Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 25 juin 2019, n° 18/04777

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 6 - ch. 11, 25 juin 2019, n° 18/04777
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/04777
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Créteil, 4 mai 2017, N° 16/00003
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 11

ARRET DU 25 JUIN 2019

(n° , 2 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/04777 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B5NDT

Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Mai 2017 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CRETEIL – RG n° 16/00003

APPELANT

Monsieur E A B

[…]

[…]

Représenté par Me Barbara VRILLAC, avocat au barreau de SENLIS

INTIMÉES

SAS SMAC

[…]

[…]

Représentée par Me Stéphanie ZAKS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0277

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF EST

[…]

[…]

Représentée par Me Arnaud CLERC de la SELARL LAFARGE ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : T10

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 Février 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Sylvie HYLAIRE, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Sylvie HYLAIRE, présidente

Monsieur Denis ARDISSON, président

Monsieur Didier MALINOSKY, vice-président placé

Greffier, lors des débats : Mme Amélie FERRARI

ARRÊT :

— Contradictoire

— Mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

— Signé par Madame Sylvie HYLAIRE, présidente, et par Mme Caroline GAUTIER, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

La société anonyme Linéa BTP appartenant au groupe Bouygues était une société spécialisée dans les secteurs du bâtiment et des travaux publics, notamment dans les domaines de la voirie, de l’étanchéité et de la signalisation en zone urbaine.

Elle exerçait ses activités sur deux sites :

— celui de Beauvais comptant un effectif de 34 salariés, dédié à une activité VRD (voirie, réseaux divers, éclairages, espaces verts, signalisations) ;

— celui de Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne) où était également basé le siège social de la société comptant un effectif de 84 salariés, exploitant une activité d’étanchéité et des activités VRD.

Le capital de la société Linéa BTP était détenu par deux sociétés, la société SMAC et sa filiale, la société MATCH.

Par jugement rendu le 22 juillet 2015, le tribunal de commerce de Créteil a prononcé la liquidation judiciaire de la société Linéa BTP avec poursuite d’activité pendant trois mois et a désigné Maître Y en qualité de mandataire liquidateur et Maître X en qualité d’administrateur judiciaire.

Par jugement en date du 23 septembre 2015, le tribunal de commerce a mis fin à la poursuite d’activité, décision entraînant la fermeture des deux sites.

Le contrat de travail de M. E A B, né en 1987, qui exerçait les fonctions de man’uvre au sein de la société Linéa BTP depuis le 1er août 2008, a pris fin au cours du dernier trimestre de l’année 2015à la suite de la procédure de licenciement collectif pour motif économique mise en place par le mandataire liquidateur pour l’ensemble du personnel de la société, étant précisé que par décision en date du 28 septembre 2015, la DIRECCTE du Val-de-Marne a validé l’accord collectif majoritaire portant sur la mise en 'uvre du plan de sauvegarde de l’emploi signé le 24 septembre par les syndicats représentatifs de l’entreprise.

Son licenciement pour motif économique a été notifié au salarié le 9 octobre 2015 et la relation contractuelle a pris fin le 14 décembre 2015.

Le 24 décembre 2015, M. A B et 49 autres salariés de la société Linéa BTP, contestant les conditions de la rupture de leur contrat de travail et mettant en cause, outre leur employeur, la société SMAC en qualité de co-employeur, ont saisi le conseil de prud’hommes de Créteil qui, par jugement rendu le 5 mai 2017, a débouté l’ensemble des salariés de leurs demandes, dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile et condamné les demandeurs aux dépens.

*

Par déclaration sur support papier déposée au greffe le 16 juin 2017 par leur conseil, avocat au Barreau de Senlis, tous les salariés ont relevé appel de la décision rendue par le conseil de prud’hommes.

Les dossiers de chacun des salariés ont été disjoints.

L’Unedic AGS CGEA Île-de-France Est a constitué avocat le 28 juin 2017.

Le 10 juillet 2017, Maître C D s’est constituée pour le compte de Maître Y en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Linéa BTP.

La société SMAC a constitué avocat le 19 juillet 2017.

Le 13 septembre 2017, le conseil des appelants a déposé ses écritures sur support papier au greffe de la cour.

Par ordonnance rendue le 4 décembre 2018, suite aux conclusions d’incident adressées par Maître Y en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Linéa BTP, le magistrat chargé de la mise en état a :

— dit n’y avoir lieu à déclarer l’appel formé par le salarié irrecevable,

— prononcé la caducité de l’appel formé par le salarié à l’égard de Maître Y en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Linéa BTP,

— dit que l’instance se poursuit entre les autres parties,

— fixé un calendrier de procédure, avec une clôture à la date du 30 janvier 2019 et une audience de plaidoirie au 14 février 2019,

— dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile,

— dit que les dépens de l’incident seront supportés par le salarié.

*

M. A B demande à la cour d’infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Créteil et, statuant à nouveau, de :

A titre principal,

— dire que les critères d’une situation de co-emploi entre la société SMAC et sa filiale Linéa BTP sont réunies,

— dès lors, dire que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

— condamner la société SMAC à lui verser une somme de 26.000 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

A titre subsidiaire,

— renvoyer l’affaire devant le tribunal de grande instance de Créteil afin que celui-ci examine ses demandes fondées sur la responsabilité extra-contractuelle de la société SMAC du fait que celle-ci, par sa faute ou a minima par sa légèreté blâmable, a contribué à la déconfiture de sa filiale et à la perte des emplois et que dès lors, la société SMAC soit condamnée à lui verser, à titre de dommages et intérêts pour la perte de son emploi, une somme identique à celle sollicitée au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse soit 26.000 €,

— condamner la société SMAC à lui verser la somme de 1.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la notification de la décision à intervenir,

— condamner la société SMAC aux dépens et frais d’exécution de la décision à intervenir.

Dans ses conclusions communiquées par le réseau privé virtuel des avocats le 8 janvier 2019, la société SMAC demande à la cour de :

In limine litis et avant toute défense au fond,

— infirmer le jugement entrepris en ce que le conseil de prud’hommes s’est déclaré matériellement compétent pour statuer sur la demande d’engagement de la responsabilité délictuelle de la société SMAC, tiers au contrat de travail,

Statuant à nouveau,

— juger que le conseil de prud’hommes est matériellement incompétent pour statuer sur la demande d’engagement de la responsabilité délictuelle de la société SMAC,

En conséquence,

— débouter l’AGS de sa demande de condamnation de la société SMAC au versement de la somme chiffrée, à titre principal, à 2.045.503 € à titre de dommages et intérêts à hauteur de l’intégralité des sommes avancées dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Linéa BTP, ou, à titre subsidiaire, à 936.300,93 € à titre de dommages et intérêts à hauteur de l’intégralité des avances faites pour le compte des appelants,

— renvoyer les appelants ainsi que l’AGS à mieux se pourvoir devant le tribunal de grande instance de Créteil ;

A titre principal,

— confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que la société SMAC n’avait pas la qualité de co-employeur et débouté les appelants de l’ensemble de leurs demandes à ce titre,

— débouter l’AGS de sa demande de condamnation de la société SMAC au versement de la somme chiffrée, à titre principal, à 2.045.503 € à titre de dommages et intérêts à hauteur de l’intégralité des

sommes avancées dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Linéa BTP, ou, à titre subsidiaire, à 936.300,93 € à titre de dommages et intérêts à hauteur de l’intégralité des avances faites pour le compte des appelants ;

A titre subsidiaire, si par extraordinaire, la cour infirmait le jugement entrepris et jugeait que la société SMAC a la qualité de co-employeur des appelants,

— juger que le secteur d’activité de la construction du groupe Bouygues est affecté par des difficultés économiques,

— dire que le liquidateur a procédé à des recherches sérieuses de reclassement au sein de l’ensemble des sociétés du groupe Bouygues,

— en conséquence, juger que les licenciements ont une cause réelle et sérieuse ;

En tout état de cause,

— débouter les appelants de l’intégralité de leurs demandes,

— condamner chacun d’eux à payer à la société SMAC la somme de 1.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Sur la demande formée à titre subsidiaire sur le fondement de la responsabilité délictuelle,

A titre principal,

— dire que la société SMAC n’a commis aucune faute susceptible d’engager sa responsabilité délictuelle en qualité de tiers au contrat,

En conséquence,

— débouter les appelants de l’ensemble de leurs demandes,

— débouter l’AGS de sa demande de condamnation de la société SMAC au versement de la somme chiffrée, à titre principal, à 2.045.503 € à titre de dommages et intérêts à hauteur de l’intégralité des sommes avancées dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Linéa BTP, ou, à titre subsidiaire, à 936.300,93 € à titre de dommages et intérêts à hauteur de l’intégralité des avances faites pour le compte des appelants ;

A titre subsidiaire, si par extraordinaire, la cour infirmait le jugement entrepris et jugeait que la société SMAC a commis une faute délictuelle,

— dire que la faute commise n’a que très partiellement causé le préjudice allégué par les appelants,

— juger que le montant du remboursement des avances faites par l’AGS ne pourra excéder le montant correspondant aux avances faites pour le compte des appelants,

En conséquence,

— limiter substantiellement le montant des condamnations,

— limiter le montant de la condamnation de la société SMAC à verser à l’AGS à la somme de 906.965,34 € à titre de dommages et intérêts à hauteur de l’intégralité des sommes avancées pour le compte des appelants ;

A titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire, la cour infirmait le jugement entrepris et jugeait les licenciements sans cause réelle et sérieuse,

— dire que les appelants ne rapportent pas la preuve d’un préjudice subi,

En conséquence,

— dire que la société SMAC ne pourra être condamnée à verser aux appelants à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse une somme supérieure à 6 mois de salaire,

— juger que le montant du remboursement des avances faites par l’AGS ne pourra excéder le montant correspondant aux avances faites pour le compte des appelants,

En conséquence,

— limiter substantiellement le montant des condamnations de la société SMAC à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— limiter le montant de la condamnation de la société SMAC au profit de l’AGS à la somme de 906.965,34 € à titre de dommages et intérêts à hauteur de l’intégralité des sommes avancées pour le compte des appelants.

Dans ses conclusions communiquées par le réseau privé virtuel des avocats le 21 janvier 2019, l’association Unedic Délégation AGS CGEA d’Île-de-France Est demande à la cour de :

À titre liminaire,

— constater que les salariés ont abandonné leurs demandes à l’encontre de la société Linéa BTP et de l’AGS consistant en une contestation du contenu du plan de sauvegarde de l’emploi validé par la DIRECCTE,

— se déclarer compétente pour examiner les autres demandes des salariés et de l’AGS,

— donner acte à l’AGS qu’elle s’en rapporte à la sagesse de la cour s’agissant de la demande de renvoi devant le tribunal de grande instance sur les demandes consistant en une mise en cause de la responsabilité civile délictuelle de la société SMAC,

Sur les demandes,

— confirmer le jugement entrepris en ce que le conseil de prud’hommes a constaté l’absence de co-emploi,

— débouter les salariés de leurs demandes fins et conclusions,

À titre subsidiaire, en cas de co-emploi ou de légèreté blâmable de la société SMAC,

— condamner la société SMAC à verser à l’AGS la somme de 2.045.503,91€ à titre de dommages et intérêts à hauteur de l’intégralité des sommes avancées par l’AGS dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Linéa BTP,

À titre infiniment subsidiaire,

— condamner la société SMAC à verser à l’AGS la somme de 936.300,93 € à titre de dommages et intérêts à hauteur de l’intégralité des avances faites pour le compte des appelants,

En tout état de cause,

— prononcer la mise hors de cause de l’AGS en cas de condamnation de la société SMAC.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 30 janvier 2019 et l’affaire a été fixée à l’audience du 14 février 2019.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le co-emploi

Au soutien de ses prétentions, M. A B invoque les éléments suivants :

— sur un plan capitalistique :

* la société SMAC détenait directement 21,95 % des actions de de la société Linéa BTP ;

* les 78,05% restant étaient détenus par la SAS MATCH dont la société SMAC possède 100 % des actions ;

— les représentants légaux des deux sociétés étaient identiques ;

— il existait une confusion de direction générale, opérationnelle et organisationnelle ainsi caractérisée :

* par le biais de conventions d’assistance couvrant tous les domaines,

* les postes de directeur des ressources humaines, de directeur administratif et financier, de directrice des affaires juridiques des deux sociétés étaient occupés par les mêmes personnes,

* des notes de services édictées par la société SMAC s’appliquaient aux salariés de la société Linéa BTP,

* certains documents sociaux de salariés de la société Linéa BTP ont été rédigés par la société SMAC ;

— la société Linéa BTP bénéficiait d’un soutien financier total la plaçant dans une situation de dépendance ; le rapport du tribunal de commerce démontrerait que les seuls créanciers de la société Linéa BTP étaient les sociétés SMAC et SATA, cette dernière étant une filiale gérant le matériel commun entre Linéa BTP et SMAC ; à elle seule, la créance de la société SMC représente 68,70% du passif de la liquidation de la société Linea BTP ;

— il existait une confusion d’activités entre les deux sociétés qui avaient les mêmes marchés, les mêmes fournisseurs et clients.

La société SMAC conteste sa qualité de co-employeur, faisant valoir l’absence de confusion d’activités, de direction, d’intérêts et l’absence d’immixtion dans la gestion sociale et économique.

L’AGS sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a refusé la qualité de co-employeur à la société SMAC.

*

Hors l’existence d’un lien de subordination, une société faisant partie d’un groupe ne peut être considérée comme co-employeur à l’égard du personnel employé par une autre, que s’il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l’état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d’intérêts, d’activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière.

Sur la confusion de direction

Si, au vu des extraits Kbis produits par M. A B, les trois sociétés Linéa BTP, SMAC et MATCH avaient le même dirigeant, la société Linéa BTP disposait d’un directeur pour le site de Beauvais et de deux directeurs pour chacune des activités du site de Vitry (pièce 22 salarié) ainsi que d’un responsable administratif et comptable (pièce 17 salarié) et, en dehors du représentant légal de la société Linéa BTP, seuls les salariés de celle-ci disposaient du pouvoir de paiement et d’enregistrement par la comptabilité de la société (pièce 19 salarié).

Sur la confusion d’intérêts

L’affirmation du salarié selon laquelle la société SATA gérait le matériel commun aux deux sociétés n’est étayée par aucune pièce.

Par ailleurs, l’examen des pièces 2, 6 et 24 du salarié, visées comme établissant la situation de « dépendance financière » de la société Linéa BTP n’établit pas cette dépendance : contrairement à ce qu’affirme M. A B, la société SMAC et la société SATA n’étaient pas « les seuls créanciers », le compte courant de la société SMAC s’élevant à 6.673.190 € pour un passif total représentant 11.306.263 €, composé notamment de dettes (fournisseurs et autres) pour plus de 3 millions d’euros et de dettes salariales, sociales et fiscales pour près de 1,5 million d’euros.

Sur la confusion d’activités

L’affirmation selon laquelle les deux sociétés avaient les mêmes clients, les mêmes marchés et les mêmes fournisseurs ne se traduit pas dans les pièces visées dans les écritures de M. A B :

— pièce 10 : présentation de l’annualisation du temps de travail,

— pièce 12 : mail relatif aux entretiens d’évaluation,

— pièce 14 : mail relatif au planning de présentation des budgets,

— pièce 15 : mail relatif au plan de charge de la société Linéa BTP pour l’exercice 2014,

— pièce 16 et 20 : directives budgétaires 2014 et 2015,

— pièce 17 : organigramme,

— pièce 19 : signataires habilités au sein de la société pour les paiements,

— pièce 21 : bilan des plans d’actions matériel 2012 et 2013,

— pièce 22 : organigramme de la société,

— pièce 26 : relevé de répartition de la taxe professionnelle.

Par ailleurs, la société SMAC fait état dans ses écritures de différences dans les activités respectives des parties dont la réalité se vérifie dans les pièces versées aux débats :

— pièce 11 société : présentation de la société Linéa BTP,

— pièce 11 salarié : historique société SMAC.

Sur l’immixtion dans la gestion économique et sociale

Les pièces invoquées par M. A B pour caractériser une immixtion de la société SMAC dans la gestion sociale de la société Linéa BTP ne démontrent pas la réalité d’une telle immixtion ni son caractère anormal au regard des nécessaires liens de coordination entre une société mère et sa filiale :

— la pièce n° 10 qui porte le logo des deux sociétés est une présentation des règles régissant « l’annualisation du temps de travail chez Linéa BTP »,

— la pièce n° 12 : mail de mars 2011 qui est un simple rappel fait à l’ensemble des directeurs de sites des modalités d’organisation des entretiens annuels d’échanges qui laissent d’ailleurs à ses destinataires le choix du support d’entretien ;

— la pièce 23 : extrait d’un document d’information « Sécuri News » du mois d’août 2012 rappelant à l’ensemble des salariés du groupe « les bonnes pratiques en matière de sécurisation des chantiers » ;

— la pièce 26 : modalités de répartition de la taxe professionnelle entre les différentes filiales pour l’année 2013, dont il n’est ni justifié ni même soutenu qu’elles généraient des charges indues pour la société Linéa BTP.

S’agissant des lettres adressées à M. Z relatives à la mise en 'uvre de sanctions disciplinaires (pièces 29 : lettres des 29 janvier puis 16 mars 2015), la société SMAC justifie qu’à la date de ces courriers, leur signataire, M. H-I J, exerçait les fonctions de directeur de l’agence de la société Linéa BTP (pièce 7 de la société) et était donc investi normalement du pouvoir de direction à l’égard des salariés de celle-ci.

M. A B produit également un échange de mails entre le directeur d’exploitation du site de Beauvais et la direction des ressources humaines de la société SMAC (pièce 15) relatif notamment au recours à la mise en activité partielle des salariés du site à raison de la baisse d’activité : cet échange de mails, loin de démontrer la réalité d’une immixtion de la société SMAC, témoigne au contraire de l’autonomie décisionnelle puisque finalement cette option envisagée par la société SMAC n’a pas été celle retenue par la société Linéa BTP.

Enfin, si la pièce 13 versée aux débats par M. A B fait apparaître que les documents sociaux de fin de contrat ont été établis par la société SMAC, la cour relève, ainsi que le fait observer celle-ci, que c’est en vertu d’une convention passée entre le liquidateur de la société Linéa BTP, Maître Y, et la société SMAC, le 15 septembre 2015 (pièce 2 société) que celle-ci a, sur la demande du liquidateur, accepté de l’assister notamment dans le cadre de la gestion du personnel.

Ce contrat d’assistance, conclu pour les besoins de la liquidation n’est pas de nature à établir l’existence antérieure d’une situation de co-emploi, étant observé que l’existence de « conventions d’assistance couvrant tous les domaines essentiels notamment en matière de gestion du personnel » telles que citées dans les écritures de M. A B, n’est étayée par aucune pièce.

Quant à l’immixtion de la société SMAC dans la gestion économique de sa filiale, la seule application de directives comptables et financières sur les modalités de communication et de présentation des budgets annuels (pièces 14, 16 et 20 salarié) ne traduisent pas une immixtion anormale de la société mère sur le fonctionnement de ses filiales.

La pièce 18 (réunion d’activités du 25 juin 2014) est également dépourvue de tout caractère probant à cet égard.

Par ailleurs, les échanges de mails en juin 2015 (pièce 15 salarié) entre le directeur d’exploitation et la société SMAC quant au projet formé, après l’ouverture de la procédure collective de la société Linéa BTP, de la création d’une SCOP en vue de la reprise de l’activité de la société ne caractérisent pas plus une immixtion de la société mère mais plutôt une aide à ce projet mené par le directeur d’exploitation avec les salariés de l’entreprise.

Enfin, s’il ne peut être contesté que la société SMAC a apporté un soutien financier à sa filiale, il ne saurait se déduire de ce soutien financier une immixtion anormale de la société mère dans la gestion économique et financière de sa filiale.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, la situation de co-emploi n’est pas caractérisée et c’est à juste titre que les premiers juges ont débouté M. A B de ses demandes de ce chef.

Sur la responsabilité délictuelle de la société SMAC en raison de sa faute ou de sa légèreté blâmable

Compte tenu de l’accord de M. A B et de la société SMAC sur l’incompétence de la cour pour statuer sur la responsabilité éventuelle de la société SMAC dans la déconfiture de la société Linéa BTP, il convient d’ordonner le renvoi des parties pour l’examen des demandes à ce titre devant le tribunal de grande instance de Créteil.

Sur les autres demandes

M. A B, qui succombe en son recours, sera condamné aux dépens mais il n’apparaît pas inéquitable, compte tenu de la situation financière de l’appelant, de laisser à chacune des parties, la charge des frais irrépétibles exposés par elle dans le cadre de l’instance prud’homale.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a jugé que la société SMAC n’avait pas la qualité de co-employeur de M. E A B et a débouté celui-ci de ses demandes à ce titre,

L’infirme pour le surplus,

Ordonne, conformément aux demandes de M. E A B et de la société SMAC, le renvoi de toutes les parties devant le tribunal de grande instance de Créteil, pour l’examen de leurs prétentions respectives quant à la responsabilité éventuelle de la société SMAC dans la déconfiture de la société Linéa BTP à raison de sa faute ou de sa légèreté blâmable,

Dit n’y avoir lieu à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. E A B aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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