Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 20 décembre 2019, n° 17/13170

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 6 - ch. 8, 20 déc. 2019, n° 17/13170
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/13170
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Paris, 21 mai 2017, N° F16/08732
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 8

ARRET DU 20 DECEMBRE 2019

(n° , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 17/13170 – N° Portalis 35L7-V-B7B-B4K6A

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Mai 2017 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS 10 – RG n° F16/08732

APPELANT

Monsieur B X

[…]

[…]

né le […] à Dijon

Représenté par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

INTIMEE

SA BPCE IOM

[…]

[…]

N° SIRET : 420 698 979

Représentée par Me Nicolas MANCRET de la SELARL HOCHE SOCIETE D AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0061

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 24 Octobre 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme E F-G, Présidente

Monsieur Benoît DEVIGNOT, Conseiller

Mme Corinne JACQUEMIN LAGACHE, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Mme E F G présidente dans les conditions prévues par l’article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Monsieur Philippe ANDRIANASOLO

ARRET :

— contradictoire

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. Prorogé à ce jour.

— signé par E F G Présidente et par Philippe ANDRIANASOLO, greffier de la mise à disposition, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire

EXPOSÉ DU LITIGE

M. X a été engagé par le groupe CAISSE D’EPARGNE le 22 avril 2003.

Son contrat de travail a été transféré à la société BANQUE POPULAIRE CAISSE D’EPARGNE (BPCE) IOM ( alors dénommée Financière Océor), filiale du groupe, structure holding de pilotage des participations de BPCE IOM français, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 23 juillet 2007, en qualité de Cadre confirmé, avec reprise d’ancienneté au 22 avril 2003.

Ce même 23 juillet 2007, était conclu un contrat tripartite d’expatriation entre la société BPCE IOM, le salarié et la Banque des Mascareignes, située à l’Ile Maurice, afin d’y exercer les fonctions de Directeur de l’audit , et ce pour une durée de deux ans.

Par avenant en date du 20 août 2008, M. X a été promu au poste de Directeur financier de la Banque des Mascareignes, avec effet rétroactif au 1er août 2008, pour une nouvelle durée de deux ans.

Par avenant du 11 mai 2010, cette affectation a été prorogée de deux ans supplémentaires et sa rémunération a été augmentée.

En son dernier état, la rémunération moyenne brute mensuelle du salarié s’élevait à 14 872,46 euros.

La convention collective des Sociétés Financières est applicable à la relation de travail.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 24 avril 2012, M. X a été licencié par la société BPCE IOM pour faute grave après convocation à un entretien préalable, qui s’est déroulé le 6 avril 2012 et mise à pied à titre conservatoire.

Contestant cette mesure prise à son encontre, M. X a, par acte du 31 décembre 2012, saisi le conseil de Prud’hommes de Paris de plusieurs demandes de condamnation de l’employeur à lui verser :

des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

des dommages-intérêt pour circonstances brutales et vexatoires du licenciement

des dommages-intérêt pour atteinte à la réputation professionnelle

une indemnité compensatrice de préavis assortie des congés payés afférents,

une indemnité conventionnelle de licenciement.

En outre, il sollicitait la la remise de divers documents liés à la rupture de son contrat.

Par jugement du 22 mai 2017, la section Encadrement du conseil de Prud’hommes de Paris a débouté Monsieur B X de l’intégralité de ses demandes.

Par acte du 20 octobre 2017, le salarié a interjeté appel.

Dans ses dernières écritures déposées le 15 juillet 2019, auxquelles la Cour fait expressément référence, remises au greffe par voie électronique, M. X formule les demandes suivantes :

« Condamner la AA. BPCE INTERNATIONAL ET OUTRE-MER au paiement des sommes suivantes :

Indemnité compensatrice de préavis : 44.617,38 euros bruts,

Indemnité compensatrice de congés payés sur préavis : 4.461,74 euros bruts,

Indemnité conventionnelle de licenciement : 68.785,12 euros,

Dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 250.000 euros,

Dommages-intérêts résultant des circonstances brutales et vexatoires du licenciement: 80.000 euros,

Dommages-intérêts pour préjudice résultant de l’atteinte à la réputation professionnelle: 90.000 euros,

Ordonner la capitalisation des intérêts sur ces sommes conformément à l’article 1343-2 du code civil ;

Dire que ces sommes produiront intérêts au taux légal ;

Ordonner à la Société de faire publier le jugement à intervenir, en totalité ou par extraits, dans le journal « Les Echos », dans la limite d’un coût de 10.000 euros H.T., aux frais de la défenderesse ;

Ordonner la remise de l’attestation Pôle Emploi, d’un bulletin de paye de solde de tout compte et du certificat de travail rectifiés sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du prononcé du jugement à intervenir, le Conseil se réservant le droit de liquider ladite astreinte ;

Condamner la AA. BPCE INTERNATIONAL ET OUTRE-MER à payer la somme de 10.000,00 euros à Monsieur B X au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens ».

Dans ses dernières écritures déposées le 7 août 2019, auxquelles la Cour fait expressément référence, régulièrement signifiées remises au greffe par voie électronique, la SA BPCE IOM formule les demandes suivantes :

« CONFIRMER le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a débouté la société BPCEIOM de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

En conséquence :

DIRE ET JUGER que licenciement pour faute grave notifié le 24 avril 2012 à Monsieur X est fondé.

DEBOUTER Monsieur X de l’ensemble de ses demandes ;

CONDAMNER Monsieur X à verser à la société BPCE IOM la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNER Monsieur X aux entiers dépens ».

Pour un exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l’article 455 du Code de procédure civile, au jugement déféré et aux conclusions mentionnées ci-dessus.

Par ordonnance de clôture du 17 septembre 2019, le conseiller de la mise en état a prononcé la fin de l’instruction et a fixé l’affaire à une audience du 24 octobre 2019 où elle a été plaidée.

La Cour a entendu, en application des dispositions des articles 12, 442 et 445 du code de procédure civile, soulever d’office en soumettant la réponse des parties au principe de la contradiction, le moyen tiré de l’absence de pouvoir pour licencier de la société BPCE IOM après la conclusion du contrat tripartite d’expatriation conclu entre M. X , la société BPCE IOM et la Banque des Mascareignes, et sollicité le dépôt d’une note en délibéré en réponse sur ce point relativement à l’absence de lien de subordination entre BPCE IOM avec le salarié expatrié dont le contrat était suspendu pour être confié à la Banque des Mascareignes.

Les avocats constitués ont régulièrement déposé à la Cour et signifié par RPVA leur note en délibéré le 11 décembre 2019.

SUR QUOI

Sur le licenciement

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

Il appartient à l’employeur d’apporter la preuve de l’existence des faits, de leur gravité et de leur imputabilité au salarié.

Par ailleurs, en vertu de l’article L.'1332-4 du Code du Travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales, l’employeur ayant à charge de rapporter la preuve qu’il a eu connaissance des faits fautifs moins de deux mois avant le déclenchement de la procédure de licenciement.

En l’espèce, la lettre de licenciement, dont les termes fixent les limites du litige et servent de cadre strict à son contrôle, fait grief à M. X d’avoir :

le 21 novembre 2011, crédité de façon irrégulière et sans justificatif le compte personnel du président d’une société cliente de la Banque des Mascareignes en versant une somme de 325 000 euros avec le libellé suivant : «remboursement partiel de frais de dossier sur une lettre de crédit», alors qu’il s’est avéré qu’il ne disposait pas des éléments permettant de justifier que cette indemnisation était due dans la mesure ou la Banque des Mascareignes avait parfaitement accompli l’ensemble des diligences lui incombant dans ce dossier ;

malgré les montants en jeu, à aucun moment cru bon de prévenir BPCE IOM l’ employeur, pour

l’avertir de ce litige et de l’étrangeté de ce virement effectué sur le compte d’une personne physique alors qu’il s 'agissait une société ;

en outre, et donc avant même la signataire de l’accord intervenu à une date ultérieure, passé une écriture d’extourne de 325 000 € en créditant le compte personnel du président de ce groupe client, par le débit d’un compte classe 7 réservé aux commissions perçues, et non par le débit d’un compte de charge ;

omis de provisionner le solde de 62 173 € restant à verser au client au terme du protocole au prétexte que le compte «provisions pour litiges sociaux» aurait présenté un solde suffisant au 31 décembre 2011, étant précisé que ce compte était également totalement inadapté compte tenu de la nature du litige ;

par une volonté délibérée, tenté ainsi de dissimuler cette écriture d’indemnisation ;

dans le dossier de la «Tour Orange», sollicité le passage de provisions au motif que la Banque des Mascareignes aurait causé, par ses délais d’instruction, un préjudice au client estimé à 4 millions d’euros. Or, après étude du dossier, aucun élément ne démontrait l’existence d’un risque susceptible de justifier une telle demande de provision. En outre, aucune réponse n’a été donnée malgré plusieurs demandes quant à la communication des correspondances avec le client afin d’évaluer les risques, qu’il s’est délibérément abstenu de transmettre ;

prétendu, dans une réponse du 19 janvier 2012, que satisfaire à cette demande requerrait la relecture de 50 000 à 200 000 courriels, alors que l’un des collaborateurs de la Banque avez transmis une partie de cette correspondance par mail le I3janvier ;

ces faits démontrant, encore une fois, une volonté délibérée de dissimuler des informations en ne transmettant pas tous les éléments en votre possession à BPCE IOM alors même que les risques étaient connus ;

commis ces faits qui sont d’autant plus graves que la passation de cette provision aurait conduit la Banque des Mascareignes à un résultat d’exploitation négatif et l’aurait placé en difficulté sans juste raison.

Il apparaît à la lecture de cette lettre qu’elle est adressée par la société BPCE IOM qui se qualifie d’employeur.

L’employeur est celui qui, dans le cadre d’un contrat de travail caractérisé par l’existence d’un lien de subordination, exerce sur le salarié un pouvoir de direction. C’est en effet le lien de subordination unissant le salarié à l’employeur qui permet à ce dernier de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements constatés.

Or, le salarié expatrié est mis à la disposition d’une autre entité à l’étranger mais son contrat de travail est suspendu avec la société d’origine avec toutes les conséquences qui s’y attachent, et notamment relativement à la définition du poste, aux conditions de rémunération et à l’évaluation des compétences.

Ainsi, il n’a plus de lien de subordination avec l’entreprise d’origine installée en France et il ne fait plus partie de ses effectifs.

En l’espèce, il résulte expressément du contrat tripartite entre la BPCE-IOM (alors dénommée Financière Océor) du 23 juillet 2007 (Pièce n°2) que la Banque des Mascareignes exercera le pouvoir de direction sur M. X dès lors qu’il est stipulé que:

« Article 2 : Effet du contrat Au cours de la période d’expatriation, le Contrat d’Origine signé entre la Société et le Salarié ['] est suspendu.

Les dispositions du contrat de substituent, pendant la durée de l’affectation du Salarié au sein de la

Société d’Accueil, au Contrat d’Origine.

[']

Article 3 : Fonctions

[']

Le Salarié sera rattaché hiérarchiquement au Directeur Général de la Banque des Mascareignes.'».

Article 5 : Rémunération

[']

La rémunération du Salarié lui sera versée par la Société d’Accueil ['].

Article 6 : Durée du travail et congés payés

['] le Salarié se conformera aux horaires de travail et congés en vigueur au sein de la Société

d’Accueil.

[']

La période de congés sera déterminée ['] en accord avec le supérieur hiérarchique du Salarié. [']

Article 8 : Avantages en nature

['] Ces avantages seront pris en charge par la Société d’Accueil.

Article 9 : Fiscalité

Pendant toute la durée du présent Contrat, la Société d’Accueil sera responsable du paiement de

l’impôt sur le revenu du Salarié.

Article 10 : Couverture sociale

Durant son expatriation, le Salarié sera affilié ['] au régime local de sécurité sociale mauricien.

[']

La Société d’Accueil règlera les cotisations patronales et salariales ['] pendant la durée de

l’affectation ['].

Article 11 : Absence pour maladie ou accident

Le Salarié doit informer la Société d’Accueil ['] de toute absence [']

Article 14 : Obligations professionnelles ' Exclusivité

Le Salarié s’engage à observer le règlement intérieur de la Société d’Accueil ['] ».

L’instauration d’une relation de travail exclusive entre la Banque des Mascareignes et M. X est corroborée par l’application stricte de ce contrat dès lors que le salarié démontre que sa rémunération lui a été versée par la Banque des Mascareignes, laquelle s’est également acquittée du versement des cotisations sociales afférentes ainsi que de l’impôt sur le revenu, comme le prouvent les bulletins de paye versés aux débats (Pièce n°7), que la directrice générale de la Banque des Mascareignes, Mme N. J, a procédé aux évaluations annuelles du travail de M. X (Pièces n°33 et 39), qu’ un avenant au contrat de travail de M. X lui attribuant une part variable de rémunération a été conclu entre Mme DJ. et M. X le 25 juillet 2008 (Pièce n°37) et que les attributions de primes au profit de M. X ont été décidées et notifiées par la directrice générale

(Pièces 38-1 et 38-2) ou par le Directeur des Ressources Humaines de la Banque des Mascareignes, M. O. M. (Pièce n°40) .

De plus, d’une part, la société BPCE IOM ne prouve pas que pendant la période d’expatriation, elle soit intervenue dans la gestion de la relation de travail de M. X.

D’autre part, il est également établi qu’au moment où la procédure de licenciement de M. X a été mise en 'uvre, la Banque des Mascareignes disposait de tous ses organes de direction générale et de direction des ressources humaines susceptible de procéder à un licenciement puisque le Directeur Général a été nommé le 12 février 2012 ( après intérim occupé par M. L à la suite du licenciement de Mme DJ. : Pièce n°36-21) alors que le poste de Directeur des Ressources Humaines n’a connu aucune vacance, étant occupé pendant la procédure de licenciement de M. X par M. M. (Pièce n°40) puis par Mme S. (Pièce n°42).

Enfin, il convient de souligner également que le fait que le certificat de travail ait été établi par la Banque des Mascareignes, sous la signature de son Directeur Général (Pièce n°43) démontre l’appartenance du salarié à ses effectifs.

Dès lors la BPCE IOM ne peut valablement soutenir qu’elle demeurait employeur et avait le pouvoir de licencier en l’absence de suspension du contrat de travail avec elle, au motif que l’avenant du 20 aout 2008 conclu précisait à l’article 1 que: « au cours de cette mission d’affectation, le contrat de travail signé entre la Société et le Salarié en date du 24 mai 2004, demeure en vigueur'», alors que ce n’est qu’en cas de rupture du contrat de travail par la société étrangère ou à la fin de mission que le contrat reprend vigueur, ce dernier étant suspendu pendant toute la période de l’expatriation.

Il en résulte que le licenciement a été notifié par une entité juridique qui n’en n’avait pas le pouvoir, ce qui le rend nécessairement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera en conséquence réformé en ce que M. X a été débouté des demandes indemnitaires

La BPCE IOM sera tenue d’indemniser le salarié dès lors qu’en cas de licenciement pendant la période où il se trouve à l’étranger, ou à la fin de la mission du salarié à l’étranger, la société française avec laquelle le contrat de travail n’a pas été rompu, mais a été simplement suspendu, est tenue de toutes ses obligations d’employeur vis-à-vis du salarié.

Sur les conséquences indemnitaires du licenciement

En application des articles L. 2134 ' 1, L. 1234 ' 6 et R. 1234 ' 1 et suivants du code du travail, M. X peut prétendre à une indemnité compensatrice de préavis, les congés payés sur préavis et

l’indemnité légale de licenciement.

Il lui sera alloué, selon un calcul effectué par le salarié , non contesté par l’employeur et sur la base de calcul d’un salaire mensuel brut moyen des 12 derniers mois égal à 14.872,46 euros (Pièce n°34), les sommes de 44.617,38 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis, 4.461,74 euros bruts à titre de congés payés sur préavis (3 mois selon art 38 de la convention collective) et 68.785,12 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement.

Concernant les dommages et intérêts pour préjudice subi du fait de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, il convient de tenir compte de la qualification du salarié, de son âge (38 ans à la date de son licenciement), de son ancienneté de plus de neuf ans au sein du groupe, du fait qu’il y a occupé le poste de Chef de mission au sein de l’inspection générale et de la nature de son poste à l’île Maurice ainsi que du temps pendant lequel il est resté sans emploi.

Il justifie à ce titre d’une période de chômage en France jusqu’au 14 mars 2016, date à laquelle il a été embauché en qualité de Secrétaire Général d’une PME de Seine Saint-Denis pour un salaire très inférieur à celui qu’il percevait auprès de la Banque des Mascareignes puisqu’ équivalent à celui qu’il percevait 10 ans auparavant ; cet emploi faisait suite à un poste qu’il avait obtenu en tant que Directeur Administratif et Financier du groupe SIPROMAD, mais à Madagascar, pays où il a rencontré avec sa famille des problèmes d’adaptation et qu’il a dû quitter pour rentrer en France en 2015.

De plus, le salarié justifie qu’il n’a pu à cette époque bénéficier d’aucune prise en charge par l’assurance chômage compte tenu du fait qu’il avait été, en dernier lieu, employé à l’étranger sous contrat de droit étranger.

Au vu de l’ensemble de ces éléments la Cour évalue à 180 000 euros le montant des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse.

Sur l’existence de circonstances brutales et vexatoires du licenciement

Les relations contractuelles de travail n’écartent pas la possibilité d’une demande en réparation des circonstances particulièrement brutales et vexatoires du licenciement sur le fondement de l’article 1382 devenu article 1240 du code civil, et un salarié a droit à la réparation du préjudice moral causé par les circonstances brutales de la rupture.

D’autre part, aux termes de l’article L. 1222-1 du code du travail : « Le contrat de travail est exécuté de bonne foi. ».

M. X sur lequel pèse la preuve des circonstances vexatoires et brutales de son licenciement cause d’un préjudice distinct de celui né de la rupture de son contrat de travail établit avoir été licencié le 24 avril 2012 après que lui eût été remis en main propre un courrier le 28 avril 2012 fixant un entretien préalable au 6 avril 2012 avec mise à pied conservatoire.

Le licenciement est ainsi intervenu sans la moindre discussion préalable avant l’entretien et ce, malgré les griefs graves énoncés à l’encontre du salarié, lequel en l’occurrence les conteste formellement notamment celui selon lequel il aurait par une volonté délibérée dissimulé des informations . Il doit d’ailleurs, compte tenu des termes employés dans la lettre de licenciement, être souligné qu’il n’a pu discuter des griefs portés à son encontre avec son employeur, à savoir la banque des Mascareignes, pourtant bien informée du contexte dans lequel une écriture comptable avait été passée pour une transaction antérieurement à sa signature et également quant au litige survenu avec un client concernant ce qui était dénommé le litige « tour orange ». En effet, bien que tenu sur l’île Maurice, l’entretien a eu lieu avec un représentant de la société BPCE IOM.

De plus, le licenciement survenu dans un laps de temps très court pour les faits qui y étaient énoncés a nécessité, compte tenu de sa situation d’expatrié, que le salarié prenne des mesures en urgence pour retrouver un emploi dans un pays où compte tenu de son contexte familial il lui a été difficile de rester et qu’il a dû revenir sur le territoire métropolitain et accepter un emploi avec un salaire inférieur.

Ainsi l’appelant prouve qu’il a subi un préjudice en lien avec la faute délictuelle commise par l’employeur dans le cadre de la rupture du contrat de travail et les circonstances précitées justifient qu’il soit alloué à M. X la somme de 30'000 euros à ce titre.

Sur l’existence d’une atteinte à la réputation professionnelle

En application de l’article 1240 du Code civil, il appartient au salarié qui formule une demande en dommages et intérêts de démontrer l’existence de son préjudice.

M. X ne justifie pas que les circonstances brutales et vexatoires du licenciement qui ont été indemnisées ci-dessus, ont entraîné une publicité particulière ayant entouré les circonstances de la rupture, de nature à porter atteinte à sa réputation, et il sera en conséquence débouté de la demande indemnitaire présentée à ce titre.

Le jugement sera en conséquence confirmé sur ce point.

Sur la publication de l’arrêt dans le journal « Les Echos »

Il n’y a pas lieu, dès lors que l’atteinte à sa réputation professionnelle n’est pas prouvée par le salarié, d’ordonner la publication sollicitée.

Sur le cours des intérêts légaux et leur capitalisation

Conformément aux dispositions des articles 1153 et 1153-1, devenus les articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances salariales sont assorties d’intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes et les dommages et intérêts alloués seront assortis d’intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Les intérêts courus seront capitalisés dans les conditions de l’article 1154 du code civil ( dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016 ), applicable à l’espèce devenu l’article 1343 -2 du même code.

Sur la demande de remise de documents

Compte tenu des développements qui précèdent, la demande tendant à la remise de documents sociaux conformes est fondée et il y est fait droit dans les termes du dispositif.

Il n’y a pas lieu au prononcé d’une astreinte.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile.

La SA BPCE IOM qui succombe dans le cadre de la présente procédure est condamné aux dépens et à payer à M. X la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et par voie de conséquence la BPCE sera déboutée de la demande présentée à ce titre.

PAR CES MOTIFS

statuant par arrêt mis à disposition au secrétariat greffe,

CONFIRME le jugement rendu le 22 mai 2017 par la section Encadrement du conseil de Prud’hommes de Paris en ce qu’il a débouté M. X de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice résultant de l’atteinte à la réputation professionnelle.

INFIRME le jugement pour le surplus, et statuant à nouveau,

DIT que le licenciement de M. X est sans cause réelle et sérieuse.

CONDAMNE la SA BANQUE POPULAIRE CAISSE D’EPARGNE (BPCE) IOM, prise en la personne de son représentant légal,dont le siège social est situé […], […] à payer à M. X la somme de :

44.617,38 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis ,

4.461,74 euros bruts à titre de congés payés sur préavis,

2 481,31 euros à titre d’indemnité de licenciement,

68.785,12 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

180 000 euros à titre d’indemnité de rupture,

30'000 euros à titre de dommages-intérêts pour circonstances brutales et vexatoires du licenciement.

DIT que les condamnations au paiement de créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes et que les condamnations au paiement de créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition du présent arrêt.

AUTORISE la capitalisation des intérêts dans les conditions dans les conditions de l’article 1154 ancien du code civil.

ORDONNE la remise par la SA BANQUE POPULAIRE CAISSE D’EPARGNE (BPCE) IOM, prise en la personne de son représentant légal de bulletins de paye, la remise de l’attestation Pôle Emploi, d’un bulletin de paye de solde de tout compte et du certificat de travail rectifiés conformes au présent arrêt.

DIT n’y avoir lieu à prononcer une astreinte.

CONDAMNE la SA BANQUE POPULAIRE CAISSE D’EPARGNE (BPCE) IOM à payer à M. X en cause d’appel la somme de 4000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et par voie de conséquence déboute la BPCE de la demande présentée à ce titre.

CONDAMNE la SA BANQUE POPULAIRE CAISSE D’EPARGNE (BPCE) IOM aux dépens à de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

S. F G

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