Cour d'appel de Papeete, Chambre des urgences, 20 décembre 2018, n° 18/00205

  • Héritier·
  • Successions·
  • Indivision·
  • Parcelle·
  • Propriété·
  • Mandataire·
  • Descendant·
  • Montagne·
  • Jugement·
  • Polynésie française

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Papeete, ch. des urgences, 20 déc. 2018, n° 18/00205
Juridiction : Cour d'appel de Papeete
Numéro(s) : 18/00205
Décision précédente : Tribunal de première instance de Papeete, 27 mai 2018, N° 126;17/317
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

476

GR

------------

Copie exécutoire

délivrée à :

— Me Oputu,

le 10.01.2019.

Copie authentique délivrée à :

— Me Jacquet,

— Président Chambre

Notaires,

le 10.01.2019.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D’APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 20 décembre 2018

RG 18/00205 ;

Décision déférée à la Cour :une ordonnance de référé n° 126, rg 17/317 du Tribunal civil de première instance de Papeete en date du 28 mai 2018 ;

Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d’appel le 20 juin 2018 ;

Appelant :

Monsieur J AA A, né le […] à Rarotonga, de nationalité française, demeurant à Punaauia PK 7,500 côté montagne – service J ;

Représenté par Me Thierry JACQUET, avocat au barreau de Papeete ;

Intimée :

Madame T AI I, née le […] à Papeete, de nationalité française, demeurant à Punaauia PK 7,5 côté montagne Bel Air – servitude J ;

Représentée par Me Lorna OPUTU, avocat au barreau de Papeete ;

Ordonnance de clôture du 2 novembre 2018 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 8 novembre 2018, devant Mme TEHEIURA, conseillère faisant fonction de présidente, M. X et Mme Y, conseillers, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme Z ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par Mme TEHEIRUA, présidente et par Mme AS-AT, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES :

Par requête du 31 octobre 2017, T I a exposé que :

Ma mère Madame S AJ AK est propriétaire indivise de la terre OFAIPUTUPUTU située au PK 7,500 c/montagne à PUNAAUIA. Elle a donné procuration à sa fille Mademoiselle I T AI dite Naiki pour agir en son nom et la représenter en ce qui concerne cette terre. Son cousin. Monsieur A J loue des maisons situées sur cette terre et perçoit l’intégralité des loyers sans donner aucun compte à l’indivision. Ainsi, il a été constaté par huissier de Justice que 11 maisons ont été construites sur autant de parcelles de la terre OFAIPUTUPUTU et qu’ils règlent la somme de 20.000 XPF par mois à Monsieur A selon baux :

pour la parcelle n° 7 du 1 / 04/1986 au 1 / 04/ 2020,

pour la parcelle n° 8 du 01/10/1986,

pour la parcelle n° 2 du 31 / 03/ 2001 jusqu’en 2020,

pour la parcelle n° 11 pas de renseignement sur le bail,

pour la parcelle n° 13 pas de renseignement sur le bail,

pour la parcelle n° 6 pas de renseignement sur le bail,

pour la parcelle n° 4 de janvier 2014,

pour la parcelle n° 5 depuis 1977,

pour la parcelle n° 12 pas de renseignement sur le bail (dans les lieux depuis longtemps),

pour la parcelle n°10 depuis 1970,

pour la parcelle n° 3 depuis 30 ans.

Par jugement du 2 novembre 1988 devenu définitif, il a été constaté que les héritiers de B

U H, à savoir : C, D, E, B, F, AG et G sont propriétaires indivis de la terre OFAIPUTUPUTU. Un certain nombre d’ayants droit de ces personnes ont donné procuration à Madame S AJ AK pour défendre leurs droits dans la terre OFAIPUTUPUTU ce sont :

descendant de 3 (E H) AM Caddy,

descendant de 4 (B H) Q AB H,

descendant de 5 (F Teumer) AC AD Jr,

descendant de 6 (AG) AE S Monga,

descendant de 6 (AG) AB AF,

descendant de 6 (AG) AJ V W,

descendant de 7 (G) G MOETAUA.

Monsieur A J (et auparavant son père) s’est accaparé indûment de la totalité des loyers de la terre toujours en indivision OFAIPUTUPUTU.

L’article 815-8 du code civil dispose que : « Quiconque perçoit des revenus ou expose des frais pour le compte de l’indivision doit en tenir un état qui est à la disposition des indivisaires ». Il est donc demandé à Monsieur J A de verser un état de tous les loyers perçus.

L’article 815-10 alinéa 2 du code civil dispose que : « Les fruits et les revenus des biens indivis accroissent à l’indivision, à défaut de partage provisionnel ou de tout autre accord établissant la jouissance divise » et alinéa 4 : « Chaque indivisaire a droit aux bénéfices provenant des biens indivis et supporte les pertes proportionnellement à ses droits dans l’indivision ».

Il est donc demandé la condamnation de Monsieur J A à payer aux indivisaires leurs parts des fruits perçus en application dudit article.

Le séquestre des fonds sera ordonné.

Enfin, l’article 813-1 du Code civil permet ainsi que le juge, saisi en raison d’une situation de crise de nature à compromettre la gestion de la succession, confie à l’un des héritiers, ou à un tiers, l’administration provisoire de la succession en lieu et place des héritiers. Ce qui est le cas en l’espèce, la succession ayant été accaparée par Monsieur J A qui s’est arrangé et organisé pour percevoir l’intégralité des fruits. Ce qui est constitutif d’une faute au sens de l’article 813-1 du code civil, cet accaparement étant contraire à l’intérêt commun des indivisaires.

Il est ajouté que la situation successorale est rendue complexe du fait de l’éloignement géographique d’un grand nombre d’indivisaires lesquels résident en Nouvelle-Zélande et ne peuvent ni gérer ni contrôler la situation. Il est donc demandé la désignation d’un mandataire successoral sur le fondement des articles 813-1 et suivants du Code civil. Cette désignation permettra une gestion transparente, conforme à l’intérêt commun et contrôlée judiciairement.

Il est demandé de désigner Madame T AI I mandataire des ayants droit de la terre OFAIPUTUPUTU.

Par ordonnance du 28 mai 2018, le juge des référés du tribunal de première instance de Papeete a :

Désigné T I aux fins d’administrer provisoirement la succession de B U H décédé le […] notamment la terre Ofaiputuputu située à Punaauia au pK 7,5 côté montagne ;

Dit que la rémunération du mandataire successoral sera à valoir sur l’actif successoral ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

Laissé à chaque partie la charge de ses dépens.

J A en a relevé appel par requête enregistrée au greffe le 20 juin 2018.

Il est demandé :

1° par J A, appelant, de :

Infirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance entreprise ;

Dire et juger Mme I irrecevable en ses demandes ;

Dire et juger la juridiction des référés incompétente au profit du juge de la mise en état ;

Dire et juger que seul Mr J A justifie d’une acceptation de la succession de Mr B U H dans le délai requis ;

En conséquence,

Débouter Mme I de toutes prétentions ;

La condamner au paiement d’une somme de 400 000 F CFP au titre des frais irrépétibles ainsi qu’aux dépens ;

2° par T I, intimée, dans ses conclusions visées le 4 octobre 2018, de :

confirmer l’ordonnance de référé du 28 mai 2018 dans toutes ses dispositions ;

débouter Monsieur J, AA A de toutes ses demandes, fins et conclusions formées à l’encontre de Mademoiselle T I, agissant en qualité de représentante des ayants droit de B, U H, décédé le […] à Manihiki, îles K, ce dernier ayant laissé sept enfants pour lui succéder ;

condamner Monsieur A au paiement d’une somme de 339.000 XPF au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel ainsi qu’aux dépens avec distraction.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 2 novembre 2018. J A a déposé le 5 novembre 2018 des conclusions qu’il échet d’écarter des débats, aucun motif de rabat de l’ordonnance de clôture n’étant invoqué ni établi.

Il est répondu dans les motifs aux moyens et arguments des parties, aux écritures desquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L’appel a été interjeté dans les formes et délais légaux. Sa recevabilité n’est pas discutée.

Le juge peut désigner toute personne qualifiée, physique ou morale, en qualité de mandataire successoral, à l’effet d’administrer provisoirement la succession en raison de l’inertie, de la carence ou de la faute d’un ou de plusieurs héritiers dans cette administration, de leur mésentente, d’une opposition d’intérêts entre eux ou de la complexité de la situation successorale.

La demande est formée par un héritier, un créancier, toute personne qui assurait, pour le compte de la personne décédée, l’administration de tout ou partie de son patrimoine de son vivant, toute autre personne intéressée ou par le ministère public (C. civ., art. 813-1).

J A fait valoir que :

Mme I prétendait intervenir en première instance au nom de sa mère et de diverses autres personnes en exposant qu’elles seraient copropriétaires indivis de la terre OFAIPUTUPUTU sise PK 7,500 côté montagne à Punaauia. Cependant qu’il n’était fourni aucun élément relatif à la propriété de la terre susvisée ni aucun justificatif permettant le rattachement de Mme I au propriétaire d’origine. En fait elle se contentait de verser un jugement de 1988 cependant qu’elle représentait n’était pas partie à ce jugement ; encore que contrairement à ce qu’elle prétendait le jugement susvisé n’était pas définitif. Dès lors que la juridiction des référés n’était donc pas compétente pour statuer mais le juge chargé de la mise en état en application des dispositions de l’article 57 du CPC.

Il ressort de l’attestation de propriété établie par Me L notaire le 22 octobre 1971 que la terre Ofaiputuputu appartenait en propre à Mme A et que celle-ci née H a laissé pour lui succéder son époux Mr. J A et son fils J AA A (le requérant). Le propriétaire d’origine Mr. B H est décédé le […] et Mme A née H qui n’était alors connue comme seule héritière a pris possession des biens de son auteur depuis et après elle son fils J A et ensuite encore son petit-fils J AA A le concluant soit donc depuis bien plus de 30 ans. Il n’est pas inutile de souligner de surcroît que ce dernier a fait établir une attestation de propriété de la terre en litige dans les 30 ans du décès de Mr. B H ce qui constitue une acceptation expresse de la succession de ce dernier. Mme I ne justifie par contre aucunement qu’une telle acceptation même tacite soit intervenue de son côté, par son auteur ou d’autres membres prétendus de la succession de Mr. B H dans les 30 ans suivant le décès de ce dernier soit avant le 4 juillet 1972. Elle est dès lors réputée étrangère à sa succession et dépourvue de droit à agir. Elle est réputée ainsi que tout autre prétendu héritier avoir renoncé à la succession en application des dispositions de l’article 780 du code civil. En effet s’agissant d’un jugement mixte appel des dispositions définitives peut être interjeté en même temps que l’appel sur le jugement définitif postérieur en application des dispositions de l’article 331 du CPC. Mais surtout en application des dispositions de l’article 217 du CPC l’instance était périmée en l’absence de diligences des parties pendant plus de 3 ans. Or en l’espèce Mme I versait elle-même en première instance une ordonnance de radiation de 2004 de sorte que la procédure était interrompue depuis 14 ans. Et en application des dispositions de l’article 220 du CPC aucun des actes de la procédure éteinte ne peuvent être opposés, aucune des parties ne peuvent s’en prévaloir. Mme I ne pouvait dès lors prétendre fonder ses prétentions sur le jugement mixte de 1988 ni le 1er juge s’appuyer sur cette décision.

Il va solliciter la remise au rôle de cette affaire pour voir constater en tant que de besoin la péremption d’instance.

En tout état de cause, à supposer que la préemption ne soit retenue par pure hypothèse, le jugement de 1988 est pour partie avant dire droit de sorte qu’il n’a pas mis fin à l’instance. L’affaire a été radiée c’est-à-dire retirée du rôle. Mr. A sollicite dès lors à bon droit le débouté des prétentions de cette dernière qui ne pouvait se voir désigner comme mandataire successoral d’une succession à laquelle elle est réputée ne pas appartenir. Elle le pouvait encore moins au regard des dispositions de l’article 813-1 du code civil. En effet : Mme I n’a jamais justifié aucunement être qualifiée ainsi que le prévoit le texte ; en toutes hypothèses une telle désignation ne pouvait intervenir en l’absence à la cause de tous les héritiers du défunt à supposer que leur renonciation à la succession ne soit pas

acquise.

T I conclut que :

S’agissant des droits de propriété des personnes représentées par Mademoiselle I, il est précisé que la terre OFAIPUTUPUTU a été acquise par B, U H le 30 mars 1918, l’acte de mutation immobilière ayant été transcrit à la Conservation des Hypothèques de Papeete le 4 avril suivant au volume 182 n° 136.

Par jugement du 2 novembre 1988, transcrit à la Conservation des Hypothèques de Papeete le 1er août 2018 au volume 4693 n° 1, le Tribunal de Première Instance de Papeete a constaté que les parties à l’instance sont propriétaires indivis de la terre précitée.

L’indivision est matérialisée au cadastre qui indique bien que les propriétaires de la terre OFAIPUTUPUTU sont les « héritiers de B, U H ».

Par ailleurs, Mademoiselle I annexait à sa requête du 31 août 2017 les procurations des ayants droit de B, U H soit ses petits-enfants :

Madame P, AL AM AN, fille de E H ;

Madame Q, AB H, petite fille de B H ;

Monsieur AC AD, fils de F, Teumere H ;

Mesdames AE S, AB AF et AJ, V AF, filles de AG H ;

Madame G AO AP, fille adoptive de G H.

Force est ainsi de constater que dans l’instance initiée par-devant le juge des référés, la concluante a parfaitement démontré qu’elle représentait les ayants droit de cinq des sept enfants de B, U H tel qu’indiqué dans la notoriété après décès rectificative dressé le 17 juillet 2018 par la SCP Office notarial RESTOUT-AQ-AR.

Les allégations de Monsieur A sur le fait que les personnes représentées par la concluante n’étaient pas parties au jugement du 2 novembre 1988 ne sauraient manifestement prospérer face à un examen des pièces produites. En effet, il ressort du jugement précité que Monsieur AC AD (demandeur n° 16), Madame R, AH AF (demanderesse n° 18), Madame AB AF (demanderesse n° 19) et Madame G AO AP (demanderesse n° 20), étaient bel et bien parties à l’instance. Pour ce qui concerne le caractère définitif du jugement rendu en 1988, il convient de rappeler qu’il n’y a eu aucun appel intenté à son encontre comme le démontre le certificat de non-appel du 2 mars 2018. Au surplus, ce jugement a été régulièrement transcrit à la conservation des hypothèques de Papeete.

Enfin Monsieur A se prévaut d’une ordonnance de radiation du 8 décembre 2004, versée par la concluante dans ses conclusions du 20 avril 2018 devant le juge des référés, pour soulever la péremption d’instance concernant le jugement de 1988. À ce propos, il semble qu’il y ait eu une confusion de la part de l’intéressé. En effet, l’ordonnance de radiation susvisée porte sur une demande en partage initiée par ce dernier et ne concerne donc pas sur le jugement de 1988. Pour s’en convaincre, il convient d’y lire est indiqué que le demandeur est Monsieur A alors que durant la procédure ayant conduite au jugement susmentionné, il était défendeur.

Monsieur A se base également sur l’ordonnance de radiation de 2004 pour soulever l’incompétence du juge des référés. Or, comme indiqué précédemment, cette ordonnance ne concerne

pas le jugement de 1988. Aussi sa demande relative à l’incompétence du juge des référées s’en trouve infondée.

Monsieur A était partie au jugement de 1988, décision qui est venue établir les droits de propriété indivis sur la terre OFAIPUTUPUTU des « héritiers de B, U H ».

Par conséquent, il ne peut se prévaloir d’une attestation de propriété antérieure à ladite décision, d’autant plus qu’au moment de sa rédaction, tous les ayant droits de B, U H n’étaient pas connus du notaire instrumentaire.

S’agissant de la question de la possession, elle a déjà été tranchée dans le cadre de la procédure ayant conduit au jugement de 1988. En effet l’appelant avait déjà tenté de faire valoir la possession de ses parents, manifestement en vain, le Tribunal ayant pour sa part relevé dans un jugement du 2 septembre 1987 qu’à défaut de possession à titre de propriétaire, « ni J A, ni ses parents n’ont pu acquérir la terre OFAIPUTUPUTU sise à PUNAAUIA par usucapion ».

Monsieur A avait également soulevé l’argument relatif à l’acceptation de la succession par les héritiers de B, U H. Or il ressort du jugement du 2 septembre 1987, précité, « qu’il est établi par la lettre de E H daté du 7 décembre 1963 soit 21 ans après le décès, que ses frères et s’urs lui avaient confié la gestion de la propriété familiale ; qu’ainsi ils avaient fait acte d’héritier dans le délai de 30 ans. »

Enfin, sur la désignation de la concluante en qualité d’administrateur provisoire de la succession de B U H, l’article 813-1 du code civil dispose que « le juge peut désigner toute personne qualifiée, physique ou morale, en qualité de mandataire successoral, à l’effet d’administrer provisoirement la succession en raison de l’inertie, de la carence ou de la faute d’un ou de plusieurs héritiers dans cette administration, de leur mésentente, d’une opposition d’intérêts entre eux ou de la complexité de la situation successorale ».

En l’espèce la mésentente entre les héritiers de B, U H d’une part, et Monsieur J AA A d’autre part, sur les droits de propriété s’attachant à la terre OFAIPUTUPUTU, la volonté évidente de l’appelant étant de s’accaparer exclusivement la terre litigieuse en profitant de l’éloignement géographique des indivisaires heureusement représentés par la concluante, a mis en évidence la nécessité de voir désigner un mandataire successoral.

À titre subsidiaire, la concluante tient à signaler à la juridiction d’appel de céans que depuis le prononcé de l’ordonnance de référé dont appel, elle fait l’objet de menaces et de violences tant de la part de Monsieur A que de son fils, qui sont par ailleurs ses voisins directs. Elle souligne que si elle essaye de régler cette situation dans un esprit de conciliation pour le bien commun, le comportement et la violence dont fait preuve l’appelant à son encontre ne lui ont pas laissé d’autre choix que celui de déposer une plainte.

Sur quoi :

Il est établi par les procurations produites que les mandataires qui ont donné pouvoir à AJ S qui a donné pouvoir à sa fille T I viennent tous aux droits des ayants droit de feu B U H. La requérante a par conséquent la double qualité de représentante d’héritiers et de personne intéressée au sens de l’article 813-1 du code civil.

La terre Ofaiputuputu est désignée à la matrice cadastrale de la commune de Punaauia (île de Tahiti) comme étant composée des parcelles :

A36 : propriétaire : litige entre commune de Punaauia et les héritiers de B U H à savoir : C, D, E, B, F, Marian et G (propriétaires indivis) ;

A101 : propriétaire : les héritiers de B U H à savoir : C, D, E, B, F, Marian et G (propriétaires indivis) ;

B57 : litige entre établissement public Tahiti Nui Aménagement et Développement et les héritiers de B U H à savoir : C, D, E, B, F, Marian et G (propriétaires indivis).

L’exception de propriété de cet immeuble que forme J A est fondée sur l’attestation d’un notaire du 22 octobre 1971 qui le désigne comme étant l’unique héritier de la fille de B H. Mais un jugement du tribunal de première instance de Papeete du 2 novembre 1988, qui a été transcrit à la conservation des hypothèques, et auquel J AA A était défendeur, a constaté que les héritiers de B U H, à savoir C, D, E, B, F, Marian et G, sont propriétaires indivis de la terre Ofaiputuputu sise à Punaauia. Ainsi que l’a exactement retenu l’ordonnance entreprise, ce jugement dont il n’a pas été relevé appel, quoi qu’il en soit de la suite de l’instance dans laquelle il a été rendu, constitue un meilleur titre que l’attestation notariale qui lui est antérieure de 17 ans, puisqu’il a été rendu contradictoirement en présence de tous les héritiers, étant observé que le père adoptif de J AA A, J A, a été reconnu par ce même jugement comme ayant été régulièrement adopté aux Îles K par une fille de B U H.

L’exception de propriété présentée par J AA A sera par conséquent rejetée.

L’ordonnance entreprise a été rendue en la forme des référés par le président du tribunal de première instance ou son délégué. Il n’est pas justifié de l’existence d’une instance en cours dont l’objet serait la succession de B U H et dans laquelle un juge de la mise en état serait actuellement désigné. L’appelant soutient même que l’instance antérieure serait éteinte. Son exception d’incompétence du juge des référés sera donc rejetée.

L’ordonnance dont appel a exactement retenu qu’il est incontestable qu’il existe depuis fort longtemps, et le jugement du 2 novembre 1988 en est la traduction, un litige quant à la propriété de la terre Ofaiputuputu, litige qui a été tranché à l’époque en défaveur de J AA A, cette terre restant donc en indivision ; qu’il est versé aux débats un procès-verbal de constat d’huissier du 22 mars 2017 aux termes duquel il était constaté que sur la terre Ofaiputuputu située à Punaauia au pK 7,5 côté montagne sont construites 11 maisons qui sont en location et dont les loyers sont perçus par J AA A celui-là même qui avait été débouté de sa revendication de propriété exclusive sur cette terre par le jugement du 2 novembre 1988.

Il est en effet établi qu’il existe une mésentente entre les héritiers, une opposition d’intérêts entre eux et une situation successorale complexe qui motive la désignation d’un mandataire successoral. Cette mesure est d’autant plus nécessaire que de nombreux co indivisaires ne sont pas sur le territoire, et que la propriété de deux des trois parcelles fait l’objet d’un litige avec des collectivités publiques.

Mais cette complexité, ainsi que le conflit de voisinage qui existerait entre les parties, motive que soit choisi un mandataire extérieur à la succession et habile en la matière. Un notaire sera par conséquent désigné. Il entrera dans sa mission de percevoir les fruits de l’indivision et d’en régler les charges, et d’établir un compte des sommes dues par l’indivision à des indivisaires ou par des indivisaires à l’indivision.

Il sera fait application des dispositions de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française au bénéfice de l’intimée.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

Déboute J AA A de ses exceptions et fins de non-recevoir ;

Confirme l’ordonnance rendue le 28 mai 2018 par le président du tribunal de première instance de Papeete ou son délégué, sauf en ce qu’elle a désigné T I aux fins d’administrer provisoirement la succession de B U H décédé le […] notamment la terre Ofaiputuputu située à Punaauia au pk 7,5 côté montagne ;

Statuant à nouveau de ce chef, commet Monsieur le président de la Chambre des notaires de Polynésie française aux fins de désigner un notaire en qualité de mandataire judiciaire successoral de ladite succession ;

Y ajoutant :

Dit que le mandataire successoral accomplira sa mission comme il est dit aux articles 813-1 et suivants du code civil, et, notamment, qu’il percevra les fruits de l’indivision et en réglera les charges, et qu’il établira un compte des sommes dues par l’indivision à des indivisaires ou par des indivisaires à l’indivision ;

Dit que le mandataire successoral fera rapport de sa mission chaque année et au terme de celle-ci ;

Dit que la mission du mandataire successoral prendra fin par son dessaisissement, par la constatation judiciaire de la réalisation de l’objet de son mandat, par la conclusion d’une convention d’indivision ou par la signature d’un acte de partage ;

Condamne J AA A à payer à T I la somme de 300 000 F CFP en application de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

Rejette toute autre demande ;

Met les dépens à la charge de J AA A.

Prononcé à Papeete, le 20 décembre 2018.

Le Greffier, La Présidente,

signé : M. AS-AT signé : C. TEHEIURA

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Papeete, Chambre des urgences, 20 décembre 2018, n° 18/00205