Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 1, 2 juin 2020, n° 17/11955

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 - ch. 1, 2 juin 2020, n° 17/11955
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/11955
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 9 novembre 2016, N° 13/18572
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 1

ARRET DU 02 JUIN 2020

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 17/11955 – N° Portalis 35L7-V-B7B-B3RFH

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Novembre 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 13/18572

APPELANT

LE MINISTÈRE PUBLIC agissant en la personne de MADAME LE PROCUREUR GÉNÉRAL – SERVICE CIVIL

[…]

[…]

représenté par Monsieur LERNOUT, avocat général

INTIMEE

Madame X née le […] à […],

N° 10 Shanmugam Muthaliyar Thottam

Vandrapet

[…]

représentée par Me Barbara CLAUSS de la SELARL EQUANIME Lex International, avocat au barreau de PARIS, toque : P0383

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 février 2020, en audience publique, le ministère public et l’avocat de l’intimée ne s’y étant pas opposés, devant M. Jean LECAROZ, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Anne BEAUVOIS, présidente de chambre

M. Jean LECAROZ, conseiller

Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRET :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, le délibéré ayant été prorogé à ce jour, sans que les parties aient pu en être avisées en raison de l’état d’urgence sanitaire;

— signé par Mme Anne BEAUVOIS, présidente de chambre et par Mme Mélanie PATE, greffière.

Vu le jugement rendu le 10 novembre 2016 et rectifié le 29 juin 2017 par le tribunal de grande instance de Paris qui a dit que Mme X, née le […] à […], est de nationalité française et ordonné la mention prévue par l’article 28 du code civil ;

Vu l’appel formé le 5 décembre 2016 par le ministère public ;

Vu l’ordonnance de radiation du 9 mai 2017 ;

Vu la décision de rétablissement de l’affaire au rôle du 19 juin 2017 ;

Vu les conclusions notifiées le 29 novembre 2018 par le ministère public qui demande à la cour de constater que le récépissé prévu par l’article 1043 du code de procédure civile a été délivré, d’infirmer le jugement, statuant à nouveau, de dire que Mme X n’est pas de nationalité française, d’ordonner la mention prévue par l’article 28 du code civil et de condamner l’intimée aux dépens ;

Vu les conclusions notifiées le 4 février 2020 par Mme X qui demande à la cour de confirmer le jugement, de dire qu’elle est française, d’ordonner la mention prévue par l’article 28 du code civil et de condamner le ministère public aux dépens ;

SUR CE,

Il est justifié de l’accomplissement de la formalité prévue par l’article 1043 du code de procédure civile par la production du récépissé délivré le 23 décembre 2016.

En application de l’article 30 alinéa 1er du code civil, il appartient à celui qui revendique la nationalité française d’en rapporter la preuve, lorsqu’il n’est pas titulaire d’un certificat de nationalité française délivré à son nom, conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du code civil. Mme Y n’étant pas titulaire d’un tel certificat, elle doit supporter la charge de la preuve de ce qu’elle réunit les conditions d’établissement de sa nationalité française.

Mme X soutient qu’elle est française, par filiation maternelle, pour être née le […] à […], de Z, née le […] à Pondichéry, laquelle aurait conservé la nationalité française lors de l’entrée en vigueur du Traité franco-indien du 28 mai 1956 en sa qualité d’enfant mineure suivant la condition de son père français, A, né en 1901 à […], pour être né dans les possessions anglaises de l’Inde de deux parents français.

Conformément à l’article 47 du code civil, « Tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ». Nul ne peut donc se voir reconnaître la nationalité

française s’il ne justifie pas d’une identité certaine, attestée par des actes d’état civil fiables au sens de cet article.

Le tribunal pour retenir que Mme X disposait d’un état civil certain a jugé que l’apostille apposée sur les actes d’état civil produits par l’intimée, dont son acte de naissance et le jugement indien du 22 décembre 2006 rectificatif de cet acte de naissance, était conforme aux dispositions de la Convention de La Haye du 5 octobre 1961 supprimant l’exigence de la légalisation des actes publics étrangers.

Le ministère public demande à la cour d’appel de constater au contraire que cette apostille n’est pas conforme.

Mme X verse aux débats notamment :

— un extrait délivré le 30 janvier 2012 de son acte de naissance n°5089/65 ou 32053 dressé le 29 décembre 1965 portant les mentions marginales suivantes d’un jugement du « tribunal de Additional Sub judge de Pondichéry ECOP n°6/2006 du 22 décembre 2006, il est dit et ordonné que l’âge du père et grand-père paternel et maternel de l’enfant soient rectifiés en « Trente deux ans, B C ; Mahaboubkane » dans l’acte ci-contre ['] 2°) suivant jugement du tribunal de Additional Sub judge de Pondichéry ECOP n°6/2006 du 22 décembre 2006, il est dit et ordonné que les nom des parents de l’enfant soient rectifiés en « HayathKhan et Z » dans l’acte ci-contre… » (pièce n°1 de l’intimée),

— une expédition du jugement en question (pièce n°2).

Conformément aux stipulations de la Convention de la Haye du 5 octobre 1961, les actes d’état civil indiens doivent êtres apostillés. Aux termes des articles 3 à 5 de la convention, cette apostille permet d’attester la véracité de la signature, la qualité en laquelle le signataire de l’acte a agi et, le cas échéant, l’identité du sceau ou du timbre dont cet acte est revêtu. Elle doit être conforme au modèle annexé à la convention.

Le « Manuel Apostille », édité par le bureau permanent de la Conférence de La Haye de droit international privé prévoit, dans son paragraphe 217, que lorsqu’une 'autorité compétente’ désignée pour l’apostille dans un Etat donné ne peut vérifier l’origine de tous les actes publics, cette autorité 'peut estimer opportun de prendre des dispositions pour qu’une autorité intermédiaire vérifie et certifie l’origine de certains actes publics, avant d’émettre elle-même une apostille pour la certification de cette autorité intermédiaire', ce Manuel rappelle également qu’il est 'indispensable que l’Autorité compétente s’assure de l’origine de l’acte pour lequel elle émet une Apostille', la certification des trois points suivants étant exigée :

— l’authenticité de la signature figurant sur l’acte public sous-jacent (le cas échéant),

— la qualité du signataire de l’acte,

— l’identité du sceau ou timbre dont est revêtu l’acte (le cas échéant).

Les paragraphes 15 et 16 du même Manuel indiquent en outre que les procédures constituées de plusieurs niveaux d’authentification sont contraignantes et 'peuvent entraîner une confusion quant à l’acte auquel l’Apostille se rapporte’ et que si 'la procédure en plusieurs étapes n’est pas nécessairement contraire à la Convention Apostille, elle fait perdurer certains des aspects de la chaîne de légalisation que la Convention Apostille était censée supprimer'.

Ainsi, ces recommandations, qui n’excluent pas l’intervention d’une autorité intermédiaire, ne sauraient justifier l’amoindrissement, voire la suppression de tout ou partie des contrôles exigés par

la Convention quant à l’origine de l’acte.

La pièce n°1 de l’intimée, qui consiste dans l’extrait d’acte de naissance a été délivré par un « Registar » de la municipalité de Pondichéry dont le nom « C. Darmanradjou Martin » ne figure que sur l’ « attestation de signature effectuée par le ministère des affaires intérieures du gouvernement de Pondichéry (Joint Secretary to Govt. – Home). Or l’apostille délivrée le 21 février 2012 ne mentionne pas le nom du « registar » ayant délivré l’extrait d’acte de naissance et précise que sa signature comporte le sceau du secrétariat du gouvernement des affaires intérieures de Pondichéry.

De même l’expédition du jugement rectificatif de l’ « Additionnal Sub Judge » de 22 décembre 2006 (pièce n°2 de l’intimée) comporte une apostille qui non seulement n’indique pas l’identité du « Superintendent of copyist » mais précise encore que celui-ci a signé avec le sceau du chef de secrétariat du secrétariat des affaires intérieures de Pondichéry.

Si l’acte de naissance de l’intéressée et le jugement rectificatif d’acte de naissance sont à nouveau produits en pièces 17 et 18, et en pièces 29 et 30, et portent de nouvelles apostilles, ces dernières ne font qu’authentifier la signature, la qualité et le sceau de F.P. Verbina Jayaraj, sous-secrétaire des affaires intérieures du gouvernement de Pondichéry, autorité intermédiaire, et non les autorités ayant délivré les copies de l’acte de naissance et le jugement rectificatif, et donc de l’acte sous-jacent.

En outre, l’identité de l’officier d’état civil qui a signé la copie de l’acte de naissance et l’identité de la personne ayant délivré l’expédition du jugement ne figurent pas au verso de ces documents.

L’absence de garantie quant à l’identité des autorités ayant délivré les copies de l’acte de naissance et du jugement, privent les actes produits, dont l’apostille n’est pas conforme à la Convention, de toute valeur probante.

Contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, ces actes ne peuvent donc faire la preuve d’un état civil fiable et certain de Mme X.

Nul ne pouvant prétendre à la nationalité française pour quelque titre que ce soit s’il ne dispose pas d’un état civil certain, l’extranéité de Mme X doit être constatée. Le jugement est donc infirmé.

Succombant à l’instance, Mme X est condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

Constate que la formalité prévue par l’article 1043 du code de procédure civile a été accomplie,

Infirme le jugement,

Statuant à nouveau :

Dit que Mme X, se disant née le […] à […], n’est pas française,

Ordonne la mention prévue par l’article 28 du code civil,

Condamne Mme X aux dépens.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

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