Cour d'appel de Paris, 4e chambre, 5 décembre 2008, n° 08/06926

  • Volonté de profiter des investissements d'autrui·
  • Reproduction des caractéristiques protégeables·
  • Empreinte de la personnalité de l'auteur·
  • Fait distinct des actes de contrefaçon·
  • Protection au titre du droit d'auteur·
  • Détournement de clientèle·
  • Investissements réalisés·
  • Condamnation in solidum·
  • Répartition des sommes·
  • Bague ornée de fleurs

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 4e ch., 5 déc. 2008, n° 08/06926
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 08/06926
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 26 mars 2008, N° 2007081131
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de commerce de Paris, 27 mars 2008, 2007/81131
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Référence INPI : D20080166
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Sur les parties

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D’APPEL DE PARIS 4e Chambre – Section B ARRÊT DU 5 DÉCEMBRE 2008

Numéro d’inscription au répertoire général : 08/06926 Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Mars 2008 -Tribunal de Commerce de PARIS-RGn° 2007081131 APPELANTES La S.A.R.L. CAMILLE & LUCIE agissant poursuites et diligences de son gérant ayant son siège Lotissement du Cheu n°3 avenue Pascouaou 40150 SOORTS HOSSEGOR représentée par Maître François TEYTAUD, avoué à la Cour, assistée de Maître Erick L, avocat au Barreau de Paris, D756. La S.A.R.L. FLORILEGE agissant poursuites et diligences de son gérant ayant son siège […]Hôtel de Ville 77340 PONTAULT COMBAULT représentée par Maître François TEYTAUD, avoué à la Cour, assistée de Maître Erick L, avocat au Barreau de Paris, D756. La S.A.R.L. EMMA DIFFUSION agissant poursuites et diligences de son gérant ayant son siège […] représentée par Maître François TEYTAUD, avoué à la Cour, assistée de Maître Erick L, avocat au Barreau de Paris, D756. La S.A.R.L. GREGOIRE C agissant poursuites et diligences de son gérant ayant son siège […] PARIS PLAGE représentée par Maître François TEYTAUD, avoué à la Cour, assistée de Maître Erick L, avocat au Barreau de Paris, D756.

INTIMEE

La S.A. CHRISTIAN DIOR COUTURE prise en la personne de son Président du Conseil d’Administration et Directeur Général ayant son siège […] représentée par la SCP ROBLIN – CHAIX de LAVARENE, avoués à la Cour, assistée de Maître Pierre D, avocat au Barreau de Paris, P221. COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue le 23 octobre 2008, en audience publique, devant la cour composée de : Monsieur GIRARDET, président, Madame REGNIEZ, conseiller, Madame SAINT SCHROEDER, conseiller, qui en ont délibéré. Greffier, lors des débats : L. MALTERRE-PAYARD ARRÊT :

- contradictoire
- rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur GIRARDET, président et par Madame L. MALTERRE PAYARD, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire. La cour est saisie d’un appel interjeté par les sociétés CAMILLE & LUCIE SARL, FLORILEGE SARL, EMMA D SARL et GREGOIRE C SARL d’un jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris du 27 mars 2008. Il sera rappelé que :

- la société CHRISTIAN DIOR COUTURE SA exploite des vêtements et accessoires de mode de haute couture et de prêt à porter. A ce titre, elle a acquis de Victoire de Castellane les droits d’auteur de cette créatrice sur une collection de bijoux dénommée « Diorette », dont une bague référencée 05-235, qu’elle commercialise depuis 2006,
- ayant découvert que plusieurs boutiques exerçant sous l’enseigne CAMILLE & LUCIE commercialiseraient des bagues qui reprendraient les caractéristiques de la sienne, elle a fait pratiquer saisie-contrefaçon dans les locaux de la société FLORILEGE et au siège de la société CAMILLE & LUCIE et a assigné par acte d’huissier du 3 décembre 2007 les sociétés ci-dessus citées en contrefaçon et concurrence déloyale. Par le jugement entrepris, le tribunal a :

- dit que les sociétés CAMILLE & LUCIE, FLORILEGE, GRÉGOIRE C et EMMA D se sont rendues coupables d’actes de contrefaçon du modèle de bague référencé 05-235 dans la collection « Diorette » appartenant à la société CHRISTIAN DIOR COUTURE,

— 

condamné in solidum ces sociétés à lui payer la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts pour réparer les préjudices afférents à la contrefaçon,
- dit que ces sociétés se sont aussi rendues coupables de concurrence déloyale,
- condamné celles-ci in solidum à payer à la société CHRISTIAN DIOR COUTURE la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- ordonné l’arrêt immédiat de toutes importation, exposition ou vente de bagues contrefaisant la bague 05-235 dans la collection « Diorette » appartenant à la société CHRISTIAN DIOR COUTURE sous astreinte,
- ordonné la destruction du stock contrefaisant sous astreinte,
- ordonné la publication du jugement dans quatre magazines au choix de la société CHRISTIAN DIOR COUTURE aux frais solidaires des sociétés CAMILLE ET LUCIE, FLORILEGE, GRÉGOIRE C et EMMA D, sans que le coût global n’excède la somme de 20 000 euros hors taxes ainsi que sur la page d’accueil du site internet www.camille-lucie.com de la société CAMILLE ET LUCIE pendant une durée de trois mois,
- ordonné l’exécution provisoire,
- condamné in solidum les sociétés CAMILLE ET LUCIE, FLORILEGE, GRÉGOIRE C et EMMA D aux dépens ainsi qu’à verser à la société CHRISTIAN DIOR COUTURE la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article du (nouveau) Code de procédure civile. Les sociétés CAMILLE ET LUCIE, FLORILEGE, GRÉGOIRE C et EMMA D prient essentiellement la cour, dans leurs dernières conclusions signifiées le 3 octobre 2008, de :

- dire que la bague référencée 05-235 par la société CHRISTIAN DIOR COUTURE n’est pas originale,
- constater l’absence de contrefaçon et d’actes distincts de concurrence déloyale,
- condamner la société CHRISTIAN DIOR COUTURE à verser à chacune des appelantes la somme de 10 000 euros, 20 000 euros à la société CAMILLE ET LUCIE, en raison de son comportement judiciaire et extrajudiciaire déloyal, ainsi qu’à payer une amende civile de 1 500 euros,
- à titre subsidiaire, débouter la société CHRISTIAN DIOR de ses demandes indemnitaires et dire qu’elle ne démontre et ne justifie pas que la société CAMILLE & LUCIE ait agi en connaissance de cause ou à tout le moins ait des motifs légitimes de connaître la caractère contrefaisant de la bague et, compte tenu des antériorités et de la mode en la matière dans le monde, la débouter,
- à titre plus subsidiaire, ne retenir comme réparation qu’un montant de 3000 euros correspondant à la marge réalisée par la société CAMILLE & LUCIE, aucun élément n’étant apporté sur les sociétés GREGOIRE C, FLORILEGE et EMMA D sur la vente des modèles 265 argués de contrefaçon,
- condamner la société CHRISTIAN DIOR COUTURE aux entiers dépens ainsi qu’àpayer à chacune la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile. Dans ses dernières conclusions signifiées le 16 octobre 2008, la société CHRISTIAN DIOR COUTURE demande, pour l’essentiel, à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts,
- condamner in solidum les sociétés CAMILLE ET LUCIE, FLORILEGE, GRÉGOIRE C et EMMA D à lui verser les somme de 150 000 euros au titre de la contrefaçon et 100.000 euros au titre de la concurrence déloyale,
- ordonner la publication de l’arrêt sur la page d’accueil des sites www.camille-lucie.com et www.bijoux-fantaisies.com,

— condamner in solidum les sociétés CAMILLE ET LUCIE, FLORILEGE, GRÉGOIRE C et EMMA D aux entiers dépens ainsi qu’à lui payer la somme de 15 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens (en ce compris les frais de saisie-contrefaçon).

- SUR CE, LA COUR Sur l’originalité Considérant que les sociétés appelantes critiquent les premiers juges qui ont admis l’originalité de la bague en affirmant seulement « qu’il n’était pas établi que la bague appartiendrait à un genre défini », sans en préciser les caractéristiques qui, d’ailleurs, n’avaient pas été décrites ; qu’en droit, celui qui agit au titre de droits d’auteur doit caractériser l’originalité de l’oeuvre sans s’en tenir à des termes généraux ; Qu’elles soutiennent, essentiellement, que, pas davantage en appel, la société intimée ne définit l’originalité de sa bague, que les caractéristiques qu’elle expose relèvent de genre, technique et style inappropriables, bien connus depuis notamment le 17e siècle, par une reprise de thèmes naturalistes ; qu’elles invoquent également un bijou de Roberto B créé, selon elle antérieurement à la création invoquée par la société CHRISTIAN DIOR COUTURE et qui comporterait la même composition florale en semis avec une coccinelle et un papillon ; Considérant que, selon la société CHRISTIAN DIOR COUTURE, la bague créée par Victoire de CASTELLANE en janvier 2005 et commercialisée en mai 2006 se caractérise par les éléments suivants : une monture en or jaune ou blanc surmontée d’un bouquet de fleurs (marguerite, pâquerette) et des insectes (coccinelle et papillon), en or émaillé dans des couleurs vives, les fleurs et les insectes étant réalisés dans un style naïf et quelques pierres semi-précieuses parsemant le bouquet ; Considérant, cela étant exposé, que le bijou invoqué par la société Christian Dior Couture s’inscrit dans un genre floral déjà décliné dans le domaine des bijoux, associant parfois des insectes, ce qui n’est pas contesté par l’intimée, et résulte des nombreux documents versés aux débats par les sociétés appelantes (tels extraits de « Les Bijoux Couture » édité par GRUND, de « les Bijoux, de l’Art déco aux années 40 », « Bijoux frivoles des années 30 »), que néanmoins, s’inspirer d’un genre n’empêche pas toute création, laquelle doit, selon les dispositions du Livre I du Code de la propriété intellectuelle, pour être protégeable, révéler l’empreinte de la personnalité de l’auteur ; Considérant que le bijou Roberto B, dont il convient de constater qu’il est très proche de celui de la société Christian Dior Couture, est publié dans un extrait en anglais de la revue DREAMS n° 34 de juillet 2006 et se réfère à une exposition à Istanbul qui aurait eu lieu du 22 au 26 mars 2006 ; que cependant, ce document ne démontre pas que le bijou aurait été créé avant celui opposé par la société Christian Dior, en janvier 2005 selon le carnet de dessins de la créatrice et le contrat de cession de droits patrimoniaux de la collection 2005 ; que ce document n’est donc pas pertinent pour apprécier le caractère original du bijou incriminé, Victoire de CASTELLANE n’ayant pu s’inspirer d’un bijou dont il n’est pas établi de manière certaine qu’il aurait été créé et diffusé avant le sien ; Considérant que le bijou commercialisé par la société Christian DIOR Couture en ce qu’il se compose d’un « semis » de fleurs (cinq suivant les photographies soumises à la cour) représentant notamment une marguerite blanche à coeur j aune, semis sur lequel se trouvent deux insectes dans une représentation très naturaliste (coccinelle rouge et points noirs et

papillon non stylisé) sur un simple anneau, et d’une pierre précieuse en son centre, révèle le choix personnel de l’auteur, notamment dans la représentation naïve de chacun des éléments, dans des coloris vifs ; que cette composition particulière témoigne de l’effort créatif de l’auteur et confère à ce bijou l’originalité nécessaire pour bénéficier de la protection du Livre I du Code de la propriété intellectuelle, étant précisé que contrairement à ce qu’ont dit les premiers juges, la nouveauté de ce bijou n’a pas à être examinée dès lors

qu’elle n’est pas un critère d’appréciation du caractère protégeable de l’oeuvre sur le fondement du Livre I du Code susvisé; que le jugement sera confirmé par substitution de motifs ; Sur la contrefaçon Considérant que, selon les appelantes, le bijou qu’ elles commercialisent ne reprend pas les caractéristiques du bijou opposé ; qu’elles insistent sur le fait que les ressemblances appartiennent au domaine public ; que doivent être au contraire prises en compte le fait qu’il n’existe pas de pierre centrale, ni en conséquence de collier floral autour, que la présentation est « aérienne » en ce sens que les fleurs sont liées à l’anneau par des tiges ce qui donne un volume à la bague qui surplombe la main d’un centimètre, à la différence de l’aspect compact de la bague Dior ; qu’elles ajoutent que la composition est différente tant par les éléments qui la constitue, leur nombre et leur disposition et que les matières sont distinctes ce qui permettrait à un oeil même non exercé de dissocier les deux modèles ; Considérant, toutefois, que dès lors qu’une oeuvre seconde reprend les éléments qui caractérisent l’originalité de l’oeuvre première, la contrefaçon est constituée ; Considérant qu’en l’espèce, contrairement à ce qui est soutenu par les appelantes, se retrouvent dans la bague incriminée, les caractéristiques de la bague Dior ; qu’ en effet, est reprise l’association de deux insectes dont l’un est identique, (s’agissant d une coccinelle de la nature rouge à points noirs) et de plusieurs fleurs consistant en des fleurs des champs, comportant un coeur jaune, cette composition surmontant une bague en forme d’anneau ; que les différences mises en avant par les sociétés appelantes et notamment le volume plus haut donné à l’ensemble du fait de l’existence de sortes de tiges rattachant le bouquet à la bague sont en l’espèce inopérantes, du fait des caractéristiques principales reproduites ; que le jugement sera, par les motifs ainsi exposés, confirmé ; Sur la concurrence déloyale et parasitaire Considérant que le tribunal a retenu que les appelantes avaient commis des agissements déloyaux en raison :

- de la mention dans les slogans des campagnes de communication de la société CAMILLE & LUCIE des termes « répliques de joaillerie » qui indiquent clairement qu’il s’agit d’un double, définition que les dictionnaires donnent au mot réplique et qu’il ne s’agit pas de n’importe quel bijou mais d’un bijou de joaillerie, les deux mots accolés se complétant d’ailleurs mutuellement pour suggérer, ni plus ni moins qu’il s’agit de copies de bijoux, vendus chez les joailliers,
- de l’achat à 2,7 euros d’un produit qualifié de luxe dans le slogan publicitaire ambigu de « numéro 1 du luxe jetable », alors que les exigences de créativité, de fabrication, de qualité

des matériaux et de savoir-faire que requiert la fabrication d’un produit de luxe s’accommodent difficilement d’un prix aussi bas,
- de la revente à 30 euros alors que le prix du modèle peut atteindre 11 900 euros, soit une vente à un prix dérisoire et ne pouvant que vulgariser, dévaloriser et rabaisser au rang de « gadget » l’oeuvre originale ; Considérant que l’intimée insiste :

- sur le caractère provocateur des slogans des campagnes de communication en ce que les boutiques à l’enseigne "Camille & Lucie« arborent la mention »Répliques de joaillerie« et en ce que l’enseigne »Camille & Lucie« se revendique »n° 1 du Luxe jetable« et captent une clientèle qui connaît parfaitement les créations des grands joailliers, au moyen d’un argumentaire commercial fondé sur la vente de »répliques de joaillerie" à des prix défiant toute concurrence,

— sur l’importante campagne de communication relative à la création « Diorette » de telle sorte qu’en commercialisant une copie du modèle de bague « Diorette », la société CAMILLE & LUCIE s’inscrit dans le sillage du succès de cette collection et profite indûment des retombées des investissements publicitaires exposés par la société Christian Dior; Considérant, cela exposé, que les appelantes insistent, pour leur part, avec raison, sur la nécessité, pour caractériser l’existence d’actes de concurrence déloyale, de prouver l’existence d’un risque de confusion avec les produits commercialisés par un concurrent ; que par l’usage du « terme n° 1 du luxe jetable », qui s’accompagne de la vente à des prix correspondant à des produits de fantaisie (30 euros) et par l’usage de l’accroche publicitaire comportant le tenue « réplique » de joaillerie, la clientèle qui s’adresse à elle ne se trompe pas sur l’origine du produit et n’est pas davantage invitée à se détourner des sociétés de prestige, la qualité des bijoux n’étant pas de même nature; que ce grief n’est en conséquence nullement distinct de celui retenu au titre de la contrefaçon, les sociétés appelantes profitant ainsi, par une réplique du bijou protégé, des investissements et de la renommée du bijou contrefait ; que ces éléments qui sont pris en compte pour l’appréciation du préjudice subi au titre de la contrefaçon ne sauraient caractériser un acte de concurrence déloyale; que le jugement sera de ce chef infirmé ; Sur le préjudice lié aux actes de contrefaçon Considérant que la société intimée soutient que les premiers juges n’ont pas suffisamment pris en compte son préjudice ; que sans faire de distinction entre le préjudice lié à la contrefaçon et celui lié à la concurrence déloyale, elle expose qu’il convient d’indemniser le préjudice d’image, le manque à gagner et l’atteinte parasitaire portée à sa campagne de communication ; Considérant qu’au contraire, les sociétés appelantes estiment que les dommages et intérêts fixés par les premiers juges sont excessifs au regard du nombre de bijoux réellement vendus, que le tribunal n’a pas tenu compte de la part jouée par chacune d’elles dans 1 ' existence du préjudice et qu’il doit être établi que le contrefacteur aurait agi délibérément ou en ayant des motifs raisonnables de savoir qu’il commettait une contrefaçon ; Considérant que les sociétés appelantes ne sauraient valablement prétendre qu’elles ne connaissaient pas le bijou de Dior qui avait été lancé en mai/juin 2006 avec une publicité et qui était commercialisé de manière importante lorsque la société CAMILLE & LUCIE

a importé les bijoux retenus comme étant contrefaisants, livrés le 9 mars 2007 ; que l’argument tiré de leur prétendu bonne foi est inopérant ; Considérant, par ailleurs, que la vente de bijoux fantaisie, réplique de bijoux de joaillerie, si elle n’entraîne pas nécessairement une perte de clientèle et en conséquence une perte de marge importante, avilit grandement en les banalisant les créations de la société CHRISTIAN DIOR Couture ; que ce préjudice est d’autant plus important que la société CAMILLE & LUCIE a de nombreux points de vente et qu’elle a économisé des frais de création et des investissements en profitant des efforts publicitaires de la société CHRISTIAN DIOR COUTURE ; que la société intimée ne démontre pas toutefois que la masse contrefaisante aurait été supérieure à la quantité importée par la société CAMILLE & LUCIE soit 3120 exemplaires ; que cette dernière verse aux débats des pièces comptables desquelles il résulte qu’elle en a vendu 1 797 pièces pour un prix HT de 13 531,41 euros ; que compte tenu de ces circonstances et de l’importance des investissements consacrés à la publicité des bijoux en cause par la société CHRISTIAN DIOR COUTURE, la cour a des éléments d’appréciation suffisants pour fixer le montant des dommages et intérêts dus à la société intimée à la somme de 30 000 euros ; que le jugement sera infirmé de ce chef ;

Considérant que les sociétés exerçant sous l’enseigne Camille & Lucie ne sauraient être tenues de l’entier préjudice, ne constituant qu’une partie du réseau concerné ; qu’en l’absence de précision donnée par chacune d’elles sur le nombre de produits contrefaisants commercialisés, la cour estime qu’elles ont partiellement participé au dommage et les condamne in solidum avec la société CAMILLE & LUCIE à hauteur de 2000 euros pour chacune d’elles ; Considérant que la mesure d’interdiction sous astreinte sera confirmée, étant précisé qu’elle ne portera que sur la bague diffusée sous la référence 265 par la société CAMILLE & LUCIE ; que les mesures de destruction et de publication seront également confirmées, sauf à préciser que les mesures de publication tiendront compte du présent arrêt ; Sur la demande de dommages et intérêts des sociétés appelantes Considérant que, selon les appelantes, l’intimée a eu un comportement déloyal en assignant « à bref délai » de manière tardive puisque l’acte a été délivré plus de trois mois après la saisie-contrefaçon du 22 août 2007, sans mise en demeure préalable et en dénaturant les faits ; qu’elles font encore valoir que la société CHRISTIAN DIOR Couture a manifesté son refus du contradictoire en refusant de communiquer les pièces essentielles, notamment le « titre en trois dimensions » et a tenté d’influencer le tribunal en invoquant une procédure pénale qui était pendante devant la Cour d’appel de Pau mais qui ne concerne pas le même litige ; qu’elles insistent sur le fait que la référence à cette procédure pénale a un caractère dénigrant puisqu’elle fait passer la société CAMILLE & LUCIE pour une « professionnelle de la contrefaçon » et que la présente action n’a pas pour but de faire respecter des droits d’auteur et sanctionner une contrefaçon mais uniquement de participer à une pression judiciaire menée contre elle et les sociétés avec lesquelles elle travaille ; Considérant qu’il ne saurait être fait grief à la société CHRISTIAN DIOR COUTURE d’avoir mentionné au cours de cette instance qu’il existait une procédure pénale opposant la société CAMILLE & LUCIE à plusieurs établissements de bijoux de luxe dont elle- même – cela correspondant à la réalité- dès lors qu’il n’est pas établi que cette référence aurait été effectuée dans des termes dénigrants ; que les autres griefs ne sont pas

davantage fondés ; qu’en effet, la société intimée n’était pas tenue de délivrer une mise en demeure avant d’agir, et a communiqué au cours de la procédure l’original de la bague « Diorette » invoquée ; qu’il n’est, par ailleurs, pas justifié de ce que l’assignation trois mois après la saisie-contrefaçon leur aurait causé un grief et contiendrait une dénaruration délibérée des faits ; que cette demande sera rejetée ; Considérant que chacune des parties succombant dans ses demandes, des raisons d’équité commandent de n’allouer aucune indemnité au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et de laisser les dépens à la charge de chacune d’elles ; PAR CES MOTIFS : Confiraie le jugement sauf sur le montant des dommages et intérêts, sur la condamnation au titre de la concurrence déloyale et sur les mesures d’interdiction ; Infirmant de ces chefs, statuant à nouveau et ajoutant, Condamne in solidum la société CAMILLE & LUCIE, les sociétés FLORILEGE, EMMA D et GREGOIRE C à payer à la société CHRISTIAN DIOR COUTURE la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour réparer le préjudice causé par les actes de contrefaçon, les sociétés FLORILEGE, EMMA D et GREGOIRE C étant tenues à hauteur pour chacune d’elles de 2000 euros ;

Dit que les mesures d’interdiction ordonnées porteront sur la bague référencée 265 par la société CAMILLE & LUCIE ; Dit que les mesures de publication tiendront compte du présent arrêt ; Rejette la demande de dommages et intérêts formée à l’encontre de la société CHRISTIAN DIOR COUTURE ; Rejette toutes autres demandes ; Dit que les dépens d’appel seront laissés à la charge de chacune des parties.

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