Cour d'appel de Montpellier, 4ème b chambre sociale, 16 janvier 2019, n° 15/04402

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 4e b ch. soc., 16 janv. 2019, n° 15/04402
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 15/04402
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Perpignan, 12 mai 2015
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

PC/JPM

4e B chambre sociale

ARRÊT DU 16 Janvier 2019

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 15/04402 – N° Portalis

DBVK-V-B67-MDIK

ARRÊT n°

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 MAI 2015 CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE PERPIGNAN

N° RGF 14/00095

APPELANTE :

Madame J I

[…]

Promenade de la Côte Radieuse

[…]

R e p r é s e n t a n t : M e A G I E R a v o c a t p o u r l a S C P V I A L – P E C H D E L A C L A U S E – E S C A L E – K N O E P F F L E R , a v o c a t a u b a r r e a u d e PYRENEES-ORIENTALES

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2015/012135 du 14/10/2015 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIMEE :

SAS KSM PRODUCTION

[…]

[…]

[…]

Représentant : Me Q ARIES, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 945-1 du Code de Procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 NOVEMBRE 2018, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. Jean-Pierre MASIA, Président, chargé(e) d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Jean-Pierre MASIA, Président

Madame Sylvie ARMANDET, Conseillère

Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère

Greffier, lors des débats : M. L M

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE.

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure civile ;

— signé par M. Jean-Pierre MASIA, Président, et par M. L M, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * FAITS ET PROCÉDURE

Madame J I a été engagée par la sas Ksm Production dans le cadre d’un contrat initiative-emploi de douze mois, le 15 octobre 2003, puis, d’un contrat à durée indéterminée, en qualité d’aide comptable, à compter du 15 octobre 2004.

Le 7 mars 2013, l’employeur a notifié à la salariée un avertissement en raison d’erreurs constituant des fautes professionnelles.

Le 29 août 2013, l’employeur a convoqué la salariée à un entretien préalable, fixé au 17 septembre 2013, à un éventuel licenciement, lequel lui a été notifié le 25 septembre 2013 en raisons d’erreurs nombreuses et récurrentes dans la réalisation de sa mission constituant des fautes professionnelles.

Le 3 février 2014, contestant le bien-fondé de son licenciement et sollicitant le paiement de dommages et intérêts à ce titre, la salariée a saisi le conseil de prud’hommes de Perpignan lequel, par jugement du 13 mai 2015, a :

— dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse,

— dit que l’avertissement du 7 mars 2013 était justifié,

— débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouté l’employeur de sa demande reconventionnelle.

C’est le jugement dont Madame J I a régulièrement interjeté appel.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Madame J I demande à la cour de :

— infirmer le jugement,

— dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— condamner l’employeur à lui verser la somme de 23000 €,

— annuler l’avertissement du 7 mars 2013,

— condamner l’employeur à rectifier l’attestation pôle emploi sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du 8e jour suivant la notification de l’arrêt,

— lui donner acte de ce qu’elle bénéficie de l’aide juridictionnelle partielle,

— condamner l’employeur à lui verser la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner l’employeur aux entiers dépens,

— le débouter de l’ensemble de ses demandes.

Elle soutient que, d’une part, le licenciement n’était pas fondé, qu’il résultait de la fiche de préparation de l’entretien préalable et de l’ensemble des griefs techniques y figurant, que l’employeur avait déjà pris la décision de la licencier avant l’entretien préalable, que les faits reprochés, qui relevaient des difficultés quotidiennes de gestion d’une entreprise, ne pouvaient pas être sérieusement retenus à son encontre, l’employeur ne démontrant pas en quoi ces erreurs, dont elle contestait la réalité, constituaient des fautes, que le réel motif de ce licenciement était sa mésentente avec Madame X, sa supérieure hiérarchique qui souhaitait obtenir son départ et que, d’autre part, l’avertissement du 7 mars 2013 était injustifié et infondé et ne faisait que s’inscrire dans le contexte de harcèlement et de pressions qu’elle subissait.

La sas KSM Production demande à la cour de :

— confirmer le jugement,

— dire que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,

— dire que l’avertissement du 7 mars 2013 est justifié,

— débouter la salariée de l’ensemble de ses demandes,

— condamner la salariée à lui payer la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que, d’une part, le licenciement était fondé, que l’entretien préalable, lequel avait pour objet de signifier au salarié les griefs qui lui étaient reprochés et de recueillir ses explications, avait en l’espèce nécessité un travail de préparation, tenant la consistance même des fautes reprochées à la salariée, que les multiples erreurs relevées dans le cadre de ses fonctions constituaient des fautes, la salariée n’appliquant pas les procédures en vigueur et répétant les mêmes erreurs que celles pour lesquelles un avertissement lui avait déjà été notifié quelques mois auparavant, qu’il était démontré que Madame X avait une attitude respectueuse envers l’ensemble du

service et des collaborateurs de la société et que, d’autre part, l’avertissement prononcé était pleinement justifié et le contexte de harcèlement et de pressions dont se prévalait la salariée était inexistant.

Pour un plus ample exposé des faits, il est renvoyé aux conclusions déposées et réitérées oralement à l’audience par les parties.

SUR CE

I] Sur l’avertissement

La lettre d’avertissement du 7 mars 2013 est ainsi motivée :

« Dernièrement, votre responsable, Mme N X a découvert les erreurs suivantes :

Le jeudi 28 février 2013 :

- Lors du pointage du grand livre Clients, nous avons découvert que le client BERNET ST FLO avait des factures impayées à échéance au 31 janvier 2013. Vous avez fait partie un courrier recommandé en date du 27 février dernier. Or, la relance aurait dû partir plus tôt, le client étant résilié par l’assureur crédit en date du 28 janvier 2013.

Le vendredi 1 er mars 2013 :

- Le stagiaire RH trouve un chèque de 822.05€ établi le 21 février en remboursement d’un avoir pour le client TRYBA DIJON. Vous n’avez pas expédié le chèque.

- Pour le client AFCM 17, retour de la lettre modifiant les conditions de règlement (mis en LC 30). Le client a deux commandes en cours, le mode de règlement a été modifié sur le seul ARC 92371. L’ARC 92919 est resté en VAR. Ceci peut entraîner un mécontentement et incompréhension du client.

- Le client FERMETECH 34 est résilié par l’assureur crédit. Malgré le transfert d’un mail vous avertissant de cet état de fait, la commande en cours est restée en LC30 alors qu’elle aurait dû passer en VAR. vous avez occasionné un risque d’impayé pour ce client qui à ce jour n’est toujours pas modifié.

- Le client O P est résilié par l’assureur crédit en date du 1er août 2011. Le compte n’est, à ce jour, toujours pas bloqué et passé en VAR depuis 2.5 ans et les conditions de règlement sont restées en LC30. Seul le plafond d’encours a été mis à 0. Une commande a été passée en date du 25 février dernier. En conséquence, nous ne sommes pas couverts pour le risque d’impayé sur cette facture.

Le mercredi 6 mars 2013 :

- Pour le client SOLOSTORES, vous avez établi une facture pro-forma en date du 28 février 2013 alors que le compte client n’est ni ouvert sur GUEPARD, ni dans la comptabilité. Vous avez persévéré en réalisant le même jour une facture définitive portant le n°106533 alors que rien n’aurait dû être fait sans l’actualisation de la fiche client.

- Lors du rapprochement bancaire du CREDIT AGRICOLE, la journalisation d’un effet impayé ne figure pas en date du 1 er mars 2013. Il s’avère que vous avez journalisé le rejet sur la BNP (erreur de banque). Vous justifiez cette anomalie par l’attente du document émanant de la banque pour obtenir plus d’informations sur cet impayé. Or, vous aviez en votre possession tous les éléments nécessaires au traitement du dossier.

- Pour le client VERANDANET 60 : trois factures ont été rejetées le 5 mars au motif « sans provision » (factures référence : F104866 / F105340 / F105520). Le compte client aurait dû être immédiatement bloqué et les rejets inscrits dans les actions GUEPARD pour bloquer le compte. Sans cette mention, nous aurions pu envoyer de la marchandise qui n’aurait pas été réglée.

Ces faits constituent des fautes professionnelles. Ils sont sanctionnés par le présent avertissement qui sera versé à votre dossier.

Ces erreurs ne sont plus acceptables et votre conduite est constitutive d’une faute sérieuse. Ces manquements témoignent d’un manque de rigueur et de réactivité, de défaut d’attention, du non-respect des procédures de votre part. Votre comportement fait peser sur l’entreprise des risques d’impayés. Vous n’êtes pas sans savoir que la conjoncture économique actuelle impose à notre entreprise de gestion des impayés rigoureuses et en temps réel.

En conséquence, nous vous demandons expressément de bien vouloir prendre les mesures nécessaires pour un redressement rapide et durable. Nous attendons de votre part une réelle remise en question respectant les procédures et les objectifs qui vous sont définis..

Si de tels incidents se renouvelaient, nous pourrions être amenés à prendre une sanction plus grave pouvant aller jusqu’au licenciement. ».

Les éléments produits par l’employeur démontrent la réalité de quatre griefs dont la salariée ne conteste pas la matérialité alors que les arguments qu’elle oppose sont inopérants :

En effet:

— s’agissant du client Tryba Dijon : il a été constaté le 1er mars 2013 que la salariée n’avait pas expédié le chèque de 822,05 € établi le 21 février 2013 en remboursement d’un avoir à ce client. Si la salariée soutient avoir répondu au courrier électronique du 1er mars 2013 par lequel Madame X le lui avait fait remarquer, il n’en demeure pas moins qu’elle avait omis d’adresser ce chèque ;

— s’agissant des clients Fermetec 34 et O P : il a été constaté le 1er mars 2013 que la salariée n’avait pas bloqué ni modifié les conditions de règlement de la commande en cours de la société Fermetech 34 et du compte de la société O P, après la résiliation de leur contrat par l’assureur crédit de la société, respectivement, les 28 février 2013 et 1er août 2011. La salariée ne conteste pas que ces tâches relevaient bien de sa mission et se borne à faire valoir qu’il appartenait à la société et notamment à Madame Y de vérifier l’état financier des clients afin de s’assurer de leur solvabilité, ce qui est sans lien avec ce qui lui est reproché ;

— s’agissant de l’effet de commerce impayé auprès du crédit agricole : il a été constaté le 1er mars 2013, lors d’un rapprochement bancaire sur le compte Crédit Agricole de la société, que la salariée n’avait pas « journalisé » un effet impayé. La salariée ne conteste pas avoir commis une erreur en mentionnant cet effet impayé sur le journal

du compte Bnp de la société en lieu et place du journal de son compte Crédit Agricole ;

— s’agissant du client Verandanet 60 : il a été constaté le 6 mars 2013, après que trois factures adressées à ce client aient été rejetées le 5 mars 2013 en raison d’une absence de provision, que la salariée n’avait pas bloqué ce compte client ni inscrit ces rejets dans les actions « guépard ». La salariée justifie avoir effectué cette tâche le 7 mars 2013, soit le jour de l’avertissement.

Ainsi, les griefs sur lesquels reposait cet avertissement sont établis.

II] Sur le licenciement

A titre préalable, il y a lieu de relever que le document sur lequel l’employeur a recensé tous les griefs reprochés à la salariée avant l’entretien préalable, lesquels ont ensuite été repris dans la lettre de licenciement, ne démontre pas que l’employeur avait décidé de la licencier avant l’entretien préalable. En effet, ce document, dont il n’est pas contesté qu’il émane de l’employeur, se borne à reprendre chacun des griefs reprochés de telle sorte que ce document n’a constitué, comme soutenu par l’employeur, qu’un document de travail de sa part en vue de préparer de manière précise l’entretien préalable. La cour observe au surplus que ce document, non seulement ne démontre pas une intention de licencier prise avant l’entretien préalable mais au contraire traduit un souci de l’employeur d’examiner dans le détail l’intégralité des faits reprochés à la salariée ce dont celle-ci ne peut objectivement pas se plaindre.

La lettre de licenciement du 25 septembre 2013 est ainsi motivée :

« Depuis plusieurs mois, vous commettez des fautes professionnelles répétées dans l’exécution de votre fonction. Notamment, depuis deux mois celles-ci se sont accentuées et nous avons relevé les manquements suivants :

Erreur importante détectée le 26/08/2013 :

Lors du rapprochement bancaire réalisé par Mme X du compte détenu par KSM PRODUCTION à la BNP, les remises de chèques :

- du 19/07/2013 (2 remises à cette date),

- du 26/07/2013,

- du 31/07/2013

- et du 02/08/2013,

ne figurent pas sur les extraits bancaires. En ressortant les pièces comptables, votre Responsable s’est aperçue que les chèques des clients ont été remis sur le compte du Comité d’Entreprise et non sur le compte de la société. Vous avez utilisé à 5 reprises et à 4 dates différentes, des mauvais bordereaux. Vous n’avez, en plus, pas en charge la gestion des remises de chèques du Comité d’Entreprise et n’avez donc pas à utiliser les bordereaux du CE. Ces mauvaises remises représentent un total de 42 634.03€ TTC, dont les fonds ne sont donc pas disponibles sur les comptes de la Société KSM PRODUCTION avec un retard de trésorerie important au frais de KSM PRODUCTION. Vous vous interrogez sur la façon dont « ils ont pu atterrir dans votre tiroir ». Nous vous rappelons que ces bordereaux de remise de chèque arrivent par voie postale. Il est fort probable que vous avez, à un moment ou à un autre, ouvert une enveloppe contenant la liasse de bordereaux du CE et, sans vérification de votre part, vous avez mis ces bordereaux dans votre tiroir, les confondant avec ceux de KSM PRODUCTION.

En effet, le courrier postal est dépouillé par le service Comptabilité journalièrement et en l’absence de Mme X, il appartient soit à vous, soit à Mme A d’effectuer le traitement du courrier arrivé. Vous faîtes une remarque concernant le contrôle des bordereaux, nous vous rappelons que, sur une tâche aussi simple, nous n’avons pas à superviser votre travail. Cette tâche élémentaire ne nécessite pas de contrôle de votre hiérarchie d’autant que vous la réalisez maintenant depuis plus de deux ans. Vous donnez l’enveloppe contenant les remises de chèques à Mme X dont la mission est le simple endossement des chèques et le dépôt dans la boîte aux lettres de l’agence bancaire sans devoir contrôler votre travail. La BNP n’a pas non plus à faire de contrôle puisqu’elle exécute nos demandes. Vous exercez de manière autonome cette tâche, le contrôle de votre travail se faisant seulement a postériori au moyen du rapprochement bancaire par votre responsable une fois par mois. Vous n’avez d’ailleurs même pas identifié vos erreurs lors de vos rapprochements intermédiaires du compte BNP, ce qui est d’autant plus inquiétant.

Erreur détectée le 29/08/2013 :

Notre client PRIM AUT 69 appelle notre service Comptabilité parce qu’il ne comprend pas qu’à l’échéance au 31/08/2013, nous remettions à l’encaissement 6 lettres de change directes alors que l’échéancier que vous lui aviez adressé en date du 31/07/2013 n’en comporte que 4, correspondant aux factures du mois de juillet. Deux traites à l’origine à échéance au 31/07/13 avaient été décalées de 30 jours. Ces deux traites supplémentaires à échéance du 31/08/2013 auraient dues figurer sur l’échéancier client que vous lui aviez adressé. Par conséquent, sur l’état, que vous avez envoyé au client, aurait dû être portées les 4 traites au 31/08/2013 plus les 2 traites du 31/07/2013 décalées au 31/08/2013. Vous n’avez pas vérifié l’état du compte du client avant l’envoi du document et avez borné l’édition du document avec de mauvaises dates d’écritures, trompant ainsi le client.

Erreur détectée le 28/08/2013 :

Le 18/07/2013 sur la facture 112146 du client EDM 78, vous avez facturé les frais d’expédition au tarif 2012 et non celui de 2013. Comme vous le savez, lors de la facturation des colis SAV, il vous appartient de vérifier que les frais d’expédition facturés aux clients correspondent au tarif en vigueur appliqué par les transporteurs, tarifs qui sont, bien entendu, en votre possession et mis à jour chaque année. En aucun cas, les tarifs ne vous sont communiqués par le service Logistique dont dépend M. B, qui se borne à indiquer le poids du colis sur le bon de livraison. Il vous incombe de calculer puis de facturer les frais d’expédition correspondant au bon tarif. Malheureusement, cette erreur sur la facturation erronée des frais d’expédition n’est pas la seule vous concernant.

Erreurs détectées le 27/08/2013 :

- Sur état de suivi des retards de règlement clients édité par vos soins le 27/08/2013, trois lignes sont indiquées :

TALEC 56 pour un montant de 2 912.74 €

TALEC 56 pour un montant de 1 735.87 €

SOUCHET 44 pour un montant de 4 281.92 €

Vous avez indiqué en observation : CONTENTIEUX pour chacune des lignes. Il se trouve que c’est effectivement le cas pour les deux lignes TALEC 56 (dossier mis en recouvrement) mais en aucun cas pour SOUCHET 44.

En effet, ce dernier client a réglé sa facture par lettre de change directe à échéance au 30/06/2013, émise par vous, mais sous déduction d’un avoir de 3621 € établi en date du 15/03/2013. Cet avoir annulait la facture n° 106376 du 28/02/2013 du même montant.

En conséquence, le client SOUCHET 44 doit toujours 36.21 € depuis le 30/06/2013 sans relance de votre part.

Par rappel, sur le grand livre édité le 26/06/2013, ce montant dû figurait déjà et vous avait été signalé pour relance du client par Mme X. Vous indiquez dans votre courrier que vous nous avez adressé le 18/09/2013 que le mot « Contentieux» est un moyen de vous rappeler de faire la relance après les vacances. Or, le document sur lequel est indiqué la mention manuscrite « Contentieux» a été édité le 27/08/2013 à 10h12 donc après la reprise. Cette mention n’a, par conséquence, pas été portée avant les vacances comme vous le

suggérez. Au niveau du service, le mot « contentieux » ne veut pas dire «à relancer ». La signification est importante puisque cela induit l’ouverture d’un dossier de recouvrement. Il est impératif d’avoir un langage commun et une rigueur dans l’application des procédures. En tout état de cause, la conséquence est que le client n’a pas été relancé depuis le 30/06/2013. De plus, vous nous indiquez que ce document était classé dans un classeur personnel. Or, aucun document de travail n’est personnel et doit être accessible à tout moment par vos collègues.

- Sur le même état, nous avons constaté que le client DMJ MOURIER 39, n’a pas réglé une facture de 49.07 €, facture du 04/07/2013. Cette facture était initialement à régler par chèque. Le 29/07/2013, un courrier modifiant les conditions de règlement est expédié au client et réceptionné par vos soins le 31/07/2013. Le retour du courrier acceptant les nouvelles conditions daté du 31/07/13, aurait dû déclencher la modification des conditions de règlement de la facture n° 111586 du 04/07/2013 dans le logiciel de gestion des ventes et la remise d’une lettre de change à échéance au 31/08/2013. Vous avez en plus effectué une première relance non justifiée en date du 01/08/2013 pour que le client vous envoie son règlement. Le 27/08/2013, vous relancez le client par téléphone. La comptable de DMJ MOURIER demande que celle-ci soit réglée par lettre de change conformément aux conditions de règlement mises en place. La lettre de change aurait dû figurer sur la remise globale au 31/08/2013 si vous aviez appliqué la méthodologie. Vous n’aviez pas à relancer le client. Cet oubli a eu pour conséquence une mauvaise image du service auprès de la clientèle et un retard dans la mise à disposition des fonds.

- Sur le logiciel de gestion clients GUEPARD au niveau de la fiche commerciale du client MENUISERIE Q R, vous avez saisi la résiliation du client par notre assureur crédit et le blocage de deux commandes : ARC 98434 et 95373 en date du 26/08/2013 à 16h40. Par mail, ce même jour à 16H46, vous demandez le blocage de la commande 98434 à notre service logistique. Or, vous oubliez la commande 95373. C’est le service logistique, en occurrence M. C, qui s’aperçoit par chance de votre oubli et prend la bonne initiative, malgré vos instructions écrites erronées, de bloquer la commande auprès de notre transporteur ; la commande étant déjà chargée dans le camion. Vous avez fait

peser le risque sur l’entreprise de livrer un client douteux sans règlement avant départ des marchandises et de faire subir un préjudice de 2 723.23 € TTC.

Erreur détectée le 31/07/2013 :

Notre client DOUBET AUTOMATISME nous demande de décaler d’un mois l’échéance des règlements prévus le 15/08/2013 au 15/09/2013 pour les sommes de 2 623.50 et 2 624.19 €, règlements fixés et enregistrés par traites acceptées, traites remises à l’encaissement en date du 27/06/2013 sur le compte de la BNP.

En traitant la demande de report de notre client, il apparait que le bordereau de confirmation de traitement de la banque n’est pas agrafé à la remise. Après enquête auprès de la banque, il s’avère qu’en voulant effectuer cette remise vous n’avez pas validé, mais supprimé cette remise. La non-réception du bordereau de confirmation de l’encaissement que vous devez agrafer à la remise, aurait dû vous alerter. La remise de traite à la banque, remise faite par Internet ne peut être validée que manuellement et pas automatiquement. Vous n’avez pas effectué la manipulation correctement et au lieu de valider vous avez supprimé la remise.

Mme X s’est limitée à vous faire remarquer cet état de fait dans son rôle de supervision. Conséquence : si le client n’avait pas demandé le décalage, le montant de l’échéance d’un total de 5 247.69 € n’aurait pas été crédité à bonne date et aurait pu présenter un préjudice pour la Société.

Erreurs détectées le 11/07/2013 :

Une notification de refus de garantie nous est signifiée par notre assureur crédit la COFACE pour le client BERTRAND JARDON, datée du 03/07/2013. Vous n’avez pas effectué le traitement de cette information majeure. La fiche client éditée le 11/07/2013 ne mentionne pas la résiliation. Le compte n’est, par conséquent, pas bloqué. Vous avez fait courir à nouveau le risque d’un impayé pour ce client.

Le même manquement concernant le client SARL MENUILAND vous est également imputable. Comme vous le subodore; pour ces deux cas, comme pour tous les autres, il est inenvisageable qu’un membre du personnel ait voulu vous nuire au point d’annuler le blocage des fiches clients, sachant que seuls les services Commercial et Comptabilité ont les droits ouverts pour réaliser cette action.

Erreur détectée le 09/07/2013 :

Suite à l’appel téléphonique de notre client MENUISERIE 2000 qui souhaitait connaître le délai de livraison de sa commande ARC 97418, il apparaît que le règlement du client a été comptabilisé le 04/07/2013 mais que la modification des conditions de règlement de la commande, et le mail informant notre service logistique pour le départ de la marchandise n’ont pas été faits. C’est lors d’un contrôle en date du 09/07/2013 que votre responsable s’est rendue compte que vous aviez enregistré en date du 04/07/2013 le règlement du client mais que le mode d’encaissement n’avait pas été modifié sur l’accusé de réception de commande. Ce n’est qu’une fois que Mme X vous l’a fait remarquer que vous avez rétabli la situation. Or, vous savez pertinemment que lorsqu’un client règle sa commande, vous devez indiquer le mode règlement BNP sur l’ARC (accusé réception commande), tout de suite après la saisie comptable. Cette indication permet à notre service logistique de mettre en livraison la commande concernée sans délai. Nous vous rappelons que le 04/07/2013 était un jeudi, et que l’erreur a été détectée le mardi 09/07/2013. Il s’est donc écoulé 3 jours ouvrés. Nous avons été, à nouveau, confrontés à votre manque de rigueur et de réactivité.

En conséquence, ces quelques derniers exemples témoignent de votre incapacité à réaliser un travail dans les critères de rigueur et d’attention qu’exige le poste.

Malgré une définition de fonction claire et des instructions connues par vous, vous ne réalisez pas les contrôles inhérents à votre fonction. Ces oublis et erreurs sont les preuves d’une certaine désinvolture et de votre manque d’intérêt certain.

Ceci n’est plus tolérable notamment quand cela concerne une collaboratrice expérimentée comme vous. Les risques d’impayés que vous faîtes courir ainsi que l’image négative que vous véhiculez auprès de nos clients sont préjudiciables à l’entreprise. De plus, votre comportement léger et vos tentatives pour vous déresponsabiliser face aux remarques et à la réalité des faits sont inacceptables quand on connaît l’importance d’une gestion rigoureuse de la trésorerie dans les entreprises de notre taille.

Vos manquements constituent des fautes professionnelles. Ils nuisent au maintien des objectifs qualitatifs du service et au bon fonctionnement de notre entreprise et surtout ils sont contraires à la garantie des impératifs de gestion comptable ».

Comme pour l’avertissement du 7 mars 2013, les éléments produits par l’employeur démontrent la réalité de trois griefs dont la salariée ne conteste pas la matérialité alors que les arguments qu’elle oppose sont inopérants.

En effet:

— s’agissant du client Prim Aut 69 : alors que le 31 juillet 2013, la salariée avait adressé à ce client un échéancier portant sur quatre factures à échéance du 31 août 2013, il a été constaté que le 29 août 2013, elle lui avait présenté six lettres de change. La salariée ne peut justifier sa carence par la circonstance que le logiciel n’avait pas pris en compte les deux autres factures qui dataient du mois de juin 2013 alors qu’il lui appartenait de sélectionner une période plus large pour intégrer ces deux factures du mois de juin 2013 et fournir un échéancier exhaustif au client ;

— s’agissant du client Doubet Automatisme : il a été constaté le 31 juillet 2013, en traitant la demande de report de l’échéance de règlement de ce client, que la remise par la salariée de ses effets de commerce à la banque n’avait pas été validée. La circonstance qu’internet n’aurait pas validé son acte ou qu’une telle erreur pouvait se produire compte tenu des centaines de validations qu’elle devait effectuer tous les mois ne permet pas de justifier son manquement alors que chaque remise donnait lieu à l’émission d’un bordereau de confirmation dont la réception permettait de s’assurer de la validation de la remise, vérification qu’elle avait manifestement omise de faire ;

— s’agissant du client Menuiserie 2000 : il a été constaté le 9 juillet 2013 qu’alors que le règlement d’un client avait été comptabilisé le 4 juillet 2013, la salariée n’avait pas modifié les conditions de règlement de sa commande ni informé le service logistique pour un départ de la marchandise. Si la salariée explique que le camion était déjà plein le jour où elle avait reçu le règlement, elle n’en justifie pas. Au surplus, cet argument

est inopérant dès lors qu’il ne lui appartenait pas de gérer les expéditions mais seulement de renseigner le fichier client et informer le service logistique pour qu’il mette la marchandise à expédition, ce qui n’avait pas été fait.

En revanche, la salariée conteste la matérialité de deux autres griefs dont la réalité résulte pourtant des pièces produites par l’employeur: En effet :

— s’agissant du client Dmj Mourier 39 : il a été constaté le 27 août 2013 que les conditions de règlement d’une facture du 4 juillet 2013, devant initialement être réglée par chèque, avaient été modifiées et acceptées le 31 juillet 2013 et que, pour autant, la salariée n’avait pas mentionné cette modification dans le logiciel de gestion des ventes ni remis de lettre de change à échéance au 31 août 2013. Si elle soutient qu’elle avait d’abord attendu la réception du chèque déjà envoyé par le client avant de décider d’émettre une lettre de change directe, elle n’en justifie pas. En tout état de cause, la remise de la lettre de change aurait dû intervenir après l’accord sur la modification des conditions de règlement du 31 juillet 2013 dont elle avait connaissance puisque le document par lequel en avait été informé le client comportait sa signature ;

— s’agissant des clients Bertrand Jardon et Menuiland : il a été constaté le 11 juillet 2013 que la société avait été informée de ce que l’assureur crédit de la société avait refusé de garantir ces deux clients et que la salariée n’avait pas traité cette information. Si elle soutient avoir pourtant bloqué les fiches de ces clients, pour autant cette prétendue opération de sa part ne résulte aucunement des fiches clients produites aux débats.

Ainsi, les faits ci-dessus visés dans la lettre de licenciement sont établis.

* * * Pour néanmoins soutenir que l’avertissement et son licenciement n’étaient pas fondés, la la salariée se prévaut d’un mauvais climat de travail, d’un contexte de relations conflictuelles entretenu par Mme X sa supérieure hiérarchique, de pressions régulières exercées par cette dernière à son encontre ainsi qu’une agressivité s’apparentant à du harcèlement moral qui seraient, selon elle, les réels motifs de ces deux sanctions.

À ce titre, elle produit des correspondances ( le courrier du 15 février 2013 d’une collègue de travail, Madame A, aide comptable et le courrier du 29 avril 2013 à Madame E des ressources humaines), des attestations de salariés ou anciens salariés (Madame F, Madame G et Monsieur H). Toutefois, ces éléments ne sauraient laisser présumer une situation de harcèlement moral en ce qu’ils visent en réalité les erreurs commises par la salariée dans le cadre de ses fonctions en sorte que les reproches qui lui étaient faits étaient justifiés. Si les témoignages ci-dessus rapportent que Madame I était affectée par ses relations avec sa supérieure hiérarchique, Madame X, l’analyse des griefs visés dans la lettre l’avertissement et dans la lettre de licenciement a démontré que cette situation trouvait son origine dans les erreurs répétées de Madame I laquelle ne supportait pas les remarques que ses erreurs engendraient inévitablement de la part de sa supérieure.

En outre, le contexte décrit par la salariée est remis en cause par les attestations contraires versées par l’employeur et émanant d’autres salariés.

* * *

Il s’en suit que tant l’avertissement du 7 mars 2013 que le licenciement du 25 septembre 2013 reposaient sur des faits matériellement avérés et personnellement imputables à la salariée sans qu’aucune de ces deux sanctions ne soit en lien avec une quelconque situation de harcèlement moral.

Les faits visés dans la lettre du 7 mars 2013 justifiaient l’avertissement notifié à la salariée.

Les faits visés dans la lettre de licenciement, commis après un avertissement pour des faits déjà de même nature, constituaient des manquements fautifs répétés de la salariée à ses obligations contractuelles en tant qu’aide comptable. Ils justifiaient à eux seuls, sans qu’il ne soit besoin d’examiner les autres griefs reprochés, le licenciement de la salariée.

En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement qui a débouté la salariée de toutes ses demandes.

III] Sur les autres demandes

Il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile à l’une quelconque des parties.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement du conseil de prud’hommes de Perpignan du 13 mai 2015 en toutes ses dispositions,

Déboute les parties de l’ensemble de leurs demandes,

Condamne Madame J I aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
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Cour d'appel de Montpellier, 4ème b chambre sociale, 16 janvier 2019, n° 15/04402