Cour d'appel de Lyon, n° 14/09549

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, n° 14/09549
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 14/09549
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lyon, 12 septembre 2011

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 14/09549

société ERBIS

C/

Y-X

société MANPOWER FRANCE

arrêt sur renvoi de la cour de cassation :

jugement du 13 septembre 2011 du conseil de prud’hommes de LYON

RG : F 09/04356

arrêt de la Cour d’Appel de LYON du 19 juin 2012

RG : 11/06629

arrêt de la Cour de Cassation de PARIS

du 19 Novembre 2014

RG : 2059 F D

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 16 DECEMBRE 2015

APPELANTE :

société ERBIS

XXX

XXX

représentée par Me Jacques GRANGE de la SELARL GRANGE LAFONTAINE VALENTI ANGOGNA-G.L.V.A., avocat au barreau de LYON substituée par Me Didier MILLET, avocat au barreau de LYON

INTIMÉS :

D Y-X

né le XXX à XXX

XXX

XXX

comparant en personne, assisté de Me Cécile RITOUET de la SELARL CABINET RITOUET-SOULA, avocat au barreau de LYON substituée par Me Fatima TABOUZI, avocat au barreau de LYON

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2015/007156 du 12/03/2015 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de LYON)

société MANPOWER FRANCE

XXX

XXX-ET-CUIRE

représentée par Me Florence FARABET ROUVIER, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Laurent CHABRY de la SELARL LAMBERT-VERNAY ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 20 Octobre 2015

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Michel BUSSIERE, Président

Agnès THAUNAT, Conseiller

Vincent NICOLAS, Conseiller

Assistés pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 16 Décembre 2015, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel BUSSIERE, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

A compter du 11 février 2008 A Y-X a conclu avec la société MANPOWER des contrats de mission et a été mis à la disposition de la société ERBIS, en qualité d’opérateur de commande numérique.

Le 1er septembre 2008, il a signé avec la société MANPOWER un avant dernier contrat de mission, prévoyant la possibilité d’avancer ou de reporter le terme entre le 10 et le 16 septembre 2008, pour une durée de 151,67 h par mois et un salaire mensuel brut de 1.321,05, et il était mis à nouveau à la disposition de la société ERBIS.

Le 12 septembre 2008, celle-ci signait avec la société MANPOWER un avenant de renouvellement du contrat de mise à disposition de A Y-X, pour la période du 13 au 19 septembre 2008.

Ce dernier a continué à travailler au sein de la société ERBIS du 16 au 19 septembre 2008, puis a signé un dernier contrat de mission pour la période du 22 au 26 septembre 2008, avec la possibilité d’avancer ou de reporter le terme entre le 24 et le 30 septembre 2008.

Le 23 septembre 2008, il a été victime d’un accident du travail.

Le 6 novembre 2009, il a saisi le conseil de prud’hommes de Lyon en lui demandant de requalifier le contrat de mission du 1er septembre 2008 en contrat à durée indéterminée, de prononcer la nullité du licenciement en vertu de l’article L.1226-9 du code du travail, de condamner en conséquence la société ERBIS à lui payer une indemnité de requalification, une indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, des dommages-intérêts pour licenciement irrégulier et des dommages-intérêts pour licenciement nul.

Il a fait mettre en cause ensuite la société MANPOWER.

Par jugement du 13 septembre 2011, le conseil de prud’hommes a :

— mis hors de cause la société MANPOWER;

— prononcé la nullité du licenciement ;

— condamné la société ERBIS à lui payer, outre les intérêts moratoires, les sommes suivantes :

* 1.321 € au titre de l’indemnité de requalification ;

* 2.643,10 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents ;

* 1.321 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul, tous préjudices confondus ;

* 700 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— débouté A Y-X du surplus de ses demandes.

Le 30 septembre 2011, la société ERBIS a interjeté appel principal de ce jugement et le 7 octobre suivant, A Y-X a interjeté un appel incident partiel.

Par arrêt du 19 juin 2012, la cour d’appel de Lyon a :

— déclaré recevables les appels ;

— confirmé le jugement entreprise en ce qu’il a mis hors de cause la société ERBIS ;

— infirmé le jugement pour le surplus

— statuant à nouveau, débouté A Y-X de toutes ses demandes dirigées contre la société ERBIS ;

— dit y avoir lieu à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné A Y-X aux dépens de première instance et d’appel.

A Y-X ayant un formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt du 19 juin 2012, la cour de cassation, par arrêt du 19 novembre 2014, après avoir mis hors de cause la société MANPOWER, a cassé cet arrêt en toutes ses dispositions et renvoyé les parties devant la cour d’appel de Lyon autrement composée.

Par déclaration reçu au greffe le 4 décembre 2014, A Y-X a saisi la présente cour d’appel, en demandant la convocation de la société ERBIS et de la société MANPOWER.

Vu les conclusions écrites de A Y-X remises au greffe le 20 octobre 2015 et reprises oralement à l’audience, par lesquelles il demande à la cour de :

— déclarer recevable son appel partiel ;

— confirmer le jugement du conseil de prud’homme en ce qu’il a ordonné la requalification du contrat de mission du 1er septembre 2008 en un contrat à durée indéterminée et en ce qu’il prononce la nullité du licenciement, condamne la société ERBIS à lui payer une indemnité de requalification, ainsi qu’une indemnité compensatrice de préavis, et les congés payés y afférents ;

— infirmer le jugement pour le surplus ;

— condamner la société ERBIS à lui payer :

* 1.321 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement irrégulier ;

* 8.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

— la condamner à payer au cabinet d’avocats RITOUET-SOULA la somme de 3.000 € en vertu de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991;

Vu les conclusions écrites de la société ERBIS remises au greffe le 20 octobre 2015 et reprises oralement à l’audience, par lesquelles elle demande à la cour de :

— infirmer le jugement du conseil de prud’homme ;

— débouter A Y-X de toutes ses demandes ;

— subsidiairement, condamner la société MANPOWER à la garantir de toutes les condamnations prononcées à son encontre ;

— condamner A Y-X et la société MANPOWERà lui payer 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions écrites de la société MANPOWER remises au greffe le 20 octobre 2015 et reprises oralement à l’audience, par lesquelles elle demande à la cour de :

— constater qu’elle a été définitivement mise hors de cause par la cour de cassation dans son arrêt du 19 novembre 2014 ;

— déclarer irrecevable la demande en garantie dirigée contre elle.

Pour de plus amples relations des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux conclusions déposées, visées par le greffier, oralement reprises.

SUR QUOI, LA COUR :

Sur la demande de requalification du contrat de mission du 1er septembre 2008 :

Attendu que pour conclure au débouté de cette demande et de toutes celles qui lui sont subséquentes, la société ERBIS fait valoir que :

— ayant conclu le 12 septembre 2008 un contrat de mise à disposition avec la société MANPOWER en vue du renouvellement du contrat du 1er au 12 septembre 2008, pour la période du 13 au 19 septembre 2008, elle a respecté les obligations mise à sa charge par l’article L.1251-42 du code du travail ;

— la mission de A Y-X ne s’étant pas poursuivie au delà du terme contractuellement prévu, il est donc intervenu en exécution du contrat de mise à disposition qu’elle avait signé avec la société MANPOWER, et n’étant pas son employeur, elle n’avait pas de contrat à signer avec lui ;

— elle n’a commis aucune faute susceptible de justifier la sanction de la requalification ;

— les dispositions de l’article L.1251-35 du code du travail ont été respectées ;

— durant la période où A Y-X a été victime d’un accident du travail, elle a signé avec la société MANPOWER un contrat de mise à disposition et il reconnaît avoir signé un contrat de mission avec cette dernière ;

— ainsi, en signant ce nouveau contrat avec la société MANPOWER, il a renoncé à se prévaloir d’un contrat à durée indéterminée à l’encontre de la société ERBIS ;

— si l’existence de ce contrat à durée indéterminée est retenue, il y a lieu de constater qu’il a pris fin d’un commun accord le 18 septembre 2008, de sorte que A Y-X ne peut se prévaloir d’un licenciement nul au 26 septembre 2008 ;

Mais attendu qu’il résulte de l’article L.1251-35 du code du travail qu’à défaut de stipulations contractuelles en fixant les conditions, le renouvellement du contrat de mission doit faire l’objet d’un avenant soumis au salarié avant le terme initialement prévu ; que selon l’article L.1251-40 du code du travail, lorsqu’une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d’une entreprise de travail temporaire en méconnaissance des dispositions précitées, ce salarié peut faire valoir auprès de l’entreprise utilisatrice les droits correspondant à un contrat à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission ; qu’en l’espèce, A Y-X a continué de travailler au sein de la société ERBIS du 16 au 19 septembre 2008, après le terme du contrat de mission du 1er septembre 2008, sans avoir signé un avenant aux fin de renouvellement ; que la société ERBIS a donc eu recours à un salarié d’une entreprise de travail temporaire en méconnaissance des dispositions de l’article L.1251-35 du code du travail, ce dont il résulte que le contrat de mission du 1er septembre 2008 doit être requalifié en contrat à durée indéterminée en vertu de l’article L.1251-40 ; que la société ERBIS n’établit pas que ce contrat a pris fin d’un commun accord des parties avant la survenance de l’accident du travail ; qu’il ne peut être déduit de la signature par A Y-X d’un nouveau contrat de mission le 22 septembre 2008 sa renonciation non équivoque à son droit de faire valoir auprès de la société ERBIS les droits correspondant à un contrat à durée indéterminée ; que les parties ont donc été liées par un contrat à durée indéterminée ayant pris effet au 1er septembre 2008 ;

Attendu qu’il y a lieu en conséquence de condamner la société ERBIS à payer à A Y-X une indemnité de 1.321 € correspondant à un mois de salaire, en vertu de l’article L.1251-41 du code du travail ;

Sur les effets de la requalification du contrat de mission du 1er septembre 2008 en contrat à durée indéterminée :

Attendu que pour justifier de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement nul, A Y-X prétend que :

— il était lié à la société ERBIS par un contrat à durée indéterminée à compter du 1er septembre 2008 ;

— celle-ci a méconnu l’article L.1226-9 du code du travail en procédant à la rupture du contrat de travail le 26 septembre 2008 alors que son contrat était suspendu en raison d’un accident du travail ;

Mais attendu que A Y-X ayant continué de travailler au sein de la société ERBIS du 16 au 19 septembre 2008, après le terme du contrat de mission du 1er septembre 2008, avant de conclure un nouveau contrat de mission le 22 septembre suivant pour une période débutant le même jour, il y a lieu d’en déduire que le contrat à durée indéterminée a pris fin le 19 septembre 2008, soit avant la survenance de l’accident du travail ; qu’ainsi, la rupture de ce contrat à cette date, en dehors des formes prévues par l’article L.1232-6 du code du travail, s’analyse en un licenciement abusif, et non en un licenciement nul ;

Attendu que la procédure de licenciement est irrégulière, les dispositions des articles L.1232-2 à L.1232-4 du code du travail n’ayant pas été respectées ;

Attendu en conséquence que compte tenu du montant de la rémunération versée à A Y-X, de son âge, de son ancienneté, et des conséquences du licenciement à son égard, il y a lieu de lui allouer, en application de l’article 1235-5 du code du travail, une somme de 1.321 € à titre d’indemnité pour licenciement abusif et irrégularité de la procédure de licenciement ;

Attendu que selon l’article L.1234-1 du code du travail, le salarié a droit, s’il justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus inférieure à six mois, à un préavis dont la durée est déterminée par la loi, la convention collective ou à défaut, par les usages pratiqués dans la localité et la profession ; qu’en l’espèce, A Y-X avait moins de six mois d’ancienneté à la date de la rupture du contrat à durée indéterminée ; qu’il n’appartient pas à la cour de rechercher s’il existe une convention collective applicable au contrat de travail qui lui est soumis stipulant un préavis pour le salarié dont l’ancienneté de service est inférieure à six mois; que A Y-X n’invoque pas un usage en vertu duquel il aurait droit à un tel préavis ; que dans ces conditions, il y a lieu de le débouter de sa demande en paiement d’une indemnité compensatrice de préavis ;

Sur l’appel en garantie dirigé contre la société MANPOWER

Attendu que cette dernière soutient que cet appel en garantie est irrecevable, motifs pris de ce que :

— la cour de cassation, dans son arrêt du 19 novembre 2014, l’a mise hors de cause ;

— il ne peut être formé pour la première fois en cause d’appel un appel en garantie après renvoi après cassation, alors qu’elle n’est plus dans la cause ;

Mais attendu que la cour de cassation ayant cassé et annulé en toutes ses dispositions l’arrêt rendu par la cour d’appel de Lyon le 19 novembre 2014, la présente cour doit de nouveau juger l’affaire en fait et en droit, dans l’état de la procédure non atteinte par la cassation ; que la société MANPOWER, qui était partie devant le conseil de prud’hommes, a donc toujours la qualité d’intimée ;

Attendu ensuite qu’aux termes de l’article L.1452-7 du code du travail, les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel ; qu’est recevable en application de cet article, la demande formée par une partie pour la première fois devant une cour d’appel statuant sur renvoi après cassation ;

qu’il en résulte que l’appel en garantie de la société ERBIS dirigé contre la société MANPOWER, formé pour la première fois en appel, est recevable ;

Attendu que pour justifier de son bien fondé, la société ERBIS soutient que les demandes de A Y-X sont fondées sur l’absence de signature de l’avenant de renouvellement et que l’abstention fautive de la société MANPOWER l’oblige à réparation ;

Attendu qu’il résulte des dispositions des articles L.1251-16 et L.1251-17 du code du travail que l’obligation de transmettre au salarié un contrat de mission écrit puis, le cas échéant, un avenant de renouvellement de ce contrat, incombe à l’entreprise de travail temporaire ; que la société MANPOWER n’établit pas en l’espèce avoir transmis à A Y-X pour signature un avenant de renouvellement du contrat de mission du 1er septembre 2008, avant le terme initialement prévu ; que faute de rapporter cette preuve, il y a lieu de la condamner à garantir la société ERBIS de toutes les condamnations prononcées contre cette dernière au profit de A Y-X ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il condamne la société ERBIS à payer à A Y-X la somme de 1.321 € au titre de l’indemnité de requalification, ainsi que celle de 700 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

L’infirme pour le surplus,

Et statuant à nouveau,

Condamne la société ERBIS à payer à A Y-X la somme de 1.321 € à titre d’indemnité pour licenciement abusif et irrégularité de la procédure de licenciement ;

Déboute A Y-X de sa demande en paiement d’une indemnité compensatrice de préavis ;

Y ajoutant,

Déclare recevable l’appel en garantie formé par la société ERBIS contre la société MANPOWER ;

Condamne cette dernière à garantir la société ERBIS de toutes les condamnations prononcées contre elle au profit de A Y-X ;

Vu l’article 700 1° et 2° du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Condamne la société MANPOWER aux dépens de première instance et d’appel.

Le greffier Le président

Sophie Mascrier Michel Bussière

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