Cour d'appel de Poitiers, Chambre sociale, 30 novembre 2023, n° 21/00687

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Poitiers, ch. soc., 30 nov. 2023, n° 21/00687
Juridiction : Cour d'appel de Poitiers
Numéro(s) : 21/00687
Importance : Inédit
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Thouars, 14 février 2021
Dispositif : Autre
Date de dernière mise à jour : 18 décembre 2023
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Texte intégral

GB/PR

ARRÊT N° 599

N° RG 21/00687

N° Portalis DBV5-V-B7F-GGUB

[W]

C/

SELARL [S] prise en la personne de Me [A] [S] ès qualités de liquidateur judiciaire de la S.A.R.L. DU SOL AU PLAFOND

Association UNEDIC DELEGATION AGS – CGEA DE BORDEAUX

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

Chambre sociale

ARRÊT DU 30 NOVEMBRE 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 février 2021 rendu par le Conseil de Prud’hommes de THOUARS

APPELANT :

Monsieur [M] [W]

né le 06 mai 1981 à [Localité 8] (93)

[Adresse 1]

[Localité 5]

Ayant pour avocat Me Daniel ITHURBISQUE de la SCP SCP AUXILIA AVOCATS, avocat au barreau des DEUX-SEVRES

INTIMÉES :

SELARL [S] prise en la personne de Me [A] [S] ès qualités de liquidateur judiciaire de la S.A.R.L. DU SOL AU PLAFOND

[Adresse 2]

[Adresse 4]

Assignée à personne morale le 8 février 2023

ASSOCIATION UNEDIC DÉLÉGATION AGS – CGEA DE BORDEAUX

[Adresse 7]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Assignée à personne morale le 13 février 2023

Défaillantes

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 04 octobre 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente

Madame Ghislaine BALZANO, Conseillère

Monsieur Nicolas DUCHATEL, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Patricia RIVIÈRE

ARRÊT :

— RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

— Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

— Signé par Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente, et par Madame Patricia RIVIÈRE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE ET PROCÉDURE

Par contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au 3 juin 2019, M. [M] [W] a été embauché par la SARL du SOL AU PLAFOND en qualité d’ouvrier d’exécution moyennant une rémunération mensuelle brute de 2.337,23 €.

Cette société relève de la convention nationale collective des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment.

Après une période d’arrêt de travail consécutive, selon M. [W], à un accident dans l’exercice de son activité, celui-ci a repris son poste le 11 janvier 2020.

M. [W] a donné sa démission par lettre recommandée du 2 mars 2020 mais il a refusé de signer le solde de tout compte du 2 mars 2020.

Par requête du 13 octobre 2020, il a saisi le conseil de prud’hommes de Thouars pour que sa démission soit requalifiée en prise d’acte et pour obtenir des indemnités subséquentes à un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 15 février 2021, le conseil de prud’hommes de Thouars a notamment :

— débouté M. [W] de toutes ses demandes ;

— condamné M. [W] aux dépens, en ce compris les éventuels frais de recouvrement forcé.

M. [W] a interjeté appel de la décision par déclaration électronique en date du 2 mars 2021 et la déclaration d’appel a été signifiée à la SARL DU SOL AU PLAFOND par acte déposé à l’étude de l’officier ministériel en date du 3 mai 2021, laquelle n’a pas constitué avocat.

* * *

Par jugement rendu le 12 avril 2022 par le tribunal de commerce de Niort, la SARL DU SOL AU PLAFOND a été placée en liquidation judiciaire et la SELARL [S], prise en la personne de Maître [A] [S], a été désignée en qualité de liquidateur.

Par exploits en date des 8 et 13 février 2023 tous deux remis à personne morale, M. [W] a fait signifier le jugement déféré, la déclaration d’appel de cette décision et ses conclusions d’appelant à la SELARL [S], ès qualités de liquidateur de la SARL DU SOL AU PLAFOND, et au CGEA-AGS de Bordeaux, lesquels n’ont pas constitué avocat.

Dans ses dernières conclusions signifiées les 8 et 13 février 2023, M. [W] demande à la Cour :

— de dire et juger son appel recevable et bien fondé ;

— d’infirmer le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau :

— de requalifier sa démission en prise d’acte produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

— d’inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la SARL DU SOL AU PLAFOND les sommes suivantes :

¿ 389,54 € au titre de l’indemnité légale de licenciement ;

¿ 2.337,23 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ;

¿ 2.337,23 € au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

¿ 3.890,21 € au titre des arriérés de salaire des mois de janvier et février 2020 ;

— d’ordonner à la SELARL [S], es qualités de liquidateur de la SARL DU SOL AU PLAFOND, de remettre à M. [W] les documents de fin de contrat rectifiés (attestation Pôle Emploi et reçu pour solde de tout compte) ;

— de dire la décision à intervenir opposable au CGEA en qualité de gestionnaire de l’AGS ;

— de condamner la SELARL [S], es qualité de liquidateur de la SARL DU SOL AU PLAFOND, aux dépens de première instance et d’appel.

Au soutien de ses prétentions, M. [W] invoque les dispositions de l’article 1353 du code civil et il fait valoir :

— que lorsque la démission du salarié est consécutive à des faits imputables à l’employeur, elle constitue une prise d’acte de la rupture du contrat de travail et produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

— qu’en l’espèce, la SARL DU SOL AU PLAFOND a manqué à son obligation de paiement des salaires de janvier et février 2020 et ce malgré les demandes qui lui ont été adressées à plusieurs reprises par M. [W] qui a fini par démissionner ;

— qu’il appartient à l’employeur, et non pas au salarié, de rapporter la preuve du paiement des salaires ;

— que sa démission doit donc être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse et en produire les effets au niveau indemnitaire.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 20 septembre 2023.

SUR QUOI

I- SUR LA QUALIFICATION DE LA RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.

La prise d’acte est un acte par lequel le salarié notifie à l’employeur qu’il met fin au contrat de travail ou cesse le travail en raison de faits ou motifs qu’il impute à ce dernier.

Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l’annulation de la démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s’il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission que celle-ci était équivoque à la date à laquelle celle-ci a été donnée, l’analyser en une prise d’acte de la rupture.

En l’espèce, la lettre de démission établie le 2 mars 2020 par M. [W], remise en main propre à son employeur et qui comporte 2 signatures, est libellée comme suit :

« Objet : Lettre de démission pour non-paiement de salaire

Monsieur,

Je vous informe par la présente de ma décision de quitter l’entreprise.

J’ai bien noté que les termes de mon contrat prévoient un préavis de 10 jours.

Par dérogation, je vous prie de bien vouloir me dispenser de ce préavis afin que mon départ soit effectif le 2 mars 2020.

Je vous prie de bien vouloir me transmettre mon reçu de solde de tout compte, mon certificat de travail ainsi qu’une attestation pôle emploi ».

Je vous prie d’agréer, Monsieur, l’assurance de mes sentiments distingués. »

Il ressort de cette pièce que la démission de M. [W] a été uniquement motivée par un manquement de l’employeur à son obligation de paiement des salaires de sorte que cette démission constitue en réalité une prise d’acte de la rupture du contrat de travail.

* * *

S’agissant des effets de la prise d’acte, il résulte de la combinaison des articles L.1231-1, L.1237-2 et L.1235-1 du code du travail que la prise d’acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l’employeur empêchant la poursuite du contrat de travail.

La prise d’acte de la rupture produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou, dans le cas contraire, les effets d’une démission.

Il appartient au salarié ayant pris acte de la rupture de son contrat de travail d’établir les faits qu’il allègue à l’encontre de l’employeur. S’il subsiste un doute sur la réalité des faits invoqués, la prise d’acte doit produire les effets d’une démission.

Le juge doit s’en tenir à l’appréciation des griefs invoqués à l’appui de la prise d’acte et ne peut pas prendre en considération la motivation réelle ou supposée du salarié.

S’agissant de la preuve du paiement des salaires, il résulte des dispositions combinées des articles 1353 du code civil et L. 3243-3 du code du travail que, nonobstant la délivrance d’une fiche de paie, il appartient à l’employeur de prouver le paiement du salaire notamment par la production de pièces comptables.

En l’espèce, M. [W] soutient que la SARL DU SOL AU PLAFOND a manqué à son obligation de paiement des salaires de janvier et de février 2020 et il verse au débats, outre sa lettre de démission :

— le certificat de travail établi par M. [K] [Y], en qualité de gérant de la société, selon lequel M. [W] a été employé du 3 juin 2019 au 2 mars 2020 en qualité d’ouvrier d’exécution – niveau 1 – position 1 et coefficient 150 ;

— le reçu pour solde de tout compte uniquement signé par l’employeur et portant sur une somme due au salarié de 65,57 € correspondant au salaire de mars 2020, cette somme étant détaillée comme suit « avant déduction des éventuelles cotisations et contributions salariales » :

¿ Salaire de base : 2.337,23 €

¿ Absence pour entrée/sortie : – 2.230,99 € ;

¿ Indemnité de repas : 0,10 €

¿ Indemnité de repas : 9,30 €

— l’attestation d’employeur destinée à Pôle Emploi dans laquelle il est notamment indiqué que M. [W] a été employé comme salarié du 3 juin 2019 au 2 mars 2020, que son contrat de travail a été rompu le 2 février 2020 et qu’il a effectué son préavis du 3 février au 2 mars 2020 (sans que ne soit précisé si ce préavis a ou non été payé) ;

— ses bulletins de paie pour les mois de :

¿ janvier 2020 faisant apparaître un net à payer avant impôt sur le revenu de 1.243,07 € ;

¿ février 2020 faisant apparaître un net à payer avant impôt sur le revenu de 1.989,95 € ;

¿ mars 2020 faisant apparaître un net à payer avant impôt sur le revenu de 65,57 € ;

— la copie d’un courrier que M. [W] aurait adressé par lettre recommandée (avec avis de réception illisible) à la SARL DU SOL AU PLAFOND le 24 mars 2020 dans lequel il a sollicité le paiement de ses salaires pour la période du 13 au 31 janvier 2020 et du 3 au 28 février 2020 ;

— les relevés de son compte joint avec Mme [N] [R] pour la période du 15 décembre 2019 au 23 mars 2020 qui ne font apparaître aucun virement émis par la SARL DU SOL AU PLAFOND au crédit de ce compte.

Ces éléments démontrent que la SARL DU SOL AU PLAFOND avait l’obligation de payer à M. [W] les salaires des mois de janvier et février 2020 de sorte qu’il appartient à cette dernière, et non pas au salarié, de rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation.

Or, aucune des pièces versées aux débats ne permet d’établir que ces salaires ont été payés par l’employeur et l’examen des relevés de compte du salarié conforte, au contraire, ses déclarations selon lesquelles ces salaires ne lui ont pas été payés.

Il résulte de ce qui précède que la SARL DU SOL AU PLAFOND a totalement manqué à son obligation de paiement des salaires dus à M. [W] pour les mois de janvier et février 2020.

Ce manquement de l’employeur à une de ses obligations essentielles, qui a conduit le salarié à être privé d’une somme équivalente à 2 mois de salaire complets, était suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

La prise d’acte par M. [W] de la rupture du contrat de travail était donc justifiée de sorte qu’elle doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La décision déférée sera en conséquence infirmée en ce qu’elle a débouté M. [W] de sa demande de requalification de sa démission en prise d’acte produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et il sera fait droit à cette demande.

II- SUR L’ARRIÉRÉ DE SALAIRES

Il résulte des pièces versées aux débats, et notamment des bulletins de paie produits, que la SARL DU SOL AU PLAFOND aurait dû payer la somme totale de 3.890,21 € au titre des salaires de M. [W] visés dans la demande, cette somme se décomposant comme suit :

— janvier 2020 : 1.536,58 € brut ;

— février 2020 : 2.353,63 € brut.

La décision déférée sera en conséquence infirmée en ce qu’elle a débouté M. [W] de sa demande au titre de l’arriéré de salaires et il sera fait droit à sa demande relative à l’inscription au passif de la liquidation judiciaire de la SARL DU SOL AU PLAFOND de la somme de 3.890,21 € au titre des arriérés de salaire.

III- SUR LES CONSÉQUENCES DE LA RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL

La démission de M. [W] étant requalifiée en prise d’acte de la rupture du contrat de travail produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ce dernier peut prétendre au versement de l’ensemble des indemnités de rupture et notamment de l’indemnité compensatrice de préavis (la dispense de préavis attachée à sa démission n’ayant pas à être prise en compte du fait de sa requalification en prise d’acte), de l’indemnité de licenciement et de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par ailleurs, il ressort des pièces versées aux débats :

— que le contrat de travail de M. [W] a pris effet au 3 juin 2019 et qu’il a pris fin le 2 avril 2020 (période de préavis incluse) de sorte que M. [W] justifie de 9 mois d’ancienneté dans la société ;

— que son salaire de base était de 2.337,23 € aux mois de janvier et de février 2020.

Les indemnités auxquelles il peut prétendre seront en conséquence calculées sur la base de 9 mois d’ancienneté et d’un salaire brut de 2.337,23 €.

1° – Sur l’indemnité de préavis

Il résulte des dispositions combinées des articles L.1234-1 et L.1234-5 du code du travail et de l’article 10-1 de la convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment occupant jusqu’à 10 salariés que, sauf faute grave :

— si le salarié justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus comprise entre 6 mois et moins de 2 ans, il a droit à un préavis de 1 mois ;

— s’il n’exécute pas le préavis, le salarié a droit à une indemnité compensatrice de préavis ;

— que le montant de cette indemnité est égal au salaire brut, assujetti au paiement par l’employeur des cotisations sociales, que le salarié aurait perçu s’il avait travaillé.

En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats que M. [W] peut prétendre à 1 mois de préavis compte tenu de son ancienneté dans l’entreprise et qu’il a donc droit à 1 mois de salaire, soit 2.337,23 €, au titre de l’indemnité compensatrice de préavis.

La décision déférée sera en conséquence infirmée en ce qu’elle a débouté M. [W] de sa demande relative à cette indemnité et il sera fait droit à la demande d’inscription de cette somme au passif de la liquidation judiciaire de la SARL DU SOL AU PLAFOND présentée par M. [W] sur ce fondement.

2°- Sur l’indemnité de licenciement

Il résulte des dispositions combinées des articles L.1234-9, R.1234-1 et R.1234-2 du code du travail :

— que le salarié titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte au moins 8 mois d’ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf faute grave, à une indemnité de licenciement ;

— que cette indemnité est calculée en fonction de la rémunération brute perçue par le salarié à la rupture du contrat de travail ;

— que l’indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un quart de mois de salaire par année d’ancienneté pour les années jusqu’à 10 ans ;

— qu’en cas d’année incomplète, l’indemnité de licenciement est calculée proportionnellement au nombre de mois complets.

En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats que M. [W] peut prétendre à la somme de 438,21 € au titre de l’indemnité légale de licenciement, cette somme étant calculée comme suit :

— un quart de mois de salaire pour moins d’un an d’ancienneté : 584,30 €, soit l’équivalent de 48,69 € par mois, ;

— pour 9 mois d’ancienneté : 438,21 €.

En conséquence, et compte tenu de l’interdiction faite au juge de statuer ultra petita, la décision déférée sera infirmée en ce qu’elle a débouté M. [W] de sa demande au titre de l’indemnité légale de licenciement et il sera fait droit à sa demande tendant à voir inscrire la somme de 389,54 € au passif de la liquidation judiciaire de la SARL DU SOL AU PLAFOND au titre de l’indemnité de licenciement.

3° – Sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Il résulte des dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail que, si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse et à défaut de réintégration, le juge octroie au salarié présentant moins d’un an d’ancienneté accompli une indemnité pouvant aller jusqu’à 1 mois de salaire brut.

En l’espèce, au moment de son licenciement, M. [W] était âgé de 38 ans et aucune des pièces versées aux débats ne permet d’établir qu’il a perçu une allocation de retour à l’emploi suite à la rupture de son contrat de travail ni de déterminer les difficultés qu’il a ou non rencontrées en mai 2020, soit après la période de confinement sanitaire, pour retrouver un emploi.

Compte tenu de ces éléments et des circonstances de la rupture, il y a lieu de lui allouer la somme de 1.100 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré sera en conséquence infirmé en ce qu’il a débouté M. [W] de sa demande de ce chef et il sera dit que la somme de 1.100 € sera inscrite au passif de la liquidation judiciaire de la SARL DU SOL AU PLAFOND au titre de cette indemnité.

IV- SUR LES AUTRES DEMANDES

Compte tenu des développements qui précèdent, la décision déférée sera infirmée en ce qu’elle a débouté M. [W] de sa demande tendant à se voir remettre une attestation Pôle Emploi et un reçu pour solde de tout compte rectifiés puisque cette demande est justifiée et il sera ordonné à Maître [S], ès qualités, à remettre ces documents à l’appelant.

En outre, et compte tenu du redressement puis de la liquidation judiciaire de la SARL DU SOL AU PLAFOND prononcés postérieurement au jugement déféré, il sera fait droit à la demande de M. [W] tendant à ce que la présente décision soit déclarée opposable au CGEA et la décision déférée sera en conséquence complétée en ce sens.

Les dépens de première instance et d’appel doivent être fixés au passif de la procédure collective de la SARL DU SOL AU PLAFOND dans la mesure où ils ne peuvent pas relever du traitement préférentiel prévu à l’article L 622-17 du code du commerce.

La charge des frais d’exécution forcée est régie par les dispositions d’ordre public de l’article L. 111-8 du code de procédure civile d’exécution.

Il n’appartient pas au juge du fond de statuer par avance sur le sort de ces frais.

En conséquence, et dans la mesure où il est fait droit aux demandes de M. [W] en cause d’appel, le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il l’a condamné aux dépens, en ce compris les éventuels frais de recouvrement forcé, et les dépens de première instance et d’appel seront fixés au passif de la liquidation judiciaire.

Par ailleurs, la situation économique des parties ne justifie pas qu’il soit fait droit à la demande de M. [W] fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et rendu en dernier ressort :

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

Requalifie la démission de M. [M] [W] du 2 mars 2020 en prise d’acte produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Fixe les créances de M. [W] à l’égard de la SARL DU SOL AU PLAFOND comme suit :

¿ 3.890,21 € bruts au titre des arriérés de salaire des mois de janvier et février 2020 ;

¿ 2.337,23 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ;

¿ 389,54 € au titre de l’indemnité légale de licenciement ;

¿ 1.100 € au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

¿ les dépens de première instance et d’appel ;

Dit que ces sommes seront inscrites au passif de la liquidation judiciaire de la SARL DU SOL AU PLAFOND par le mandataire liquidateur ;

Rappelle qu’en application de l’article L. 622-28 et L641-3 du code de commerce le jugement d’ouverture d’une procédure collective arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ;

Ordonne à la SELARL [S], prise en la personne de Maître [S], agissant en qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la SARL DU SOL AU PLAFOND, de rectifier l’attestation Pôle Emploi et le reçu pour solde de tout compte conformément au présent arrêt et à les remettre à M. [M] [W] ;

Y ajoutant :

Dit que la présente décision est opposable à l’AGS CGEA de Bordeaux dans les conditions et limites légales ;

Dit que ces sommes seront inscrites au passif de la liquidation judiciaire de la SARL DU SOL AU PLAFOND par le mandataire liquidateur ;

Déboute M. [M] [W] de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

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