Cour d'appel de Paris, 4e chambre, 11 décembre 1998

  • Inscription au registre national des dessins et modèles·
  • Indemnités mises in solidum à la charge des defendeurs·
  • 1) frais irrepetibles de premiere instance et d'appel·
  • Action en contrefaçon et en concurrence déloyale·
  • Volonte de profiter des investissements d'autrui·
  • À la date de l'assignation, qualité pour agir·
  • Assignation anterieure à la fusion-absorption·
  • Demande reconventionnelle d'un des defendeurs·
  • Economie de frais de creation et de publicité·
  • Article 700 nouveau code de procédure civile

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Paris, 4e ch., 11 déc. 1998
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Publication : PIBD 1999 673 III 155
Décision(s) liée(s) :
  • TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS DU 13 DECEMBRE 1996
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Classification internationale des dessins et modèles : CL16-06
Référence INPI : D19980112
Télécharger le PDF original fourni par la juridiction

Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE I – LA PROCEDURE DE PREMIERE INSTANCE Le 30 juin 1993, OAKLEY Inc et OAKLEY E, invoquant leurs droits sur des modèles de lunettes déposés ont fait pratiquer une saisie contrefaçon dans le magasin exploité par GO SPORT au Forum des Halles à PARIS où étaient offertes à la vente les lunettes B MINT et PAULINE fabriquées respectivement par CEBE et L. Parc acte du 12 juillet 1993, elles ont ensuite fait assigner GO SPORT et L. Par acte du 12 juillet 1993, elles ont ensuite fait assigner GO SPORT en contrefaçon et concurrence déloyale devant le tribunal de commerce de PARIS. Le 23 décembre 1993, elles ont fait procéder à une autre saisie-contrefaçon dans les locaux d’un magasin exploité par la société AU VIEUX CAMPEUR à PARIS. Ont été appréhendés à cette occasion les modèles BABY de la société BERTHET BONDET, ORLANDO et RACINE de la société LOUBSOL, PIWEE, TOURMALET et 3070 de la société EUROP TECHNIC, ARSENE de la société CEBE, AZURE N et EXTREME de la société ALCAD. Par acte du 4 janvier 1994, les sociétés OAKLEY ont fait assigner AU VIEUX CAMPEUR en contrefaçon et concurrence déloyale devant le Tribunal de Commerce de Paris. Par actes des 25 janvier et 23 mars 1994, AU VIEUX CAMPEUR et GO SPORT ont respectivement fait assigner en garantie les fournisseurs des lunettes ci-dessus mentionnées ; pour LE VIEUX CAMPEUR : EUROP TECHNIC, L, CEBE, BERTHET- BONDET et ALCAD ; pour GO SPORT : CEBE et L. Le 6 septembre 1994, les sociétés OAKLEY ont à nouveau fait procéder à une saisie- contrefaçon au SISEL de VILLEPINTE sur le stand de L. Ont été saisies notamment les lunettes NICOLAS, SANTA, TENNIS, SIAM, SYSTEME, TIGER, SOLANA et THONY de L. Par acte du 6 octobre 1994, les sociétés OAKLEY ont fait assigner L en contrefaçon et en concurrence déloyale devant le Tribunal de Commerce de Paris. Ces procédures ont été jointes. Par jugement du 13 décembre 1996, le tribunal de commerce de PARIS :

- a dit nulle la saisie-contrefaçon effectuée par la société OAKLEY à l’encontre de la société LOUBSOL,
- a dit que les sociétés CEBE INTERNATIONAL, GO SPORT, L et AU VIEUX CAMPEUR se sont rendues coupables de concurrence déloyale à l’encontre de la société OAKLEY,
- leur a fait interdiction sous astreinte de fabriquer ou vendre les modèles litigieux,
- les a condamnées chacune à payer à la société OAKLEY EUROPE la somme de 200.000 F à titre de dommages intérêts,
- a dit que CEBE INTERNATIONAL et L devraient solidairement rembourser à GO SPORT et AU VIEUX CAMPEUR après paiement par elles des sommes ci-dessus le montant des condamnations mises à leur charge,
- a autorisé OAKLEY a faire publier le jugement à ses frais,

— a dit n’y avoir lieu de faire application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- a ordonné l’exécution provisoire. II – L’APPEL CEBE INTERNATIONAL et L ont interjeté appel ; les procédures ont été jointes. Par ailleurs l’exécution provisoire du jugement a été suspendue. En cours de procédure devant la cour, les appelants ont appris que la société OAKLEY Inc. (ayant son siège en Californie) qui avait mené la procédure jusque-là avait disparu à la suite de sa fusion absorption par la société OAKLEY Inc. (ayant son siège dans l’Etat de Washington). A partir du 27 novembre 1997, les conclusions des intimées ont été prises par cette société OAKLEY Inc (Washington). Dans le dernier état de leurs écritures, les prétentions des parties peuvent se résumer ainsi qu’il suit. CEBE poursuit la réformation intégrale du jugement et prie la cour de : "Vu les articles 117 et 32 du NCPC En ce qui concerne la société OAKLEY INC,
- déclarer irrecevable la société OAKLEY INC, Sté de droit de l’Etat de Californie, en ses demandes de première instance, celle-ci ayant du fait de la fusion perdu sa qualité à agir.

-Déclarer irrecevable la société OAKLEY INC, Sté de droit de l’Etat de Washington, en ce qu’elle n’a pas de qualité à agir dans la présente procédure pendante devant la Cour. Surabondamment,
-déclarer irrecevable la société OAKLEY INC, société de droit de l’Etat de Washington, en ce qu’elle n’a pas qualité à agir dans la présente procédure, en raison de l’absence de transcription au Registre National des Dessins et modèles des éventuels transferts de propriété intervenus entre la société OAKLEY INC (droit de l’Etat de Californie) et OAKLEY INC (droit de l’Etat de Washington) et de justification de la réalité d’un tel transfert au regard du régime légal de la fusion entre deux sociétés de droit américain. En ce qui concerne la société OAKLEY SARL
- déclarer irrecevable la Sté OAKLEY SARL, société de droit français, notamment en ce qu’elle ne démontre pas avoir des droits privatifs sur les modèles argués de contrefaçon, ni de droits d’exploitation exclusifs fondant une éventuelle action en concurrence déloyale. Surabondamment
- dire que la Sté OAKLEY EUROPE SARL ne rapporte pas la preuve de faits distincts susceptibles de fonder sa demande en concurrence déloyale,

Très subsidiairement
- dire que la société OAKLEY Inc. est irrecevable et mal fondée à revendiquer des droits de propriété littéraire et artistique sur les modèles n 88 6891, 88 4121, 88 7705 et 901191 eu égard notamment aux dispositions de l’article 2-7 de la Convention de Berne,
- dire que les modèles déposés par la société OAKLEY Inc (Etat de Californie) 88 6891, 88 4121, 88 7705 et 901191 sont nuls pour défaut d’originalité et en raison de leur caractère fonctionnel, En conséquence,
- débouter la société OAKLEY Inc. et la société OAKLEY EUROPE SARL de toutes leurs demandes, fins et conclusions. Infiniment subsidiairement
- dire que la société CEBE INTERNATIONAL ne s’est pas rendue coupable de contrefaçon.

- dire que la société CEBE INTERNATIONAL n’a pas commis d’actes de concurrence déloyale à l’encontre des sociétés OAKLEY Inc et OAKLEY E. Reconventionnellement
- dire la société CEBE INTERNATIONAL recevable en ses écritures et bien fondée en toutes ses demandes, En conséquence,
- condamner les sociétés OAKLEY Inc. et OAKLEY EUROPE SARL, pour contrefaçon du modèle de lunettes n 800409 intitulé « Courrèges » de la société CEBE INTERNATIONAL déposé le 19 février 1980 à l’INPI.

- condamner solidairement les sociétés OAKLEY Inc. et OAKLEY E à payer à la société CEBE INTERNATIONAL une somme de 3.609.750 francs de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la contrefaçon du modèle n 800 409.

- condamner solidairement les sociétés OAKLEY Inc. et OAKLEY EUROPE SARL à payer à la société CEBE INTERNATIONAL la somme de 500.000 Francs à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice commercial subi du fait de cette procédure abusive et des agissements déloyaux des demanderesses.

- ordonner la publication du jugement à intervenir par extrait ou en entier dans quatre journaux aux frais des demanderesses pour un montant qui ne saurait être inférieur à 10 000 F par insertion.

- condamner solidairement la société OAKLEY Inc. et la société OAKLEY EUROPE SARL au paiement d’une indemnité de 100.000 Francs au titre de l’article 700 du NCPC." L demande à la cour de :

- déclarer irrecevables les sociétés OAKLEY Inc et OAKLEY E, faute pour celles-ci de justifier de leur qualité pour agir,
- confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la nullité de la saisie description pratiquée sur son stand le 6 septembre 1996 au salon du SISEL,
- réformer le jugement pour le surplus,
- dire que les formes des modèles BLADES et RAZOR BLADES, FRAME et F ne

peuvent être protégées par le droit des dessins et modèles du fait de leur absence d’originalité et de nouveauté,
- prononcer la nullité de ces modèles,
- dire que les sociétés OAKLEY sont irrecevables à revendiquer des droits d’auteur sur ces modèles,
- dire que les modèles LOUBSOL ne constituent pas des contrefaçons des modèles OAKLEY,
- à titre infiniment subsidiaire, dire que les sociétés OAKLEY ne démontrent pas avoir subi un préjudice imputable à L,
- reconventionnellement, condamner in solidum les sociétés OAKLEY à payer la somme de 2.500.000 F de dommages intérêts pour procédure abusive et concurrence déloyale,
- condamner in solidum les sociétés OAKLEY à lui payer 150.000 F par application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile. EUROPE TECHNIC prie la cour de :

- dire que les modèles invoqués par les sociétés OAKLEY sont nuls pour défaut de nouveauté et caractère fonctionnel,
- dire que les sociétés OAKLEY sont irrecevables et mal fondées à revendiquer des droits de propriété sur ces modèles,
- dire que les sociétés OAKLEY en rapportent pas la preuve de faits distincts ni d’un préjudice susceptibles de fonder leur demande en concurrence déloyale,
- en conséquence, débouter les sociétés OAKLEY de toutes leurs demandes,
- reconventionnellement condamner les sociétés OAKLEY à lui payer les sommes de 50.000 F à titre de dommages intérêts pour procédure abusive et celle de 20.000F par application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile. ALCAD, à l’encontre de laquelle le tribunal n’a prononcé aucune condamnation, demande la confirmation du jugement et sollicite que L soit condamnée à lui payer la somme de 7.000 F par application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile. GO SPORT qui poursuit la réformation du jugement, prie la cour de dire que les modèles n 884121, 887705 et 886831 sont nuls pour défaut de nouveauté et d’originalité et qu’elle n’a commis aucune acte distinct de concurrence déloyale. Elle conclut au débouté de toutes les demandes des sociétés OAKLEY, réclame qu’elles soient reconventionnellement condamnées à lui payer la somme de 500.000 F à titre de dommages intérêts pour procédure abusive et celle de 50.000 F pour ses frais irrépétibles. Subsidiairement, s’il était fait droit aux demandes des sociétés OAKLEY, elle demande la confirmation du jugement en ce qu’il a condamné solidairement CEBE et L à lui rembourser le montant des condamnations mises à sa charge. BERTHET BONDET sollicite sa mise hors de cause. Elle expose avoir transigé avec les sociétés OAKLEY qui n’incriminent plus son modèle BABY 3522 qu’elle a retiré de la vente, fait valoir qu’AU VIEUX CAMPEUR a abusivement maintenu son appel en garantie contre elle et qu’elle a été abusivement intimée par CEBE et L avec lesquelles elle n’a pas de lien de droit. Elle demande qu’AU VIEUX CAMPEUR, CEBE et L soient solidairement condamnées à lui payer la somme de 20.000 F pour ses frais irrépétibles.

AU VIEUX CAMPEUR prie la cour :

- à titre préliminaire :

- de dire irrégulières les écritures prises en appel par la société OAKLEY Inc. organisée selon les lois de l’Etat de WASHINGTON, et en conséquence de déclarer irrecevables l’ensemble des prétentions de OAKLEY Inc et OAKLEY E,
- de lui donner acte de son désistement à l’égard de la société BERTHET BONDET et de débouter celle-ci de ses demandes à son encontre,
- sur le fond :

- de réformer le jugement entrepris, dire que les modèles invoquées par OAKLEY Inc sont entachés de nullité, que n’est pas démontrée la réalité des agissements contrefaisant et de concurrence déloyale reprochés AU VIEUX CAMPEUR et condamner les sociétés OAKLEY à lui payer la somme de 80.000 F par application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- de débouter les sociétés OAKLEY de leur appel incident,
- subsidiairement, si le jugement était confirmé en ce qu’il a retenu la recevabilité et le bien fondé de l’action en concurrence déloyale d’OAKLEY E, de le réformer sur le montant des dommages intérêts au visa de l’article 5 du nouveau code de procédure civile,
- de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a accueilli dans son principe l’appel en garantie diligenté contre L et CEBE par AU VIEUX CAMPEUR, mais de le réformer sur les modalités de mise en oeuvre de cette garantie et de condamner in solidum CEBE et L à la garantir de toutes condamnations et de les condamner à lui payer une indemnité de 40.000 F pour ses frais irrépétibles. Les sociétés OAKLEY poursuivent également la réformation du jugement et formant appel incident prient la cour de :

- dire que les sociétés CEBE, LOUBSOL, GO SPORT, LE VIEUX CAMPEUR, EUROPE TECHNIC, ALCAD se sont rendues coupables de contrefaçon et de concurrence déloyale,
- condamner en conséquence CEBE, L, EUROP TECHNIC et ALCAD, solidairement avec GO SPORT et LE VIEUX CAMPEUR pour les modèles qu’elles ont commercialisés à payer à la société OAKLEY, Inc. 100.000 FF pour chaque modèle contrefaisant,
- condamner de plus en réparation du préjudice subi par les concluantes :

- la société LOUBSOL au paiement de la somme de 1.621.422 FF,
- les sociétés GO SPORT et CEBE, solidairement, au paiement de la somme de 387.516 FF,
- LE VIEUX CAMPEUR et CEBE solidairement à la somme de 23.166 FF,
- LE VIEUX CAMPEUR et ALCAD solidairement à la somme de 63.360 FF,
- LE VIEUX CAMPEUR et EUROP TECHNIC solidairement à la somme de 51.978 FF,
- dire que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter de l’assignation ;

- ordonner la publication de l’arrêt dans cinq journaux ou publications au choix des concluantes et aux frais des appelantes dans la limite de 80.000 FF TTC pour chaque publication ;

- débouter les appelantes principales et les autres intimées de toutes leurs demandes ;

— condamner chacune des appelantes à verser aux concluantes la somme de 150.000 FF HT au titre de l’article 700 du NCPC.

DECISION I – SUR LA QUALITE A AGIR DES SOCIETES OAKLEY Considérant qu’il est constant :

- que le tribunal de commerce (réserve faite des appels en garantie diligentés par GO SPORT et AU VIEUX CAMPEUR) a été saisi par assignations en dates des 12 juillet 1993, 4 janvier 1994 et 6 octobre 1994 émanant des sociétés OAKLEY Inc et OAKLEY E, la société américaine indiquant être organisée selon les lois de l’état de Californie et avoir son siège à IRVINE, Californie,
- que le jugement entrepris a été rendu au profit de ces sociétés, au nom desquelles il a été constitué avoué devant la cour,
- que les conclusions signifiées le 27 décembre 1997, mentionnent pour la première fois qu’elles sont prises notamment au nom de « la société OAKLEY Inc. Société de droit américain organisée selon les lois de l’Etat de Washington dont le siège social est sis 1, Icon, Foothill Ranch, CA 92610 »,
- qu’il ressort des explications de cette société (qui, dans ses dernières écritures, fait état d’une adresse dans l’Etat de Washington, et mentionne l’adresse californienne comme étant celle de son principal établissement) qu’elle a absorbé la société OAKLEY Inc. (Californie) aux termes d’un accord de fusion conclu le 23 octobre 1994 et devenu effectif le 7 novembre 1994 ; Considérant que les assignations lancées par les sociétés OAKLEY sont antérieures à la fusion ci-dessus visée et à la disparition de la société OAKLEY Inc. organisée selon les lois de l’Etat de Californie ; que les instances concernées ont donc été régulièrement introduites par des sociétés qui avaient parfaitement qualité pour agir ; que si, par la suite, la société OAKLEY Inc organisée suivant les lois de l’état de Californie a perdu le droit d’agir, cette irrégularité de fond a été couverte par l’intervention devant la cour -en qualité simplement d’intimée et d’appelante incidente- de la société OAKLEY Inc organisée suivant les lois de l’Etat de Washington, dont il est suffisamment établi par les pièces versées aux débats qu’elle a recueilli l’ensemble du patrimoine de la société absorbée ; que les demandes des appelantes tendant à voir déclarer OAKLEY Inc ayant son siège dans l’état de Washington irrecevable à agir dans la présente procédure seront en conséquence repoussées ; Considérant qu’il sera ajouté qu’OAKLEY E a précisé que c’est par suite d’une erreur, rectifiée dans les écritures postérieures, qu’avait été mentionnée pour ce qui la concerne dans les conclusions du 27 novembre 1997 déjà citées la dénomination « OAKLEY EUROPEAN HEADQUARTERS » qui est son nom commercial et non pas sa

dénomination sociale ; que cette société a par ailleurs transféré son siège social de TREMBLAY EN FRANCE à ROISSY EN FRANCE en 1997 (ce transfert décidé par délibération du 15 mai 1997 de l’associé unique ayant été régulièrement publié dans un journal d’annonces légales et mentionné au registre du commerce) ; qu’elle est également recevable à agir en appel ; Considérant que la société OAKLEY Inc. organisée selon les lois de l’Etat de Washington fonde ses demandes devant la cour sur la contrefaçon de modèles et la concurrence déloyale ; qu’en revanche, OAKLEY E agit au seul titre de la concurrence déloyale ; Considérant que la qualité d’OAKLEY Inc à agir en contrefaçon de modèles est contestée par ses adversaires qui relèvent que les modèles invoqués ont été déposés par la société OAKLEY Inc organisée suivant les lois de l’Etat de Californie qu’elle a absorbée, et qu’elle ne peut pas se prévaloir desdits modèles faute d’avoir fait procéder à une inscription modificative au Registre national des dessins et modèles ; qu’OAKLEY Inc critique cette argumentation en soutenant que la transmission universelle de patrimoine dont elle a bénéficié lui a conféré de plein droit la propriété des modèles sans qu’elle ait besoin d’opérer une quelconque inscription ; Mais considérant que ce raisonnement ne saurait être suivi ; qu’il se heurte aux termes précis de l’article L 512-4 du Code de la propriété intellectuelle qui prévoit que « tout acte modifiant ou transmettant les droits attachés à un dessin ou modèle déposé n’est opposable aux tiers que s’il a été inscrit au Registre national des dessins et modèles », les dispositions réglementaires prises pour l’application de ce texte prévoyant d’ailleurs expressément (Art R 512-16, 2 ) l’inscription des actes de « fusion… ou absorption » ; Considérant qu’il résulte des observations qui précèdent qu’OAKLEY Inc. organisée selon les lois de l’Etat de Washington, faute d’avoir fait procéder aux inscriptions requises au Registre national des dessins et modèles, est irrecevable à agir en contrefaçon des modèles qu’elle prétend invoquer à l’encontre de ses adversaires ; Qu’il s’en déduit également qu’elle n’a pas non plus qualité pour opposer des droits, en défense aux demandes reconventionnelles en nullité des mêmes modèles formées par ses adversaires sur lesquelles il ne saurait, en cet état, être statué ; II – SUR LES DEMANDES EN CONCURRENCE DELOYALE FORMEES PAR LES SOCIETES OAKLEY Considérant qu’au soutien de leur action en concurrence déloyale, OAKLEY Inc. et OAKLEY E font valoir qu’EUROP TECHNIC, ALCAD, L, CEBE, GO SPORT et AU VIEUX CAMPEUR (elles ne forment aucune demande contre BERTHET BONDET) ont commis divers agissements constitutifs de concurrence déloyale, par copie servile et imitation de leurs -en commercialisant 19 paires de lunettes qu’elles incriminent- imitation de leur publicité, vente à des prix inférieurs dans des qualités moindres, et parasitisme ;

Considérant qu’il convient d’ajouter que les produits litigieux ont en commun d’être des lunettes mono-écran à vocation sportive ; que les adversaires des sociétés OAKLEY relèvent exactement que celles-ci qui indiquent dans leurs publicités proposer plus de deux millions de configurations différentes en combinant leurs divers éléments, ne sauraient en toute hypothèse prétendre au monopole du genre des lunettes mono-écran – connu depuis longtemps, notamment par des lunettes de protection pour le travail dans certaines industries ou les lunettes de ski ; 1 – Sur les griefs d’imitation et copie servile des produits Considérant qu’il importe d’abord de relever que contrairement à ce que soutiennent les appelants, aucune règle ne fait obstacle en principe à ce que l’action en concurrence déloyale soit exercé après rejet d’une action en contrefaçon ; qu’en l’espèce (alors qu’elle ne peut pas opposer à ses adversaires les modèles dont elle a négligé de faire inscrire la transmission) OAKLEY Inc. est recevable, de même qu’OAKLEY E, à incriminer au titre de la concurrence déloyale l’imitation de ses produits, l’appréciation de la concurrence déloyale dépendant toutefois de critères différents de ceux qui auraient déterminé l’examen d’un grief de contrefaçon ; qu’alors que la contrefaçon, résultant de l’atteinte à un droit privatif, est constituée par la simple reproduction de caractéristiques protégeables d’un modèle, la concurrence déloyale par imitation de produit n’est réalisée que pour autant que le produit incriminé présente avec le produit imité des similitudes suscitant une confusion dans l’esprit du consommateur, ou constitue une copie servile ; que tandis que la contrefaçon s’apprécie par les ressemblances et non par les différences, l’examen comparatif d’un produit argué d’imitation déloyale et du produit invoqué peut conduire à écarter la concurrence déloyale même en présence de ressemblances sur des points particuliers, si d’autres éléments précis ou la configuration d’ensemble du produit incriminé excluent le risque de confusion ; III – SUR LES FAITS DE PRODUITS REPROCHES A ALCAD Considérant que deux modèles de lunettes founis par ALCAD et saisis dans le magasin de GO SPORT au forum des halles, sont incriminés les sociétés OAKLEY qui prétendent que :

- le modèle AZUREENNE est, par l’écran, la monture et les branches la copie servile de leurs produits qu’ils désignent respectivement par les dénominations BLADES, RAZOR BLADES et TRIGGER,
- les lunettes EXTREME constituent par l’écran, la monture et les branches la copie servile de leurs produits M-FRAME SWEEP, RAZOR BLADES et TRIGGER ; Que les sociétés OAKLEY versent aux débats, d’une part, les lunettes AZUREENNE ET EXTREME de leur adversaire, d’autre part des lunettes portant leur marque composées de l’assemblage des éléments ci-dessus mentionnés ; Considérant que la comparaison de ces produits ne permet pas de retenir les prétentions des sociétés OAKLEY ; que les lunettes AZUREENNE diffèrent de celles qui leur sont opposées par la forme de l’écran, de configuration générale plus étroite et allongée que

celle l’écran BLADES, et par la forme de la monture, qui comporte en son centre vu de face un épaississement qui fait que le coté de la monture surplombant l’écran dessine deux arcs de cercle de part et d’autre du nez, au lieu d’un arc unique allant d’un allant d’une extrémité à l’autre de la monture RAZOR BLADES ; que l’écran des lunettes EXTREME ne comporte pas les cotés inférieures fortement convexes, ni les extrémités latérales en pointe qui donnent à l’écran M-FRAME S une allure en aile de papillon ; que même si les branches des lunettes en cause s’apparentent aux branches TRIGGER, les différences ci-dessus mentionnées confèrent aux produits incriminés des configurations générales nettement différentes de celles des produits qui leur sont opposés, dont ils ne constituent certainement pas la copie servile, et avec lesquels ils ne suscitent aucun risque de confusion ; IV – SUR LES FAITS D’IMITATION DE PRODUITS REPROCHES A EUROPE TECHNIC Considérant que trois paires de lunettes provenant D’EUROP TECHNIC et saisies dans un magasin exploité par AU VIEUX CAMPEUR sont incriminées par les sociétés OAKLEY ; que celles-ci soutiennent que :

- les lunettes TOURMALET constitueraient, par leur écran et leur monture, la copie servile de leurs propres produits respectivement dénommés RAZOR BLADES et BLADES,
- les lunettes PIWEE copieraient, par leur écran et leur monture, leurs produits respectivement appelés M-FRAME S et BLADES,
- les lunettes 3070 seraient, par leur écran et leur monture, la copie de leurs produits M- FRAME HYBRID et M-FRAME ; Considérant que l’examen des produits remis par les sociétés OAKLEY fait apparaître :

- que la forme oblongue de l’écran des lunettes TOURMALET est tout à fait différente de celle l’écran RAZOR BLADES aux cotés droits et aux extrémités anguleuses, les montures se différenciant des montures BLADES par leur aspect plus rectiligne, de sorte que les lunettes TOURMALET ont une configuration d’ensemble beaucoup plus arrondie et moins haute,
- que les lunettes PIWEE n’ont pratiquement rien de commun avec celles qui leur sont opposées, leur écran aux bords concaves se différenciant totalement de l’écran M- FRAME S déjà évoqué, aux cotés convexes, et leur monture formant deux arcs de cercle au lieu de l’arc unique que dessine la monture BLADES,
- que les lunettes 3070, dont l’écran et la monture ressemblent à ceux qui produit qui leur est opposé, se distinguent toutefois totalement de celui-ci par le fait qu’elles ne comportent pas les mêmes branches très particulières qui, au lieu de suivre le profil latéral de la tête, comportent à proximité de l’articulation avec la monture un décrochement extrêmement prononcé vers l’extérieur donnant l’impression d’une monture dépassant très largement de part et d’autre les cotés latéraux de l’écran ; Considérant qu’aucun des produits ci-dessus visés d’EUROP TECHNIC ne suscite une confusion avec ceux qui leur sont respectivement opposés ;

V – SUR LES FAITS D’IMITATION DE PRODUITS IMPUTES A CEBE Considérant que sont mis en cause deux produits de CEBE respectivement saisis dans les magasins exploités par AU VIEUX CAMPEUR et GO SPORT ; que selon les intimées :

- les lunettes B MINT copient, par leur écran et leur monture, respectivement leurs produits RAZOR BLADES et BLADES,
- les lunettes ARSENE copient par leur écran et leur monture RAZOR BLADES et leurs branches TRIGGER ; Considérant que, de la comparaison des lunettes incriminées et des produits qui leur sont opposés, il ressort que :

- l’écran des B MINT est moins haut et plus effilé aux extrémités latérales que celui du produit opposé, qui comporte en outre une monture formant un arc de cercle plus prononcé,
- si les branches des lunettes ARSENE sont pratiquement identiques à celles du produit opposé, leur écran et leur monture appellent les mêmes observations que celles émises ci- dessus à propos de B MINT, remarque étant faite toutefois que l’écran, dont la forme des extrémités latérales est plus proche de celle de RAZOR BLADES, est coupé au centre par un étrier nasal en forme de pointe marquée au lieu d’être arrondi ; Considérant qu’il s’ensuit que la comparaison des produits de CEBE et de ceux qui leur sont opposés ne fait pas non plus apparaître de risque de confusion ; VI – SUR LES FAITS D’IMITATION DE PRODUITS REPROCHES A L Considérant que les sociétés OAKLEY incriminent 11 produits de L, les lunettes :

- PAULINE saisies chez GO SPORT,
- ORLANDO et RACINE saisies AU VIEUX CAMPEUR,
- THONY, NICOLAS, SIAM, TENNIS, TIGER, SOLANA, SYSTEME, SANTA qui avaient été saisies au SISEL de VILLEPINTE ; Que PAULINE, ORLANDO, et RACINE sont versées aux débats accompagnées des produits que les sociétés OAKLEY leur opposent ; qu’en ce qui concerne les autres modèles ayant fait l’objet d’une saisie contrefaçon dont l’annulation par le tribunal (pour tardiveté de l’assignation) n’est pas contestée par les intimées, celles-ci produisent devant la cour des planches photographies mettant en présence les photos des produits incriminés prises sous trois angles différents par leur adversaire et les photos de leurs propres produits opposés ; Considérant que s’agissant d’ORLANDO, PAULINE et RACINE, les sociétés OAKLEY soutiennent :

- qu’ORLANDO, par son écran et sa monture, copie leurs produits RAZOR BLADES et BLADES,
- que PAULINE et RACINE, identiques, par leur écran et leur monture copient leurs produits M-FRAME SWEEP et BLADES ;

Mais considérant qu’en ce qui concerne PAULINE/RACINE ces allégations sont dépourvues de tout fondement, que la monture formant un arc de cercle moins prononcé que celui que présente BLADES, surmonte un écran de forme oblongue et dont les extrémités sont arrondies, sans présenter les découpes convexes prononcées et les bouts effilés qui caractérisent M-FRAME S ; que pour ORLANDO, la combinaison de la monture qui forme également un arc de cercle moins prononcé que BLADES, et de l’écran, moins haut au centre et plus haut aux extrémités que RAZOR BLADES, donnent aux lunettes une apparence plus fine que celle du produit opposé dont la configuration tend à se rapprocher de celle d’un masque de ski ; qu’il n’existe donc pas de risque de confusion entre les produits ici mis en présence ; Considérant que parmi les autres produits incriminés de L :

- THONY apparaît identique à ORLANDO, et ne peut donc être confondu avec la combinaison RAZOR BLADES/BLADES qui lui est opposée,
- NICOLAS qui selon les intimés copierait, par son écran, RAZOR BLADES et, par sa monture, SUB ZERO, présente une apparence d’ensemble totalement différente de celle du produit opposé, les montures en cause -qui ont en commun de pas comporter de tige d’un seul tenant surplombant l’écran dans toute sa largeur, et de consister simplement en des attaches séparées placées de part et d’autre de l’écran et articulées aux branches des lunettes- étant fixées dans un cas (NICOLAS) sur les extrémités verticales latérales de l’écran, alors que dans l’autre (produit OAKLEY) elle se prolongent sur quelques centimètres à chaque extrémité du sommet de l’écran,
- TENNIS dont les intimés prétendent qu’il copierait par son écran et par sa monture leurs produits M-FRAME et M-FRAME HYBRID présent une configuration différente de celle des lunettes qui lui sont opposées essentiellement en ce que sa monture ne comporte pas la même forme en M marqué, et que les bords latéraux de l’écran dépassent chacune des extrémités de la monture,
- SIAM auquel sont opposés les mêmes produits s’en distingue en ce qui concerne la monture dont la partie supérieure dessine un arc de cercle continu et ne comporte pas non plus la même forme en M marqué, dessinant deux arcs de cercle se coupant nettement au- dessus de l’étrier nasal,
- TIGER qui, selon les sociétés OAKLEY, copierait respectivement par son écran, sa monture et ses branches leurs produits M-FRAME HYBRID, SUB-ZERO et HAMMER, présente une découpe d’écran qui suffit à écarter les griefs dirigés contre ce produit en ce qu’elle est totalement différente de celle de M-FRAME H, la partie inférieure de chaque demi-écran ne comportant pas moins de cinq cotés, alors que M-FRAME H beaucoup plus simple n’en comporte que trois,
- SOLANA, qui selon les sociétés OAKLEY copierait par son écran M-FRAME S et par sa monture BLADES, n’apparaît pas être autre chose qu’une déclinaison de PAULINE/RACINE dotée d’une monture comportant des motifs et coloris différents (de sorte que doivent lui être intégralement transposées les observations précédemment faites à propos de PAULINE/RACINE),
- SANTA, qui, selon les intimées, copierait servilement leur produit SUB-ZERO, présente en effet un écran de forme très proche (encore qu’il ne présente pas au bas de chaque coté de l’étrier nasal la découpe concave que l’on voit sur SUB-ZERO), mais s’en distingue très sensiblement par la forme des montures, celles de SANTA, d’une part, et de

SUB-ZERO, d’autre part, ayant respectivement la configuration ci-dessus décrite dans la comparaison de NICOLAS et du produit (Montures SUB-ZERO) qui lui était opposé ; Considérant qu’il ressort donc de la comparaison des lunettes ci-dessus mentionnées qu’il n’existe pas de risque de confusion entre les produits en cause de L et ceux qui leur sont opposés ; Considérant que s’agissant des lunettes SYSTEME, dont les sociétés OAKLEY prétendent qu’elles copieraient de manière totalement servile respectivement par leur écran, leur écran M-FRAME S et, par leur monture, son produit M-FRAME, la comparaison des photographies versées aux débats ne fait en effet apparaître aucune différence ; que contrairement à ce que soutient L l’examen attentif des photographies communiquées ne permet pas de distinguer la forme des produits en présence en ce qui concerne la monture de SYSTEME dessinant un M dont les extrémités quoiqu’elle prétende ne sont pas plus « descendantes » ou moins « droites » que celles de la monture F ; que L ne formule aucune observation sur la forme de l’écran ; qu’en effet l’écran de SYSTEME apparaît totalement identique à l’écran M-FRAME S dont il reprend la forme en ailes de papillon, avec les mêmes courbures convexes des bords inférieurs, les mêmes extrémités effilées avec des courbes et orientations identiques ; que la présence qu’invoque L d’une encoche nasale légèrement plus longue dans SYSTEME n’est pas nettement perceptible à l’examen des photographies mises en présence et n’empêche pas que les produits en cause apparaissent totalement superposables ; Considérant que L ne conteste pas l’antériorité de commercialisation des lunettes de ses adversaires dont les pièces mises aux débats établissent qu’elles étaient en tout cas sur le marché en 1991 (alors que les pièces de L ne font apparaître de ventes de SYSTEME qu’à partir de 1993) ; qu’elle ne rapporte pas la preuve de ses affirmations selon laquelle les produits des sociétés OAKLEY auraient été totalement banals et auraient répondu à des nécessités fonctionnelles ; que cette preuve ne ressort pas en particulier des éléments qu’elle avait avancés pour discuter la validité des modèles M-FRAME qui avaient été déposés par OAKLEY Inc (Californie), puisque -pour se limiter aux documents susceptibles d’être pertinents- le modèle BOLLE comporte une monture dont le coté supérieur est pratiquement rectiligne et ne présente pas la forme en M caractéristique de F, que la monture des modèles BARATELLI présentent une forte courbure dessinant toutefois un seul arc de cercle, ou, pour l’un d’entre eux deux arcs, mais associés dans une forme très arrondie qui ne s’apparente en rien à celle d’un M, et qu’aucune réalisation antérieure produite devant la cour ne fait apparaître la configuration très particulière en aile de papillon et découpes convexes des écrans M-SWEEP H -totalement reprise dans les lunettes SYSTEME ; Considérant que la circonstance que l’écran de ces lunettes porte la marque LOUBSOL ne suffit pas à exclure une confusion dans l’esprit du public avec le produit des sociétés OAKLEY qu’elles copient de manière quasi-servile sinon servile, cette reprise intégrale du produit de ces sociétés constituant en lui-même un acte déloyal puisqu’il a permis à L de s’épargner les frais de conception engagés par ses adversaires, et de profiter indûment de leurs efforts d’innovation et de promotion ; qu’en commercialisant ainsi ses lunettes

SYSTEME, L a donc commis des actes constitutifs de concurrence déloyale à l’égard des sociétés OAKLEY ; VII – SUR LES AUTRES GRIEFS Considérant qu’au titre de la concurrence déloyale les sociétés OAKLEY reprochent encore à leurs adversaires :

- la pratique de prix inférieurs pour des produits de qualité moindre,
- l’imitation de leur publicité,
- des agissements parasitaires ayant consisté à se placer dans leur sillage pour imiter systématiquement toutes leurs innovations et tirer parti indûment de leurs efforts de recherche, de création et d’innovation ; Considérant que le premier de ces griefs dirigé contre tous leurs adversaires est manifestement non pertinent en ce qui concerne les sociétés autres que L et est mal fondé à l’égard de celle-ci ; que la liberté de fixer ses prix est un corollaire de la liberté du commerce et de la concurrence qui ne dégénère en abus que dans des hypothèses exceptionnelles de pratiques de prix anormalement bas, voire prédateurs ; qu’aucun grief de cette nature ne peut être adressé à L, dont les produits étaient vendus à des prix de l’ordre de 200 F, certes inférieurs aux prix élevés que les sociétés OAKLEY estiment devoir pratiquer mais néanmoins largement rémunérateurs ainsi qu’elles-mêmes le soulignent, le coût d’achat unitaire des lunettes en cause fabriquées à TAIWAN n’excédant pas, selon leurs dires, 15 F ; que, sous réserve de ce qui a été relevé précédemment à propos de la copie servile de F et M-FRAME S par les lunettes SYSTEME, le grief de parasitisme (alors notamment que sont en présence des entreprises directement concurrentes et que n’est retenue que la reprise illicite d’un produit) apparaît non pertinent ; qu’enfin le grief d’imitation de la publicité repose sur le fait que L a employé comme les sociétés OAKLEY l’image de sportifs et des données techniques sur les verres et plastiques dans le domaine des articles destinés aux sports et aux loisirs conduit à l’évidence à écarter ces reproches ; qu’en définitive les sociétés OAKLEY seront donc déboutées de toutes leurs demandes autres que celles formées contre L ; VIII – SUR LES DOMMAGES INTERETS Considérant que les demandes de dommages intérêts formées contre L (1.621.422 F) au titre de la concurrence déloyale apparaissent très excessives au regard des faits en réalité retenus contre cette partie ; qu’alors qu’il est établi que celle-ci a réalisé par la vente de SYSTEME un chiffre d’affaires de 147.505 F entre 1993 et 1995 et compte tenu du trouble commercial subi par les sociétés OAKLEY dont les produits de la gamme F (qui représentaient en 1993 36% en volume et 47% en valeur de leurs ventes) ont été galvaudés, il convient de fixer à 200.00 F le montant des dommages intérêts alloués à ces sociétés ; IX – SUR LES AUTRES DEMANDES

Considérant que CEBE ayant indiqué former sa demande reconventionnelle en contrefaçon de son modèle COURREGES déposé en 1980, pour le cas où « par extraordinaire, l’on devrait reconnaître une ressemblance entre le modèle de CEBE et celui d’OAKLEY », cette demande est en l’état sans objet ; Considérant qu’il n’y a pas lieu de faire droit aux demandes de dommages intérêts pour procédure abusive formées contre les sociétés OAKLEY, alors qu’il n’est pas démontré dans les circonstances spécifiques à l’espèce qu’elles auraient, en engageant ou poursuivant la présente instance, agi de mauvaise foi ou avec une légèreté blâmable ; Considérant que les circonstances de la cause font qu’il n’apparaît approprié d’ordonner des mesures de publication ; Considérant qu’eu égard à la complexité et à la longueur particulières de la procédure et aux diligences qu’elle rendues nécessaires, l’équité commande d’allouer pour leurs frais irrépétibles des indemnités de 80.000 F à CEBE, 50.000 F AU VIEUX CAMPEUR, 30.000 F à GO SPORT et 20.000 F à EUROPE TECHNIC ; que ces indemnités seront mises in solidum à la charge des sociétés OAKLEY qui supporteront les dépens de première instance et d’appel supportés et relatifs à la mise en cause de ces parties ; que les dépens d’appel de BERTHET BONDET incomberont in solidum à CEBE et L qui ont estimé devoir l’intimer, et qui seront pareillement condamnées à lui payer une somme de 8.000 F par application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ; que le surplus des dépens incomber à L qui sera condamné à payer aux sociétés OAKLEY une indemnité de 70.000 F pour leurs frais non taxables de procédure ; PAR CES MOTIFS : Réforme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a annulé la saisie contrefaçon pratiquée le 6 septembre 1994 ; Statuant à nouveau pour le surplus et ajoutant : Condamne la société LOUBSOL Etablissement LOUBEYRE à payer aux sociétés OAKLEY Inc et OAKLEY E la somme globale de 200.000 F à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice résultant de ses agissements constitutifs de concurrence déloyale et celle de 70.000 F par application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Condamne in solidum les sociétés OAKLEY Inc et OAKLEY E à payer au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile des indemnités de 80.000 F à la société CEBE INTERNATIONAL, 50.000 F à la société AU VIEUX CAMPEUR, 30.000 F à la société GO SPORT et 20.000 F à la société EUROPE TECHNIC ; Condamne in solidum les sociétés LOUBSOL Etablissements LOUBEYRE et CEBE INTERNATIONAL à payer à la société BERTHET BONDET la somme de 8.000 F par application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Rejette le surplus des demandes ; Condamne in solidum les sociétés LOUBSOL Etablissements LOUBEYRE et CEBE INTERNATIONAL à supporter les dépens d’appel de la société BERTHET BONDET ; Condamne in solidum les sociétés OAKLEY Inc et OAKLEY E à supporter les dépens de première instance et d’appel relatifs à la mise en cause des sociétés CEBE INTERNATIONAL, AU VIEUX CAMPEUR, GO SPORT et EUROPE TECHNIC ; Condamne la société LOUBSOL Etablissements LOUBEYRE au surplus des dépens de première instance et d’appel ; Admet les avoués de la cause, hormis Me B, au bénéfice, chacun en ce qui les concerne des dispositions de l’article 699 du nouveau Code de procédure civile.

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Extraits similaires à la sélection
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, 4e chambre, 11 décembre 1998