Cour d'appel de Paris, 4e chambre, 2 décembre 1998

  • Volonte de perturber les activités d'un concurrent·
  • Action en contrefaçon et en concurrence déloyale·
  • Éléments pris individuellement ou en combinaison·
  • Fait distinct des actes argues de contrefaçon·
  • Indifference du merite et de la destination·
  • Empreinte de la personnalité de l'auteur·
  • Appréciation à la date de creation·
  • 1) droit des dessins et modèles·
  • Appréciation à la date de dépôt·
  • Numero d'enregistrement 943 877

Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 4e ch., 2 déc. 1998
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Publication : PIBD 1997 628 III 163;PIBD 1999 671 III 96
Décision(s) liée(s) :
  • TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS DU 4 OCTOBRE 1996
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 943877
Classification internationale des dessins et modèles : CL09-02
Référence INPI : D19980101
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Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE La société PIERRE HENRY est titulaire d’un modèle de cantine déposé à l’Institut National de la Propriété Industrielle le 1er juillet 1994 et enregistré sous le n 943 877 (photographie n 1 du dépôt) et publié sous lé n 0378192 ; Ayant eu connaissance de ce que la société TEXERIC mettrait en vente des cantines qui reproduiraient les caractéristiques de son modèle, la société PIERRE HENRY a fait procéder le 22 septembre 1995 à une saisie contrefaçon dans les locaux de cette société, Boulevard de la Chapelle, après y avoir été autorisée par ordonnance ; C’est dans ces circonstances, que par exploit en date du 27 septembre 1995, la société PIERRE HENRY a assigné la société TEXERIC devant le tribunal de commerce de Paris en contrefaçon et en concurrence déloyale ; Elle sollicitait, outre les mesures habituelles d’interdiction sous astreinte, de confiscation et de publication, le paiement d’une indemnité provisionnelle de 500 000 francs à valoir sur son préjudice à déterminer par expertise, mesure par ailleurs requise ; Enfin elle réclamait sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de Procédure Civile paiement d’une somme de 40 000 francs ; La société TEXERIC concluait à la nullité du modèle faute de nouveauté et d’originalité et au rejet de l’ensemble des prétentions de la société PIERRE HENRY tout en demandant reconventionnellement la condamnation de cette société à lui payer la somme de 50 000 francs à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive outre celle de 25 000 francs sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de Procédure Civile ; Le tribunal estimant que le modèle n’était pas original et ne méritait pas protection, qu’aucun acte de concurrence déloyale ne pouvait être imputé à la société TEXERIC et que cette dernière, assignée deux fois au cours de la même année pour des motifs similaires avait subi un préjudice moral et commercial a ;

- ordonné la radiation du modèle 0378192 faisant l’objet de la photographie n 1 dans la déclaration enregistrée à l’Institut National de la Propriété Industrielle le 18 juillet 1994 sous le n 94 3877
- débouté la société PIERRE HENRY de l’ensemble de ses demandes
- condamné celle-ci à payer à la société TEXERIC la somme de 50 000 francs à titre de dommages et intérêts avec exécution provisoire outre celle de 20 000 francs sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de Procédure Civile ; Appelante de cette décision, selon déclaration du 28 octobre 1996, la société PIERRE HENRY demande à la Cour de l’infirmer en toutes su dispositions et reprend ses

prétentions telles que formulées dans son exploit introductif d’instance et rappelées ci- dessus ; La société TEXERIC poursuit la confirmation du jugement tout en demandant à la Cour d’élever à la somme de 100 000 francs le montant des dommages et intérêts qui lui ont été accordés ; Par ailleurs elle réclame paiement d’une somme supplémentaire de 15 000 francs sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de Procédure Civile.

DECISION I – SUR LA PROCEDURE Considérant que l’ordonnance de clôture a été rendue le 5 octobre 1998 ; Que le 16 octobre 1998 la société TEXERIC a fait signifier des conclusions par lesquelles elle demande que soient rejetées des débats lu conclusions signifiées et les pièces communiquées le 5 octobre 1998 par la société appelante ; Considérant qu’alors que la société TEXERIC avait fait signifier ses conclusions en réplique le 30 avril 1997 et communiqué ses pièces le 11 septembre 1997 et que les parties avaient été avisées par bulletin en date du 26 juin 1997 que l’ordonnance de clôture serait rendue le 5 octobre 1998, la société appelante a attendu le jour de la clôture pour faire signifier des conclusions en réponse et communiquer de nouvelles pièces ; Qu’en agissant ainsi elle a mis la société TEXERIC dans l’impossibilité d’en prendre utilement connaissance et porté atteinte aux droits de la défense ; Considérant en conséquence qu’il convient de rejeter des débats les conclusions du 5 octobre 1998 ainsi que les pièces communiquées à cette date à savoir : l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles du 5 févier 1998, l’attestation de Monsieur E et le catalogue E ; II – SUR LA TITULARITE DES DROITS Considérant que la société TEXERIC soutient que la société PIERRE HENRY ne justifie pas être titulaire des droits sur le modèle de cantine dont elle se prévaut dès lors que l’ordonnance du juge commissaire à la liquidation judiciaire de la société ESTOR autorisant la cession des actifs de cette société à la société PIERRE HENRY ne vise pas ce modèle ;

Mais considérant que la société appelante démontre par la production de catalogues COLLECTION 88 et COLLECTION 1991 mentionnant en dernière page des tarifs France 1988 et 1991 qu’à ces dates elle offrait à la vente sous son nom le modèle de cantine en cause, celle-ci étant photographiée en page 1 ; Qu’en l’absence de toute revendication de la part de ou des personnes physiques qui l’aurait créé, ces actes de d’exploitation font présumer à l’égard des tiers poursuivis pour contrefaçon, que la société PIERRE HENRY est titulaire sur ce modèle de cantine des droits de propriété incorporelle de l’auteur ; III – SUR LA VALIDITE DU MODELE Considérant que la société PIERRE HENRY fait valoir que le modèle de cantine qui se caractérise notamment par la présence :

- sur chaque côté, de deux nervures entourant une poignée repliable autour d’une pièce soudée en forme d’écusson
- sur la face avant, de huit nervures en relief et de deux pattes rabattables de fermeture du couvercle comportant un trou de forme allongée permettant d’insérer une boucle fixée sur la face avant dans laquelle peut se glisser une tringle
- sur le couvercle de trois liteaux de renforts soudés
- sur le fond d’un prolongement des nervures des faces avant et arrière auxquelles s’ajoutent deux liteaux de renfort soudés percés chacun d’un trou bénéficie de la protection cumulée des livres 1 et 5 du code de la propriété intellectuelle dès lors qu’il est tout à la fois nouveau et original ; Considérant que la société TEXERIC lui oppose que ce modèle en d’une banalité avérée et que ses caractéristiques répondent à des nécessités fonctionnelles ; Considérant ceci exposé, que la société appelante, critiquant l’attestation produite par la société TEXERIC devant le tribunal et tendant à prouver que le modèle en cause existait déjà en 1968, soutient que la société ESTOR dont elle a racheté les éléments d’actifs en 1989 en fournissait des exemplaires au Ministère de l’Intérieur dès 1951 ; Qu’elle en conclut que la cantine opposée a été créée à une date antérieure à 1968 ; Mais considérant que le plus ancien document daté régulièrement produit par la société PIERRE HENRY et reproduisant la cantine en cause étant son catalogue COLLECTION 88, il y a lieu de retenir comme date de création l’année 1988 ; Considérant que sur le fondement du Livre 1 du code de la propriété intellectuelle, il convient de rechercher si à cette date, cette cantine constituait un création originale ;

Que la société Pierre Henry se prévalant également des dispositions de l’article L 511-3 Code de la Propriété Intellectuelle, la Cour se doit de déterminer si à la date du dépôt, soit le 1 juillet 1994, ce modèle pouvait bénéficier de la protection prévue par ce texte ; Considérant que les attestations produites par la sodée TEXERIC tendant à prouver que la cantine est dans le commerce « depuis plusieurs décennies » sont dépourvues de caractère probant ; Qu’en effet, aucun élément ne permet d’établir avec certitude à quelle date Monsieur B aurait acquis la cantine dont des photographies sont annexées à son attestation ; Que l’attestation de Monsieur S qui aurait aidé en juillet 1996 Monsieur B à sortir une très vieille malle métallique d’un container n’apporte aucun élément supplémentaire, observation étant faite que rien ne permet de déterminer l’origine et l’ancienneté de la malle dont trois photographies sont annexées à son attestation ; Considérant cependant que les éléments revendiqués sont essentiellement fonctionnels : les nervures et les liteaux servent à rigidifier la cantine, les poignées à la porter et la tige à la fermer ; Que la disposition par groupe des nervures et la mise en place de trois liteaux de renfort au le couvercle sont destinées à renforcer uniformément la solidité de la cantine ; Que ces pièces pris individuellement ou en combinaison ne confèrent aucun aspect spécifique à la cantine, aucune physionomie propre permettant de la distinguer d’autres modèles de cantine ; Que c’est donc à juste titre que les premiers juges ont annulé ledit modèle comme étant dépourvu de nouveauté ; Considérant que sur le fondement du droit d’auteur même si le mérite il ou la destination de l’oeuvre n’a pas à être pris en compte, il demeure que la combinaison des éléments et formes revendiqués ne constitue pas une création originale révélant la personnalité de son auteur ; Que l’agencement adopte est fonctionnel parce que simplement caractérise par l’emploi d’éléments dont les seuls effets sont d’assurer la rigidité de l’ensemble et de permettre la fermeture et la préhension de l’objet ; Qu’en conséquence la cantine dont se prévaut la société appelante n’est pas davantage protégeable sur le fondement du Livre 1er du Code de la Propriété Intellectuelle ; Qu’il s’ensuit que la société Pierre Henry doit être déboutée de sa demande en contrefaçon ; IV – SUR LA CONCURRENCE DELOYALE

Considérant que la société appelante soutient que la société TEXERIC s’est rendue coupable d’actes de concurrence déloyale à son encontre en commercialisant des copies serviles de son modèle à un prix inférieur ; Qu’elle prétend que la société intimée a manifestement entendu créer, dans l’esprit de la clientèle, une confusion préjudiciable à la société PIERRE HENRY leader sur le marché et s’inscrire dans son sillage aux fins de profiter de l’image de ses produits dont elle reproduit également les coloris et les dimensions ; Considérant que la société TEXERIC lui oppose qu’elle ne justifie d’aucun fait distinct de ceux invoqués à l’appui de sa demande en contrefaçon ; Considérant ceci exposé, qu’il résulte des catalogues mis aux débats que la société PIERRE HENRY propose sa cantine dans les colons : bleu de France, vert, bordeaux, beige et marron et dans 9 tailles différentes allant de 61 cm de longueur à 120 cm ; Or considérant que le procès verbal de saisie contrefaçon dressé chez TEXERIC établit simplement que cette société vendait le modèle incriminé en bleu roi et vert émeraude et en 80 cm de longueur ; Qu’en conséquence il ne peut être reproché à la société intimée d’avoir adopté une gamme de cantines identique à celle de la société appelante ; Considérant par ailleurs que le modèle de la société TEXERIC ne constitue pas une copie servile du modèle de la société PIERRE HENRY ; Qu’à la différence de celui-ci, il comporte trois poignées, une de chaque côté et une sur le devant, que le nombre de nervures est différent, que les angles sont plus vifs et qu’il n’existe sur les côtés aucune incrustation évoquant un écusson ; Qu’au surplus la copie servile d’un modèle si elle peut constituer une circonstance aggravante de la contrefaçon et être prise en compte dans l’appréciation du préjudice subi de ce chef par la victime de la contrefaçon, n’est pas en soi un fait distinct de concurrence déloyale ; Considérant enfin que la pratique d’un prix inférieur n’est pas davantage constitutive de concurrence déloyale dès lors qu’il ne s’agit pas d’un prix dérisoire ; Or considérant qu’en l’espèce, il n’existe qu’une légère différence de prix, le modèle litigieux en 80cm de long étant vendu en gros 142, 98 francs et celui de l’appelante 164, 68 francs ; Considérant dans ces conditions que le jugement doit être confirmé en ce qu’il a débouté la société PIERRE HENRY de sa demande en concurrence déloyale ; V – SUR LA DEMANDE CONVENTIONNELLE

Considérant que la société TEXERIC fait valoir que l’action de la société PIERRE HENRY est abusive et réclame le paiement d’une somme de 100 000 francs à titre de dommages et intérêts ; Considérant que la société appelante lui oppose qu’elle bénéficie d’un titre de propriété industrielle et qu’elle n’a fait qu’user des moyens mis à sa disposition ; Considérant ceci exposé que les premiers juges ont justement relevé que c’était la deuxième fois en l’espace d’une année que la société PIERRE HENRY assignait la société TEXERIC pour des motifs similaires ; Qu’un tel comportement qui révèle la volonté de perturber les activités d’un concurrent, a causé à la société TEXERIC un préjudice commercial ; Que le tribunal en ayant fait une exacte appréciation, le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la société PIERRE HENRY au paiement de la somme de 50 000 francs ; VI – SUR L’ARTICLE 700 DU NCPC Considérant que l’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du nouveau Code de Procédure Civile à la société PIERRE HENRY ; Qu’en revanche, il y a lieu d’allouer à la société TEXERIC pour les frais hors dépens par elle engagés en appel une somme complémentaire de 5 000 francs ; PAR CES MOTIFS Rejette des débats les conclusions signifiées et les pièces communiquées le 5 octobre 1998 par la société PIERRE HENRY Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions Condamne la société PIERRE HENRY à payer à la société TEXERIC la somme de CINQ MILLE FRANCS (5 000 francs) sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de Procédure Civile La condamne aux dépens d’appel Admet la SCP AUTIER titulaire d’un office d’avoué, au bénéfice de l’article 699 du nouveau Code de Procédure Civile.

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