Cour d'appel de Paris, 4e chambre, 28 mai 1999

  • Articles de revue, brevets européen, français et étranger·
  • Absence de magnesium, d'anions acetate et/ou propianate·
  • Article l 611-11 code de la propriété intellectuelle·
  • L'amplification de la deshydratation par le lactose·
  • Article 552 nouveau code de procédure civile·
  • Existence de la contrefaçon non contestee·
  • Revendications une, deux, trois et douze·
  • Doutes profitant au titulaire du brevet·
  • Combinaison avec la revendication une·
  • Brevet d'invention, brevet 8 300 330

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Composition rehydratante utilisable notamment dans l’alimentation de jeunes animaux ne pouvant plus digerer normalement le lait et complement pour sa preparation

fusion absorption inscrite au registre national des brevets et subrogation des droits par avenant au contrat de sous-licence inscrit au registre national des brevets

ouvrage publie apres le depot du brevet presente comme relatant une conference faite avant le depot du brevet

combinaison comprenant du lactose destinee a rehydrater les animaux nouveaux-nes atteints de diarrhee

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 4e ch., 28 mai 1999
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Décision(s) liée(s) :
  • TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS DU 6 JUIN 1997
Domaine propriété intellectuelle : BREVET
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : FR8300330
Titre du brevet : COMPOSITION REHYDRATANTE UTILISABLE NOTAMMENT DANS L'ALIMENTATION DE JEUNES ANIMAUX NE POUVANT PLUS DIGERER NORMALEMENT LE LAIT ET COMPLEMENT POUR SA PREPARATION
Classification internationale des brevets : A23K
Brevets cités autres que les brevets mis en cause : FR7929395;EP116484
Référence INPI : B19990100
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Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE Appel a été interjeté par l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA), la SA GIFAVET (aux droits de laquelle se trouve actuellement la société VIRBAC FRANCE, intervenue volontairement dans la procédure d’appel) et la SA LABORATOIRES VIRBAC, à l’encontre d’un jugement rendu par le tribunal de grande instance de PARIS le 6 juin 1997 dans un litige les opposants aux sociétés SOLVAY SANTE ANIMALE, S.A. (actuellement FORT DODGE SANTE ANIMALE) et SOLVAY DUPHAR, société de droit néerlandais (actuellement dénommée SOLVAY PHARMACEUTICALS BV) Référence étant faite au jugement entrepris et aux écritures échangées en cause d’appel pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, il suffit de rappeler les éléments qui suivent. L’INRA est titulaire du brevet d’invention français 83 00 390, déposé le 12 janvier 1983 et délivré le 3 mai 1985 sous le n 2 539 006. Ce brevet est relatif à une « Composition réhydratante utilisable notamment dans l’alimentation de jeunes animaux ne pouvant plus digérer normalement le lait et à un complément pour sa préparation ». L’INRA a consenti à la société LABORATOIRES VIRBAC une licence exclusive d’exploitation de ce brevet et la société GIFAVET, sous-licenciée, à distribué le produit conforme à l’invention, sous la marque LACTOLYTE. Après y avoir été autorisé, l’INRA a fait pratiquer des saisies contrefaçon le 31 mai 1994 à BREST et à TOURS, qui ont établi que SOLVAY SANTE ANIMALE avait importé les ayant acquises auprès de leur fabricant néerlandais, SOLVAY DUPHAR- et commercialisé des compositions réhydratantes pour les veaux sous la dénomination EFFERHYDRAN qui auraient contrefait les revendications 1, 2, 3 et 12 du brevet ci- dessus mentionné. L’INRA ainsi que les sociétés VIBRAC et GIFAVET ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de PARIS, SOLVAY SANTE ANIMALE et SOLVAY DUPHAR pour obtenir, outre des mesures d’interdiction, de publication et de confiscation, leur condamnation au paiement de dommages intérêts et d’une indemnité au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. Les sociétés SOLVAY avaient soulevé la nullité des revendications opposées pour défaut de nouveauté, au motif que leurs caractéristiques auraient été divulguées par une communication orale de Messieurs R, D et C, lors d’un colloque à THEIX les 15, 16 et 17 décembre 1982, (communication publiée en 1985), et à tout le moins pour défaut d’activité inventive au regard d’autres documents. A titre subsidiaire, elles avaient conclu à l’absence de contrefaçon. Reconventionnellement, elles avaient formé une demande en paiement de la somme de 500 000 francs à titre de dommages intérêts ainsi que celle de 100 000 francs par application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par le jugement déféré, le tribunal a prononcé la nullité des revendications 1, 2, 3 et 12 du brevet opposé, en retenant que :

- la publication en 1985 de l’article de Messieurs R, D et C devait être considérée comme rendant compte de la communication orale présentée en décembre 1982, soit avant le dépôt du brevet, et constituait ainsi une antériorité opposable à ce dernier,
- cette publication divulguait les revendications 1 et 2 du brevet, et privait d’activité inventive la revendication 3. Le tribunal a rejeté les demandes de dommages intérêts formées par les sociétés SOLVAY et a condamné l’INRA, les sociétés VIRBAC et GIFAVET au paiement de la somme de 25 000 francs par application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. Appelants de ce jugement, l’INRA, VIRBAC et GIFAVET en poursuivent la réformation en toutes ses dispositions. Ils soutiennent que la publication de 1985 ne pouvait être retenue comme constituant une antériorité opposable, les sociétés SOLVAY n’ayant pas rapporté la preuve de ce que son contenu aurait été identique à celui de la communication de décembre 1982. Ils demandent encore à la cour de :

- dire que les sociétés SOLVAY ont commis des actes de contrefaçon des revendications 1, 2, 3 et 12 du brevet,
- leur interdire, sous astreinte de 100 francs par infraction, la poursuite de la vente de chaque unité de conditionnement destinée à la préparation d’un litre de solution reconstituée, ce dès la signification de l’arrêt,
- les condamner solidairement ou in solidum à payer des dommages intérêts à fixer après expertise et dès à présent par provision, la somme de 900 000 francs à l’INRA, celle de 1 800 000 francs à VIRBAC et celle de 1 800 000 francs à VIRBAC FRANCE (aux droits de GIFAVET),
- dire que les condamnations porteront sur tous les faits de contrefaçon commis jusqu’à la date de dépôt du rapport de l’expert,
- ordonner la confiscation,
- autoriser la publication,
- les condamner au paiement de la somme de 100 000 francs par application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. Les sociétés SOLVAY soulèvent l’irrecevabilité des appels interjetés par VIRBAC et GIFAVET plus d’un mois après la signification du jugement, ainsi que de l’intervention volontaire de VIRBAC FRANCE. Elles demandent la confirmation du jugement en ce qu’il a admis que la publication de 1985 comportait le compte rendu du colloque de 1982 et divulguait le brevet. A titre subsidiaire, elles concluent à la nullité des revendications opposées pour défaut d’activité inventive et à l’absence de contrefaçon. Elles sollicitent paiement de la somme de 100 000 francs au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. Les appelants et l’intervenante volontaire ont conclu au rejet des moyens d’irrecevabilité.

DECISION SUR CE, LA COUR : I – SUR LA RECEVABILITÉ DES APPELS FORMÉS PAR LES SOCIÉTÉS VIRBAC ET GIFAVET (AUX DROITS DE LAQUELLE INDIQUE VENIR LA SOCIÉTÉ VIRBAC FRANCE) Considérant que, selon les intimées, l’appel interjeté par VIRBAC et GIFAVET, le 11 décembre 1997, alors que le jugement avait été signifié le 13 octobre 1997 est irrecevable, de même que, par voie de conséquence, l’intervention volontaire de la société VIRBAC FRANCE disant venir aux droits de GIFAVET ; qu’en effet, selon les sociétés SOLVAY :

- l’appel interjeté dans les délais par l’INRA ne peut bénéficier à ses licenciée et sous- licenciée dès lors que l’INRA est titulaire du droit d’agir en contrefaçon, alors que VIRBAC en qualité de licenciée exclusive et GIFAVET en qualité de sous-licenciée ont la possibilité d’intervenir, de manière facultative, dans la procédure pour défendre leurs droits tirés de l’existence du contrat,
- les demandes concernées formées sur des fondements distincts ne sont ni solidaires ni indivisibles au sens de l’article 552 du nouveau code de procédure civile,
- les dispositions de l’article 550 du nouveau code de procédure civile ne peuvent davantage être invoquées dès lors que la déclaration d’appel de l’INRA était dirigée contre les seules sociétés SOLVAY ; Considérant qu’il est encore soutenu que VIRBAC FRANCE serait irrecevable dans son intervention volontaire, à défaut par elle de justifier qu’elle vient aux droits de GIFAVET et qu’elle est liée par un contrat de sous-licence à VIRBAC (le précédent contrat conclu avec GIFAVET l’ayant été « intuitu personae ») ; Mais considérant que les demandes formées par l’INRA ainsi que par ses licenciée et sous licenciée procèdent toutes du même titre, le brevet 83 00 390, sur lequel elles se fondent ensemble pour réclamer pareillement la condamnation pour contrefaçon de leurs adversaires ; qu’alors qu’elles tendent notamment en appel à la réformation du jugement ayant annulé le brevet invoqué, et que l’article L613-27 du Code de la propriété intellectuelle dispose que « la décision d’annulation d’un brevet d’invention a un effet absolu », ces demandes sont indivisibles ; que l’appel des sociétés VIRBAC et GIFAVET, bien que formé après le délai d’un mois, est donc recevable par application des dispositions de l’article 552 du nouveau code de procédure civile, l’appel principal de l’INRA ayant été interjeté dans les délais impartis ; Considérant qu’en outre, VIRBAC FRANCE justifie venir aux droits de GIFAVET par absorption fusion des 28 et 29 mai 1998, inscrite au registre national des brevets (RNB) le 22 janvier 1999 et par un avenant au contrat de sous licence en date du 1er septembre

1998 inscrit au RNB le 27 janvier 1999 ; que son intervention volontaire, formée le 10 décembre 1998 (avant inscription au RNB) et réitérée le 11 février 1999, après inscription, est donc recevable, les causes d’irrecevabilité soulevées par les intimées ayant disparu avant que la cour ne statue ; que les fins de non recevoir ainsi soulevées ne sauraient être retenues ; II – SUR LA DEMANDE EN NULLITÉ DES REVENDICATIONS 1, 2, 3 ET 12 Considérant que le brevet invoqué propose d’apporter une solution aux diarrhées des animaux nouveaux-nés qui ne peuvent plus digérer normalement le lait, et notamment les veaux, par une composition réhydratante à base de lactose (ou un produit à base de lactose), « convenablement complémenté », notamment avec des cations sodium associés à des anions organiques, composition qui permet un réhydratation active ; Considérant que les revendications opposées sont ci-dessous reproduites : 1 – Composition réhydratante utilisable notamment dans l’alimentation de jeunes animaux ne pouvant plus digérer normalement le lait, caractérisée par le fait qu’elle comprend :

-du lactose ou un produit à base de lactose et
-un complément comportant les anions chlorure, acétate et/ou propionate et les cations sodium, potassium et/ou magnésium. 2 – Composition selon la revendication 1, caractérisée par le fait que le complément comporte du chlorure de sodium, de l’acétate de sodium, du propionate de sodium, du chlorure de potassium et/ou du chlorure de magnésium. 3 – Composition selon l’une des revendications 1 et 2, caractérisée par le fait que le complément comporte : 30 à 100 mmoles/l de sodium 5 à 40 mmoles/l de potassium 20 à 60 mmoles/l de chlorure 0 à 50 mmoles/l d’acétate 0 à 50 mmoles/l de propionate 1 à 5 mmoles/l de magnésium. 12- Composition selon l’une des revendications 1 à 11, caractérisée par le fait qu’elle est utilisable par voie orale. 1 – Sur la nouveauté Considérant que le tribunal a prononcé la nullité des revendications invoquées, en retenant que l’ouvrage de l’INRA « Physiologie et pathologie périnatales chez les animaux de ferme », bien que publié en 1985, rapportait les communications faites en décembre 1982, soit antérieurement au dépôt du brevet et que, dans cette publication, l’article de Messieurs D, R et C portant sur "Le traitement des diarrhées néonatales : réhydratation et

antibiothérapie« comprenait un paragraphe sur »les réhydratants à base de lactosérum" qui divulguait les caractéristiques des revendications 1 et 2 et les privait de nouveauté ; Considérant que le tribunal a estimé que l’identité entre la publication réalisée en 1985 et les communications faites en décembre 1982 résultait du fait que :

- les journées des 15, 16 et 17 décembre 1982 avaient été organisées par l’INRA,
- l’INRA avait également assuré la publication de l’ouvrage de 1985 avec la mention « Exposés présentés aux XIVèmes journées du grenier de THEIX, 15, 16 et 17 décembre 1982 » et une préface indiquant : « le présent ouvrage rassemble les exposés qui y ont été présentés, après le délai- quelque peu excessif quand même- nécessaire à leur mise en forme pour publication »,
- la publication « dont le dépôt légal date de février 1985, avait été réalisée sous le timbre de l’INRA » ; Que le tribunal a retenu que l’INRA avait attribué à l’ouvrage la qualité de recueil des exposés et que « cette reconnaissance expresse qui conférait à cette publication le caractère d’une antériorité certaine opposable à l’INRA précisément, en tant que titulaire du brevet » ne pouvait être contestée, que ce soit en raison de la présence de quelques références bibliographiques postérieures qui n’avaient pas d’incidence sur le texte lui- même, ou du fait de l’absence, dans le dossier remis aux participants au colloque, de toute référence à des réhydratants à base de lactose, dans la mesure « où l’INRA n’avait pas accordé à ces feuillets valeur de compte rendu des exposés présentés puisqu’il ne les avait pas publiés comme tels » ; Considérant que les appelants font grief aux premiers juges d’avoir ainsi statué alors qu’un document ne constitue une antériorité comprise dans l’état de la technique que dans la mesure où sa date et son contenu sont certains, preuve qui peut se faire par tous moyens mais qui est à la charge de celui qui conteste la validité du brevet ; qu’ils soutiennent qu’en l’espèce, cette preuve n’est pas rapportée, exposant essentiellement que :

- dans la préface de l’ouvrage publié en 1985 il n’est pas affirmé qu’il s’agit de la reproduction fidèle des communications orales de 1982,
- la publication intègre de manière certaine des données scientifiques non divulguées en décembre 1982,
- il est courant de remanier ou de compléter, pour les actualiser, des articles issus de conférences, surtout quand un temps aussi long que celui écoulé en l’occurrence sépare la conférence de leur publication,
- l’ouvrage n’est pas, par ailleurs, un recueil de l’ensemble des communications, certaines des interventions ne se trouvant pas dans le recueil, d’autres études, au contraire, y apparaissant alors que leurs auteurs n’étaient pas intervenus au colloque ; Considérant, cela exposé, que, selon les dispositions de l’article L 611-11 du code de la propriété intellectuelle, l’état de la technique susceptible de détruire la nouveauté des revendications d’un brevet est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet par une description écrite ou orale, un

usage ou tout autre moyen ; qu’il est nécessaire que celui qui conteste la validité du brevet rapporte la preuve de la date de l’antériorité ainsi que de sa teneur ; Considérant qu’en l’espèce, contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, cette preuve n’est pas rapportée ; qu’en effet, si l’INRA a présenté l’ouvrage publié en 1985 comme contenant les exposés des XIVèmes journées du Grenier de Theix (15-16-17 décembre 1982), il a également indiqué à la fin de l’introduction que « cet ouvrage collectif présente les connaissances actuelles » ; qu’en outre, s’il est exact que le délai important écoulé entre la conférence et sa publication ne suffit pas à faire présumer une absence d’identité entre le texte et l’exposé effectué, il y a lieu de relever que le texte publié n’est pas une simple transcription des conférences ; que cela est démontré par :

- les noms des signataires des articles qui ne sont pas identiques à ceux des intervenants au colloque,
- les références à d’autres publications scientifiques publiées postérieurement à ce colloque, l’article litigieux publié dans l’ouvrage sous la signature de Messieurs R, D et C se référant, en particulier, à plusieurs articles de 1983 et de 1984,
- les textes des exposés des intervenants au colloque tels que remis aux participants, qui ne sont pas identiques à ceux publiés, particulièrement pour ce qui concerne celui de Messieurs R, D et C, qui ne comporte rien sur les réhydratants à base de lactosérum ; Considérant qu’en l’absence de tout autre document produit par les sociétés SOLVAY au soutien de leur thèse, il existe un doute sur l’identité entre le contenu de la publication de 1985 et celui de la communication de 1982 ; que ce doute doit bénéficier au breveté, puisque la charge de la preuve incombe à ceux qui invoquent la divulgation (alors que le brevet bénéficie d’une présomption de validité et qu’il ne saurait être demandé au breveté de rapporter la preuve négative d’une non-divulgation) ; que le jugement sera en conséquence réformé en ce qu’il a prononcé la nullité des revendications, en retenant, à tort, que l’ouvrage publié en 1985 était un document faisant partie de l’état de la technique opposable à l’invention objet du brevet déposé le 12 janvier 1983 ; 2 – Sur l’activité inventive Considérant qu’il est indiqué dans la description du brevet :

- que les jeunes animaux souffrant de troubles digestifs tels que des diarrhées, et en cours de déshydratation, sont affectés en raison de différents facteurs (exposés page 2 du brevet) d’une intolérance plus ou moins marquée au lait et présentent ainsi, outre un état de déshydratation, un état de déficit en minéraux, spécialement en Na+, K+ et Cl-, et un état de déficit énergétique,
- qu’on avait déjà proposé des formules par voie orale, ou rehydratants, pour corriger les troubles de la déshydratation et les pertes minérales en priorité, avec un apport énergétique se faisant généralement sous forme de glucose associé à des acides organiques et quelques acides aminés tels la glycine, cet apport d’énergie étant toutefois limité par des problèmes de pression osmotique en raison du respect de l’isotonicité,
- que l’utilisation du lactose avait rarement été préconisée pour l’alimentation d’animaux diarrhéiques, « en raison de l’opinion largement répandue selon laquelle la lactase située près de la surface des entérocytes, disparaissait au cours des diarrhées » (la lactase étant

l’enzyme destinée à la digestion du lactose et les entérocytes les cellules de la paroi intestinale),
- que le demandeur avait constaté que « contre toute attente le lactose pouvait être utilisé dans la préparation de compositions réhydratantes convenablement complémentées en vue de l’alimentation de jeunes animaux pouvant présenter des problèmes de digestion du lait »,
- que les compositions réhydratantes de l’invention comprennent du lactose ou un produit à base de lactose, un complément comportant les anions chlorure, acétate et/ou proprionate et les cations sodium, potassium et/ou magnésium,
- que l’utilisation du lactose, comme élément principal de compositions réhydratantes de l’invention, présente de nombreux avantages par rapport à celle du glucose : pression osmotique deux fois plus faible à poids égal, une hydrolyse sur un site très voisin du système de cotransport Na+ glucose ou Na- galactose, un apport en glucides plus équilibré (glucose + galactose), un retour facilité à l’alimentation lactée ; Considérant qu’il y a lieu de rappeler ce qui, de manière non contestée par les parties, était acquis sur les phénomènes diarrhéiques chez les mammifères nouveaux-nés, s’alimentant avec du lait (sans faire de distinction entre les espèces) : qu’il était ainsi connu que :

- la diarrhée est caractérisée par trois déséquilibres : la déshydratation, la perte en électrolytes et l’acidose métabolique,
- les compositions réhydratantes doivent permettre de supprimer ces déséquilibres en compensant les pertes et être également énergétiques,
- les effets de la diarrhée sont différents suivant qu’elle provient soit de bactéries (cas dans lequel n’existe qu’une hypersécrétion), soit de rotavirus (hypothèse où existent deux phénomènes, l’hypersécrétion et la malabsorption),
- le lait contient, outre des matières grasses, un glucide, le lactose, disaccharide constitué de deux molécules liées (glucose + galactose) qui est, au niveau de la muqueuse de l’intestin transformé par l’enzyme, la lactase, en deux molécules séparées, glucose et galactose, absorbées par le phénomène de la pression osmotique dans l’intestin,
- le glucose, monosaccharide ne subit pas, au contraire du lactose, de transformation à ce stade,
- le sodium est véhiculé au stade de l’absorption en « transport couplé » avec le glucose, ce qui entraîne l’absorption d’eau à travers la paroi intestinale,
- les solutions réhydratantes à base de glucose comportent des compléments variables, cations sodium et potassium, et anions chlorure pour corriger la perte en électrolytes, bicarbonate ou citrate, ou leurs précurseurs (lactates, acétates ou propionates) pour corriger l’acidose métabolique, compléments qui favorisent également l’absorption de l’eau ; Considérant, cela étant rappelé, que les sociétés SOLVAY pour contester l’activité inventive des revendications opposées soutiennent :

- que les éléments essentiels du complément que le brevet n 83 00390 prévoit d’associer au lactose étaient déjà connus de l’art antérieur, notamment par le produit ELECTYDRAL fabriqué sous licence d’un brevet antérieur de l’INRA n 79 29395,
- que le seul apport du brevet aurait été le remplacement du glucose par le lactose dans

une composition réhydratante déjà connue dans la même application et en vue du même résultat,
- que ce remplacement du glucose par le lactose aurait été rendu évident par un article de Mme F de 1981 qui aurait dissipé le préjugé contraire existant auparavant chez l’homme du métier et l’aurait même convaincu des avantages considérables résultant de l’administration de lactose,
- que « l’action surprenante positive de réhydratation par le lactose qui, convenablement complémenté, permettrait d’obtenir un effet réhydratant en accélérant la vitesse de digestion du lactose », invoquée tardivement devant la cour par les appelants, aurait été connue depuis longtemps par un article de Messieurs C et S de 1973 ; Considérant qu’au soutien de leurs prétentions, les sociétés SOLVAY se référent aux documents ci-après mentionnés, qui démontreraient respectivement qu’il n’y avait pas de préjugé à vaincre, que la composition brevetée n’aurait procuré aucun effet surprenant, enfin qu’elle associe le lactose à des compléments déjà connus ; Considérant qu’elles exposent, sur le premier point, que Madame F (et autres), dans un article d’août 1981, « Tolérance au lactose chez l’agneau atteint de diarrhée à rotavirus » a mis en évidence et indiqué :

- que le lactose n’avait pas un effet nocif à des doses « faibles » dans des diarrhées à rotavirus,
- que l’enzyme lactose était encore active malgré les détériorations des parois intestinales infectées par le virus,
- que « la présence ou l’absence d’un défaut d’absorption du lactose dans la diarrhée à rotavirus aiguë est d’une importance pratique considérable dans l’attitude clinique, non seulement en relation avec les recommandations portant sur l’inclusion ou l’absence d’inclusion de disaccharides dans les liquides destinés aux régimes de réhydratation orale mais également pour permettre le maintien de la nutrition par fourniture par voie orale d’aliments non susceptibles d’être mal absorbés »,
- que "bien qu’il faille être prudent quant à l’extrapolation des résultats d’expérience chez l’homme, nos découvertes suggèrent que, dans l’attitude à adopter face à une diarrhée à rotavirus aiguë, les liquides contenant du lactose comme le lait de femme ne sont pas nécessairement contre-indiqués comme agents pour le maintien de la nutrition et de l’hydratation ; Considérant que les intimées déduisent de cet article que le préjugé mis en avant par les appelants aurait été vaincu, relevant en outre qu’il était précisé dans l’article que l’usage du lactose était également préconisé dans les cas de réhydratation orale dans un but nutritif ce qui évitait les inconvénients du retour à une alimentation lactée ; Considérant qu’elles ajoutent que cet effet « non nocif » avait également été mis en valeur par les articles suivants :

- « Pathophysiologie et traitement de la diarrhée du veau », publié le 1er juin 1982, par M. B qui se réfèrait aux travaux de F, en soulignant que l’intolérance au lactose n’est apparue que lorsque de grosses quantités étaient administrées, ajoutant que sa suppression "n’est

pas indispensable bien qu’elle soit conseillée du fait que les infections mixtes produisent plus facilement une intolérance au lactose",
- « Intérêt de l’acétate dans les formulations orales de glucose-électrolytes destinées au traitement de la déshydratation chez le veau diarrhéique », (7-10 septembre 1982, mise à la disposition du public le 20 décembre 1982) de MM. D, R et C qui affirmaient : « à l’heure actuelle, les formulations orales reposent essentiellement sur une association glucose-sel de sodium. Outre le glucose, l’utilisation du lactose semble sous estimée : dans la mesure où ce glucide est bien digéré, il peut assurer un apport relativement élevé en énergie pour une asmolarité similaire à celle du glucose »,
- « Utilisation d’acides gras volatils et amélioration du traitement liquidien pour le traitement de la déshydratation chez les veaux diarrhéiques » (communication lors d’un colloque à THEIX du 1er au 3 décembre 1982, publiée au début de l’année 1983 dans les « Annales de recherches vétérinaires ») de MM. D, R, C et K qui traitait essentiellement des acides gras mais indiquait que « le lactose pourrait présenter un apport énergétique intéressant (osmolarité inférieure à 50% à celle du glucose), mais n’a pas été pris en considération probablement en raison de l’opinion populaire selon laquelle la lactase intestinale est drastiquement réduite dans la diarrhée aiguë. Mais il faut revoir cette affirmation, car de récentes études ont établi que l’activité lactasique était toujours efficace dans l’infection virale, à tout le moins pour l’hydrolyse de quantités physiologiques de lactose alimentaire. Outre le glucose, la disponibilité du galactose est susceptible de permettre un apport énergétique plus équilibré et adapté, notamment pour le métabolisme hépatique »,
- « Pour traiter des diarrhées du veau nouveau-né, l’ingestion précoce d’un réhydratant efficace » publié avant mars 1981 dans « L’élevage bovin » par MM. D, R et G qui indiquaient déjà que « le glucose est contenu dans la plupart des réhydratants disponibles dans le commerce. Sa présence est nécessaire bien qu’il ne soit pas entièrement prouvé que le lactose n’ait pas un effet aussi efficace » ; Considérant que, sur le second point, les intimées contestent les affirmations des appelants qui ont fait valoir dans leurs conclusions des 10 décembre 1988 et 20 janvier 1999 que « le brevet marque une rupture avec l’art antérieur en ce qu’il enseigne que convenablement complémenté, notamment avec les cations sodium associés à des anions organiques appropriés, le lactose permet une réhydratation active : de manière surprenante l’étape d’hydrolyse n’est plus limitante », et que « les compositions revendiquées ont pour effet de décupler le processus d’hydrolyse et le transport de l’eau », en expliquant que ce phénomène surprenant résultant du complément adjoint au lactose ne pouvait pas être suggéré par les travaux de F et autres dès lors que ceux-ci ne se préoccupaient pas de la réhydratation active et rapide de l’animal et ne portaient que sur le lactose administré isolément, lequel ne peut en aucun cas être un réhydratant sans les compléments que le brevet enseigne de lui associer ; Que les intimées exposent que le complément n’intervient nullement au niveau de l’hydrolyse du lactose, seul la lactase permettant son hydrolyse, c’est à dire sa transformation en glucose et galactose, et que le brevet le précise d’ailleurs en énonçant page 4 lignes 15-17 « il faut également noter que la fraction glucidique (lactose) est hydrolysée au contact immédiat des cellules intestinales par la lactase » ;

Que les appelants ayant critiqué cette argumentation et produit notamment un article de M. G de 1970 qui confirme selon elles que l’hydrolyse du lactose est plus lente qu’un mélange de glucose et de galactose, les intimées soutiennent que ce document n’est pas pertinent, s’agissant d’une étude portant sur l’homme et non pas sur les ruminants, et, qu’au contraire, un article de C et S de 1973 intitulé « Absorption du glucose et du galactose et digestion et absorption du lactose par les veaux pré-ruminants » mentionnait que « l’hydrolyse du lactose en glucose et galactose se produit rapidement », et précisait que « ce mécanisme diffère de celui étudié chez les autres mammifères » notamment « chez l’homme » pour lequel « G et SANTIAGO (1966) ont trouvé que les vitesses d’absorption du glucose et du galactose à partir du lactose étaient considérablement plus lentes que celles à partir des mélanges glucose-galactose équivalents… et ont conclu que l’étape d’hydrolyse était limitante dans l’élimination du lactose à partir de l’intestin » ; Considérant qu’en troisième lieu, enfin, les intimées exposent que la prétendue invention de MM. D et R n’aurait en définitive consisté qu’à substituer dans des compositions réhydratantes avec des compléments ayant des compositions parfaitement connues en elles-mêmes, du lactose ou un produit à base de lactose à du glucose ; qu’elles font valoir :

- qu’un article du 26 février 1982 de Messieurs R, D, intitulé « Les gastro-entérites diarrhéiques des veaux : intérêt de l’utilisation de réhydratants par voie orale dans le traitement des diarrhées néo-natales », insistait sur « l’importance, pour favoriser l’absorption du sodium, des formes anioniques des acides gras volatils (acétate surtout, propionate), corps qui permettent également la stimulation de l’absorption à tous les niveaux du tube digestif et qui est métabolisable avec production d’énergie et fournit indirectement du bicarbonate » ;

- que les compositions orales réhydratantes disponibles sur le marché avant le 12 janvier 1983 (répertoriées dans le Dictionnaire des Médicaments vétérinaires de 1981 ou le Repertorium DIERGENEESMIDDELEN de 1982/1983) contenaient déjà les composants du complément indiqués dans les revendications 1, 2 et 3 du brevet invoqué,
- que le produit ELECTYDRAL qui correspond au brevet n 79 26395 (n 2467 599) de l’INRA prévoyait en complément du glucose des adjuvants de composition qualitative et quantitative analogue à celle préconisée par le brevet invoqué,
- que l’INRA, lors de la procédure de délivrance du brevet européen EP 116 484 demandé sous priorité du brevet français invoqué avait indiqué : a – « l’aspect essentiel de l’invention consiste à utiliser du lactose ou du lactosérum, c’est à dire des dérivés du lait, chez les animaux qui ne peuvent plus digérer le lait normalement. »

b – il est parfaitement exact que le brevet 2 467 599 (brevet de 1979 dont est issu le produit Electydral) décrit des compositions réhydratantes du même type que celles qui sont revendiquées mais qui sont à base de glucose et non pas à base de lactose ou de produits à base de lactose",


- que dans le brevet européen finalement délivré à l’INRA, la partie caractérisante de la revendication 1 est une combinaison des revendications 1, 3, 4, 5, 8, et 9 du brevet français ; Considérant que les appelants soutiennent au contraire que les antériorités ci-dessus mentionnées, même combinées, ne conduisaient nullement l’homme du métier à réaliser les compositions réhydratantes actives à base de lactose qui font l’objet du brevet ; Considérant en effet que l’article de F, qui est la principale antériorité opposée, porte sur l’étude de la « tolérance au lactose chez l’agneau souffrant de diarrhées par rotavirus », cette étude ayant été menée dans le but de transposer les résultats sur le nouveau-né humain afin de savoir s’il pouvait continuer d’être nourri au sein maternel ; que s’il enseigne que le lactose n’a pas l’effet nocif qu’on lui imputait lorsqu’il est ingéré à faibles doses, il ne suggérait pas le rôle fondamental que pourrait jouer le lactose dans la réhydratation active associé à des compléments appropriés ; qu’il révèle seulement en effet que le lactose, contrairement à ce que l’on pensait, n’avait pas d’effets néfastes au cours de diarrhées et qu’en conséquence, il pouvait être adjoint aux compositions administrées, en raison de son apport nutritif ; qu’il ne peut pas être déduit de l’expression utilisée par l’article sus-visé, « les liquides contenant du lactose (tel que le lait maternel) ne sont pas nécessairement contre-indiqués en tant qu’agent destiné à entretenir la nutrition et l’hydratation », qu’il aurait suggéré que le lactose aurait eu un rôle actif dans l’apport en eau, le terme « entretien » ne pouvant être assimilé à une réhydratation active ; que les auteurs de l’article ne se souciaient d’ailleurs aucunement de remédier à la déshydratation (traitée par les solutions connues), mais se préoccupaient de l’utilisation du lait à des fins nutritives même en cas de diarrhée ; Considérant qu’il est encore énoncé dans l’article de F, comme le soulignent exactement les appelants, qu’il existe une activité lactasique anormalement faible dans l’intestin et un « plafonnement de la capacité de l’hydrolyse du lactose » ; qu’ainsi, si ledit article révélait que le lactose, en cas de diarrhée chez les nouveaux-nés n’aggravait pas la diarrhée, il n’apportait aucun enseignement s’agissant de l’utilisation du lactose dans la réhydratation, utilisation qui supposait une intensification de la vitesse de l’hydrolyse ; Considérant que les autres articles cités ne donnaient pas davantage d’enseignement à cet égard ; que tous (même ceux publiés à des dates très proches de celle du dépôt du brevet) ne faisaient que mentionner, avec des réserves, que le lactose n’aurait pas été néfaste dans les cas diarrhéiques ; Qu’ainsi M. B (présenté par les appelantes, qui ne sont pas contredites à cet égard, comme un des spécialistes les plus éminents dans ce domaine à l’époque), tout en faisant mention des résultats de F, proches de celle du dépôt du brevet) ne faisaient que mentionner, avec des réserves, que le lactose n’aurait pas été néfaste dans les cas diarrhéiques ; Qu’ainsi M. B (présenté par les appelantes, qui ne sont pas contredites à cet égard, comme un des spécialistes les plus éminents dans ce domaine à l’époque), tout en faisant

mention des résultats de F, déconseillait en juin 1982, la prise de lactose en période de diarrhée et indiquait que « la réhydratation reste basée sur la prise combinée de glucose ou de glycine avec du sodium et de l’eau pour entraîner un effet réhydratant net » ; Que plus généralement dans tous ces articles, le lactose était envisagé comme complément alimentaire pour sa valeur énergétique, y compris dans l’article de septembre 1982 sur « l’intérêt de l’acétate dans les formulations orales de glucose-électrolytes… »où il était suggéré que le lactose pourrait être inséré dans une composition « en plus » du glucose pour sa valeur nutritive, mais avec des réserves (« dans la mesure où il serait bien digéré ») ; Que l’article de M. D et autres de décembre 1982 précédemment cité énonçait encore que le lactose pourrait représenter un apport énergétique intéressant (osmolarité inférieure de 50% à celle du glucose) mais indiquait qu’il n’avait pas « été pris en considération probablement en raison de l’opinion populaire selon laquelle la lactose intestinale était drastiquement réduite dans la diarrhée aiguë » (tout en soulignant que cette théorie devait être revue) ; Considérant, sur la question de l’hydrolyse du lactose, que les intimées interprètent inexactement les énonciations du brevet en ce qu’elles prétendent que celui-ci aurait indiqué lui-même que « lors de la digestion du lactose le glucose est libéré immédiatement » puisqu’il y est écrit : « il faut également noter que la fraction glucidique (lactose) est hydrolysée au contact immédiat des cellules intestinales par la lactase » ; que cette phrase se rapporte en réalité au siège du phénomène d’hydrolyse (au contact immédiat des entérocytes) et non pas à la vitesse de ce processus ; Considérant par ailleurs que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés SOLVAY, le document C et S de 1973 n’est pas pertinent pour démontrer que l’hydrolyse du lactose ne présentait aucun effet « limitant » ; que ce document, en effet, décrit le processus d’hydrolyse dans le cas général d’animaux sains et non pas dans la situation particulière des animaux atteints de diarrhée ; que les documents plus récents, dont ceux cités par les intimées, insistaient sur le caractère lent de l’hydrolyse du lactose ; qu’il en était ainsi de l’article de F, ainsi que de celui de R datant de février 1982 ; que ce dernier document, qui s’applique aux veaux, soulignait à propos du lactose, « le risque d’hydrolyse défectueuse et la diminution de la vitesse d’absorption » ; que ce phénomène d’hydrolyse lente, conduisait à donner, comme le relèvement exactement les appelants, la préférence au glucose (monosaccharide), qui à la différence du lactose (disaccharide), est assimilé sans avoir à subir de transformation, et qui était immédiatement utilisable en « transport couplé » avec le sodium ; Considérant enfin que s’il est certain que les compléments prévus à la revendication 1du brevet avaient déjà été utilisés avec du glucose et s’il est encore exact qu’une précédente solution orale préconisait également des anions acétate et propionate, il n’en demeure pas moins que les enseignements de l’art antérieur n’incitaient pas l’homme du métier à associer ces composants au lactose pour produire une réhydratation active ; qu’il convient au surplus de souligner que les compléments de l’art antérieur avaient des compositions

variées (les intimées versent aux débats des tableaux montrant l’existence à l’époque sur le marché de 20 compositions orales rehydratantes différentes) et que l’INRA a fait le choix de compléments particuliers afin de provoquer l’action de réhydratation active en association avec le lactose ; Considérant qu’il ne saurait être tiré argument des brevets américain et européen qui intègrent tous deux dans la revendication 1, notamment les compléments précis et les pourcentages de chacun des composants de la composition du brevet litigieux, pour en déduire que la revendication 1 du brevet français serait dénuée d’activité inventive ; qu’outre le fait que chaque brevet constitue un titre indépendant, la validité du brevet invoqué dans la présente espèce ne peut être appréciée qu’au regard des documents versés aux débats, parmi lesquels ne figure pas la principale antériorité, une demande EP A 90356 publiée le 5 octobre 1983, qui, au vu des pièces communiquées de la procédure d’examen devant l’OEB, avait été opposée à la demande de l’INRA, sur le plan de la nouveauté, par l’examinateur de l’Office Européen ; Considérant qu’il se déduit de ces éléments que s’il était connu que les diarrhées n’étaient pas aggravées lorsque le lactose était pris dans des doses normales, le maintien d’une alimentation lactée réduite que permettait d’envisager cette information, ne se confond pas avec le moyen réhydratant objet de l’invention ; qu’il n’était pas évident pour l’homme du métier, même en combinant les antériorités ci-dessus mentionnées, d’associer le lactose à un complément comportant des anions chlorure, acétate et/ou propianate et des cations sodium, potassium et/ou magnésium afin d’obtenir une réhydratation active de jeunes animaux alors :

- que la composition destinée à une réhydratation active par le lactose vise à obtenir une absorption complémentaire d’eau compensant l’hypersécrétion,
- qu’il faut donc stimuler l’absorption nette d’eau et de minéraux par les parois intestinales de manière à ce que l’eau sécrétée soit réintégrée dans les cellules,
- que les compositions réhydratantes de l’art antérieur préconisaient le glucose et non pas le lactose, parce que le processus physiologique de la digestion du lait est relativement lent et que dans le cas de diarrhées, du fait de l’altération des muqueuses, la durée des processus d’hydrolyse ultérieure aboutit à limiter les quantités de liquides ingérés et la vitesse de la réhydratation,
- que l’accumulation du lactose apparaissait comme de nature à augmenter la pression osmotique du contenu intestinal, donc à créer un appel d’eau de l’organisme vers la lumière intestinale, et à amplifier la déshydratation,
- qu’au contraire le brevet révèle que l’enrichissement d’une composition à base de lactose par des cations sodium et des anions organiques appropriés permet d’obtenir une rehydratation active et rapide de l’animal ; Considérant qu’il sera surabondamment relevé que les intimées ont eux-mêmes invoqué pour la promotion publicitaire de leur produit (en utilisant d’ailleurs un croquis reproduisant celui qui figure page 409 dans l’article de MM. R, D et C) les effets mis en valeur par l’invention, dans les termes suivants : "sa composition inédite et exclusive, à base de lactose, est idéalement équilibrée en minéraux et agents alcalinisants… le lactose à osmolarité égale apporte deux fois plus d’énergie que le glucose et cette énergie est

indispensable à l’absorption de l’eau dans l’intestin… un progrès essentiel de la recherche Solvay Santé Animale" ; Que la demande de nullité de la revendication 1 pour défaut d’activité inventive sera donc rejetée ; Considérant que les revendications 2, 3 portent sur la nature des compléments et leur masse moléculaire ; que la revendication 12 indique qu’il s’agit d’une solution par voie orale ; que ces revendications sont toutes dépendantes de la revendication 1, dont elles précisent la composition ; que dès lors qu’elles entrent en combinaison avec la revendication 1 dont l’activité inventive a été reconnue, elles sont elles-mêmes valables, quand bien même, ce qui d’ailleurs n’est pas soutenu, elles seraient en elles-mêmes dépourvues de nouveauté ou d’activité inventive dans leurs caractéristiques propres ; III – SUR LA CONTREFAÇON Considérant que le produit EFFERHYDRAN livré en FRANCE par SOLVAY (Hollande) qui le fabrique, et commercialisé sur ce territoire par SOLVAY est un réhydratant oral se présentant sous forme de comprimé effervescent ; que la composition indiquée de ce comprimé est la suivante : chlorure de sodium, 2, 34 g, chlorure de potassium, 1, 12 g, carbonate de sodium, 6, 72 g, acide citrique anhydre 3, 84 g, lactose 32, 44 g, glycine 2, 25 g, Qu’il est encore précisé que la composition d’un litre de solution reconstituée comprend : sodium 120mmol/l potassium 15 mmol/l chlorure 55mmol/l bicarbonate + citrate 80mmol/l lactose 90mmol/l glycine 30mmol/l Considérant qu’il est constant que cette composition est destinée à réhydrater les animaux nouveaux-nés atteints de diarrhée et ne diffère dans ses composants des revendications opposées du brevet INRA que par l’absence de magnésium et l’absence des anions acétate et/ou propianate ; Considérant que selon les sociétés SOLVAY, le produit qu’elles commercialisent ne serait pas la contrefaçon de la revendication 1 du brevet opposé dans la mesure où ses constituants diffèrent de ceux de l’invention ; qu’elles insistent sur le fait que les compléments de l’invention étaient déjà connus (par le produit Electydral) et qu’il n’y aurait aucun effet nouveau à les associer au lactose ; que dès lors, le complément utilisé

par elles, comportant les anions chlorure et citrate, ne saurait être constitutif de contrefaçon, puisque la fonction de ce complément était déjà connue ; Mais considérant que, comme il a été ci-dessus exposé, l’invention consiste dans une composition comprenant du lactose et un complément particulier, moyens qui coopèrent pour procurer un résultat d’ensemble autre que l’addition des résultats qu’ils procureraient chacun isolément ; que l’argumentation tenant à la fonction connue du complément pris isolément est donc dénuée de pertinence, les appelants observant pertinemment qu’elle reviendrait à empêcher pratiquement la protection des inventions dites de combinaison qui réunissent le plus souvent des moyens dont certains au moins sont connus isolément ; Que les appelants rappellent en page 5 du brevet que les « anions organiques tels le propianate et l’acétate » sont intéressants…" notamment (lignes 21 à 29) en ce que la métabolisation est rapide et permet de lutter contre l’acidose métabolique, par transformation en CO2, ce qui provoque à partir de l’acétate de sodium, du bicarbonate de sodium ; qu’ils exposent que les anions chlorure et citrate se métabolisent de la même manière en se transformant en bicarbonate de sodium ; Que cette analyse n’est pas contestée par les sociétés SOLVAY, qui, comme il a été ci- dessus exposé affirment essentiellement que ce complément était connu et que le chlorure aurait des effets autres ; Considérant toutefois que les anions chlorure et citrate qui se métabolisent de manière identique aux anions de l’invention assurent ainsi la même fonction en combinaison avec le lactose pour aboutir à des résultats semblables (une réhydratation active) ; qu’il n’est, par ailleurs, pas discuté que l’absence de magnésium n’altère en rien le résultat d’ensemble de l’invention, le magnésium n’étant au surplus prévu que de manière facultative dans la revendication 1 ; que dès lors que les anions composant le produit des sociétés SOLVAY sont équivalents à ceux protégés par le brevet et que les autres composants sont la reproduction de ceux de la revendication 1 du brevet, le produit des sociétés SOLVAY constitue la contrefaçon de cette revendication ; que la demande en contrefaçon des revendications 2 et 3 est également fondée, les sociétés SOLVAY n’élevant aucune discussion quant aux proportions de chacun des composants ; que la revendication 12 est également reproduite, alors qu’il n’est pas contesté que le produit sous forme de pastille effervescente se dissout dans l’eau et est absorbé par voie orale ; Considérant que la cour n’a pas tous les éléments de nature à lui permettre à déterminer le préjudice subi par les appelants du fait des actes de contrefaçon ; qu’il convient en conséquence de recouvrir à une mesure d’instruction dans les termes du dispositif ci-après et d’allouer dès à présent la somme de 100 000 francs à chacune des sociétés appelantes, puisque selon les indications données à l’huissier, SOLVAY SANTE ANIMALE avait réalisé un chiffre d’affaires mensuel moyen de 182 000 francs environ entre le mois de septembre 1993 et le mois d’avril 1994, et que le produit contrefaisant a continué à être commercialisé en cours de procédure ;

Considérant qu’il est nécessaire, compte tenu de la nature de l’affaire, de faire droit aux mesures d’interdiction et de publication sollicitées, dans les termes du dispositif ci-après ; Considérant que l’équité commande d’allouer aux appelants la somme de 50 000 francs au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS : Rejette les exceptions d’irrecevabilité formées par les sociétés FORT DODGE SANTE ANIMALE et SOLVAY PHARMACEUTICALS BV ; Reçoit la société VIRBAC FRANCE en son intervention volontaire ; Réforme le jugement déféré ; Statuant à nouveau et ajoutant ; Rejette les demandes en nullité des revendications 1, 2, 3, et 12 du brevet français n 83 00390 ; Dit que les sociétés FORT DODGE SANTE ANIMALE et SOLVAY PHARMACEUTICALS BV ont commis des actes de contrefaçon des revendications 1, 2, 3 et 12 du brevet susvisé, Fait défense à ces sociétés, sous astreinte de 100 francs par infraction constatée, de poursuivre la vente du produit EFFERHYDRAN ou tout autre produit destiné à une consommation par voie orale contenant la composition litigieuse, ce passé le délai d’un mois de la signification du présent arrêt ; Autorise l’INRA et les sociétés LABORATOIRES VIRBAC et VIRBAC FRANCE à faire publier un extrait du présent arrêt dans deux journaux ou revues de leur choix aux frais in solidum de leurs adversaires et dans la limite d’un coût global de 40.000 F ; Avant dire droit sur la réparation du préjudice, Commet en qualité d’expert Monsieur Philippe G, […] tél 01.43.27.05.20 fax 01.42.79.89.13 avec mission :

- d’entendre contradictoirement les parties et de consigner leurs explications,
- de se faire remettre ou présenter tous documents utiles détenus par elles ou par des tiers,
- de donner son avis sur le préjudice qui est résulté pour les sociétés appelantes de la contrefaçon des revendications 1, 2, 3 et 12 du brevet susvisés,
- de répondre dans la limite de ces chefs de mission, aux dires des parties et de faire part de ses premières conclusions ;

Dit que l’expert sera mis en oeuvre et accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 273 à 284 du nouveau code de procédure civile, et qu’il devra déposer son rapport au greffe de la cour avant le 15 janvier 2000 ; Désigne Madame R en qualité de magistrat chargé de suivre les opérations d’expertise ; Dit que l’INRA, les sociétés VIRBAC FRANCE et LABORATOIRES VIRBAC devront consigner au greffe de la cour la somme de 30 000 francs à valoir sur les honoraires de l’expert avant le 15 juillet 1999 ; Dit que cette somme devra être versée au régisseur d’avances et de recettes de […] (75055) PARIS LOUVRE SP ; Condamne in solidum les sociétés FORT DODGE SANTE ANIMALE et SOLVAY PHARMACEUTICALS à payer à titre de provision à valoir sur les dommages intérêts, la somme de 100 000 francs à chacun des appelants, l’Institut National de la Recherche Agronomique, la société LABORATOIRES VIRBAC et la société VIRBAC FRANCE ; Condamne in solidum les sociétés intimées à payer aux appelants la somme globale de 50 000 francs au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ; Les condamne aux dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés pour les dépens d’appel par la SCP FISSELIER, CHILOUX, BOULAY, avoués, selon les dispositions de l’article 699 du nouveau code de procédure.

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Cour d'appel de Paris, 4e chambre, 28 mai 1999