Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 28 juin 2018, n° 17/08661

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 - ch. 2, 28 juin 2018, n° 17/08661
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/08661
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 29 mars 2017, N° 17/51184
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de grande instance de Paris, 30 mars 2017, 2017/51184
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : AVS A VOTRE SERVICE ; AVS
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 3203391 ; 3752671 ; 3778001
Classification internationale des marques : CL29 ; CL35 ; CL41 ; CL42 ; CL43
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Référence INPI : M20180262
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE PARIS ARRET DU 28 juin 2018

Pôle 1 – Chambre 2 (n°370, 8 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 17/08661 Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 30 mars 2017 – Président du TGI de Paris – RG n° 17/51184

APPELANTE Association A VOTRE SERVICE (AVS) représentée par son Président, Monsieur Lahcene B […] 93200 SAINT-DENIS Représentée et assistée par Me Matthieu B, avocat au barreau de PARIS, toque : A0596

INTIMEE Société ALJAWDA représentée par son gérant […] 63000 CLERMONT FERRAND N° SIRET : 489 637 967 Représentée par Me Nicolas RAYER, avocat au barreau de PARIS, toque : A0955

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 31 mai 2018, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Bernard CHEVALIER, Président, chargé du rapport, et Mme Véronique DELLELIS, Présidente de chambre.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Bernard CHEVALIER, Président Mme Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère Mme Véronique DELLELIS, Présidente de chambre Qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : M. Aymeric PINTIAU

ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Bernard CHEVALIER, Président et par Aymeric PINTIAU, Greffier.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte du 12 décembre 2016, l’association A VOTRE SERVICE (AVS) a fait assigner la SARL Aljawda, qui exploite une boucherie à Clermont Ferrand, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris auquel elle a demandé de :

- la dire recevable en ses réclamations ;

- juger que, en utilisant le signe « AVS » sur son site internet aljawda.fr sans jamais avoir conclu de contrat d’agrément avec l’association A VOTRE SERVICE (AVS), la société Aljawda a commis des actes de contrefaçon des marques verbale « AVS A VOTRE SERVICE » n° 3.203.391 et semi-figuratives « AVS » n° 3.752.671 et n° 3.778.001 ;

- à titre subsidiaire, dire qu’en utilisant le signe « AVS » sur son site internet aljawda.fr sans jamais avoir conclu de contrat d’agrément avec l’association, la société Aljawda a commis des actes distincts de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de l’association A VOTRE SERVICE (AVS) ;

- ordonner à la société Aljawda de cesser toute utilisation de la mention « AVS » au sein de son établissement de boucherie et sur ses supports de communication (en particulier son site internet aljawda.fr,) sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir ;

— condamner la société Aljawda à lui payer une provision de 5 000 euros ;

— la condamner aux dépens et faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance contradictoire rendue le 30 mars 2017, le juge des référés a :

- rejeté les demandes de l’association AVS au titre tant de la contrefaçon que de la concurrence déloyale et parasitaire ;

- rejeté la demande reconventionnelle de la société Aljawda pour procédure abusive ;

- condamné l’association AVS à payer à la société Aljawda la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Par déclaration en date du 26 avril 2017, l’association A VOTRE SERVICE a fait appel de cette ordonnance.

Au terme de ses conclusions communiquées par voie électronique le 28 juillet 2017, elle a demandé à la cour, sur le fondement des articles L 713-3 et L716-6 du code de la propriété intellectuelle, L121-2 et L121-4 du code de la consommation, 1240 (ex-1382) du code civil et 809 du code de procédure civile, de :

- dire et juger qu’elle est recevable et bien fondée en son appel et ses demandes ;

- infirmer l’ordonnance de référé du 30 mars 2017 en toutes ses dispositions ;

- juger que, en utilisant le signe « AVS » sur son site internet www.aljawda.fr, sans jamais avoir conclu de contrat d’agrément avec l’association AVS, la société Aljawda a commis des actes de contrefaçon des marques verbale « AVS A Votre Service » n° 3.203.391 et semi-figuratives « AVS » n° 3.752.671 et n° 3.778.001 ou, à titre subsidiaire, des actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de l’association A Votre Service (AVS) ;

en tout état de cause, par conséquent,
- ordonner à la société Aljawda de cesser toute utilisation de la mention « AVS » au sein de son établissement de boucherie et sur ses supports de communication (en particulier son site internet www.aljawda.fr), sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir ;

- condamner la société Aljawda à lui payer une somme de 5 000 euros à titre de provision au titre des actes de contrefaçon de marque ou, à titre subsidiaire, des actes de concurrence déloyale ;

- condamner la société Aljawda à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens, dont les frais de constat dressé par Maître C le 1er décembre 2016.

L’association AVS a fait valoir en substance les éléments suivants :

- elle est une association à but non lucratif créée en 1991 qui a pour objet social de 'contrôler, informer et orienter la communauté musulmane de France', par tous les moyens de diffusion, sur la consommation des produits halal, c’est-à-dire licites pour les musulmans ;

- elle est reconnue en France comme l’un des organismes de certification les plus sérieux, authentifiant un volume de viande

croissant, de plus de 50 000 tonnes en 2016 et son professionnalisme lui a valu d’être consacrée par les Émirats Arabes Unis ;

- elle est titulaire de la marque verbale « AVS A Votre Service » et de la marque semi figurative en couleur composée des trois lettres majuscules AVS surmontées et entourées par deux chevrons, déposée pour désigner des produits et des services des classes n ° 29, 42 et 43, notamment les produits de la boucherie et de la charcuterie ainsi que les cafés restaurants, cantines, boucheries, etc.

- l’usage du signe AVS est réservé aux établissements qui ont conclu avec elle un contrat d’agrément, contrat permettant à ses salariés de vérifier que les viandes portant sa marque ne sont pas mélangées avec d’autres, ce qui leur ferait perdre les qualités essentielles attachées à celle-ci ;

- il s’ensuit que seules les personnes physiques ou morales ayant conclu un contrat d’agrément avec elles peuvent utiliser la marque AVS ;

- elle se trouve confrontée actuellement à une multiplication de cas dans lesquels des commerçants, bouchers ou restaurants, font valoir qu’ils se fournissent auprès de grossistes agréés afin de bénéficier de l’effet attractif de la marque AVS sans être eux-mêmes agréés, cela fin de contourner la procédure d’agrément qu’elle a mise en place ;

— la société Aljawda a, sans son autorisation, fait paraître sur la page d’accueil de son site internet la mention suivante : ' Votre boucherie Aljawda se fournit auprès de fournisseurs contrôlés par les organismes les plus rigoureux en matière du halal tel que halal service, halal contrôle, Achahada et AVS ;

- cette mention ne peut qu’induire les consommateurs en erreur sur la réalité d’un agrément et les qualités de le viande vendue dans cet établissement puisque, en se fournissant auprès de grossistes bénéficiant d’autres certifications, cette société fait perdre aux viandes certifiées AVS les garanties, notamment de traçabilité, attachées à sa marque ;

- la SARL Aljawda commet ainsi une contrefaçon de la marque AVS pour les motifs suivants : elle fait usage du signe protégé, à titre de marque et non de dénomination sociale, dans la vie des affaires et pas seulement à titre informatif ; elle fait naître une confusion dans l’esprit du public en faisant croire aux consommateurs musulmans normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés que les produits vendus dans cet établissement présenteraient toutes les garanties des produits certifiés par AVS alors que seuls les contrôles effectués en vertu du contrat d’agrément permettent de s’assurer de l’exclusivité de l’approvisionnement en viande AVS ;

— en d’autres termes, l’usage du signe AVS fait croire au consommateur musulman que l’établissement est agréé et fait l’objet de contrôles ;

- des situations comparables ont été qualifiées de contrefaçons par de nombreuses décisions de justice ;

- à titre subsidiaire, la mention litigieuse sur le site internet de l’intimée est constitutive d’actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de l’appelante ;

- les faits exposés au soutien d’une action en contrefaçon peuvent être invoqués à titre subsidiaire à l’appui d’une action en concurrence déloyale ;

- l’usage du signe AVS crée un risque de confusion dans l’esprit des consommateurs pour les motifs exposés ci-dessus et cet usage est fautif, puisqu’il consiste pour l’intimée à se placer dans le sillage de l’association AVS et des agréés AVS en bénéficiant de leur renommée et de la garantie attachée à son estampille.

La SARL Aljawda, par conclusions transmises par voie électronique le 25 septembre 2017, a demandé à la cour, de :

— juger l’association AVS recevable mais mal fondée en son appel ;

— débouter l’association AVS de l’ensemble de ses réclamations ;

— la recevoir en sa demande reconventionnelle ;

- condamner l’association AVS à lui payer et porter, avec intérêts légaux, les sommes de 3 000 euros à. titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner l’association AVS en tous les dépens.

La SARL Aljawda a exposé en résumé ce qui suit :

- sur le moyen tiré de la contrefaçon, la reproduction d’une marque à des fins d’information et en dehors de toute relation concurrentielle ne constitue pas une contrefaçon ; il en va de même de l’usage d’un signe pour décrire le produit ou ses caractéristiques ; la liberté du commerce et de l’industrie permet à un commerçant ayant acquis régulièrement des produits marqués, auprès du titulaire de marque ou d’un tiers autorisé, de les revendre sans avoir à solliciter une nouvelle autorisation auprès du titulaire de la marque ; un commerçant qui vend véritablement des produits marqués doit pouvoir l’annoncer à sa clientèle dès lors que la publicité est faite dans des conditions normales conformes à la loi et aux usages commerciaux ; elle a fait

constater par huissier qu’elle vend des produits certifiés halal notamment par l’organisme AVS et elle justifie s’approvisionner auprès de fournisseurs dont les produits carnés sont contrôlés par l’organisme AVS ;

— sur le moyen tiré de l’action en concurrence déloyale, la Cour de cassation refuse par principe le cumul entre concurrence déloyale et contrefaçon ; dès lors que l’exploitation non contrefaisante n’est pas en elle-même fautive, la jurisprudence exige, pour retenir un fait de concurrence déloyale, la démonstration d’une «faute distincte » de cette exploitation ; les faits invoqués comme constitutifs d’une prétendue concurrence déloyale se confondent matériellement avec les griefs de contrefaçon dont il a été démontré le caractère injustifié.

La cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE LA COUR

Sur l’action en contrefaçon

Selon l’article L 716-1 du code de la propriété intellectuelle, l’atteinte portée au droit du propriétaire de la marque constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur ; constitue une atteinte aux droits de la marque la violation des interdictions prévues aux articles L. 713-2, L. 713-3 et L. 713-4.

En vertu de l’article L 713-2 du même code, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire :

a) La reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, même avec l’adjonction de mots tels que: « formule, façon, système, imitation, genre, méthode », ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l’enregistrement.

Suivant l’article L 713-3, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s’il peut en résulter un risque de confusion dans l’esprit du public : a) La reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l’enregistrement; b) L’imitation d’une marque et l’usage d’une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement.

En vertu de l’article L 716-6 du code de la propriété intellectuelle, toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l’encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d’actes argués de contrefaçon ; le juge des référés ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu’il est porté atteinte à ses droits ou qu’une telle atteinte est imminente.

Dans l’affaire examinée, l’association AVS soutient que la mention des lettres AVS dans la phrase ' Votre boucherie Aljawda se fournit auprès de fournisseurs contrôlés par les organismes les plus rigoureux en matière du halal tel que halal service, halal contrôle, Achahada et AVS ', figurant sur le site internet de la SARL Aljawda constitue une contrefaçon de sa marque verbale ' AVS A VOTRE SERVICE ' et semi figurative ' AVS ' visée par l’article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle.

Ainsi que le premier juge l’a exposé dans des motifs que la cour adopte, la position de l’association AVS ne saurait être retenue.

Il n’est pas contesté que l’association A VOTRE SERVICE est titulaire de la marque verbale AVS et de la marque semi figurative AVS dans laquelle ces trois lettres forment un élément essentiel. La matérialité des faits reprochés à la SARL Aljawda tenant à l’existence de la phrase incriminée sur son site internet www.aljawda.fr n’est pas non plus discutée.

Toutefois, quand bien même l’usage par un tiers d’un signe identique à la marque intervient dans la vie des affaires, comme l’est la mention des lettres AVS par la SARL Aljawda dans la phrase incriminée sur son site internet à des fins commerciales, cet usage ne constitue une contrefaçon que s’il porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque, c’est-à-dire de garantir au consommateur l’origine d’un produit ou d’un service en lui permettant de les distinguer sans confusion possible de ceux qui ont une autre provenance.

Il s’ensuit qu’il n’y a pas contrefaçon lorsque le signe protégé comme marque est cité non pour désigner un produit ou un service mais dans une dénomination sociale.

Dans l’affaire en examen, le membre de phrase dans lequel les lettres AVS sont citées indique très clairement, que la SARL Aljawda, qui se présente sur son site comme une boucherie halal, ainsi que le démontrent les mots écrits en très gros caractère 'Aljawda Boucherie Halal', s’approvisionne auprès de fournisseurs qui sont contrôlés par

les organismes certifiant la licéité de la viande selon le rite musulman les plus rigoureux.

Le fait que les lettres AVS ne correspondent pas à la dénomination sociale de l’appelante et que les termes ' HALAL SERVICES ' constituent la marque d’un concurrent ne saurait mettre en cause l’interprétation qui s’impose manifestement à la lecture de la phrase dans son entier et son contexte.

Cette appréciation s’impose d’autant plus que le signe AVS est l’acronyme de sa dénomination sociale, que ce sigle est aussi employé pour la désigner, comme le démontrent ses statuts, et qu’elle est notoirement connue sous ce sigle par les consommateurs musulmans.

Il n’est pas non plus contesté que les termes 'Halal contrôle’ et 'Achahada’ sont des dénominations sociales d’organismes certifiant la licéité de produits selon le rite musulman.

La mention des lettres AVS dans le membre de phrase litigieux renvoie donc sans équivoque à la dénomination sociale de l’organisme de contrôle et non à la marque.

En outre, la phrase incriminée indique seulement mais très clairement que la boucherie Aljawda s’approvisionne auprès de fournisseurs contrôlés par les organismes les plus rigoureux, comme, notamment ou par exemple l’association A VOTRE SERVICE, l’expression 'tel que’ précédant la liste des quatre organismes cités indiquant sans équivoque que cette liste n’est pas exhaustive.

Elle ne saurait être comprise en ce sens que la boucherie Aljawda serait elle-même contrôlée par l’un de ces organismes ou l’association A VOTRE SERVICE.

Elle ne saurait donc induire en erreur un consommateur musulman attaché aux caractéristiques des produits vendus dans des boucheries contrôlés par l’association A VOTRE SERVICE, selon lesquelles ils ne doivent pas être mis en contact avec d’autres produits que ceux contrôlés par celle-ci, fussent-ils déclarés halal par d’autres organismes.

En effet, ce consommateur, particulièrement soucieux non seulement des conditions dans lesquelles il a été procédé à l’abattage des animaux mais aussi de celles dans lesquelles les produits certifiés par AVS sont mis en vente, ne saurait déduire de la phrase incriminée que la boucherie Aljawda serait agréée par l’association A VOTRE SERVICE ni ignorer que cette boucherie se fournit aussi auprès de producteurs agréés par d’autres organismes.

L’association A VOTRE SERVICE demande encore d’ordonner à la société Aljawda de cesser toute utilisation de la mention « AVS » au sein de son établissement de boucherie sans préciser quelle utilisation serait faite de cette mention qui devrait être prohibée.

En tout état de cause, l’association A VOTRE SERVICE ne conteste pas que les fournisseurs dont elle a certifié les produits sont autorisés à les vendre à des boucheries comme la SARL Aljawda qui n’ont pas conclu avec elle un contrat d’agrément et il ne saurait être fait grief à cette dernière de les proposer à la vente revêtus de l’estampille apposée lors de leur certification chez le fournisseur.

Au vu de ces éléments, l’ordonnance attaquée doit être confirmée en ce qu’elle a rejeté les demandes de l’association A VOTRE SERVICE au titre de la contrefaçon.

Sur la concurrence déloyale

Selon l’article 809 du code de procédure civile, le président du tribunal de grande instance peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans l’affaire examinée, l’association A VOTRE SERVICE soutient que l’utilisation du signe AVS par la SARL Aljawda dans le membre de phrase litigieux est fautif en ce qu’il crée une confusion dans l’esprit des consommateurs, de sorte que le fait de se prévaloir de l’agrément de son fournisseur sans être agréé soi-même est fautif.

Elle cite, à cet égard, l’article L 121-2 du code de la consommation dans sa version en vigueur au 1er juillet 2016, selon lequel une pratique commerciale est trompeuse si elle est créé une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commercial ou un autre signe distinctif d’un concurrent, si elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur les caractéristiques essentielles du bien ou du service, telles que ses qualités substantielles.

Elle se réfère encore à l’article L 121-4 du même code, aux termes duquel sont réputées trompeuses, au sens des articles L 121-2 et L 121-3, les pratiques commerciales qui ont pour objet d’afficher un certificat, un label de qualité ou un équivalent sans avoir obtenu l’autorisation nécessaire.

Elle mentionne, enfin, l’article 1240 du code civil, qui énonce que tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Cependant, la SARL Aljawda, dans la phrase litigieuse, contrairement à ce que l’association A VOTRE SERVICE soutient, n’indique pas que ses produits sont certifiés par celle-ci mais qu’elle s’approvisionne auprès de fournisseurs contrôlés par des organismes rigoureux comme, notamment, cette association.

En outre, comme il a déjà été dit, cette phrase ne saurait induire en erreur les consommateurs musulmans qui consultent le site de la SARL Aljawda sur les caractéristiques de la viande vendue par celle- ci.

En effet, ces consommateurs, dotés d’une attention et d’une information plus élevée, ne peuvent se méprendre sur le fait que la SARL Aljawda n’est pas elle-même agréée par l’association A VOTRE SERVICE et l’incidence, pour cette association, d’un approvisionnement auprès d’autres fournisseurs que ceux dont elle a authentifié les produits.

Il n’est donc pas établi avec l’évidence requise en référé que la mention du signe AVS dans la phrase incriminée revêt un caractère fautif ni qu’elle créé un préjudice à l’association appelante permettant de retenir la responsabilité de la SARL Aljawda sur le fondement des textes précités.

Au vu de ces considérations, l’ordonnance attaquée doit aussi être confirmée en ce qu’elle a rejeté les demandes de l’association A VOTRE SERVICE fondées sur la concurrence déloyale.

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts

La SARL Aljawda, qui soutient que l’appelante s’est livrée à un abus de droit, ne fournit aucune explication à l’appui de cette affirmation alors que l’exercice d’une action en justice de même que la défense à une telle action constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à l’octroi de dommages-intérêts que dans le cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollente au dol, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. La demande à ce titre doit donc être rejetée.

Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile

Le premier juge a fait une application équitable de l’article 700 du code de procédure civile et fondée de l’article 696 du même code. L’ordonnance attaquée doit aussi être confirmée en ce qu’elle a fait application de ces articles.

En cause d’appel, l’association A VOTRE SERVICE, dont le recours est rejeté, devra supporter les dépens, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

L’équité commande de décharger la partie intimée des frais non répétibles qu’elle s’est trouvée contrainte d’exposer. Il lui sera alloué la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME en toutes ses dispositions l’ordonnance rendue le 30 mars 2017 par le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris ;

Ajoutant à celle-ci,

CONDAMNE l’association A VOTRE SERVICE aux dépens d’appel et à payer à la SARL Aljawda la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

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