Cour d'appel de Paris, 4e chambre, 15 décembre 2006, n° 2005/08405

  • Adéquation entre le modèle revendiqué et le modèle exploité·
  • Divulgation par le créateur ou son ayant cause·
  • Commercialisation sur le territoire français·
  • Atteinte à la valeur patrimoniale du modèle·
  • Empreinte de la personnalité de l'auteur·
  • Impression visuelle d'ensemble identique·
  • Assignation dans le délai de quinzaine·
  • Protection au titre du droit d'auteur·
  • Application de la loi dans le temps·
  • Titularité des droits sur le modèle

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

La saisie-contrefaçon est régulière dès lors que l’assignation a été délivrée dans le délai de quinzaine, l’article L. 521-1 du CPI exigeant, non de placer l’affaire au rôle du greffe dans ce délai, mais seulement de se "pourvoir". Le dépôt de modèle ayant eu lieu avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 25 juillet 2001, la recevabilité des demandes sera examinée au regard des dispositions du texte ancien. Par application de ce texte, la présomption de titularité des droits qui résulterait du dépôt d’un dessin ou modèle ne pouvait être valablement combattue que par celui qui prétendait en être l’auteur. Le défendeur n’est pas fondé à prétendre que le modèle ne saurait faire l’objet d’une protection au titre du Livre V du CPI en raison d’une divulgation antérieure au dépôt. Outre le fait que le modèle antérieur invoqué se distingue du modèle déposé, le texte ancien n’interdisait pas à celui qui avait divulgué une création de le déposer à titre de modèle. Sur les droits d’auteur, le cumul des droits peut être invoqué par application de la convention de Berne en raison de la règle de la réciprocité existant entre la France et l’Allemagne. En l’espèce, il n’est pas démontré que le modèle n’aurait pas une valeur esthétique suffisante pour être protégé sur le double fondement du droit d’auteur et des dessins et modèles. Bien qu’ayant un aspect utilitaire lié à la fonction d’un robinet, il comporte néanmoins un aspect ornemental suffisamment élevé pour admettre sa protection également sur le fondement du droit d’auteur. Sur la contrefaçon, selon l’article L. 513-5 du CPI, la protection conférée par l’enregistrement d’un dessin ou modèle s’étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l’observateur averti une impression visuelle d’ensemble différente.

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 4e ch., 15 déc. 2006, n° 05/08405
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 2005/08405
Publication : PIBD 2007, 847, IIID-183
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 9 mars 2005, N° 02/018955
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de commerce de Paris, 10 mars 2005
  • 2002/18955
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : DM/053183
Classification internationale des dessins et modèles : CL23-01 ; CL23-02
Référence INPI : D20060179
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE PARIS 4e Chambre – Section B ARRÊT DU 15 DÉCEMBRE 2006 Numéro d’inscription au répertoire général : 05/08405 Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Mars 2005 -Tribunal de Commerce de PARIS-RGn° 02/018955 APPELANTES SA HANSGROHE AG société de droit allemand, agissant poursuites et diligences de son Président du Directoire ayant son siège Auestrasse 5/9, D77761 – Schilta ALLEMAGNE représentée par la SCP BAUFUME – GALLAND – VIGNES, avoués à la Cour, assistée de Maître A LESZCZYNSKI, avocat au Barreau de Paris, W03. S.A.R.L. HANSGROHE agissant poursuites et diligences de son Gérant ayant son siège […] représentée par la SCP BAUFUME – GALLAND – VIGNES, avoués à la Cour, assistée de Maître A LESZCZYNSKI, avocat au Barreau de Paris, W03. INTIMÉES Société COMERCIAL SALGAR société de droit espagnol ayant son siège Autovia Logrono Km 9,5 50080 ZARAGOZA ESPAGNE représentée par la SCP REGNIER – SEVESTRE-REGNIER – REGNIER-AUBERT LAMARCHE-BEQUET, avoués à la Cour, assistée de Maître Nicolas B, avocat au Barreau de Paris, E122.

Société GRISAMA SL, société de droit espagnol prise en la personne de ses représentants légaux. Ayant son siège Poligono Industrial La Victoria C/ Guamicioneros 2 23740 ANDUJAR (JAEN) ESPAGNE

défaillante COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire, après rapport oral prévu par l’article 31 du décret n°205 1678 du 28 décembre 2005, a été débattue le 9 novembre 2006, en audience publique, devant Madame REGNIEZ, les avocats ne s’y étant pas opposés. Ce magistrat, en application de l’article 786 du NCPC, a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de : Madame PEZARD, président, Madame REGNIEZ, conseiller, Monsieur MARCUS, conseiller, GREFFIER, lors des débats : L. MALTERRE-PAYARD ARRÊT:
- réputé contradictoire.

- prononcé publiquement par Madame PEZARD, président.

- signé par Madame PEZARD , président et par L.MALTERRE- PAYARD, greffier présent lors du prononcé. La cour est saisie :

- d’un appel interjeté par les sociétés HANSGROHE AG et HANSGROHE SARL à rencontre d’un jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 10 mars 2005 dans un litige les opposant à la société COMERCIAL SALGAR SA, la société GRISAMA et la société COFRES SARL,
- d’un appel interjeté par la société COMERCIAL SALGAR SA à l’encontre de ce jugement et d’un jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris du 29 novembre 2002. Il sera rappelé que :

- invoquant des droits sur un modèle de robinet mitigeur « AXOR S PURO » déposé à l’OMP Ile 18 septembre 2000 sous priorité d’un dépôt allemand du 20 mars 2000, visant la France, enregistré sous le n° DM/053 183 n°4.1 à 4.11, la société HANSGROHE AG a fait pratiquer saisie-contrefaçon le 7 février 2002 au salon IDEOB AIN à Paris sur un modèle « GLASS », puis a fait assigner, les sociétés COMERCIAL S ALGAR et COFRES, devant le tribunal de commerce, par actes des 19 et 20 février 2002 et 14 mars 2002, en contrefaçon du modèle sur le fondement des articles L.521-4, L.122-4 et L.335-2 et suivants et en concurrence déloyale,
- la société HANSGROHE SARL, société qui commercialise en France les produits de la société HANSGROHE AG est intervenue en cours d’instance, sollicitant réparation de son préjudice résultant des actes de concurrence déloyale commis en France, la société HANSGROHE AG limitant, du fait de cette intervention, ses demandes, à la contrefaçon,

— la société COMERCIAL S ALGAR et la société COFRES avaient en premier lieu conclu à la nullité de l’assignation des 19 et 20 février 2002 et à la nullité de la saisie-contrefaçon. Par jugement contradictoire du 29 novembre 2002, le tribunal de commerce de Paris a débouté les sociétés COMERCIAL S ALGAR et COFRES de leurs demandes en nullité de saisie-contrefaçon et d’assignation et a renvoyé l’affaire pour dépôt de conclusions au fond. Après échange d’écritures, le tribunal de commerce de Paris a, par jugement du 10 mars 2005:

- donné acte aux parties de leurs désistements d’instance et d’action à rencontre de la SARL COFRES,
- dit irrecevable la société HANSGROHE AG,
- dit recevable mais mal fondée la SARL HANSGROHE,

— condamné solidairement la société HANSGROHE AG et la SARL HANSGROHE à payer à la société COMERCIAL S ALGAR SA la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- condamné la société COMERCIAL SALGAR SA à payer à la société GRISAMA la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- débouté les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires,
- dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné solidairement les sociétés HANSGROHE à payer les entiers dépens. Par leurs écritures du 12 octobre 2006, les sociétés HANSGROHE demandent à la cour de:

- confirmer le jugement rendu le 29 novembre 2002,
- infirmer le jugement du 10 mars 2005 en ce qu’il les a déboutées de leurs demandes et condamnées au paiement à la société COMERCIAL SALGAR de la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, statuant à nouveau,
- dire la société HANSGROHE AG recevable et bien fondée en son action en contrefaçon,
- dire la société HANSGROHE SARL recevable et bien fondée en son action en concurrence déloyale et parasitaire,
- dire qu’en important en France, offrant en vente et vendant un modèle de robinet référencé « GLASS » reproduisant les caractéristiques du modèle de robinet déposé le 18 septembre 2000 et enregistré sous le n° DM/053 1 83 (n° 4.1 à 4.11 ) appartenant à la société HANSGROHE AG, la société COMERCIAL SALGAR SA a commis des actes de contrefaçon de modèle au sens des dispositions des articles L. 521-4, L.513-4, L.122-4 et L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle,
- dire que la société COMERCIAL SALGAR a commis à l’égard de la société HANSGROHE SARL qui commercialise en France ledit modèle invoqué, des actes de concurrence déloyale et parasitaire qui doivent être sanctionnés sur le fondement des articles 1382 et suivants du Code civil,
- interdire à la société COMERCIAL SALGAR d’importer en France, d’y offrir en vente et/ou vendre le modèle de robinet contrefaisant, sous astreinte de 800 euros par infraction commise, c’est à dire par article vendu, à compter du prononcé de l’arrêt à intervenir,

— condamner la société COMERCIAL SALGAR à payer à la société HANSGROHE AG la somme de 75000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte portée à ses droits sur son modèle de robinet,
- la condamner à payer à la société HANSGROHE SARL la somme de 75000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice commercial subi du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire commis à son encontre,
- ordonner la publication de l’arrêt dans quatre journaux ou revues, français ou étrangers, au choix des sociétés HANSGROHE et aux frais de la société SALGAR à concurrence de 5000 euros hors taxes par insertion et ce, au besoin, à titre de dommages et intérêts complémentaires,
- condamner la société SALGAR à payer à chacune des sociétés HANSGROHE la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel, ces derniers pouvant être recouvrés par la SCP BAUFUME GALLAND VIGNES, avoué, dans les conditions de l’article 699 du nouveau Code de procédure civile. Par ses écritures du 30 octobre 2006, la société COMERCIAL SALGAR invite la cour à :

- infirmer le jugement avant dire droit du 29 novembre 2002,
- statuant à nouveau :

- dire l’assignation nulle et de nul effet, ~ dire la saisie-contrefaçon pratiquée le 7 février 2002 nulle et de nul effet,
- confirmer le jugement du 10 mars 2005 sauf en ce qu’il a :

- déclaré la société HANSGROHE SARL recevable,
- condamné la société COMERCIAL SALGAR à payer à la société GRISAMA la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- statuant à nouveau, ~ déclarer la société HANSGROHE SARL irrecevable en ses demandes, ~ condamner solidairement les sociétés HANSGROHE à lui verser la somme de 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles engagés par la société COMERCIAL SALGAR en cause d’appel et aux entiers dépens de première instance et d’appel dont le recouvrement pourra être poursuivi directement par la SCP REGNIER BEQUET, avoué, conformément aux dispositions de l’article 699 du nouveau Code de procédure civile. La société GRISAMA régulièrement assignée par la société COMERCIAL SALGAR n’a pas constitué avoué. SUR CE, LA COUR : Sur les exceptions de nullité Considérant que la société COMERCIAL SALGAR reprenant les exceptions de nullité soutenues en première instance, expose que l’assignation en date du 20 février 2002, à défaut de mention d’une élection de domicile en France, doit être annulée et qu’en conséquence, la société HANSGROHE AG ne s’est pas pourvue

dans le délai de quinzaine de la saisie-contrefaçon, la seule assignation valable en date du 14 mars 2002 n’ayant été placée au rôle que le 19 mars 2002 ; Qu’elle ajoute que l’absence d’indication d’une élection de domicile était bien cause d’un grief dans la mesure où elle aurait été contrainte de signifier des actes à l’étranger et que l’assignation du 20 février 2002 n’a jamais été enrôlée ; Considérant que ce dernier argument tenant à l’absence de placement de l’assignation du 20 février 2002 est dénué de pertinence dès lors qu’il résulte des documents mis aux débats que cette assignation a été placée en même temps que l’assignation du 14 mars 2002 ; qu’en outre, il n’est pas davantage expliqué en quoi la signification des actes à l’étranger aurait été à l’origine d’un grief ;

Considérant qu’aucun argument nouveau autre que ceux ci-dessus exposés n’étant invoqué, la cour, faisant siens les motifs des premiers juges, retient :

- que l’irrégularité contenue dans l’assignation du 20 février 2002, tenant au défaut de mention d’une élection de domicile ne faisait pas grief, et avait, au surplus, été rectifiée par l’assignation délivrée « sur et aux fins » le 14 mars 2002, contenant élection de domicile,
- qu’en conséquence, il n’y a pas lieu d’ordonner la nullité de l’assignation du 20 février 2002
- que la saisie-contrefaçon pratiquée le 7 février 2002 était régulière, l’assignation du 20 février 2002 ayant été délivrée dans le délai de quinzaine du procès-verbal de saisie- contrefaçon, l’article L 521-1 du Code de la propriété intellectuelle exigeant non pas de placer l’affaire au rôle du greffe dans ce délai, mais seulement de se « pourvoir » dans ce délai ; Que le jugement du 29 novembre 2002 sera en conséquence confirmé ;

Sur la recevabilité des demandes de la société HANSGROHE AG Considérant que, selon les sociétés HANSGROHE, les premiers juges ont, à tort, estimé que la société HANSGROHE AG était irrecevable dans ses demandes à défaut de démontrer sa qualité à agir, ne prouvant pas, alors qu’il est mentionné sur le certificat de dépôt que le modèle a été créé par M. Philippe S, que ce dernier lui avait cédé ses droits ; qu’elles font, en effet, valoir que suivant les dispositions de l’article L. 511-9 du Code de la propriété intellectuelle, la société HANSGROHE AG qui a déposé à son nom un modèle est, sauf preuve contraire, regardé comme le bénéficiaire de cette protection et qu’elle est également en droit d’invoquer la protection des droits patrimoniaux d’auteur sur cette oeuvre, diffusée sous son nom, seul, l’auteur pouvant revendiquer des droits sur celle-ci et non pas un tiers poursuivi en contrefaçon ; qu’elle ajoute que le cumul de protection est parfaitement possible au regard de la Convention de Berne, qu’en l’occurrence, contrairement à ce qu’a dit le tribunal, même si le robinet en cause présente un caractère utilitaire, il est également une oeuvre d’art, par son aspect esthétique ; qu’elle ajoute que ne peut lui être valablement opposée l’existence d’une divulgation depuis 1994 d’un robinet mitigeur alors que ce robinet commercialisé sous le nom d’AXOR S PLUME, n’a pas une forme identique à celui qu’elle invoque dans la présente procédure et qu’en outre, même s’il était dit qu’il était identique, la divulgation ne pourrait lui être

opposée par application de l’article L.511-6 dernier alinéa du Code de la propriété intellectuelle ; Considérant que la société COMERCIAL SALGAR soutient que, dès lors que la société HANSGROHE AG ne prouve pas sa qualité d’ayant cause de Monsieur S, elle n’est pas recevable à se prévaloir du modèle déposé, l’alinéa 1 de l’article L. 511-9 du Code de la propriété intellectuelle susvisé disposant que « la protection du dessin ou modèle conféré par les dispositions du présent livre s’acquiert par l’enregistrement. Elle est accordée au créateur ou à son ayant cause » ; qu’elle n’est pas davantage fondée à se prévaloir des dispositions du Livre I du Code de la propriété intellectuelle, faisant observer que le robinet mitigeur est commercialisé sous le nom de S et non pas de la société HANSGROHE AG, les catalogues et tarifs mis aux débats contenant seulement comme référence « AXOR S PURO » ou simplement « AXOR S » et ne comportent aucune dénomination « HANSGROHE » ; Qu’elle ajoute qu’en l’espèce, la société HANSGROHE AG ne peut se prévaloir du cumul de protection des Livres I, III et V du Code de la propriété intellectuelle, au regard du droit allemand, droit du pays d’origine, qui permet ce cumul à la condition que le « contenu esthétique de l’oeuvre atteigne un degré tel que d’après les idées généralement répandues dans la vie, dans les milieux sensibles et familiarisés avec l’art, on puisse parler d’une oeuvre d’art et non d’une simple prestation artistique, telle que le prévoit la protection sur la loi sur les dessins et modèles artistiques » ; Considérant, cela exposé, que le dépôt dont se prévaut la société HANSGROHE AG ayant eu lieu en mars 2000, soit avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 25 juillet 2001, la recevabilité des demandes sera examinée au regard des dispositions du texte ancien ; Que par application de ce texte, la présomption de titularité de droits qui résultait du dépôt d’un dessin ou modèle ne pouvait être valablement combattue que par celui qui prétendait en être l’auteur ; Considérant qu’en l’espèce, il est seulement soutenu par la société COMERCIAL SALGAR que selon le dépôt, l’objet a été créé par Monsieur S et que, dès lors que la société HANSGROHE AG ne justifie pas être cessionnaire des droits d’auteur, elle ne démontre pas avoir qualité pour agir en contrefaçon ; Mais considérant que dans la mesure où il n’ est formé aucune revendication sur ce modèle par Monsieur S, la société HANSGROHE AG est, du fait de son dépôt, présumée titulaire de droits sur ce modèle ; que la société COMERCIAL SALGAR qui ne prétend pas être titulaire de droits n’est ainsi pas fondée dans son argumentation ; que le jugement sera, sur ce point, réformé ; Considérant que la société COMERCIAL SALGAR n’ est pas davantage fondée lorsqu’ elle prétend que ce robinet, divulgué en 1999, ne saurait faire l’objet de protection et que la société HANSGROHE AG est, en conséquence, irrecevable ; Considérant qu’en effet, comme le fait exactement observer la société HANSGROHE AG, le robinet antérieur invoqué n’est pas identique à celui opposé dans la présente procédure, qu’il s’en distingue notamment par la présence d’une

manette en forme de plume (et non pas cylindrique), soit d’une manière qui ne peut être qualifiée d’insignifiante ; qu’au surplus, le dépôt ayant eu lieu avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 25 juillet 2001, le texte ancien n’interdisait pas à celui qui avait divulgué une création de le déposer à titre de modèle ; que la société HANSGROHE AG est ainsi recevable à agir sur le fondement du Livre V du Code de la propriété intellectuelle ; Considérant sur les droits d’auteur également opposés par la société HANSGROHE AG, qu’il n’est pas contesté que le cumul de droits puisse être invoqué par application de la Convention de Berne, en raison de la règle de la réciprocité existant entre la France et l’Allemagne; que, contrairement à ce qu’a retenu le tribunal et à ce que soutient la société COMERCIAL SALGAR, il n’est toutefois pas démontré que le modèle n’aurait pas une valeur esthétique suffisante pour être protégé sur le double fondement du droit d’auteur et des dessins et modèles ; que, bien qu’ayant un aspect utilitaire lié à la fonction d’un robinet, il comporte néanmoins un aspect ornemental suffisamment élevé pour admettre sa protection également sur le fondement du droit d’auteur : que la société HANSGROHE AG est, ainsi, en droit de se prévaloir, non seulement de droits sur le modèle déposé, mais également de droits patrimoniaux d’auteur, étant acquis que Monsieur Philippe S l’a créé pour la société HANSGROHE AG ; Considérant que la société COMERCIAL SALGAR fait de manière injustifiée grief à la société HANSGROHE AG de ne pas prouver qu’elle serait cessionnaire de droits et que le robinet mitigeur « AXOR S PURO » aurait été divulgué sous son nom ; qu’en effet, le produit est certes commercialisé sous une référence qui comporte le nom de S, que néanmoins, les catalogues reproduisant l’objet en cause sont diffusés sous le nom de la société HANSGROHE; que cette dernière bénéficie ainsi aux yeux des tiers poursuivis en contrefaçon d’une présomption de titularité de droits d’auteur qui ne peut être combattue que par le titulaire des droits et non par un tiers ; qu’elle a bien qualité à agir sur le fondement des droits d’auteur, sans qu’il lui soit nécessaire d’établir sa qualité de cessionnaire de droits ;

Que le jugement sera en conséquence réformé en ce qu’il a dit que la société HANSGROHE AG était irrecevable à agir ; Sur la recevabilité des demandes en concurrence déloyale et parasitaire formées par la société HANSGROHE SARL Considérant que la société COMERCIAL SALGAR, qui demande l’infirmation du jugement de ce chef, soutient que la société HANSGROHE SARL ne rapporte pas la preuve de la commercialisation en France du produit en cause, les factures versées aux débats étant trop peu nombreuses pour démontrer la réalité d’une commercialisation ; Mais considérant que c’est par des motifs pertinents que la cour fait siens que le tribunal a relevé que les factures prouvaient que la société HANSGROHE SARL commercialisait les robinets référencés « AXOR S PURO » et justifiait ainsi avoir qualité et intérêt à agir en concurrence déloyale et agissements parasitaires, cette

société étant distributrice en France des produits qui seraient contrefaits par ceux diffusés par la société COMERCIAL SALGAR ; que le jugement sera confirmé sur ce point ; Sur le bien fondé de l’action en contrefaçon sur le fondement du Livre V du Code de la propriété intellectuelle et du Livre I du même Code Considérant que la société COMERCIAL SALGAR développe toute une argumentation sur l’absence de communication du robinet mitigeur commercialisé par les sociétés HANSGROHE qui l’empêcherait de faire une analyse précise et sur le fait que les éléments caractéristiques revendiqués par la société HANSGROHE AG dans son assignation ne figurent nullement dans le dépôt effectué à l’OMPI du modèle litigieux mais ont été « purement et simplement recopiés, à la ponctuation près, du procès-verbal de saisie contrefaçon » ; Qu’elle soutient qu’il n’existe aucun acte de contrefaçon ; qu’en effet, selon elle, les ressemblances ou similitudes ne sont pas constitutives de contrefaçon lorsqu’elles proviennent d’une communauté de style, de la mode et du domaine public ; que tel est le cas en l’espèce dans la mesure où les analogies sont d’ordre fonctionnel ou explicables par les goûts généraux de la clientèle ; que le modèle qui est opposé est dénué de nouveauté ou d’originalité ; qu’en effet, selon elle, les robinets présentent toujours un corps et un bec, progressivement, le mitigeur sous forme de manette a remplacé les molettes qui actionnaient l’eau froide et l’eau chaude, et depuis plusieurs années, le goût des créateurs s’est porté sur des formes épurées, cylindriques ou cubiques ainsi qu’en attestent divers catalogues ; Qu’elle relève encore que les nombreuses différences existant entre les robinets en cause donnent une impression visuelle d’ensemble distincte ; Considérant qu’au contraire, la société HANSGROHE soutient que son modèle qui se caractérise par les éléments suivants : un corps de robinet de forme cylindrique, un couvre-cartouche ou rosette au sommet du corps du robinet, une manette constituée d’une tige de forme cylindrique située au dessus et dans le prolongement du corps du robinet, un bec de robinet de forme cylindrique formant un angle d’environ 45° avec le corps du robinet, est valable , les documents versés aux débats, non datés ou postérieurs à la date du dépôt, n’étant, dès lors, pas pertinents pour détruire la nouveauté du modèle ou l’originalité de l’oeuvre ; qu’elle ajoute que les différences mises en avant par la société COMERCIAL SALGAR ne modifient nullement l’impression d’ensemble identique pour un consommateur averti au sens de l’article L.513-5 du Code de la propriété intellectuelle ; Considérant, cela étant exposé, que la société HANSGROHE revendiquant des droits sur le modèle tel que déposé, il est indifférent que n’ait pas été versé aux débats le modèle commercialisé, étant au surplus précisé que les catalogues portent reproduction du produit en cause ; Considérant qu’il n’est versé aux débats aucun document antérieur au dépôt qui serait de nature à en détruire la nouveauté, les pièces communiquées étant, comme le font justement observer les sociétés HANSGROHE, ou non datés, ou postérieurs

à la date du dépôt ; qu’en outre, si le robinet présente un caractère fonctionnel par sa destination, le modèle déposé en ce qu’il est constitué d’un corps cylindrique surmonté d’une manette de même forme cylindrique a, par sa forme très épurée, une configuration "distincte et reconnaissable lui conférant un caractère de nouveauté et lui donnant une physionomie propre au sens de 1 ' article L. 511 -3 du Code de la propriété intellectuelle, (applicable pour apprécier la validité de ce dépôt en raison de sa date) ; que cette forme révèle également l’empreinte de la personnalité de l’auteur et lui confère de par son originalité une protection relevant du Livre I du Code de la propriété intellectuelle ; Considérant, sur la contrefaçon, qu’il sera rappelé que, selon les dispositions de l’article L. 513 -5 du Code de la propriété intellectuelle, "la protection conférée par l’enregistrement d’un dessin ou modèle s’étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l’observateur averti une impression visuelle d’ensemble différente ; Considérant qu’en l’espèce, les différences invoquées par la société COMERCIAL SALGAR tenant à l’absence d’une rosette ou d’un couvre-cartouche, à l’angle formé entre le bec du robinet et le cylindre du corps du robinet, à la présence d’un brise-jet, et d’une tige distincte à l’arrière du cylindre, et à une composition du corps du cylindre en deux parties, ne modifient pas l’aspect général du robinet qui présente dans les deux robinets en cause la même forme épurée, constituée par un corps cylindrique surmonté d’une manette de plus petite dimension et également cylindrique, les différences du robinet « GLASS » de la société COMERCIAL SALGAR ne donnant pas, même à un observateur averti, une impression visuelle d’ensemble distincte ; que la société HANSGROHE AG est en conséquence bien fondée dans son action en contrefaçon ; Sur le bien fondé de l’action en concurrence déloyale Considérant que la société HANSGROHE SARL commercialise en France les robinets « AXOR S PURO » et soutient ainsi que par l’importation et la vente en France d’articles qui reproduisent la combinaison des éléments caractérisant le modèle, la société COMERCIAL SALGAR a cherché à se placer dans son sillage, à profiter du renom de ce produit lié au nom du créateur, en reproduisant à moindres frais les caractéristiques du produit qui, au surplus, est commercialisé à un prix très inférieur à celui du modèle AXOR STARCK PURO ; Considérant que la société HANSGROHE SARL justifiant par la production de factures et d’un listing des ventes de ce qu’elle commercialise en France les produits correspondant au modèle protégé, il ne saurait être sérieusement soutenu, contrairement à ce qu’a retenu le tribunal qui a estimé qu’elle ne démontrait pas avoir une véritable activité commerciale, que la société COMERCIAL SALGAR est une société concurrente qui, en diffusant des produits qui sont la contrefaçon de ceux commercialisés par la société HANSGROHE SARL s’est rendue coupable d’agissements fautifs à son encontre, en profitant du renom des modèles et en les commercialisant, au surplus, à des prix très inférieurs à celui de la société HANSGROHE SARL; que le jugement sera réformé de ce chef ;

Sur les mesures réparatrices Considérant que si la société COMERCIAL SALGAR fait ajuste titre valoir qu’ il n’est pas rapporté la preuve de ce que les sociétés HANSGROHE commercialise de manière importante en France les robinets « AXOR S PURO », il subsiste que par la diffusion sur le territoire français de produits qui sont la contrefaçon du modèle déposé, la société COMERCIAL SALGAR a porté atteinte à la valeur de ce modèle ; que ce préjudice, subi par la société HANSGROHE AG, sera réparé par l’allocation de la somme de 15 000 euros; Considérant que pour réparer le préjudice commercial subi par la société HANSGROHE SARL du fait de la commercialisation de produits contrefaisants ceux qu’elle distribue en France, eu égard aux documents comptables versés aux débats qui ne révèlent pas l’existence d’un important chiffre d’affaires, il lui sera alloué la somme de 10 000 euros ; Considérant qu’il y a lieu de faire droit aux mesures d’interdiction sollicitées dans les termes du dispositif ci-dessous énoncé ; Considérant en revanche que les publications sollicitées ne s’imposent pas ; Considérant que la société COMERCIAL SALGAR ne formant plus de demande en garantie à rencontre de la société GRISAMA, rien ne justifie sa demande d’infïrmation du jugement en ce qu’elle avait été condamnée à verser à cette société une indemnité au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Considérant que l’équité commande d’allouer à chacune des sociétés HANSGROHE la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS : Confirme le jugement du 29 novembre 2002 en toutes ses dispositions ; Infirme le jugement du 10 mars 2005 en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a dit recevable la société HANSGROHE SARL en sa demande en concurrence déloyale et en ce qu’il a condamné la société COMERCIAL SALGAR à verser à la société GRISAMA une indemnité au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Statuant à nouveau, Dit la société HANSGROHE AG recevable et bien fondée en son action en contrefaçon ; Dit la société HANSGROHE SARL bien fondée en son action en concurrence déloyale et parasitaire ; Dit qu’en important en France, offrant en vente et vendant un modèle de robinet référencé « GLASS » reproduisant les caractéristiques du modèle de robinet déposé le 18 septembre 2000 et enregistré sous le n° DM/053 1 83 (n° 4.1 à 4.11) appartenant

à la société HANSGROHE AG, la société COMERCIAL SALGAR SA a commis des actes de contrefaçon ; Dit que la société COMERCIAL SALGAR a commis à l’égard de la société HANSGROHE SARL, des actes de concurrence déloyale et parasitaire, Interdit à la société COMERCIAL SALGAR d’importer en France, d’y offrir en vente et/ou vendre le modèle de robinet contrefaisant sous astreinte de 500 euros par infraction commise (par article vendu), à compter du délai d’un mois de la signification de l’arrêt ; Condamne la société COMERCIAL S ALGAR à payer à titre de dommages et intérêts :

- à la société HANSGROHE AG la somme de 15 000 euros,
- à société HANSGROHE SARL celle de 10 000 euros ; La condamne à payer à chacune des sociétés HANSGROHE la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Rejette toutes autres demandes ; Condamne la société COMERCIAL SALGAR aux entiers dépens ; Autorise la SCP BAUFUME, GALLAND, VIGNES, avoué, à recouvrer les dépens d’appel conformément aux dispositions de l’article 699 du nouveau Code de procédure civile.

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Cour d'appel de Paris, 4e chambre, 15 décembre 2006, n° 2005/08405