Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 19 mai 2021, n° 19/12095

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 3, 19 mai 2021, n° 19/12095
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 19/12095
Sur renvoi de : Cour de cassation, 9 avril 2019, N° X17-28.424
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 3

ARRET DU 19 MAI 2021

(n° , 13 AD)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/12095 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CAEDC

Décisions déférées à la Cour :

Arrêt du 10 avril 2019 – Cour de Cassation – pourvoi numéro X 17-28.424

Arrêt du 7 juin 2017 – Cour d’appel de PARIS – RG 16/02846

Jugement du 18 Novembre 2013-Tribunal de Commerce de CRETEIL – RG n° 2012F00045

DEMANDEURS A LA SAISINE

Monsieur D Z

né le […] au PLESSIS-TREVISE (94420)

[…]

[…]

Représenté par Me Yadhira STOYANOVITCH, avocat au barreau de PARIS, toque : C0483

Monsieur E Y

né le […] à PARIS

Le Bois Saint-Louis – Bât 9R

[…]

Représenté par Me Yadhira STOYANOVITCH, avocat au barreau de PARIS, toque : C0483

SARL SOCIETE DE COURTAGE ET DE GESTION D’ASSURANCES (SCGA) agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de NANTES sous le numéro 502 531 049

[…]

[…]

Représentée par Me Yadhira STOYANOVITCH, avocat au barreau de PARIS, toque : C0483

DÉFENDEURS A LA SAISINE

Monsieur F X

exerçant sous l’enseigne ILE DE FRANCE ASSUR

immatriculé au RCS de CRETEIL sous le numéro 353 165 525

né le […] à PARIS

[…]

77320 BETON-BAZOCHES

Représenté par Me BK SEGUIN de la SELARL AAPS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : G0536

SARL ILE DE FRANCE ASSUR agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de CRETEIL sous le numéro 537 452 039

[…]

[…]

Représentée par Me BK SEGUIN de la SELARL AAPS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : G0536

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 26 Janvier 2021, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Sandrine GIL, conseillère faisant fonction de présidente

Mme Elisabeth GOURY, conseillère

Madame Nelly CAYOT, conseillère

qui en ont délibéré,

un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Madame BH-Gabrielle de La REYNERIE

ARRET :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Sandrine GIL, conseillère faisant fonction de présidente et par Madame

BH-Gabrielle de La REYNERIE, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.

*****

FAITS ET PROCÉDURE

La SOCIÉTÉ DE COURTAGE ET DE GESTION D’ASSURANCES, ci-après société SCGA, représentée par M. E Y et M. D Z, a signé le 1er août 2011 avec M. F X, courtier d’assurance, un contrat de vente de son fonds de commerce de courtier en assurances et autres prestations.

Le 30 septembre 2011, M. X a notifié la défaillance de la condition suspensive relative au prêt et, le 6 novembre 2011, la rupture des négociations en vue de l’acquisition du fonds de commerce sur la base d’un prix moins élevé avec substitution de la société Ile de France Assur (créée en octobre 2011) à lui-même.

La société SCGA a assigné la société Ile de France Assur et M. X en constatation de la réalisation de la cession du fonds de commerce et en paiement du prix ainsi que de dommages-intérêts pour résistance abusive et rupture abusive de pourparlers.

Par jugement en date du 18 novembre 2013, le tribunal de commerce de Créteil a :

— Débouté la société ILE DE FRANCE ASSUR de sa demande de nullité de l’assignation en intervention forcée ;

— Débouté M. F X de sa fin de non-recevoir pour défaut de qualité à agir à son encontre ;

— Débouté M. F X et la société ILE DE FRANCE ASSUR de leur demande de sursis à statuer ;

— Constaté la réalisation de la cession du fonds de commerce de la société SOCIETE DE COURTAGE ET DE GESTION D’ASSURANCES suivant protocole d’accord du 1er août 2011 ;

— Condamné solidairement M. F X et la société ILE DE FRANCE ASSUR à payer à la société SOCIETE DE COURTAGE ET DE GESTION D’ASSURANCES la somme de 205.000,00 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2011, pour M. X, sur la somme de 125.000, 00 euros, et sur le solde à compter du 15 mai 2012, et à compter du 13 mars 2013 pour la société ILE DE FRANCE ASSUR et avec capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1154 du Code civil, et débouté la société SOCIETE DE COURTAGE ET DE GESTION D’ASSURANCES du surplus de sa demande au titre des intérêts ;

— Débouté M. F X et la société ILE DE FRANCE ASSUR de leur demande reconventionnelle de rétrocession de la somme de 9.566,19 euros ;

— Autorisé la société SOCIETE DE COURTAGE ET DE GESTION D’ASSURANCES à conserver ladite somme à titre de dommages-intérêts ; l’a déboutée du surplus de sa demande ;

— Débouté M. F X et la société ILE DE FRANCE ASSUR du surplus de leurs demandes reconventionnelles ;

— Ordonné l’exécution provisoire, sous réserve qu’en cas d’appel la société SOCIETE DE COURTAGE ET DE GESTION D’ASSURANCES produise une caution bancaire égale au montant de la condamnation prononcée à son profit ;

— Condamné solidairement M. F X et la société ILE DE FRANCE ASSUR à payer à la société SOCIETE DE COURTAGE ET DE GESTION D’ASSURANCES la somme de 5.000,00 euros au titre de l’article 700 du CPC et débouté la société SOCIETE DE COURTAGE ET DE GESTION D’ASSURANCES du surplus de sa demande et M. F X et la société ILE DE FRANCE ASSUR de leur demande de ce chef ;

— Condamné solidairement M. F X et la société ILE DE FRANCE ASSUR aux dépens ;

— Liquidé les dépens à recouvrer par le Greffe à la somme de 163,80 euros T.T.C. (dont 19,6 % de TVA).

M. F X et la société ILE DE FRANCE ASSUR ont interjeté appel de ce jugement. Messieurs D Z et E Y sont volontairement intervenus à l’instance.

Par arrêt en date du 7 juin 2017, la chambre 3, pôle 5, de la cour d’appel de Paris a :

— Infirmé le jugement déféré et, statuant à nouveau :

— Condamné solidairement la Société de courtage et de gestion d’assurances (SCGA), M. Y et M. Z à rembourser à M. X la somme de 15.000 €, avec intérêts au taux légal à compter du 6 novembre 2011 ;

— Déclaré recevable la demande de la Société de gestion et de courtage d’assurances (SCGA) en sa demande subsidiaire en paiement de la somme de 1.708.500 € ;

— Condamné solidairement M. X et la société Ile-de-France Assur à payer à la Société de courtage et de gestion d’assurances la somme de 100.000 € ainsi que celle de 8.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Débouté les parties, en ce compris M. Y et M. Z, de toutes leurs autres demandes ;

— Condamné solidairement M. X et la société Ile-de-France assur aux dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

La Société de courtage et de gestion d’assurances (SCGA), MM. D Z et E Y ont formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt rendu le 7 juin 2017 par le Pôle 5 – Chambre 3 de la cour d’appel de Paris.

Par arrêt du 10 avril 2019, la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a condamné solidairement M. X et la société Ile-de-France Assur à payer à la Société de courtage et de gestion d’assurances la somme de 100 000 euros, l’arrêt rendu, le 07 juin 2017, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Condamne M. X et la société lle-de-France Assur aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à la Société de courtage et de gestion d’assurances et à MM. Y et Z la somme globale de 3 000 euros et rejette leur demande ;

Au motif :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l’article 1134, alinéa 1er , du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016 ;

Que selon l’arrêt attaqué, la Société de courtage et de gestion d’assurances (la SCGA), dont MM. Y et M. Z sont associés co-gérants, a conclu avec M. X, gérant de la société lle-de-France Assur (la société Assur), un contrat de vente de fonds de commerce, sous conditions suspensives, stipulant que si la vente devenait caduque en l’absence de réalisation de ces conditions, M. X auquel la SCGA avait communiqué le fichier-clients et les codes d’accès aux assureurs, s’engageait à lui rétrocéder l’ensemble des contrats conclus avec les clients mentionnés dans une annexe et à l’indemniser à concurrence de la somme de 1 500 euros par 'client extourné’ ; qu’à la suite de caducité de la vente consécutivement à l’absence d’obtention par M. X du prêt convenu, la SCGA l’a assigné ainsi que la société Assur en paiement de l’indemnité contractuellement prévue ; MM. Y et Z sont intervenus à l’instance ;

Que pour condamner solidairement M. X et la société Assur à payer à la SCGA une indemnité limitée à la somme de 100 000 euros au titre des modalités contractuelles, l’arrêt relève que la liste des clients figurant dans l’annexe ne correspond pas aux clients effectivement cédés et non rétrocédés, car de nombreux contrats avaient été résiliés avant la date prévue pour la cession ; qu’il relève encore que la compagnie Generali a été empêchée de proposer des contrats à des tarifs préférentiels à certains clients, le « code affinitaire '' de la SCGA, qui lui avait été transmis, ayant été supprimé 'suite à une insuffisance de production’ ; qu’il ajoute que des clients attestent n’avoir pu joindre la SCGA pour traiter leurs problèmes d’assurance, trois d’entre eux faisant état de ce qu’un ancien salarié de celle-ci cherchait à reprendre sa clientèle ; qu’il en déduit qu’au regard de ces éléments, l’indemnité due par M. X et la société Assur, au titre de la clientèle qu’ils ont conservée, doit être fixée à 100 000 euros ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’il lui appartenait, pour fixer le montant de l’indemnité due à la SCGA , de mettre en oeuvre les modalités qui avaient été convenues par les parties et de déterminer, au préalable, conformément à celles-ci, le nombre de « clients extournés '' par M. X et la société Assur, et, si elle ne disposait pas d’éléments d’information suffisants à cette fin, d’ordonner une mesure d’expertise, comme la SCGA le lui avait demandé subsidiairement, la cour d’appel qui a alloué à celle-ci une somme fixée de manière forfaitaire, a violé le texte susvisé ;

Par déclaration en date du 11 juin 2019, la SARL SOCIETE DE COURTAGE ET DE GESTION D’ASSURANCES (SCGA), Monsieur D Z et Monsieur E Y, ont saisi la cour d’appel de Paris, statuant sur renvoi après cassation.

Dans leurs dernières conclusions, notifiées par le RPVA le 11 novembre 2020, la SARL SOCIETE DE COURTAGE ET DE GESTION D’ASSURANCES (SCGA), Messieurs D Z et E Y demandent à la Cour de :

Vu le Jugement du Tribunal de Commerce en date du 18 novembre 2013,

Vu l’arrêt de la Cour d’appel de Paris en date du 7 juin 2017,

Vu l’arrêt de la Cour de cassation en date du 11 avril 2019,

Vu les articles 66, 325, 328, 329 et 554 du Code de Procédure Civile,

Vu l’article 1101 du Code Civil, dans sa rédaction antérieure à l’Ordonnance du 10 février 2016,

Vu les articles 1134 et 1147 et suivants du Code civil, dans leur rédaction antérieure à l’Ordonnance

du 10 février 2016,

Vu les articles 1382 et suivants du Code civil, dans leur rédaction antérieure à l’Ordonnance du 10 février 2016,

Vu l’article 5.1., paragraphes 3 et 5 du Contrat de Cession en date du 1 er août 2011,

En application d’un Arrêt en date du 10 avril 2019 par lequel la Cour de Cassation, Chambre Commerciale, Financière et Economique a cassé et annulé, mais seulement en ce qu’il a condamné la Société de COURTAGE ET DE GESTION D’ASSURANCES à la somme de 100 000 euros, un arrêt rendu le 7 juin 2017 par la Cour d’appel de Paris (Pôle 5, Chambre 3), et remis, en conséquence sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, a renvoyé les parties devant la Cour d’appel de Paris, autrement composée.

— INFIRMER l’arrêt sanctionné en ce qu’il a fixé arbitrairement le montant de l’indemnité due par M. X et la Société ILE DE France ASSUR à la Société de Courtage et de Gestion Assur et MM. Y et Z à la somme forfaitaire de 100 000 € pour les clients extournés,

STATUANT A NOUVEAU,

A TITRE PRINCIPAL,

— DETERMINER, en application des dispositions mises en place par les parties, le nombre de « clients extournés » par M. X et la Société Assur,

— DIRE et JUGER que le nombre de clients extournés s’élève à 827,

Ce faisant,

— CONDAMNER solidairement M. X et la Société ILE DE France ASSUR à payer à SCGA l’indemnité de 1 500 € par « client extourné », soit la somme globale de 1 240 500 €,

A TITRE SUBSIDIAIRE,

Si par impossible la Cour d’appel de céans ne disposait pas d’éléments d’information suffisants à cette fin,

— DESIGNER tel Expert Judiciaire qu’il lui plaira avec la mission de :

— en application des modalités prévues par les parties, déterminer le nombre de clients «extournés », c’est-à-dire, détournés et transférés par les intimés dans leur portefeuille ;

— en tant que de besoin, étendre la mission aux différentes entités complices des intimés, à savoir Monsieur X, exerçant en qualité de courtier, la SARL à associé unique ILE DE France ASSUR, l’EIRL ILE DE FRANCE ASSUR et la SARL PL ASSURANCES ;

— DIRE et JUGER que l’Expert se devra de déterminer les dates éventuelles de résiliation alléguées par les intimés et distinguer celles intervenues avant le 3 août 2011 et celles intervenues après cette date.

EN TOUT ETAT DE CAUSE,

— CONDAMNER solidairement M. X et la Société ILE DE France ASSUR au paiement d’une somme de 45.000 € en application de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens d’instance et

d’appel dont le recouvrement sera poursuivi par Me STOYANOVITCH, conformément aux dispositions de l’article 699 du CPC.

Dans leurs dernières conclusions, notifiées par RPVA, le 11 novembre 2020, M. F X et la SARL Ile de France Assur demandent à la Cour de :

Vu les articles 1134, 1152 et 1226 ancien du Code civil,

Vu l’article 700 du Code de procédure civile,

Vu l’arrêt de la Cour de Cassation du 10 avril 2019

À titre principal :

— ORDONNER à SCGA de procéder aux formalités nécessaires pour le transfert des clients lui ayant appartenu et qui resteraient à ce jour gérés par les concluants ;

— ASSORTIR cette injonction d’une astreinte définitive de 500 € par jour de retard passé le délai d’un mois à compter de la décision à intervenir ;

À titre principal :

— DIRE ET JUGER que les transferts de contrats ont été effectués postérieurement à la caducité du Protocole ;

— DIRE ET JUGER que la clause pénale est inapplicable ;

En conséquence,

— REJETER la demande d’indemnité de SCGA ;

A titre subsidiaire,

— DIRE ET JUGER que l’inexécution de l’obligation sanctionnée par la clause pénale n’est pas imputable aux concluants ;

En conséquence,

— ÉCARTER l’application de la clause pénale à l’encontre des concluants ;

— REJETER la demande d’indemnité de SCGA ;

À titre très subsidiaire,

— DIRE ET JUGER que le montant de la clause pénale est manifestement excessif et en modérer le montant :

À titre principal sur le préjudice,

— DIRE ET JUGER que SCGA n’a subi aucun préjudice du fait de la non-rétrocession de clients transférés aux concluants ;

En conséquence,

— USER de son pouvoir de modération en application de l’article 1152 ancien du Code civil ;

— CONDAMNER les concluants à payer à la société SCGA la somme de 1 € au titre de la clause pénale ;

À titre subsidiaire sur le préjudice,

— DIRE ET JUGER que le préjudice prétendument subi par SCGA consiste uniquement dans la perte de la valeur marchande des clients effectivement transférés à M. X ;

En conséquence,

— USER de son pouvoir de modération en application de l’article 1152 du Code civil

— CONDAMNER les concluants à payer à SCGA la somme de 36 845 € au titre de la clause pénale ;

À titre infiniment subsidiaire,

— ORDONNER, si elle le juge nécessaire, une expertise judiciaire aux fins de déterminer le nombre de « clients extournés » ;

— PRÉCISER la mission de l’expert :

' REJETER la demande d’extension de l’expertise à la SARL PL Assurances et à l’EIRL Ile de France Assur ;

' AJOUTER à la mission proposée par SCGA, l’évaluation du préjudice éventuellement subi par SCGA du fait de la non-reprise des clients transférés à M. X ;

' AJOUTER à la mission proposée par SCGA, l’évaluation de la valeur vénale du portefeuille des clients réellement transférés ;

' REJETER la demande de SCGA tendant à distinguer les résiliations selon leur antériorité ou leur postériorité à la date du 3 août 2011.

— DIRE et JUGER que cette expertise sera faite aux frais avancés de SCGA, M. Y et M. Z.

En tout état de cause,

— DEBOUTER la SCGA de l’ensemble de ses autres demandes.

— DEBOUTER M. Y et M. Z de l’ensemble de leurs demandes.

— CONDAMNER solidairement la société SCGA, M. Y et M. Z à payer à M. X et à la SARL Ile de France Assur’ la somme de 40 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

— CONDAMNER solidairement la société SCGA, M. Y et M. Z à supporter les entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 12 novembre 2020.

MOTIFS

Sur le périmètre de la cassation partielle

Les parties sont en désaccord sur le périmètre de la cassation partielle de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 7 juin 2017.

La société SCGA, MM. Z et Y font valoir que le principe de l’indemnité due solidairement par M. X et la SARL Ile de France Assur au titre de la clientèle qui leur a été transférée et qu’ils ont conservée est définitivement acquis aux débats, la Cour de cassation n’ayant cassé et annulé l’arrêt de la cour d’appel de Paris qu’en ce qui concerne le quantum de l’indemnité, laquelle doit être calculée au regard des modalités fixées entre les parties par le protocole du 1er août 2011.

M. X et la SARL Ile de France Assur soutiennent que la cour de renvoi doit statuer sur le principe et le quantum d’une indemnité due à la société SCGA, MM. Z et Y au titre d’une prétendue clientèle extournée.

Il ressort de l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 10 avril 2019 que celle-ci a cassé l’arrêt de la cour d’appel de Paris sur le montant de l’indemnité due à la SCGA alors qu’il lui appartenait, pour en fixer le montant, selon les termes de la cassation, de mettre en oeuvre les modalités qui avaient été convenues par les parties et de déterminer, au préalable, conformément à celles-ci, le nombre de « clients extournés » par M. X et la société Assur, et, si elle ne disposait pas d’éléments d’information suffisants à cette fin, d’ordonner une mesure d’expertise, comme la SCGA le lui avait demandé subsidiairement.

Il s’ensuit que l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 7 juin 2017 qui, après avoir rappelé les dispositions de l’article 5-1 du protocole du 1er août 2011 et les avoir interprétées comme voulant dire 'qu’une indemnisation a été prévue pour le cas où des clients cédés ne seraient pas rétrocédés au vendeur', a relevé que, même si la société SCGA 'n’a pas voulu reprendre les clients cédés, ces derniers sont restés au moins pour partie’ dans le portefeuille de M. X et de la société Assur Ile de France, ceux-ci devaient, en conséquence, 'l’indemniser à ce titre', est définitif de ce chef. Il s’ensuit que le principe d’indemnisation de la société SCGA au titre des clients qui sont restés 'au moins pour partie’ dans le portefeuille de M. X et de la société Assur Ile de France est acquis.

Par conséquent les demandes faites par M. X et la SARL Ile de France Assur, tendant à voir remettre en cause le principe de l’indemnisation , de :

'À titre principal :

— DIRE ET JUGER que les transferts de contrats ont été effectués postérieurement à la caducité du Protocole ;

— DIRE ET JUGER que la clause pénale est inapplicable ;

En conséquence,

— REJETER la demande d’indemnité de SCGA ;

A titre subsidiaire,

— DIRE ET JUGER que l’inexécution de l’obligation sanctionnée par la clause pénale n’est pas imputable aux concluants ;

En conséquence,

— ÉCARTER l’application de la clause pénale à l’encontre des concluants ;

— REJETER la demande d’indemnité de SCGA'

ne sont pas comprises dans le périmètre de la cassation partielle de sorte que la cour n’est pas tenue d’y répondre, étant relevé que les demandes ainsi présentées ont trait à l’article 5-1 du protocole du 1er août 2011.

Il n’est pas discuté que les autres chefs du dispositif de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 7 juin 2017 sont définitifs.

Le débat est donc circonscrit au montant de l’indemnité due par application de l’article 5-1, étant relevé que la cour a toujours la possibilité, après en avoir déterminé le montant selon les modalités prévues audit article, si elle considère, comme l’y invitent M. X et la SARL Ile de France Assur, qu’il s’agit d’une clause pénale, d’en modérer le montant par application de l’article 1152 ancien du code civil.

Enfin s’agissant de la demande tendant à voir ordonner à la société SGCA de 'procéder aux formalités nécessaires pour le transfert des clients lui ayant appartenu et qui resteraient à ce jour gérés par les concluants', qui est une obligation de faire, celle-ci ne peut plus donner lieu à une exécution eu égard au temps écoulé, le protocole étant caduc depuis le 1er octobre 2011 et depuis cette date, la clientèle est gérée par M. X et la société Ile de France Assur. Cette demande sera rejetée.

Sur la qualification de la clause indemnitaire prévue par l’article 5-1 du protocole

M. X et la SARL Ile de France Assur soutiennent que les stipulations de l’article 5-1 du protocole constituent une clause pénale puisqu’elle a pour objet de fixer forfaitairement les dommages et intérêts dus par le débiteur d’une obligation contractuelle. La société SCGA, M. Z et M. Y considèrent qu’il convient de faire application des seules modalités contractuelles d’indemnisation, la Cour de cassation ayant censuré l’arrêt de la cour d’appel du 7 juin 2017 en ce qu’il a prononcé une indemnisation forfaitaire.

Par application de l’ancien article 1152 du code civil, (désormais article 1231-5) antérieur à l’ordonnance du 10 février 2016, applicable à l’espèce : lorsque la convention porte que celui qui manquera de l’exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte, ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite.'.

Selon l’ancien article 1226'du code civil, 'La clause pénale est celle par laquelle une personne, pour assurer l’exécution d’une convention, s’engage à quelque chose en cas d’inexécution.'.

Il est admis que les juges n’ont pas à s’arrêter aux termes employés par les parties.

Une clause pénale se définit comme une évaluation forfaitaire et par avance des éventuels dommages-intérêts dus en cas d’inexécution d’une obligation contractuelle. Elle présente à la fois un caractère comminatoire, car elle a pour mission de garantir l’exécution d’une obligation et un caractère indemnitaire, car elle fixe préalablement et forfaitairement le préjudice en cas d’inexécution.

La cour considère que si la Cour de cassation a cassé partiellement l’arrêt de la cour d’appel de Paris qui a alloué une somme fixée de façon forfaitaire, le débat ne portait pas sur la qualification de

clause pénale des dispositions de l’article 5-1, cette qualification n’ayant pas été soulevée par les parties ni en première instance ni devant l’instance d’appel ayant abouti à l’arrêt du 7 juin 2017.

La qualification de la clause pénale n’entre par conséquent pas dans le périmètre de la cassation partielle puisqu’elle ne remet pas en cause le principe d’indemnisation de la société SGCA du fait des clients extournés, qui est acquis, l’application des stipulations de cette clause quant aux modalités d’indemnisation prévues étant seulement, le cas échéant, susceptibles de modération.

Aux termes de l’article 5-1 du protocole conclu le 1er août 2011 :

'Si par suite de l’absence de réalisation des conditions suspensives stipulées aux présentes, la cession est anéantie, l’acquéreur s’engage ':

— […]';

— à rétrocéder l’ensemble des contrats conclus avec les clients visés en ANNEXE 2. L’acquéreur s’engage directement ou indirectement à indemniser le Vendeur à hauteur de 1.500 euros par client extourné';

— […]';'.

Il résulte de la rédaction de la clause que les parties ont prévu une évaluation forfaitaire par avance de 1 500 euros du préjudice subi par le vendeur pour chaque client 'extourné’ résultant d’une inexécution contractuelle par l’acquéreur, lequel s’est engagé contractuellement à rétrocéder les clients cédés en cas de non réalisation des conditions suspensives de la cession, non réalisation entraînant la caducité du contrat. Elle présente à la fois un caractère comminatoire, puisqu’elle a pour mission de garantir que les clients seront rétrocédés en cas de caducité du protocole de cession et un caractère indemnitaire, car elle fixe préalablement et forfaitairement le préjudice en cas d’inexécution.

Il s’ensuit que les stipulations contractuelles de l’article 5-1 précitées constituent une clause pénale susceptible, par application de l’ancien article 1152 du code civil, de modération si elle est manifestement excessive ou dérisoire, ce qui nécessite de déterminer le montant de l’indemnité qui est due par application des stipulations contractuelles, à savoir 1 500 euros par client extourné, après avoir préalablement déterminé le nombre de clients extournés.

Sur le montant de l’indemnité due au titre des clients extournés par application de l’article 5-1 du code civil

La société SCGA, M. Z et M. Y se prévalent de 1.139 clients extournés à la date du 1er août 2011 en se référant à l’annexe 2 du protocole mentionnant : pour Generali 627 client pour 752 contrats, pour Allianz 187 clients pour 213 contrats , pour Axa 154 clients pour 117 contrats et pour Novelia 171 clients pour 202 contrats ; qu’à ce chiffre il convient de retrancher 150 clients 'communs’ aux différentes compagnies d’assurance comme le demandent les défendeurs au renvoi, soit un chiffre de 827 clients extournés. Ils contestent le chiffre de 577 clients (soit 727 clients extournés – 150 clients 'communs') retenus par M. X et la SARL Ile de France Assur faisant valoir que leur décompte a été effectué en décembre 2011. Selon la société SCGA, M. Z et M. Y, le montant de l’indemnité qui leur est due par application de l’article 5-1 du protocole est donc de 1 240 500 euros ( 827 clients extournés x 1500 euros).

M. X et la SARL Ile de France Assur font valoir qu’il convient de prendre en considération non pas l’annexe 2 du protocole mais le nombre de clients effectivement cédés en octobre/décembre 2011, de nombreux contrats ayant été résiliés entre la date d’extraction des listings annexés au Protocole et la date de transfert effectif des contrats. Selon eux, il en résulte pour Generali 435 client

pour 559 contrats, pour Allianz 137 clients pour 148 contrats, pour Axa 69 clients pour 72 contrats et pour Novelia 86 clients pour 101 contrats et il convient de retrancher du nombre de clients extournés 150 clients communs entre les différentes compagnies d’assurance lesquels ne peuvent pas être comptabilisés plusieurs fois. M. X et la SARL Ile de France Assur se prévalent par conséquent de 577 clients, soit une indemnité de 865 500 euros (577 x 1500 euros).

La cour rappelle qu’aux termes de l’article 5-1 du protocole, il est stipulé que si par suite de l’absence de réalisation des conditions suspensives prévues à l’acte, la cession est anéantie, l’acquéreur s’engage à rétrocéder l’ensemble des contrats conclus avec les clients visés en annexe 2 et à indemniser le vendeur à hauteur de 1.500 euros par client extourné.

La cour d’appel a, par arrêt du 7 juin 2017 définitif sur ce point, interprété les dispositions de l’article 5-1 comme voulant dire qu’une indemnisation a été prévue pour le cas où des clients cédés ne seraient pas rétrocédés au vendeur, les parties s’accordant au demeurant sur cette définition de clients 'extournés’ (clients cédés non rétrocédés au vendeur ).

Selon le protocole de cession, les conditions suspensives devaient être réalisées au plus tard à la date du 30 septembre 2011. Il s’ensuit que la date à prendre en compte quant à la détermination du nombre de clients qui n’ont pas été rétrocédés, suite à la caducité du protocole, est le 1er octobre 2011 et non celle du 1er août 2011 comme prétendu par les demandeurs au renvoi.

M. X et la SARL Ile de France Assur ont fourni, au soutien de leurs prétentions des attestations des sociétés GENERALI (pièce 120 intimés), ALLIANZ (pièce 122), AXA (pièce 124) et NOVELIA (pièce 126) auxquelles sont jointes, pour chaque société, un décompte effectué en décembre 2011 des clients transférés, la cour relevant qu’en comparant notamment avec les pièces 20, 21 et 22 de la société SGCA et de MM. Z et Y, il s’agit de transferts considérés comme étant effectifs par les compagnies d’assurance au 1er décembre 2011, les commissions étant perçues par la SARL Ile de France Assur et non plus par la société SCGA. Lesdits transferts font suite aux attestations de cession totale de portefeuilles et autorisation de transfert intervenus par application du protocole du 01/08/2011 signé entre M. X et la société SCGA, attestations que la société SCGA et la SARL Ile de France Assur, représentée par M. X, ont ensuite régularisées en octobre 2011 mais avec une date de transfert des clients au 01/08/2011, la cour rappelant qu’il résulte de la motivation de l’arrêt du 7 juin 2017 de la cour d’appel de Paris, non censuré de ce chef, que c’est en accord avec les associés de SCGA que M. X a pris possession de certains éléments du fonds de commerce suite à la signature du protocole.

Toutefois, pour déterminer le nombre de clients extournés à la date du 1er octobre 2011, il convient de procéder à la réintégration, au sein des décomptes susvisés, des clients ayant résilié le dernier contrat les liant à ces compagnies d’assurance entre le 1er octobre 2011 et le 30 novembre 2011 et qui, au 1er octobre 2011, étaient transférés à la société Ile de France Assur.

Pour la société GENERALI, les clients ayant résilié leur dernier contrat entre le 1er octobre 2011 et le 30 novembre 2011 sont':

— G H, contrat n°AL213731';

— I J, contrat n°AL970958';

— K L, contrat n°56418554';

— M N, contrat n°AA083647';

— O P, contrat n°56406742';

— CASTEL BI, contrat n°56163068';

— Q R, contrat n°AL741603';

— S T, contrat n°AA005639';

— U V, contrat n°AH561525';

— W AA, contrat n°56439412';

— AB AC, contrat n°AA633771;

— MNEMONIDE Erick, contrat n°AH409017';

— MOINDJIE Abdou, contrat n°AA080042';

— OTTOU Hélène, contrat n°AL746584';

— AD AE, contrat n°AL728681';

— PANDA Tchikangala, contrat n°AH910798';

— AF AG, contrat n°AH050871';

— RASE Joanna, contrat n°AL171093';

— ROBSON Claris, contrat n°AH641079';

— SCGA, contrat n°AL425162'; et

— TOUNKARA & MLE VOULIBALY Tapa, contrat […].

Soit une réintégration de vingt-et-un clients pour la société GENERALI.

Pour la société ALLIANZ, les clients ayant résilié leur dernier contrat les liant à ALLIANZ entre le 1er octobre 2011 et le 30 novembre 2011 sont':

— SOMPALA Priyasantha, contrat n°40872093';

— QUIASSUNGU Miguel, contrat n°42182574';

— GADY Didier, contrat n°42497314';

— AH AI, contrat n°43688884';

— RAFFOUL Diana, contrat n°43923150'; et

— AJ AK, contrat n°44591372.

Soit une réintégration de six clients pour la société ALLIANZ

Pour la société AXA, aucun client n’a résilié de contrat entre le 1er octobre 2021 et le 30 novembre 2021.

Pour la société NOVELIA, les clients ayant résilié leur dernier contrat entre le 1er octobre 2011 et le 30 novembre 2011 sont':

— AL AM, contrat n°GC00094536';

— BF AC-F, contrat n°GC00055974';

— AN AO, contrat n°GC00000134';

— AP AQ, contrat n°GC00115447';

— AX AY AZ, contrat n°GC00071988';

— HANANY Nice, contrat n°GC00032037';

— KRIM Mustapha, contrat n°GC00090072';

— BA BA BB, contrat n°GC00065298';

— MARINI Loana, contrat n°GC00027084';

— AR AS, contrat n°GC00051073';

— AR AT, contrat n°GC00050825';

— AU AV, contrat n°GC00084705';

— BG BH-BI, contrat n°GC00146373';

— BJ AC-BK, contrat n°GC00032012';

— AW AE, contrat n°GC00142507'; et

— BC BD BE, contrat n°GC00081373.

Soit une réintégration de seize clients pour la société NOVELIA.

Au total, la Cour relève que quarante-trois clients doivent être réintégrés aux décomptes fournis par les compagnies d’assurance.

Il s’ensuit que :

— le nombre total de clients transférés à la date du 1er octobre 2011 pour la société GENERALI est fixé à 456 clients';

— le nombre total de clients transférés à la date du 1er octobre 2011 pour la société ALLIANZ est fixé à 143 clients';

— le nombre total de clients transférés à la date du 1er octobre 2011 pour la société AXA est fixé à 69 clients';

— le nombre total de clients transférés à la date du 1er octobre 2011 pour la société NOVELIA est fixé à 102 clients.

Le nombre total de clients transférés est donc de 770 clients, dont il convient de retrancher 150 clients communs aux portefeuilles des sociétés cédante et cessionnaire.

Par conséquent, le nombre de clients extournés à la date du 1er octobre 2011 est de 620.

Par application des modalités de calcul de l’article 5-1 du protocole, l’indemnité contractuellement prévue au titre des clients extournés est de 930.000 euros (620 x 1 500 euros).

Sur la modération de la clause pénale

La société SCGA, M. Z et M. Y s’opposent à toute possibilité de modération du montant d’indemnisation prévue à l’article 5-1 alors que cela fait plus de 9 années que M. X et la SARL Ile de France Assur exploitent le fonds de commerce de la société SGCA que celle-ci a perdu ; que M. X et la SARL Ile de France Assur ne peuvent limiter la valeur marchande des clients transférés aux commissions perçues en 2012.

M. X et la SARL Ile de France Assur exposent que le montant déterminé par application de l’article 5-1 est disproportionné par rapport au préjudice réellement subi, faisant d’abord valoir l’absence de préjudice subi par les demandeurs au renvoi dès lors que ceux-ci ont refusé toute rétrocession des clients de sorte que la clause pénale doit être réduite à un euro. Ils ajoutent subsidiairement, que si la cour considérait que la société SGCA avait subi un préjudice du fait de la non reprise des clients transférés, alors celui-ci consiste dans la perte de valeur marchande des clients qui leur ont été transférés, ce au regard de la mauvaise situation de la société SCGA en 2011, de ses mauvais résultats marqués par une baisse de son chiffre d’affaires, de la perte de son code affinitaire Disney et d’un fort taux de résiliation des contrats. Ils rappellent avoir perçu en 2012 la somme de 42 448 euros de commissions pour les contrats transférés par la société SGCA, somme à laquelle il convient d’appliquer un coefficient de 0,868 en raison de l’état médiocre du fonds SCGA, soit la somme de 36 845 euros ; que la somme réclamée est donc disproportionnée avec le préjudice réel ; que l’indemnité doit donc être réduite à la valeur marchande des clients, soit 36 845 euros.

La cour rappelle que la disproportion manifeste s’apprécie en comparant le montant de la peine conventionnellement fixé et celui du préjudice effectivement subi.

La cour rappelle qu’il a été définitivement tranché par l’arrêt de la cour d’appel du 7 juin 2017 que ' même si SCGA n’a pas voulu reprendre les clients cédés, il demeure que ceux-ci sont restés au moins pour partie entre les mains des appelants qui doivent en conséquence l’indemniser ' .

Par conséquent les défendeurs au renvoi ne peuvent pas se prévaloir à nouveau de

l’absence de préjudice en raison du refus de la société SCGA de reprendre les clients extournés, étant relevé au surplus qu’aux termes de l’article 5-1, le preneur promettait 'expressément de ne plus utiliser les codes à compter de la date de la défaillance d’une condition suspensive'; que force est de constater que M. X et la SARL Ile de France Assur ont utilisé lesdits codes après la caducité du protocole, codes sans lesquels ils ne pouvaient pas exploiter les clients cédés.

Il ressort des pièces du dossier que les associés de la société SCGA avaient signé des lettres avisant leurs clients qu’ils cessaient leurs activités pour des raisons personnelles et familiales; que la société SGCA n’a pas manifesté, suite à la caducité du protocole et l’échec des négociations qui s’en sont suivies, la volonté de poursuivre l’exploitation du fonds en reprenant les clients qui avaient été cédés à M. X et la SARL Ile de France Assur, la cour relevant qu’il n’a pas été donné suite par la société SCGA au courrier précité du 6 novembre 2011 de M. X ; que de nombreux clients attestent de leurs difficultés de joindre la société SGCA, que ce soit par téléphone, lettres ou courriels, notamment depuis début 2011, ce qui témoigne du retrait progressif des associés de ladite société avant la conclusion du protocole ; que la société SGCA a résilié son bail de manière anticipée

le 24 novembre 2011, postérieurement à la caducité du protocole ; que par courriel du 27/10/2011, M. Z estimait que 'en cas de non concrétisation de la vente’ (les parties ayant entamé des négociations suite à la non réalisation des conditions suspensives), 'il nous serait impossible de reprendre l’exploitation normale de notre portefeuille', ce qui est corroboré par le fait que la société SCGA avait déjà averti ses clients de la reprise par M. X. Il n’est donc pas établi que la société SCGA aurait poursuivi l’exploitation de son fonds de commerce si les clients avaient été rétrocédés, son intention étant manifestement de céder son fonds de commerce.

Il s’ensuit que le préjudice réellement subi par la société SCGA du fait de l’absence de rétrocession des clients, qui composaient l’essentiel de son fonds de commerce (le droit au bail n’étant pas inclus dans la cession du fonds de commerce prévue par le protocole du 1/08/2011) est constitué par la perte de son fonds de commerce.

La cour relève que les parties avaient convenu, dans le cadre du protocole du 1er août 2011, de procéder à la vente du fonds de commerce pour un montant de 220 000 euros.

Les chiffres d’affaires HT réalisés par la société SGCA sont de :

— au 30/06/2011 :103.981 euros

— au 30/06/2010: 141.777 euros

— au 30/06/2009 :146.612 euros.

Il en résulte un chiffre d’affaire moyen de 130 790 euros.

Il ressort des pièces comptables que l’excédent brut d’exploitation (EBE) est de 15 586 euros en 2011, 9.071 euros en 2010 et 8.070 euros en 2009.

Le coefficient de valorisation d’un fonds de cabinet d’assurances varie entre1 et 1,5 selon les pièces produites par M. X et la SARL Ile de France Assur (notamment 120, 124,130 ), ce qui est conforme aux usages, sans que preuve contraire n’en soit rapportée.

Compte tenu de la perte des codes affinitaires GENERALI « Disneyland » (perte non contestée par société SCGA, MM. Z et Y), de l’absence de cession du droit au bail, d’un résultat d’exploitation qui, bien que modeste, était en augmentation en 2011, le coefficient de valorisation sera fixé à 1,20%, soit une valeur du fonds de commerce de 156 948 euros, la cour relevant que le coefficient de valorisation sollicité par M. X et la SARL Ile de France Assur est manifestement sous-évalué comme étant inférieur à la fourchette et alors que le taux de résiliation élevé des contrats d’assurance dont ils se prévalent ne résulte que de l’étude faite par le cabinet Malatiré à leur demande.

Il s’ensuit que le préjudice subi par la société SCGA est de 156 948 euros correspondant à la valeur du fonds de commerce perdu, la cour relevant que même en appliquant le coefficient maximum de valorisation, la valeur du fonds serait de 196 185 euros.

Il s’ensuit que la somme de 930.000 euros, résultant de l’application des modalités de l’article 5-1 du protocole, qui correspond à 4,2 fois le prix de cession et à 5,92 fois la valeur du fonds de commerce, est manifestement excessive au regard du préjudice effectivement subi par la société SGCA.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, il convient par conséquent de modérer la clause pénale stipulée par l’article 5-1 du protocole et

de fixer l’indemnité due par M. X et la SARL Ile de France Assur du fait des clients extournés à

la somme de 200 000 euros.

Par conséquent, il convient de condamner solidairement M. X et la société Ile-de-France Assur à payer à la Société de courtage et de gestion d’assurances la somme de 200.000 euros.

Sur les demandes accessoires

M. X et la société Ile-de-France Assur, qui restent débiteurs de la Société de courtage et de gestion d’assurances, seront condamnés solidairement aux dépens de première instance et d’appel.

L’équité commande de les condamner à régler la somme de 9 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel dont distraction au profit de l’avocat postulant conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Par arrêt contradictoire

Vu l’arrêt du 7 juin 2017 de la cour d’appel de Paris, chambre 3 pôle 5 ;

Vu l’arrêt de la Cour de cassation du 10 avril 2019 de cassation partielle de l’arrêt précité ;

Statuant à nouveau et y ajoutant

Condamne solidairement M. X et la société Ile-de-France Assur à payer à la Société de courtage et de gestion d’assurances la somme de 200 000 euros ;

Condamne solidairement M. X et la société Ile-de-France Assur à payer à la Société de courtage et de gestion d’assurances la somme de 9 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette les demandes plus amples ou contraires ;

Condamne solidairement M. X et la société Ile-de-France Assur aux dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de l’avocat postulant conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE, LA CONSEILLÈRE FAISANT FONCTION DE PRÉSIDENTE,

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 19 mai 2021, n° 19/12095