorée et a réitéré sa demande de documents. Le 12 octobre 2020, les documents ont été adressés avec une nouvelle mise en demeure de payer.


Par lettre du 2 novembre 2020, X a répondu qu’elle souhaitait un avoir de 13 352 euros TTC prétendant qu’un élément de la machine n’aurait pas été livré : elle n’a donc pas contesté la vente et elle a reconnu devoir paiement. Cela démontre la persistance de la mauvaise foi car l’absorbeur de choc a bien été livré avec la machine ainsi que cela se voit sur des photographies après livraison sur un parking D’X. Le 2 décembre 2020, une dernière mise en demeure a été envoyée. Le 7 décembre suivant, X a répondu qu’elle allait payer après avoir vérifié pourquoi l’absorbeur de choc avait disparu. Elle a contesté les intérêts de retard car les documents n’ont été fournis que le 19 octobre 2020. Elle a reconnu à nouveau la vente et son obligation de payer le prix. Cette absence de paiement est abusive.


L’obligation est incontestable justifiant la demande provision au sens de l’article 873 al 2 du code de procédure civile.


Sur la prescription, l’arrêt de la cour de cassation du 26 février 2020 est inapplicable. Il s’agissait de prestations d’études exécutées. COLAS n’a réalisé aucune prestation. Elle a vendu un équipement de chantier. X a passé commande le 2 septembre 2016 pour un prix de 65 000 euros HT soit 78 000 euros TTC. Le 30 septembre 2016, la facture a été établie. Aucune facture ne pouvait être établie avant le bon de commande.


La nouvelle facture du 1er novembre 2019 a donné lieu à un avoir sur celle du 30 septembre 2016. Le délai de prescription de 5 ans court du 30 septembre 2016 en exécution d’un contrat de vente. L’assignation n’est donc pas tardive.


En tout état de cause, il y a eu reconnaissance de dette qui a interrompu le délai de prescription en application de l’article 2240 du code civil. Une reconnaissance même partielle vaut pour la totalité de la créance. Cette reconnaissance date du 21 février 2020. Etait joint l’accord de la caisse d’Epargne du 20 février 2020 qui a accepté de financer une somme de 65 000 euros HT relative à une facturation de COLAS. La société FIDEM n’est pas une personne extérieure mais la présidente d’X comme société Holding. Le bon de commande était suivi par Monsieur Y, président de FIDEM et signataire de courriers entre X et COLAS. La lettre du 2 novembre 2020 est également interruptive de prescription.


Il n’est pas sollicité l’application de l’article 872 du code de procédure civile. L’argumentation sur ce point est sans objet. Il ne s’agit d’ailleurs pas d’une exception d’irrecevabilité.


L’obligation n’est pas sérieusement contestable : la facture a été émise le 30 septembre 2016 et rééditée le 1er novembre 2019 à la demande d’X. Elle n’est pas contestée. Elle a même admis qu’elle était prête à la régler le 7 décembre 2020.
Cette somme doit être augmentée des intérêts de droit au taux BCE à son obligation de refinancement la plus récente majorée de 10 points conformément à l’article L 441-10 anciennement L441-6 du code de commerce et de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement. Le délai de paiement a été fixé le 1er novembre 2019 à 45 jours soit le 15 décembre 2019. Les pénalités de retard sont dues.


Les délais de paiement ont d’ores et déjà été les plus larges d’autant que l’ordonnance n’a pas été exécutée.


Pour l’exposé des moyens développés par les parties, il sera fait référence conformément à l’article 455 du code de procédure civile à leurs écritures déposées et débattues à l’audience du 25 janvier 2022 à 9 heures.


A l’audience, les conseils des parties ont pu faire leurs observations et/ou déposer ou adresser leurs dossiers respectifs. Puis, l’affaire a été mise en délibéré au 2 mars 2022.

MOTIFS


A titre liminaire, les demandes des parties tendant à voir la Cour « constater » ou « dire et juger » ne constituant pas des prétentions au sens des articles 4,5,31 et 954 du code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions, il n’y a pas lieu de statuer sur celles-ci.


Sur les demandes de provision de la société COLAS RAIL


L’article 9 du code de procédure civile dispose que : « Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ». L’article 1353 du code civil dispose que : « Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. »


L’article 1104 du code civil dispose que : « Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d’ordre public ».


L’article 873 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que « Le président (') dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire ».


Contrairement à ce que soutient la société X, la société COLAS RAIL ne se fonde pas sur l’article 872 du code de procédure civile et n’a pas à démontrer la condition d’urgence. Elle doit démontrer que l’obligation à paiement n’est pas sérieusement contestable.


COLAS RAIL prouve, à l’appui des pièces qu’elle verse, qu’elle a livré un matériel le 16 octobre 2015 à la société X pour une phase d’essai ainsi que cela ressort suffisamment du mail de Z Y en date du 6 novembre 2015 (pièce 3 de l’intimée), qu’un bon de commande a été passé le 2 septembre 2016, que la facture relative à cette vente a été émise le 30 septembre 2016 pour le montant de 78 000 euros TTC, avec paiement 60 jours fin de mois, que cette facture a été rééditée avec un avoir le 1er novembre 2019 à payer le 15 décembre 2019.


La relation contractuelle a donc, à l’évidence, débuté par un prêt pour un essai qui a duré trois semaines environ pour se concrétiser par un accord sur une vente d’un équipement de chantier qui a été formalisée par le bon de commande suivi d’une facturation.


La société X soutient que l’action en paiement est prescrite. En réalité, en matière de référé, le juge qui est juge de l’évidence et de l’incontestable n’a pas à se prononcer sur la prescription d’une action, question qui relève du juge du fond. Le juge des référés ne peut que constater qu’il existe une contestation sérieuse si la prescription apparaît être un moyen sérieux et dire n’y avoir lieu à référé ou inversement si la prescription n’est manifestement pas acquise faire droit à la demande de provision.


Ainsi, X doit démontrer le caractère sérieux de la prescription quinquennale qu’elle invoque. Or, elle fait valoir une argumentation se fondant sur une prestation de service et sur la réception d’un ouvrage qu’elle assimile à la livraison d’un matériel. Or, juridiquement, il n’y a, à l’évidence, pas eu de prestation de service ni de réception d’un ouvrage mais une vente. En effet, tous les mails produits (en pièces 8 et 9) démontrent que la société X souscrit à la qualification juridique de vente et qu’elle assurait qu’elle allait payer sa dette, en ayant obtenu l’accord de sa banque pour la facture de 65 000 HT. X a juste tenté d’obtenir un avoir pour une pièce, l’absorbeur de choc, prétendument manquante ou des documents non remis.


En conséquence, le point de départ de la prescription quinquennale de l’article L 110-4 du code de commerce court pour cinq ans à compter du 60 ème jour suivant le 30 septembre 2016. Cette facturation a bien suivi rapidement le bon de commande sans violation manifeste du code général des impôts.


Dès lors, en assignant en paiement provisionnel le 13 janvier 2021, le société COLAS RAIL est manifestement toujours dans le délai de prescription. Le moyen tiré de la prescription de l’action et développé par la société X n’est pas une contestation sérieuse.


La société X n’a pas développé de moyen particulier, en dehors de la prescription, à l’encontre des demandes de provision au titre de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au titre de la facture impayée, au titre de la signification de la sommation de payer, ni au titre des intérêts de droit au taux BCE à l’obligation de refinancement la plus récente majorée de 10 points à compter du 15 décembre 2019 en application de l’article L 441-10 du code de commerce. La société COLAS a, à juste titre, revendiqué dans sa demande de provision l’application de cette disposition légale à raison du retard de paiement.


La Cour confirme en conséquence l’ordonnance déférée en ce qu’elle a fait droit aux demandes de provision en précisant, compte tenu de la saisie conservatoire partiellement fructueuse, qu’il s’agit d’une condamnation en deniers ou quittances.


Sur les délais de paiement


En application de l’article 1343-5 du code civil, le juge peut accorder au débiteur des délais de paiement. Toutefois, le demandeur doit démontrer les éléments justifiant ses difficultés de trésorerie et sa volonté d’apurer sa dette par une proposition de paiement qui n’apparaisse pas illusoire.


Or, en l’espèce, outre le fait que la société X a déjà eu d’importants délais de fait, elle ne fournit aux débats aucun document financier permettant d’établir ses difficultés de trésorerie et de s’assurer du sérieux de sa proposition. Invoquer le contexte sanitaire de manière abstraite n’est pas un argument pertinent. En conséquence, la Cour confirme l’ordonnance déférée en ce qu’elle a rejeté la demande de délai de paiement.


Sur les demandes accessoires


Partie perdante, tant en appel qu’en première instance, la société X doit supporter les entiers dépens de première instance et d’appel. La Cour confirme l’ordonnance déférée sur les dépens et y ajoute, à la charge de la société X, ceux d’appel.


La Cour autorise Maître Pierre BUISSON, qui en a fait la demande expresse, à recouvrer directement ceux des dépens dont il a été fait l’avance sans avoir reçu provision dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.


En équité, la Cour confirme la juste appréciation de l’indemnité allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile par le premier juge à hauteur de 4 000 euros et y ajoute, en équité une somme de 2 000 euros à hauteur d’appel.


Corrélativement, la Cour déboute la société X de ses demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens.

PAR CES MOTIFS,


La Cour,


Confirme l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions.


Y ajoutant,


Condamne la SAS ENTREPRISE LYONNAISE DE TRAVAUX SPECIAUX aux entiers dépens d’appel,


Autorise Maître Pierre BUISSON à recouvrer directement ceux des dépens dont il a été fait l’avance sans avoir reçu provision dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile


Condamne la SAS ENTREPRISE LYONNAISE DE TRAVAUX SPECIAUX à payer à la SAS COLAS RAIL la somme supplémentaire de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel,


Déboute la SAS ENTREPRISE LYONNAISE DE TRAVAUX SPECIAUX de ses demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens.


LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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