Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 6, 22 décembre 2017, n° 16/11281

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 ch. 6, 22 déc. 2017, n° 16/11281
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/11281
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de commerce d'Auxerre, 24 avril 2016, N° 2014C2370
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 1 novembre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 6

ARRET DU 22 DECEMBRE 2017

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/11281

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Avril 2016 -Tribunal de Commerce d’AUXERRE – RG n° 2014C2370

APPELANT

Monsieur [T] [M]

Né le [Date naissance 1]/1962 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

Ayant pour avocat plaidant Me Martine BENNAHIM, avocat au barreau de PARIS, toque: E0866

INTIMEE

SA BANQUE CIC EST

RCS STRASBOURG 754 800 712

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée et ayant pour avocat plaidant par Me Olivier HASCOET de la SELARL HAUSSMANN/KAINIC/HASCOET/HELAIN, avocat au barreau d’ESSONNE

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 06 Novembre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Françoise CHANDELON, Présidente de chambre

M. Marc BAILLY, Conseiller

Madame Christine SOUDRY, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Josélita COQUIN

ARRET :

— Contradictoire,

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Françoise CHANDELON, présidente et par Madame Josélita COQUIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement du tribunal de commerce d’Auxerre du 25 avril 2016 qui, saisi par la société Banque Crédit Industriel et Commercial Est d’une assignation délivrée le 19 décembre 2014, à M. [T] [M] en paiement au titre de son engagement de caution des obligations de la SARL Pains, Saveurs & Tentation issues d’un prêt consenti le 4 octobre 2011 d’un montant de 329 000 euros a notamment :

— débouté M. [T] [M] de ses demandes de nullité du contrat de cautionnement,

— déclarée prescrite sa demande reconventionnelle en nullité du TEG,

— débouté M. [T] [M] de sa demande de dommages-intérêts pour faute de la banque,

— condamné M. [T] [M] à payer à celle-ci la somme de 114 524,86 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 novembre 2012, outre la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Vu les dernières conclusions en date du 30 novembre 2016 de M. [T] [M], à la suite de l’appel interjeté le 19 mai 2016, au moyen desquelles il expose :

— que, salarié de la Poste, il a passé un certificat d’aptitude professionnelle en boulangerie à l’occasion d’un congé formation puis a créé sa société au sein d’un centre commercial au mois de septembre 2011, en investissant 140 000 euros de ses deniers personnels et en souscrivant le prêt litigieux, mais qu’il s’est heurté à des malfaçons du local pris à bail, à des modifications des lieux baissant les facteurs de commercialité et à 'l’externalisation’ dans la galerie commerciale du service de boulangerie de l’hypermarché aux prix très concurrentiels, de sorte que ses difficultés l’ont conduit à une hospitalisation en secteur psychiatrique qui a révélé qu’il souffrait de troubles bipolaires et à la cessation rapide de l’exploitation au mois d’octobre 2012,

— à titre principal, que l’engagement de caution est nul en vertu des articles L341-2 et L341-3 du code de la consommation qui s’applique également aux cautions averties dès lors que la mention manuscrite ne précède pas sa signature,

— que l’engagement de caution est nul en vertu des articles 1110 et suivants du code civil puisqu’en raison de la garantie Oseo à hauteur de 70 % du prêt, M. [M] a cru s’engager sur 30 % de l’encours du crédit alors que les manoeuvres de la banque ont abouti à un cautionnement de la somme de 118 440 euros qui ne correspond pas à ces 30 % puisque l’offre de prêt était de 329 000 euros dont 30 % font 98 700 euros,

— à titre subsidiaire, qu’en vertu de l’article 2292 du code civil, l’engagement ne saurait excéder 30 % des sommes restant dues après la liquidation judiciaire soit celle de 85 440 euros,

— que le TEG est 'nul’ en vertu de l’article 1907 du code civil dès lors qu’aucun exemple chiffré n’est donné et qu’il n’est pas fait mention des coûts directs et indirects du crédit, l’exception de nullité étant imprescriptible,

— que la banque a commis des fautes en portant le taux d’intérêt de 4,12 % à 4,50 % avant que cela ne soit rectifié au terme de démarches anxiogènes, qu’alors que le coût de la garantie Oseo était payable au fur et à mesure des échéances, qu’il lui a été demandé, de manière injustifiée, sur ses fonds personnels la somme totale de 11 383,38 euros avant que le principe du paiement en une fois soit remis en cause par Oseo unilatéralement, de sorte qu’il a perdu le bénéfice de la somme d’environ 10 000 euros de décembre 2011 à mai 2012, alors qu’il peut se prévaloir des exceptions inhérentes à la dette,

— que la garantie supplémentaire de blocage du compte courant d’associé n’avait pas été prévue au départ et qu’il était déloyal d’inscrire une telle clause à hauteur de la somme de 96 000 euros dans le contrat, la somme n’ayant pu être utilisée,

— que la banque lui a refusé le choix de la compagnie d’assurance comme le révèlent des échanges de courriels, son coût auprès de la banque ayant été de 8 540 euros, outre un préjudice moral de 50 000 euros, de sorte qu’il demande à la cour :

— de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

— à titre principal de déclarer nul le cautionnement,

— à titre subsidiaire,

— de juger que le cautionnement ne peut excéder la somme de 85 440 euros,

— de dire que le TEG est nul,

— de renvoyer la banque à recalculer le préjudice en fonction du seul taux d’intérêt légal,

— de condamner la banque à lui payer la somme de 165 920 euros en réparation du préjudice subi du fait de ses fautes,

— de la condamner à lui payer la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu les seules conclusions en date du 30 septembre 2016 de la société CIC-Est qui sollicite la confirmation du jugement et la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles en faisant valoir :

— que la société Pains, Saveurs & Tentation a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce d’Auxerre du 1er octobre 2012, que la créance a été déclarée le 12 novembre suivant à hauteur de 319 711,03 euros à titre privilégié, que la caution a été mise en demeure de régler celle de 118 440 euros par recommandé de la même date, que M. [M], comme cela a été convenu, a versé dix mensualités de 400 euros qui avaient été convenues dans l’attente de le vente du fonds de commerce et d’un bien immobilier puis a été totalement défaillant, de sorte qu’après une nouvelle mise en demeure infructueuse, elle a été contrainte de l’assigner,

— que le cautionnement n’est pas nul dès lors que M. [M] reconnaît être le scripteur de la mention et de la signature et que sa signature à gauche de celle-ci, en plus de celle qui n’est au-dessus qu’en sa qualité de représentant légal de l’emprunteur, montre qu’il n’a pu se méprendre sur son engagement,

— qu’il n’est pas nul pour erreur puisqu’il résulte clairement du contrat et de la garantie Oseo qu’il s’est engagé pour 30 % du montant prêté soit 98 700 euros majoré de 20 %, soit 118 440 euros sans qu’il ne démontre avoir souffert de troubles bipolaires au moment de la souscription du cautionnement du 4 octobre 2011, et sans s’être seulement engagé à garantir 30 % du seul encours de la dette,

— qu’il ne démontre pas une erreur de TEG et que les exemples chiffrés invoqués ne sont imposés par aucun texte alors qu’il était avisé comme dirigeant de société et ancien employé de La Banque Postale, la prescription abrégée d’un an contractuellement prévue entre les parties devant s’appliquer dès lors que le contrat ayant commencé à être exécuté, le délai de prescription est le même par voie d’exception que par voie d’action,

— que le manquement allégué dans la ponction de la garantie Oseo ne concerne que les rapports entre la banque et la société Pains, Saveurs & Tentation et non la caution, étant observé qu’au remboursement de la totalité de la cotisation, il pouvait se faire lui-même rembourser par prélèvement sur le compte courant d’associé, qu’il ne s’agit pas d’une exception inhérente à la dette mais personnelle de la société, laquelle a été perdue du fait de la liquidation,

— que les fautes relatives à la prise de garanties supplémentaires ne sont reprochables que par la société et non par la caution, que c’est la liquidation judiciaire qui a entraîné la perte de la part des fonds du compte courant indisponibles à titre de garantie,

— qu’il en est de même du choix de l’assurance étant observé qu’il n’a pas été privé de ce choix, la faute étant inexistante,

— que M. [M] ne peut invoquer des préjudices en lien avec la seule situation de la société Pains, Saveurs & Tentation, le lien de causalité avec la découverte de ses troubles n’étant pas démontré ;

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 26 septembre 2017 ;

MOTIFS

Le contrat de prêt comportant la garantie Oseo et l’engagement de caution est daté du 4 octobre 2011.

Sur la nullité de l’engagement de caution fondée sur les articles L341-2 et L341-3 du code de la consommation.

Ces dispositions prévoient que la caution 'doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite’ exigée par chacun des articles respectivement sur le cautionnement et, le cas échéant, la solidarité.

En l’espèce M. [T] [M], qui ne dénie pas être le scripteur des mentions exigées par la loi, a apposé sa signature en marge gauche desdites mentions sous l’indication préimprimée de son nom qui y figurait, par une signature dont la taille la place en regard de six seulement des quatorze lignes qu’elles comportent.

Il apparaît ainsi, selon les conclusions de la banque elle-même, que l’emplacement de la signature et la forme incurvée du texte manuscrit montrent que 'Monsieur [M] a manifestement signé puis a mis toute la mention manuscrite à droite de sa signature, étant précisé que cette mention manuscrite contourne cette signature pour en quelque sorte l’envelopper'.

Or, les dispositions appliquées imposent précisément que, dans le temps, la signature – manifestant la connaissance par la caution de ses obligations et le consentement donné – suive le texte de la mention, ce qui doit se manifester, dans l’espace, par son apposition au-dessous de la mention.

Dès lors qu’il n’en a pas été ainsi en l’espèce, il y a lieu de faire droit à la demande tendant au prononcé de la nullité du cautionnement, étant ajouté qu’il ne ressort pas du seul règlement par M. [M] de quelques échéances prévues dans un accord postérieur entre les parties, des mois de janvier à octobre 2013, qu’il aurait, eu connaissance du vice affectant l’acte, entendu le ratifier au sens de l’article 1338 du code civil.

En conséquence, il y a lieu d’infirmer le jugement, de condamner la société CIC-Est aux dépens, ainsi qu’à payer la somme de 1 500 euros à M. [M] au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,

Déclare nul le cautionnement donné par M. [T] [M] le 4 octobre 2011 ;

Déboute la société CIC-Est de toutes ses demandes ;

Condamne la société CIC-Est à payer la somme de 1 500 euros à M. [T] [M] en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société CIC-Est aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Guizard en application de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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