Cour d'appel de Pau, 2ème ch - section 1, 16 décembre 2010, n° 09/03594

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Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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Simon François-luc · Lettre des Réseaux · 17 décembre 2021

L'affaire qui a opposé la société CHATTAWAK, qui dirige le réseau du même nom, à son affilié d'Annecy défraye la chronique depuis plusieurs années. L'affaire qui a opposé la société CHATTAWAK, qui dirige le réseau du même nom, à son affilié d'Annecy défraye la chronique depuis plusieurs années. Au-delà de l'espèce considérée, c'est la viabilité de la commission-affiliation elle-même qui paraissait être en jeu, tant les critères retenus par la Cour d'appel de Paris pour qualifier le contrat en cause de contrat d'agence commerciale paraissaient-ils remplis quasi-systématiquement par les …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Pau, 2e ch - sect. 1, 16 déc. 2010, n° 09/03594
Juridiction : Cour d'appel de Pau
Numéro(s) : 09/03594
Décision précédente : Tribunal de commerce, 4 octobre 2009
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

CC/AM

Numéro 5447/10

COUR D’APPEL DE PAU

2e CH – Section 1

ARRET DU 16 décembre 2010

Dossier : 09/03594

Nature affaire :

Demande en nullité d’un contrat ou des clauses relatives à un autre contrat

Affaire :

SA X

C/

SARL Y

Grosse délivrée le :

à

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 16 décembre 2010, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 09 Novembre 2010, devant :

Monsieur BERTRAND, Président

Madame CLARET, Conseiller chargé du rapport

Monsieur SCOTET, Vice-Président placé, désigné par ordonnance du 06 septembre 2010

assistés de Madame SAYOUS, Greffier, présent à l’appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

SA X

XXX

XXX

représentée par la SCP P. et C. LONGIN, P. LONGIN-DUPEYRON, O. MARIOL, avoués à la Cour

assistée de Maître COHEN-BOULAKIA, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

SARL Y

XXX

64100 A

agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités de droit audit siège

représentée par la SCP DE GINESTET / Z / D, avoués à la Cour

assistée de Maître LECLAIR, avocat au barreau de A

sur appel de la décision

en date du 05 OCTOBRE 2009

rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE A

Vu l’appel interjeté le 15 octobre 2009 par la S.A X à l’encontre du jugement du Tribunal de commerce de A en date du 5 octobre 2009.

Vu l’ordonnance de M. le Premier Président de la cour d’appel de PAU statuant en référé en date du 1er décembre 2009 suspendant l’exécution provisoire.

Vu les conclusions de la SA X en date du 11 février 2010.

Vu les conclusions de la SARL Y du 25 juin 2010.

Vu l’ordonnance du magistrat de la mise en état en date du 12 mai 2010 qui s’est déclaré incompétent pour statuer sur l’exception d’incompétence.

Vu l’ordonnance de clôture du 19 octobre 2010, l’affaire étant fixée à l’audience de plaidoirie du 9 novembre 2010.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 1er août 2006 la SARL Y, représentée par Mme B, a conclu avec la SA X un contrat intitulé CONTRAT DE COMMISSION-C pour une durée de 5 ans, lequel a été modifié par un avenant du même jour modifiant certaines dispositions contractuelles, notamment l’article 5-2 relatif à la commission supplémentaire, l’article 25 au titre des sanctions et l’article 30 relatif à la juridiction compétente, compétence étant accordée au tribunal de commerce de A au lieu et place du tribunal de commerce de LYON.

Le même jour également Mme E B, gérante de la société PS, a signé un engagement personnel pour se porter caution solidaire de la société pour un montant de 14 000 €.

La SARL Y estimant que la SA X ne respectait par les engagements contractuels souscrits a, par lettre recommandée de son conseil du 13 octobre 2008, alerté la société X sur les manquements prétendus, indiquant qu’elle les considérait comme de nature à constituer une cause de résiliation du contrat à ses torts exclusifs, tout en cherchant à privilégier une solution amiable.

Faute de solution amiable trouvée, la Sté Y a, par acte du 6 mars 2009, assigné la Sté X pardevant le Tribunal de commerce de A aux fins de solliciter la nullité du contrat conclu le 1er août 2006 et à titre subsidiaire la résiliation dudit contrat.

Par le jugement entrepris le Tribunal de commerce de A a :

— reçu les parties en leurs demandes, fins et conclusions,

— s’est déclaré compétent pour régler ce litige,

— débouté Y sa demande de nullité du contrat,

— débouté Y en sa demande de requalification du contrat,

— prononcé la résolution du contrat au vu de l’article 1184 du Code civil aux torts exclusifs de X pour le non-respect des clauses contractuelles,

— condamné X à payer à Y la somme de 50 000 € avec intérêt légaux à titre de dommages et intérêts et ce à compter de la date du prononcé du présent jugement,

— condamné X à payer à la somme de 735,12 € portant 1,30 % d’intérêts mensuels à compter du 5 novembre 2008,

— condamné X à payer à Y la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonné l’exécution provisoire du jugement,

— rejeté comme inutiles non fondées toutes autres demandes contraires des parties,

— condamné X aux entiers dépens dont les frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 80,85 € TVA 19,60 % incluse en ce compris le coût de l’expédition du présent jugement.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

La SA X, aux termes de ses dernières écritures, demande à la Cour de :

— vu le jugement du tribunal de commerce de LYON le 5 octobre 1009,

— vu l’appel interjeté par la société X à l’encontre dudit jugement,

— vu la signature du contrat de commission C du 1er août 2006,

— vu l’article 48 du code de procédure civile,

— vu l’article 20-5 du contrat de commission C,

— déclarer pour les causes sus-énoncées le Tribunal de commerce de A territorialement incompétent,

— dire et juger que le Tribunal de commerce de LYON était compétent,

— renvoyer pour les causes sus-énoncées la cause et les parties devant la cour d’appel de LYON,

A titre subsidiaire si le jugement était confirmé du chef de la compétence,

— déclarer recevable et bien-fondé l’appel présenté par la société X,

— réformer partiellement le jugement entrepris,

QUOI FAISANT,

— débouter pour les causes sus-énoncées la société Y de l’intégralité de ses demandes,

— en tout état de cause condamner pour les causes sus-énoncées la société Y à payer à la société X la somme de 3 500 € au titre de l’article

700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de première instance et d’appel.

En premier lieu, elle soutient que le Tribunal de commerce de A était incompétent pour statuer sur le présent litige en vertu de la clause attributive de compétence au Tribunal de commerce de LYON figurant à l’article 20-5 du contrat de commission affiliation, clause répondant aux dispositions de l’article 48 du code de procédure civile, à savoir qu’elle a été convenue entre deux commerçants et qu’elle est spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée, la clause attributive de compétence au Tribunal de commerce de A insérée à l’article 30 de l’avenant étant d’interprétation stricte et n’étant applicable qu’aux contestations relatives à cet avenant.

Sur le fond, elle fait valoir que :

— Mme B, représentante de la Sté Y, s’est vue remettre de la part de la société X un document d’information pré-contractuel le 12 juillet 2006 en vue de la signature d’un contrat de commission C, qu’après s’être renseignée sur le réseau G H et la société X elle a conclu le contrat de commission-affiliation le 1er août 2006, que dans ledit contrat il est précisé que la société Y a reçu une information complète relative notamment à l’expérience commerciale de G H par un document conforme au décret du 4 avril 1991 et à l’article L 330-3 du code de commerce.

— Le jugement doit être confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de nullité du contrat de commission C et sa requalification en contrat d’agence commerciale,

° il n’y a aucune erreur sur un élément substantiel du contrat, la Sté X ne s’étant jamais présentée comme un créateur de produits, le document pré-contractuel faisant référence à des fournisseurs et à des collections,

° en tout état de cause la société Y ne démontre pas le caractère excusable et déterminant de l’erreur prétendue susceptible d’emporter application de l’article 1110 du Code civil, toute personne souhaitant exercer une activité dans le domaine de la maroquinerie ou du textile connaissant la différence entre « produits » et « collections » ; il ne peut donc s’agir d’une subtilité de la part de la Sté X,

° il incombait à la société une obligation de renseignements, de recherche et d’analyse qu’elle ne peut reporter sur la société X.

— Le jugement doit être également confirmé en ce qu’il a rejeté la requalification en contrat d’agent commercial au sens de l’article L. 134-1 du code de commerce dès lors que le contrat dont s’agit est dans sa qualification, sa rédaction et son régime conforme à la commission telle que définie à l’article L. 132-1 du même code, dont la spécificité est que le commissionnaire agit en son nom mais pour le compte du commettant, comme spécifié à l’article 1 du contrat.

La Cour de Cassation a affirmé que les sociétés propriétaires de leur fond de commerce (ce qui est le cas de la société Y) relèvent du régime des commissionnaires au sens de l’article L. 132-1 du code de commerce et non de l’agent commercial au sens de l’article L. 134-1 du même code.

— Le jugement doit être infirmé sur la demande de résolution du contrat et l’allocation de dommages et intérêts, dans la mesure où la Sté X n’a pas commis de manquements à ses obligations dans les différents cas allègués par la Sté Y à savoir que la Sté X aurait :

° livré la société Y avec des produits d’anciennes collections,

° livré à la société Y des produits de déstockage à solder,

° manqué à son devoir d’assistance et d’organisation,

° commis des irrégularités de nature à engager la responsabilité de la Sté Y,

° commis une violation de l’obligation de non-concurrence,

° commis des retards de paiement,

et en tout état de cause la société Y ne justifie pas d’un préjudice tel que retenu par le tribunal à hauteur de 50 000 €.

La SARL Y demande en réponse à la Cour de :

— confirmer le jugement en ce qu’il a dit irrecevable et mal fondée l’exception d’incompétence territoriale soulevée par la Sté X,

— confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la Sté X à payer à la Sté Y le montant de la prime supplémentaire de 8 % majorée des intérês conventionnels de retard à compter du 5 novembre 2008,

— réformer le jugement en ce qu’il n’a pas prononcé la nullité du contrat du 1er août 2006,

— en conséquence condamner la Sté X à payer à la Sté Y la somme de 29 000 € outre celle de 86 191,80 € au titre de la perte de chance des fruits perdus,

A défaut

— prononcer la résiliation du contrat aux torts exclusifs de la Sté X,

A défaut

— dire et juger que le contrat doit être qualifié de contrat d’agent commercial ou à défaut de mandat d’intérêt commun,

— prononcer la résiliation du contrat du 1er août 2006 aux torts exclusifs de la Sté X,

— condamner la Sté X à payer à titre de dommages-intérets la somme de 49 000 € outre celle de 86 191,80 € au titre des fruits perdus,

— condamner la Sté X à payer une indemnité de 58 000 € en vertu de l’article L 134-12 du code de commerce,

— subsidiairement, confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la Sté X à payer une somme de 50 000 € à titre de dommages-intérêts,

Y ajoutant

— la condamner à une somme supplémentaire de 20 000 € au titre du préjudice né de la reprise du stock,

— confirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée au paiement d’une somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Y ajoutant, la condamner au paiement d’une somme supplémentaire de 3 000 € ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Elle fait valoir que la gérante a très rapidement constaté que la société X ne respectait pas les engagements souscrits par elle dans le cadre du contrat de commission C, ces manquements trouvant leur point d’orgue dans les offres diffusées par télécopie à des magasins de chaussures proches du local Y afin qu’ils vendent des produits de maroquinerie G H, que par lettre recommandée du 13 octobre 2008 le conseil de la société Y alertait la société X sur ses manquements en faisant savoir qu’elle les considérait comme de nature à constituer une clause de résiliation du contrat à ses torts exclusifs et qu’elle souhaitait privilégier une solution amiable concernant la rupture du contrat et les modalités d’indemnisation de son préjudice, qu’aucun rapprochement n’a pu avoir lieu, la société X contestant avoir violé la clause lui interdisant de s’implanter ou de favoriser l’implantation d’un point de vente sous enseigne G H et prétendant s’être contentée d’effectuer des démarches pré-commerciales d’analyse du marché par prospection sans suivi d’effet.

L’intimée soutient en premier lieu qu’aux termes de l’article 30 de l’avenant au contrat « article 20-5 juridiction compétente » la volonté des parties était clairement manifestée de modifier les termes de l’article 20-5 du contrat principal et d’attribuer compétence territoriale au Tribunal de commerce de A.

Sur le fond, elle conclut à la résiliation du contrat aux torts de la société X tant au regard de ses manquements contractuels antérieurs au jugement entrepris qu’au regard de ses manquements postérieurs au jugement querellé, exposant que le jour même de l’audience de sursis à exécution provisoire devant le Premier Président le 10 novembre 2009, la Sté X a procédé à la reprise de son stock, ce que le conseil de la société Y et M. le Premier Président ignoraient, que ce faisant elle a fait preuve d’un manquement à la bonne foi inqualifiable en faisant perdre à la Sté Y le bénéfice de la condamnation financière prononcée en première instance et susceptible de lui permettre de financer un nouveau stock, tout en la privant du stock de marchandises nécessaires à la poursuite de son activité.

L’intimée conclut également à la nullité du contrat et à la réformation du jugement sur ce point, soutenant que la société X n’a pas respecté ses obligations d’information pré-contractuelles précises de sorte que la société Y a commis une erreur sur un élément substantiel du contrat entraînant la nullité de celui-ci,

° notamment la société X s’est présentée comme un créateur de produits alors qu’elle s’est contentée de griffer des produits achetés auprès de ses fournisseurs, que c’est par une explication subtile que la société X a indiqué se présenter comme « créateur de collection » et pas de produits,

° la société X n’a pas donné de liste exhaustive, a pris soin de sélectionner les boutiques listées afin de présenter une image idyllique du C proposé, a également donné des chiffres qui sont ceux des succursales qui toutes affichent un niveau de réussite bien meilleur que celui des affiliés et n’a pas donné d’informations sincères, ce qui caractérise un dol entraînant la nullité du contrat pour vice du consentement et la restitution des sommes investies par la société Y soit 29 000 €.

Elle demande en tout état de cause la résiliation du contrat aux torts de la Sté X au titre des manquements commis par celle-ci avant la date du 10 novembre 2010, date de reprise du stock, rappelant que la véritable qualification

du contrat doit lui être donnée par le juge en vertu de l’article 12 du code de procédure civile, soutenant qu’en l’espèce s’il s’agit d’un contrat d’agence commerciale soumis aux dispositions de l’article L 134-1 du code de commerce dès lors que les stipulations contractuelles démontrent que non seulement la société Y agit pour le compte de la société X mais dans les faits agit aussi au nom de la société X et que la clause stipulant que la Société Y est un commerçant indépendant est artificiel, qu’à tout le moins il s’agit d’un mandat d’intérêt commun.

Elle fonde sa demande de résiliation du contrat aux torts de la Sté X sur un ensemble de manquements commis par cette dernière à savoir des retards de paiement, en l’espèce 735,12 €, motif pour lequel le tribunal a prononcé la résiliation du contrat aux torts de la société X, des difficultés liées aux marchandises, un manque d’assistance et d’organisation, un défaut d’information, portant entre autres sur certaines promotions, l’évolution des chiffres d’affaires des membres du réseau, entre autres.

Elle relève que les manquements de la société X sont établis non seulement par les nombreuses réclamations de Mme B mais également par la simple comparaison entre les chiffres de ventes réalisées sous l’enseigne G H et les chiffres réalisés par la société Y sans enseigne, assistance ou C alors même que la société X avait repris son stock.

Enfin elle considère que la réparation de son préjudice doit également prendre en compte la perte de fruits espérés de l’activité jusqu’à son terme soit les trois ans restant à courir, ce qui représente une somme de 86 191,80 €.

MOTIVATION DE LA DECISION

I – Sur la compétence territoriale

L’article 20-5 du contrat de commission C signé le 1er août 2006 stipule que « toutes contestations éventuelles entre les parties, relatives à la conclusion du présent contrat, à son exécution, à son interprétation ou à sa rupture pour quelque cause que ce soit, sont de la compétence exclusive du Tribunal de commerce de LYON ».

L’avenant au contrat signé le jour même, 1er août 2006, prévoit en son article 30 :

« Article 30 – Article 20-5 Juridiction compétente :

A titre exceptionnel il est accordé que le tribunal compétent en cas de litige est le Tribunal de commerce de A."

En premier lieu il convient de se référer aux dispositions de l’article 48 du code de procédure civile qui stipule que toute clause qui directement ou indirectement déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite n’ait été spécifié de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée.

Il n’est pas contesté ni contestable qu’en l’espèce les deux parties ont la qualité de commerçant et dès lors la validité de la clause telle que définie à l’article 30 de l’avenant au contrat en date du 1er août 2006 est acquise.

S’agissant de sa portée, c’est à juste titre que le Tribunal de Commerce de A s’est déclaré compétent par une exacte interprétation littérale de la numérotation tant du contrat principal que de l’avenant, relevant que les articles de l’avenant modifiant le contrat portent tous le numéro de l’article du contrat principal, qu’en l’espèce l’article 20-5 du contrat est accolé à l’article 30 de l’avenant, ce qui doit nécessairement s’interpréter comme une modication de la compétence territoriale pour toutes contestations relatives à la conclusion, l’exécution et la rupture du contrat.

De plus il doit être relevé que l’article 31 de l’avenant est ainsi rédigé : « Les autres clauses du contrat de commission C sont inchangées », ce qui confirme si besoin était que la commune intention des parties était de modifier par l’avenant du même jour certains articles du contrat principal dont l’article 20-5 relatif à la compétence territoriale.

En conséquence le jugement sera confirmé en ce que le Tribunal de commerce de A s’est déclaré compétent pour statuer sur le litige opposant la société X et la Sté PS.

II – Au fond

II – 1 – Sur la qualification du contrat signé le 1er août 2006.

La Sté Y soutient qu’il s’agit en réalité d’un contrat d’agent commercial relevant des dispositions de l’article L 134-1 du code de commerce ou à défaut d’un mandat d’intérêt commun conformément à ce que retient l’article 1er de la loi DOUBIN du 31 décembre 1989.

Il est constant que le 1er août 2006, la société X qui commercialise des produits de maroquinerie cuir et synthétique a passé avec la SARL Y en cours de constitution, représentée par sa gérante Mme B, un contrat dénommé CONTRAT DE COMMISSION-C, étant préalablement exposé que la Sté X est titulaire des droits d’exploitation de la marque« G H » déposée auprès de l’INPI le 5 août 1998, qu’elle exploite, au moyen d’établissements secondaires et de concessions des unités de vente de maroquinerie, en France et principalement dans la région Rhône-Alpes et les régions limitrophes, qu’elle a acquis une expérience qui l’a amenée à développer son activité en favorisant l’ouverture, par des commerçants indépendants, de points de vente garnis de marchandises qui restent la propriété, jusqu’à leur vente aux consommateurs, de la société X, qu’il s’agit d’un contrat de distribution sous forme de « commission affiliation ».

Le tribunal a relevé que la marchandise que propose la Sté Y est la propriété de la Sté X, que les tickets de caisse rendus contre paiement sont au nom de cette société, que les règlements des achats sont versés sur un compte spécial, que la Sté Y reçoit un règlement mensuel de la Sté X qui est un pourcentage des ventes qu’elle a effectuées, que par rapport à sa clientèle il est spécifié contractuellement que la Sté Y se doit d’apposer sur sa vitrine la marque G H, mais également sa dénomination sociale, qu’en cas de recherche téléphonique le nom de la Sté Y est précisé sur les pages jaunes, qu’en cas de recherche par Internet il est précisé que le point de vente de A est un magasin indépendant.

L’article L. 132-1 du code de commerce qui définit le contrat de commission dispose :« le commissionnaire est celui qui agit en son nom propre ou sous un nom social pour le compte d’un commettant. »

L’examen du contrat litigieux fait ressortir les points suivants :

— Le commissionnaire-partenaire (la Sté Y) est propriétaire de son fonds de commerce.

— L’article 1 prévoit que le contrat a pour objet de définir les conditions dans lesquelles G H s’engage à confier au commissionnaire-partenaire, pour être vendu au détail, en son nom, et pour le compte de G H, un stock de marchandises ; ledit stock sera renouvelé au fur et à mesure des ventes et des saisons compte tenu de l’état et de l’évolution du marché considéré, par G H et suivant les critères qu’elle a retenus après avis du commissionnaire-partenaire.

— L’article 6.1 précise que le local dans lequel le commissionnaire-partenaire exercera son activité a été choisi par ses soins et n’a pas à être agréé par G H.

— L’article 9-1 du contrat prévoit que le commissionnaire-partenaire est un commerçant indépendant, qu’il devra apposer sur sa vitrine son nom patronymique ou sa dénomination sociale selon le cas conformant à l’arrêté ministériel du 21 février 1991 relatif à l’information des consommateurs.

Il apparaît ainsi que la Sté Y est propriétaire de son fonds de commerce, ce qui est incompatible avec la qualité de mandataire, et qu’il s’agit bien d’un contrat de commission-affiliation relevant des dispositions des articles L. 132-1 et suivants du code de commerce, comme l’a justement jugé le tribunal de commerce qui a relevé que la principale différence entre les commissionnaires et les agents commerciaux est que les agents commerciaux ne sont pas propriétaires de leur clientèle ni de leur fonds de commerce.

II – 2 – Sur la nullité du contrat

La Sté Y soutient que la société X n’a pas respecté ses obligations d’information pré-contractuelles précises de sorte que la société Y a commis une erreur sur un élément substantiel du contrat entraînant la nullité de celui-ci, notamment que la société X s’est présentée comme un créateur de produits alors qu’elle s’est contentée de griffer des produits achetés auprès de ses fournisseurs.

C’est à juste titre que le Tribunal de commerce a retenu que le document précontractuel ne précise pas que la Sté X crée ses propres produits, qu’il y est stipulé la notion de « création de collections », ce qui en matière textile et de maroquinerie ne signifie pas que les produits qui constituent ces collections sont des dessins originaux mais simplement un assemblage de différents produits.

De même il convient de confirmer le jugement entrepris qui a estimé que les informations pré-contractuelles fournies en date du 12 juillet 2006 sont conformes à la loi DOUBIN puisqu’il y est mentionné notamment la liste des magasins à l’enseigne, la liste des magasins ayant résilié le contrat, l’organisation de la société et ses résultats et qu’il suffisait à Mme B de prendre des informations complémentaires nécessaires à sa décision auprès des magasins succursalistes,

concessionnaires ou commissionnaires dont elle avait la liste et l’adresse, que d’ailleurs Mme B déclare avoir pu visiter des points de vente et que dans ces conditions elle était seule juge de l’opportunité de son investissement.

En conséquence le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la société Y de sa demande de nullité du contrat.

II – 3 – Sur la résiliation du contrat pour inexécution des obligations

La Sté Y reproche principalement à la société X les manquements suivants :

° des retards de paiement,

° des difficultés liées aux marchandises, notamment l’absence de livraison de nouveautés pourtant diffusées auprès d’autres affiliés du réseau, des gammes dépareillées ou des modèles aux couleurs démodées, des articles provenant de déstockage de certains magasins ou ayant été soldés antérieurement, des défaillances dans la gestion des stocks,

° un manque d’assistance et d’organisation,

° un défaut d’information, portant entre autres sur certaines promotions, l’évolution des chiffres d’affaires des membres du réseau…,

° des irrégularités de nature à engager la responsabilité de Y à l’égard des consommateurs, tels que commercialisation de plagiats de produits de marques concurrentes,

° une violation de l’obligation de non-concurrence.

S’agissant de l’obligation de non concurrence, il convient de se reporter à l’article 3 du contrat, relatif au territoire concédé, qui précise que G H garantit au commissionnaire-partenaire une exclusivité d’implantation d’un point de vente G H sur la ville de A et dans un rayon de 20 kms autour de A, que G H s’interdit en conséquence pendant toute la durée du contrat d’implanter ou de favoriser l’implantation d’un point de vente sous enseigne G H dans le territoire concédé.

La Sté Y soutient que des sacs à main de la marque G H ont été vendus chez un chausseur se trouvant à 10 m de sa boutique et que des produits G H ont été également vendus chez un chausseur de SAINT VINCENT DE TYROSSE.

Cette clause doit s’analyser comme un engagement de non implantation d’un point de vente G H dans un rayon de 20 km autour de Batonne et il y a lieu de noter que la Sté Y ne démontre pas qu’un point de vente G H ait été implanté dans ce rayon, la commune de SAINT VINCENT DE TYROSSE étant éloignée d’au moins 22 kms.

En revanche le Tribunal de commerce qui a examiné de façon exhaustive les différents griefs invoqués par la société Y au soutien de sa demande de résiliation du contrat pour inexécution par la société X de ses obligations contractuelles a retenu comme justifiés et fondés les manquements suivants :

— Le manque d’assistance et d’organisation ; en particulier un non-respect des visites mensuelles prévues au contrat puisqu’entre juin et novembre 2008 la Sté Y n’aurait reçu que trois visites sur les cinq qui auraient dû être effectuées, la société X répondant que pour le mois de novembre la société Y aurait refusé le rendez-vous au motif qu’elle n’aurait été prévenue que 24 heures à l’avance ; or il est prévu au contrat un délai de 48 heures minimum et ce refus paraît donc fondé (cf : mail du 13 novembre 2008).

— Le non-respect des délais contractuels de paiement qui doive être réalisé le 5 de chaque mois : il a été relevé que la société X doit une somme de 735,12 € correspondant à l’accroissement de chiffre d’affaires 2007/2008 par rapport à l’année précédente, que la société X se défend seulement en mettant en avant la faiblesse de la somme, qu’il faut toutefois comparer ce montant avec les très faibles résultats de la société Y pour laquelle cette somme n’est pas négligeable alors que par ailleurs il s’agit d’un principe de toute relation contractuelle de respecter l’ensemble des clauses d’un contrat sans porter un jugement personnel sur leur niveau d’importance.

En conséquence le jugement sera confirmé en ce qu’il a retenu que la Sté X n’avait pas respecté certaines clauses du contrat et a prononcé la rupture du contrat à ses torts exclusifs sur le fondement de l’article 1184 du Code civil à compter du prononcé du jugement.

II – 4 – Sur le préjudice

La société demande une indemnisation constituée par le remboursement de ses droits d’entrée pour une somme de 15 000 €, des frais d’acquisition de mobilier auprès des fournisseurs choisis par la société X pour 14 000 €, la perte de fruits espérés de l’activité jusqu’au terme du contrat soit les trois ans restant à courir soit 86 191,80 € sur la base d’un chiffre d’affaires de 32 649 € réalisé en 2009 avec une augmentation prévisible de 20 % par an, ainsi qu’une somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts au titre de la perte de fruits du fait de la concurrence déloyale de la société X, de ses manquements aux obligations de collaboration, de loyauté et d’assistance ayant diminué le nombre de ventes susceptibles d’être réalisées.

Elle sollicite également le paiement de la somme de 735,12 € représentant la prime supplémentaire de 8 % majorés des intérêts de retard à compter du 5 novembre 2008.

Elle ajoute une demande en paiement d’une somme de 20 000 € au titre du préjudice né de la reprise du stock postérieurement au jugement dont appel.

La Cour reprend à son compte les éléments retenus par le Tribunal de commerce, à savoir que la perte de fruits espérés de l’activité jusqu’au terme du contrat n’est qu’une projection basée sur un chiffre d’affaires supposé et espéré, que la perte ne peut être que d’une marge bénéficiaire dégagée et non du chiffre d’affaires, que le chiffre d’affaires réalisé en 2008 à été de l’ordre de 66 000 €, que la marge brute correspond pour cette année à 50 % de cette somme, que la société Y exploite la marque depuis trois ans, amortissant d’autant les droits d’entrée de mobilier, que ce dernier est spécifique à la marque, et en définitive a indemnisé la société Y par une somme de 50 000 € en compensation de la valeur des investissements réalisés et de la perte de résultats d’une année, outre la somme de 735,12 € restant due avec intérêts à 1,30 % par mois à compter du 5 novembre 2008.

Il apparaît que depuis le jugement du 5 octobre 2009, la Sté X a obtenu du Premier Président de la cour d’appel de PAU l’arrêt de l’exécution provisoire attachée au jugement suivant ordonnance de référé du 1er décembre 2009.

La Sté Y prétend que la Sté X a repris le stock le jour même de l’audience de référé, 10 novembre 2009, rendant impossible de ce fait la poursuite du contrat, sans toutefois en rapporter la preuve, aucune pièce n’étant produite à ce sujet.

En conséquence il ne peut être fait droit à la demande complémentaire de dommages et intérêts de 20 000 €.

L’équité commande de ne pas laisser supporter par la société Y les frais qu’elle a dû exposer en cause d’appel pour faire valoir ses droits et il lui sera alloué une somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société X qui succombe sera condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Reçoit l’appel de la Société X comme régulier en la forme.

Confirme le jugement du tribunal de commerce de A du 5 octobre 2009 en toutes ses dispositions.

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Y ajoutant

Condamne la société X à payer à la société Y une somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société X aux dépens d’appel, avec distraction au profit de la SCP DE GINESTET – Z – D, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Monsieur BERTRAND, Président, et par Madame SAYOUS, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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Cour d'appel de Pau, 2ème ch - section 1, 16 décembre 2010, n° 09/03594