Cour d'appel de Lyon, 3e chambre a, 23 novembre 2023, n° 23/03155

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 3e ch. a, 23 nov. 2023, n° 23/03155
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 23/03155
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Lyon, 3 avril 2023, N° 22/00052
Dispositif : Autre
Date de dernière mise à jour : 28 novembre 2023
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 23/03155 – N° Portalis DBVX-V-B7H-O5LT

Décision du Président du TJ de LYON du 04 avril 2023

RG : 22/00052

S.C.I. DU PIGEONNIER

C/

S.E.L.A.R.L. SELARL AJ UP

S.E.L.A.R.L. MJ SYNERGIE – MANDATAIRES JUDICIAIRES

S.A.R.L. RAMEL COMMUNICATION

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 23 Novembre 2023

APPELANTE :

S.C.I. DU PIGEONNIER au capital de 1 000,00 €, immatriculée au RCS de LYON sous le n° 827 943 796 RCS LYON, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée par Me Eric CESAR de la SELARL LEGI AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 664

INTIMEES :

S.E.L.A.R.L. AJ UP immatriculée au RCS de CHAMBERY sous le numéro 820 120 657, représentée par Maître [P] [N], administrateur judiciaire, ès qualité d’administrateur judiciaire de la SCI DU PIGEONNIER, désignée à cette fonction par Jugement du Tribunal Judiciaire de LYON du 4 avril 2023

[Adresse 3]

[Localité 6]

S.E.L.A.R.L. MJ SYNERGIE – MANDATAIRES JUDICIAIRES immatriculée au RCS de LYON sous le numéro 538 422 056, représentée par Maître [Z] [O] ou Maître [V] [M], mandataires judiciaires, ès qualités de mandataire judiciaire de la SCI DU PIGEONNIER, désignée à cette fonction par Jugement du Tribunal Judiciaire de LYON du 4 avril 2023

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentées par Me Cécile FLANDROIS de la SELARL SVMH AVOCATS LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 1643

S.A.R.L. RAMEL COMMUNICATION

[Adresse 2]

[Localité 1]

non représentée,

En présence du Ministère Public, en la personne d’Olivier NAGABBO, avocat général

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 26 Septembre 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 05 Octobre 2023

Date de mise à disposition : 23 Novembre 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

— Patricia GONZALEZ, présidente

— Aurore JULLIEN, conseillère

— Viviane LE GALL, conseillère

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière

A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Par assignation du 15 novembre 2022, la SARL Ramel Communication a saisi le tribunal judiciaire de Lyon aux fins d’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la SCI du Pigeonnier.

Elle motivait sa demande par l’existence d’une décision en référé condamnant la SCI du Pigeonnier à lui verser la somme de 80.581,80 euros à titre principal, somme qu’elle n’avait pu recouvrer.

Par jugement du 15 décembre 2022, le tribunal judiciaire de Lyon a désigné un juge-commis pour procéder à une enquête. Le juge-commis a rendu son rapport le 20 mars 2023.

Par jugement contradictoire du 4 avril 2023, le tribunal judiciaire de Lyon a :

— constaté l’état de cessation des paiements et prononcé l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire de SCI Du Pigeonnier, dont le siège social est sis [Adresse 5], avec période d’observation d’une durée de 6 mois, soit jusqu’au 4 octobre 2023, en vue soit de l’élaboration d’un projet de plan de redressement, soit de la liquidation,

fixé provisoirement au 14 septembre 2022 la date de cessation des paiements,

— nommé Mme [U] [R] en qualité de juge-commissaire, et, à défaut, M. le président du tribunal judiciaire de Lyon,

— désigné la Selarl AJ Up, représentée par Me [P] [N], [Adresse 3], en qualité d’administrateur judiciaire, avec mission d’assistance prévue à l’article L. 631-12 du code de commerce,

— désigné la Selarl MJ Synergie, représenté par Me [O] ou Me [M], [Adresse 4], en qualité de mandataire judiciaire, qui disposera pour remplir sa mission, en application de l’article L. 624-1, d’un délai de 10 mois à compter du présent jugement,

— dit que le délai pour produire les créances est de 2 mois à compter de la publication du présent jugement au Bodacc, ce dernier délai est augmenté de 2 mois pour les créanciers domiciliés hors de la France métropolitaine (article R. 622-24 du code de commerce),

— désigné la Selas 2C Partenaires, commissaire-priseur, pour procéder à l’inventaire des biens du débiteur, et en adresser rapport au tribunal avant le 4 juin 2023,

— renvoyé l’affaire à l’audience du 23 mai 2023, à 14 heures salle P pour qu’il soit statué sur la suite à donner à la procédure, et au besoin qu’il soit statué sur le prononcé éventuel d’une liquidation judiciaire,

— ordonné la publicité du présent jugement et la transmission des extraits prescrits par la loi,

— dit que les dépens seront tirés en frais privilégiés ainsi que les frais de greffe.

La SCI Du Pigeonnier a interjeté appel par acte du 13 avril 2023.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 24 mai 2023 et signifiées à la SCI Ramel Communication le 5 juin 2023 fondées sur les articles L. 631-1 et suivants du code de commerce, la SCI Du Pigeonnier a demandé à la cour de :

— infirmer le jugement en ce qu’il a :

— constaté son état de cessation des paiements et prononcé d’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire avec période d’observation d’une durée de 6 mois, soit jusqu’au 4 octobre 2023, en vue soit de l’élaboration d’un projet de plan de redressement, soit de la liquidation,

— fixé provisoirement au 14 septembre 2022 la date de cessation des paiements,

— nommé Mme [U] [R] en qualité de juge-commissaire, et, à défaut, M. le président du tribunal judiciaire de Lyon,

— désigné la Selarl AJ Up, représentée par Me [P] [N], [Adresse 3], en qualité d’administrateur judiciaire, avec mission d’assistance prévue à l’article L. 631-12 du code de commerce,

— désigné la Selarl MJ Synergie, représenté par Me [O] ou Me [M], [Adresse 4], en qualité de mandataire judiciaire, qui disposera pour remplir sa mission, en application de l’article L. 624-1, d’un délai de 10 mois à compter du présent jugement,

— désigné la Selas 2C Partenaires, commissaire-priseur, pour procéder à l’inventaire des biens du débiteur, et en adresser rapport au tribunal avant le 4 juin 2023,

statuant à nouveau,

— constater que son état de cessation des paiements n’est pas caractérisé,

en conséquence,

— juger n’y avoir lieu de prononcer l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire,

— débouter la société Ramel Communication de ses demandes,

— laisser les frais et dépens de la présente procédure à la charge du Trésor public.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 15 septembre 2023 et signifiées à la SCI Ramel Communication le 12 juin 2023 fondées sur l’article L. 631-1 du code commerce, la Selarl AJ Up, ès-qualités d’administrateur judiciaire de la SCI Du Pigeonnier et la Selarl MJ Synergie ' Mandataires Judiciaires, ès-qualités de mandataire judiciaire de la SCI Du Pigeonnier ont demandé à la cour de :

à titre principal,

— confirmer le jugement déféré en intégralité,

— débouter la SCI Du Pigeonnier de l’intégralité de ses demandes,

à défaut,

— constater que la SCI Du Pigeonnier est en état de cessation des paiements et ne justifie d’aucun actif disponible qui lui permettrait de faire face à son passif exigible,

— prononcer en conséquence l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la SCI Du Pigeonnier,

— fixer la date de cessation des paiements au 14 septembre 2022,

en toutes hypothèses,

— condamner la SCI Du Pigeonnier aux entiers dépens de l’instance et à leur payer la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouter la SCI Du Pigeonnier de l’intégralité de ses demandes dont celles relatives aux frais et dépens de la présente procédure.

Le ministère public, par avis du 23 août 2023 communiqué contradictoirement aux parties le 29 août 2023, a requis la confirmation du jugement entrepris.

La SCI Ramel communication, à qui la déclaration d’appel a été signifiée par acte du 28 avril 2023, n’a pas constitué avocat.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 26 septembre 2023, les débats étant fixés au 26 septembre 2023.

Pour un plus ample exposé des moyens et motifs des parties, renvoi sera effectué à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de Procédure Civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’état de cessation des paiements

La SCI du Pigeonnier a fait valoir :

— la non-exigibilité des dettes fiscales en raison de l’existence d’un contentieux concernant le permis de construire en cours devant le Tribunal Administratif de Nice, aucune mesure de recouvrement n’étant en cours,

— le caractère non exigible des dettes bancaires puisque par courriel du 14 avril 2023, la CECM a adressé les avenants de prorogation des crédits d’acquisition et la convention de caution d’indemnité d’immobilisation pour le programme de [Localité 7],

— l’absence de demande de paiement au titre des dettes fournisseurs, étant indiqué que dans le cadre d’une opération de promotion immobilière, de nombreux frais sont engagés avant toute rentrée d’argent par le promoteur immobilier et que dans ce cadre, il est d’usage de conclure des conventions d’assistance administrative et de gestion, le promoteur immobilier assurant la gestion technique, administrative et financière du programme, la SCI n’étant qu’un support technique et n’employant aucun salarié,

— la conclusion de convention d’assistance administrative avec la société Financière du Quai Sarrail, et d’une convention d’assistance administrative avec la société MIPROM qui est associée et gérante de l’appelante, avec en contrepartie la facturation d’honoraires, les factures n’ayant pas été exigées puisque les travaux n’ont pas commencé, les sociétés concernées ayant connaissance de ce que les paiements interviendront lors du début des travaux, d’autant plus que l’administrateur judiciaire de la société MIPROM n’a sollicité aucun paiement dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire de cette dernière,

— la contestation de la créance de la Société Ramel, au vu de l’existence d’une plainte contre cette dernière du fait des agissements de l’intimée, le délit caractérisé lui permettant d’obtenir une indemnisation en cas de renvoi devant le tribunal correctionnel,

— la demande de la société MIPROM, au juge-commissaire en charge de son dossier, d’apporter des fonds à la SCI du Pigeonnier, ce qui lui permettrait d’éteindre la créance de la Société Ramel,

— le défaut d’exigibilité des sommes en compte-courant d’associés, en application de l’article 12 des statuts de l’appelante, étant rappelé que la demande de remboursement impose un préavis de 3 mois pour le paiement, sous réserve que la trésorerie le permette.

La Société AJ UP et la société MJ Synergie ont fait valoir :

— l’absence d’actifs de la SCI du Pigeonnier, qui n’en revendique aucun et n’apporte aucune preuve à ce titre, l’appelante se contentant de contester certaines créances en les estimant non exigibles,

— la nécessité d’apprécier l’existence d’un état de cessation des paiements au jour où la cour statue, ce qui ne peut mener à limiter le passif à seulement certaines créances comme le fait l’appelante,

— la mise en 'uvre des opérations de déclarations et de vérification du passif sachant qu’un passif a été déclaré à hauteur de 16.620.186,39 euros, dont le dirigeant de la SCI du Pigeonnier ne conteste pas la somme à hauteur de 84.269,86 euros au titre du passif échu dont 83.884,86 euros au 14 septembre 2022,

— la nécessité de tenir compte des créances contestées dans l’appréciation de la situation,

s’agissant de la créance de la Société Ramel, l’existence de factures impayées depuis le 23 novembre 2021, qui ont fait l’objet d’une condamnation en référé du 20 juin 2022, l’existence d’une plainte à l’encontre de l’intimée étant indifférente quant à l’existence de la créance qui est exigible à hauteur de 82.081 euros TTC et doit être intégrée au passif,

— l’absence d’accord entre les parties concernant la diminution de la créance à 50.000 euros, aucune preuve n’étant versée en ce sens, sans compter qu’une société tierce, à savoir la société Mi Prom, n’a pas vocation à payer cette créance, étant elle-même placée en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire,

— s’agissant des créances fiscales, la déclaration par la DDFIP du Vaucluse d’une créance pour la somme de 1.569.956 euros pour laquelle l’appelante ne justifie pas avoir fait une demande de suspension des délais auprès des services compétents, ni avoir obtenu un moratoire ou un report de la date de paiements,

— la déclaration par la DRFP de Provence, d’un solde de 52.220 euros au titre d’une indemnité de défrichement payée partiellement, sachant que la date limite de paiement indiquée sur le titre de perception était le 15 septembre 2020, étant rappelé qu’aucune preuve d’un moratoire ou d’un délai de paiement n’est versée aux débats,

— la déclaration par le PRS de la taxe foncière uniquement pour l’année 2022 pour la somme de 6.398 euros, l’appelante en reconnaissant le caractère définitif,

— la déclaration par la société [Localité 6] Olympique Universitaire Lou-Rugby, d’une créance de 66.000 euros, au titre d’une facture de prestation du 21 juin 2021 exigible au 21 juillet 2021, pour laquelle le libellé de la facture à l’égard de l’appelante n’a pas été contesté (les prestations étant au bénéfice de la société Mi Prom), et pour laquelle aucun moratoire n’a été obtenu, les écrits du dirigeant tendant seulement à faire patienter le créancier en annonçant des rentrées d’argent,

— la déclaration de créance de la société DUTI pour la somme de 412.000 euros au titre de factures datant de juillet 2019 à décembre 2022 et non au titre de son compte-courant d’associé, aucun moratoire n’étant établi,

— la déclaration de créance de la société MI Prom pour la somme de 4.500.275 euros, composée de factures, avec toutefois une réserve concernant la somme de 1.067.459,52 euros qui pourrait porter sur le compte-courant d’associés et devrait être exclue du passif exigible eu égard à l’article 12 des statuts de l’appelante, la question étant la même pour la déclaration de créance de la société Hazak si elle porte sur le compte-courant d’associé pour la somme de 2.000.000 euros,

— la déclaration de créance de la société d’avocat ISEE pour un montant de 40.029,90 euros correspondant à des factures émises entre le 24 octobre 2019 et le 31 août 2022, pour lesquelles aucun délai de paiement ou moratoire ne sont constatés,

— la déclaration de créance de la société Financière du Quai Sarrail pour un montant de 336.633,50 euros au titre des factures de prestations, qui doit être pris en compte puisque l’article 12 des statuts de l’appelante ne porte que sur les sommes présentes au compte-courant d’associés et non sur les factures entre les sociétés du groupe, sans compter l’absence de tout moratoire,

— l’absence de moratoire concernant les déclarations de créances de la société Adjectif (27.041,21 euros, factures de mars 2019 à janvier 2023), de la société Legiconsultant pour la somme de 5.421,20 euros (factures des 16 juin et 14 décembre 2022) et de la société Archi Partenaire pour la somme de 69.700 euros s’agissant d’un solde de facture suite à des règlements partiels d’avril 2022 et janvier 2023,

— s’agissant de la créance de la société Banque Européenne de Crédit, inscrite par l’appelante sur la liste des créanciers, l’absence de toute preuve de prorogation des crédits d’acquisition, étant rappelé que le dirigeant de la SCI du Pigeonnier, lui-même placé en état de redressement judiciaire, ne peut signer seul un avenant, seul l’administrateur judiciaire étant en mesure de le faire,

— l’absence de preuve de ce que la pratique en matière de construction prévoit un paiement postérieur à la commercialisation des biens vendus en l’état futur d’achèvement,

— le caractère indifférent de l’absence de mise en 'uvre de mesures de recouvrement de la part du liquidateur judiciaire de la société MI PROM,

— un total de passif non contesté pour la somme de 84.268,86 euros auquel il faut ajouter 7.169.944,60 euros au titre des créances pour lesquelles aucun moratoire n’est constaté,

— une absence totale d’actifs au profit de la SCI du Pigeonnier, de disponibilités bancaires,

la fixation de la date de cessation des paiements au 14 septembre 2022, date à laquelle la Société Ramel a fait signifier un commandement de payer à la SCI du Pigeonnier, suite à la saisie-attribution infructueuse du 8 septembre 2022,

— le rappel de l’existence de créances antérieures, avec l’indication qu’au 31 décembre 2021, les disponibilités financières de la SCI du Pigeonnier étaient de 23 euros contre une somme due à M. [Y] pour 13.200 euros.

Sur ce,

L’article L631-1 du code de commerce dispose : « Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n’est pas en cessation des paiements.

Cette condition s’apprécie, s’il y a lieu, pour le seul patrimoine engagé par l’activité ou les activités professionnelles.

La procédure de redressement judiciaire est destinée à permettre la poursuite de l’activité de l’entreprise, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif. Elle donne lieu à un plan arrêté par jugement à l’issue d’une période d’observation et, le cas échéant, à la constitution de classes de parties affectées, conformément aux dispositions des articles L. 626-29 et L. 626-30. La demande prévue au quatrième alinéa de l’article L. 626-29 peut être formée par le débiteur ou l’administrateur judiciaire. »

Il sera rappelé que le passif exigible correspond au passif échu c’est-à-dire à l’ensemble des dettes arrivées à échéance dont le créancier peut réclamer le paiement à tout moment, à moins qu’un moratoire n’ait été consenti au débiteur, ce dernier devant rapporter la preuve de l’existence du moratoire.

Il convient également de rappeler que l’actif disponible est constitué des sommes ou valeurs dont l’entreprise peut immédiatement disposer pour assurer le paiement d’une dette quel qu’en soit le montant, s’agissant notamment de liquidités, de valeurs mobilières immédiatement réalisables de même que la valeur d’un fonds de commerce.

S’agissant d’une convention de trésorerie entre sociétés d’un groupe, il convient de vérifier si le financement relève d’une faculté laissée à leur bon vouloir, ou non afin de déterminer si elle relève d’une réserve de crédit ou non.

En outre, doit être rappelé le fait que l’état de cessation des paiements ne doit pas être un temps furtif mais constitue un état dans la durée, et que la seule situation d’un mois avec un état négatif avant un retour à meilleure fortune immédiate ne peut caractériser une telle situation.

L’article L278 du Livre des Procédures Fiscales dispose qu’en cas de contestation par un tiers auprès du tribunal administratif du permis de construire ou de la non-opposition à la déclaration préalable, le paiement des impositions afférentes à cette autorisation est différé, sur demande expresse de son bénéficiaire, jusqu’au prononcé d’une décision juridictionnelle devenue définitive. A l’appui de sa demande, le bénéficiaire de cette autorisation doit constituer auprès du comptable les garanties prévues à l’article L. 277. La prescription de l’action en recouvrement est suspendue jusqu’au prononcé de la décision définitive.

Il convient en conséquence d’apprécier la situation de la SCI du Pigeonnier et de déterminer le quantum tant du passif exigible que de l’actif disponible pour y faire face.

Concernant les créances fiscales suivantes :

— DDFIP Vaucluse Redevance Archéologique : 72.030 euros

— DDFIP Vaucluse Taxe Aménagement : 1.355.194 euros

— DRFIP PACA et Bouches du Rhône ' indemnité de défrichement : 52.220 euros,

— Pôle de recouvrement spécialisé (taxe foncière, TVA, impôt sur les sociétés) : 6.398 euros,

l’appelante fait valoir de ce qu’une demande de paiement différé a été formulée dans l’attente de la décision du Tribunal Administratif saisi d’un recours à l’encontre du permis de construire.

Toutefois, la SCI du Pigeonnier ne rapporte pas la preuve de ce qu’elle a effectivement saisi les différents services concernés de demandes de suspension de recouvrement et a obtenu gain de cause, étant rappelé en outre que des titres exécutoires ont été émis et que les déclarations de créances au passif de l’appelante ont été faites, sur la base de ces titres.

Par ailleurs, le jugement de première instance étant exécutoire de plein-droit, le délai pour les déclarations de créance est expiré et permet de retenir un montant total de déclarations pour la somme de 16.620.186,39 euros dont 84.269 euros de créances non contestées, portant principalement sur des factures.

Il convient d’écarter du passif les comptes-courants d’associés pour lesquels il n’est pas constaté que leur règlement a été demandé.

Concernant la créance de la Société Ramel, il est relevé que cette dernière dispose d’une ordonnance de référé du 20 juin 2022, condamnant l’appelante à lui verser la somme de 80.581,80 euros, décision dont il n’a pas été interjetée appel et qui est exécutoire.

De fait, il convient également de retenir cette somme au passif de l’appelante. L’indication par l’appelante qu’une plainte est déposée à l’encontre de la Société Ramel, et qu’en cas de décision correctionnelle en faveur de l’appelante, elle pourrait obtenir des dommages et intérêts de la part de l’intimée ne relève que de la spéculation et ne permet de retirer à la somme réclamée son caractère exigible.

Si la juridiction envisage de retenir a minima les créances non contestées, la condamnation prononcée au profit de la Société Ramel, mais aussi les sommes dues à l’administration fiscale, le passif est déjà conséquent, et atteint un montant de 1.734.806,80 euros.

S’agissant de l’actif disponible, la SCI du Pigeonnier ne fournit aucun élément permettant de retenir un actif disponible, ou bien l’existence de créance pouvant être recouvrée à bref délai.

Il est constaté que l’appelante ne fournit que ses bilans, la convention de gestion la liant à la société Mi prom et la convention d’assistance administrative et financière conclue avec la Financière du Quai Sarrail, mais ne remet aucun relevé de comptes ou éléments permettant à la juridiction d’apprécier un quantum précis des sommes en possession effective de l’appelante.

Il doit être retenu par ailleurs que la société MIPROM fait également l’objet d’une procédure collective et que tout comme la Financière du Quai Sarrail, elle a déclaré sa créance au passif de l’appelante.

Dès lors, aucune somme ne saurait être obtenue de la part de la société MIPROM dans le cadre de la convention de gestion susmentionnée.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, et au jour où la juridiction statue, il est constant que la SCI du Pigeonnier est en état de cessation de paiement, étant rappelé qu’elle ne dispose d’aucun actif propre et n’est pas en mesure d’apurer ne serait-ce qu’une marge basse de son passif.

La décision déférée sera donc confirmée sur ce point.

Sur le placement en redressement judiciaire de la SCI du Pigeonnier

Au regard des éléments susvisés, il convient de confirmer la décision déférée en ce qu’elle a ordonné une mesure de redressement judiciaire au profit de la SCI du Pigeonnier.

Sur les autres demandes

La SCI du Pigeonnier échouant en ses prétentions, elle sera condamnée à supporter les entiers dépens de la présente instance.

L’équité commande d’accorder à la Société AJ UP et à la société MJ Synergie une indemnisation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La SCI du Pigeonnier sera ainsi condamnée à leur payer la somme totale de 1.500 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, dans les limites de l’appel

Confirme la décision déférée dans son intégralité,

Y ajoutant

Condamne la SCI du Pigeonnier à supporter les entiers dépens de la procédure d’appel,

Condamne la SCI du Pigeonnier à payer à la SELARL AJ UP en qualité d’administrateur judiciaire de la SCI du Pigeonnier et à la SELARL MJ Synergie, en qualité de mandataire judiciaire de la SCI du Pigeonnier la somme totale de 1.500 euros à titre d’indemnisation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

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